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RÉSUMÉ : Les chroniques de Georges Courteline dans "Les Petites nouvelles" offrent un aperçu fascinant de la société française à la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle. Courteline, maître de l'ironie et de l'observation sociale, nous plonge dans un univers où la bureaucratie, les petites misères du quotidien et les travers humains sont mis en lumière avec humour et perspicacité. À travers une série de récits courts, l'auteur dépeint des personnages hauts en couleur, souvent ridicules mais toujours attachants, qui naviguent dans les méandres de la vie parisienne. Les situations cocasses et les dialogues incisifs révèlent une critique subtile des conventions sociales et des institutions de l'époque. Courteline parvient à capturer l'essence des petites tragédies et comédies de la vie ordinaire, rendant ses chroniques intemporelles et universelles. Cette collection est un témoignage précieux de la culture et des moeurs de son temps, tout en restant étonnamment pertinente et drôle pour les lecteurs contemporains. Les chroniques sont un mélange savoureux de satire et de réalisme, où chaque ligne est imprégnée de l'esprit caustique et brillant de Courteline. Ce livre est une invitation à découvrir ou redécouvrir l'oeuvre d'un auteur dont l'acuité d'esprit et le talent narratif continuent de captiver les générations successives. __________________________________________ BIOGRAPHIE DE L'AUTEUR : Georges Courteline, de son vrai nom Georges Victor Marcel Moinaux, est né le 25 juin 1858 à Tours, en France. Il est reconnu comme l'un des plus grands auteurs satiriques de la littérature française. Fils de l'écrivain Jules Moinaux, Courteline a grandi dans un environnement littéraire qui a fortement influencé sa carrière. Après des études à Paris, il commence à travailler dans l'administration, une expérience qui nourrira son oeuvre, notamment ses critiques acerbes de la bureaucratie. Courteline se fait connaître grâce à ses pièces de théâtre et ses récits humoristiques qui dépeignent avec finesse les travers humains et les absurdités de la société. Parmi ses oeuvres les plus célèbres, on trouve "Messieurs les ronds-de-cuir" et "Boubouroche", qui restent des classiques du théâtre comique. Son style se caractérise par une ironie mordante et une capacité à observer les détails du quotidien. En 1899, il est élu à l'Académie Goncourt, et en 1926, il reçoit la Légion d'honneur pour sa contribution à la littérature.
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Seitenzahl: 148
Veröffentlichungsjahr: 2022
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XI LA NÉERLANDIDE ou LES STÉVENS ENNEMIS
XXIII
LES FOUS (VILLE-EVRARD)
I
II
III
IV
AUX CHIENS PERDUS
V
L’EXÉCUTION DE CAMPI
VERSION DE L' “OURS BRUN”
VERSION DE L’“ OURS BLANC”
VERSION DE L’ “OURS NOIR”
VI
A THÉOPHILE GAUTIER Auteur d’Albertus!
VII
VIII
IX
PREMIÈRE QUESTION
DEUXIÈME QUESTION
TROISIÈME QUESTION
X
SCÈNE PREMIÈRE
SCÈNE II
SCÈNE III
SCÈNE IV
SCÈNE V
XII
XIII
XIV
ACTICLE PREMIER
ART2
ART. 3
ART. 4
XV
ROYAUME DE HOLLANDE EXPOSITION UNIVERSELLE D’AMSTERDAM
XVI
XVII
XVIII
XIX
XX
XXI
XXII
XXIV
XXV
XXVI
XXVII
XXVIII
XXIX
XXX
Sans pénétrer aucunement dans le domaine de la politique,—à Dieu ne plaise que ça m’arrive jamais, —je peux dire que les anarchistes commencent à devenir encombrants.
Ces gens-là ne font parler que d’eux; quand ça n’est pas pour une chose, c’est pour l’autre.
Ils ont tenté, ces jours derniers, de faire avaler une boulette à M. le comte de Paris, et, à peine l’émotion causée par cette horrible tentative commence-t-elle à se calmer, que, brusquement, comme par enchantement, nos murs se couvrent d’affiches rouges, terrifiantes de laconisme, et portant aux quatre coins de la ville ce cri de détresse et de misère:
J’ai faim! J’ai faim ! j’ai faim !
Ceux qui n’ont pas vu de leurs yeux l’aspect de Paris ce jour-là, ne peuvent s’en faire aucune idée.
C’était navrant.
Victor Hugo en eût pleuré.
*
Heureusement, M. Camescasse eut l’excellente idée de faire enlever ces affiches à mesure qu’on les collait et de les faire jeter au ruisseau. Après quoi il s’aperçut que ce qu’il avait pris naïvement pour une excitation au pillage des charcuteries n’était autre chose qu’une innocente annonce du roman feuilleton J’ai faim, actuellement en cours de publication dans le journal les Petites Nouvelles.
On pense bien qu’à la nouvelle de ce massacre de nos marchandises nous nous transportâmes en bloc à la préfecture de police. Nous y arrivâmes, d’ailleurs, dix minutes trop tard; le sacrifie était consommé. Nous ne pûmes obtenir que des explications, que nous avons jetées dans la rue, en sortant, et des excuses dont nous accusons réception.
Avec tout ça, nous sommes refaits de quelque chose comme trois cents francs, plus trente-cinq sous d’une voiture que nous avions été dans l’obligation de prendre pour ne pas arriver avec des chaussures sales.
Mais ça nous est égal, nous sommes bons princes et nous donnons quittance à M. Camescasse. Si cet argent lui pèse sur la conscience, il est libre d’en faire bénéficier qui il voudra: les petits Chinois ou l’œuvre des Statues de France.
*
Car je commence à croire que c’est une entreprise. C’est tous les jours une statue nouvelle, qui demande à cor et à cri à faire son apparition, et la semaine qui, sur ce point, a été particulièrement accablante, peut se résumer comme suit:
Lundi
Proposition, par un journal du matin, d’élever une statue à VICTOR DE LAPRADE, poète lyrique, ex-membre de l’Académie (François Coppée. successeur.)
Mardi
Proposition, par un journal du matin, d’élever, dans les parages de l'Observatoire, une statue à JEAN PAUL BÉRANGER, ex-chansonnier populaire. (Villemer et Delormel, successeurs.)
Mercredi
Nouvelles rassurantes, fournies par un journal du matin, sur la santé de la statue de VICTOR HUGO.
Jeudi
Proposition, par un journal du matin, d’élever une statue à l’amiral COLIGNY, ancien huguenot, assassiné par Charles IX dans la nuit de la saint Barthélémy, et par Voltaire dans la Henriade.
Vendredi
Proposition, par un chroniqueur bien inspiré, d’élever une statue à l’amiral Le Kelpudubec.
*
Ces diverses motions ont été accueillies par de violents éclats de rire. La dernière, seule a paru fixer l’attention. Après avoir fait le tour de la presse, elle est arrivée à bon port chez Mme Juliette Lamber, où les habitués de la maison se mettaient en devoir d’en discuter l’urgence, quand ils apprirent, avec douleur, que son auteur, soupçonné d’accointance avec les anarchistes, venait d’être, pour cette raison arrêté par les sbires de M. Camescasse.
Le fait était malheureusement vrai: l’infortuné venait d’être jeté sur la paille humide des cachots.
Il y a pourri une heure et demie et n’a été rendu enfin aux douceurs de la vie de famille que sur les supplications de son concierge et les témoignages flatteurs de sa femme de ménage.
*
La police est, on le voit, aussi bien faite chez nous que la justice est bien exécutée chez nos bons amis d’outre-Manche.
Un importante ville anglaise vient, en effet, d’être le théâtre d’une scène extrêmement plaisante.
Un coquin, convaincu de double assassinat, avait été, pour cette espièglerie, condamné à être pendu, et attendait avec une légitime impatience le moment de son exécution. Le grand jour arriva enfin, et avec lui, l’exécuteur des hautes œuvres,—gris comme on ne l’a jamais été qu’à Varsovie, avant que le calme y régnât.
Ce fonctionnaire grimpa sur l’échafaud, et là, en présence du public, coram populo, comme dirait Tacite, se livra à différentes facéties, dont la plus spirituelle fut de s’y reprendre à TREIZE FOIS avant de mener son client à bonne fin.
Treize fois! nombre fatidique! Le patient s’en aperçut. Il en mourut, tout simplement.
Je dois ajouter, au surplus, qu’on ne m’accuse pas de farder la vérité, qu’immédiatement après sa mort on reconnut son innocence, mais ça ne change rien à ce que je dis.
*
De Liverpool, où s’est passé cet incident, à la place Saint-Germain-des-Prés, il n’y a guère que quelques journées de traversée et sept heures et demie de chemin de fer; ce qui m’amène, sans que personne s’en soit douté, devant les bancs de la police correctionnelle.... où s’asseyaient, pas plus tard qu’hier, les sieurs Pailloux et Charles Trévoazan.
On sait ce que je veux dire.
Ces drôles, l’un cocher, l’autre conducteur du tramway sud de Clamart, avaient conçu l’étrange dessein, pour abréger la longueur du par-cours, de grignoter de pair une pomme verte, dans la personne d’une petite blanchisseuse bête comme une oie, dit la chronique, mais cependant suffisamment intelligente pour des gens blasés de longue date sur la conversation des chevaux. Ils ont donc voulu à toute force donner de l’esprit à cette niaise, suivant le procédé du bonhomme; malheureusement ça n’a pas pris, cette niaise s’étant formellement refusée à troquer sa position contre une autre plus intéressante; si bien que ses deux précepteurs en ont été pour leurs tentatives d’éducation, plus trois mois de prison et16fr. d’amende.
S’ils eussent, sur le bout du doigt, possédé leur Victor Hugo, ils auraient su que la pièce:
Louis, voici le temps de respirer les roses
n’est pas datée du mois de mars. Malheureusement on ne peut pas en demander tant à des conducteurs de tramways.
Il nous en arrive une bonne.
Les habitants de Passy et de Grenelle, éprouvant le désir de voir courir des chevaux,—c’est une distraction comme une autre pour les gens qui n'ont rien à faire,—députèrent ces jours-ci, au gouvernement, plusieurs notables commerçants du quartier, en vue d’obtenir que le Champ de Mars fût converti en champ de courses. M. Waldeck-Rousseau, ministre de l’intérieur, prit immédiatement la parole, et, toujours aimable, se dé-clara trop heureux de pouvoir acquiescer à un semblable désir.
—Messieurs, dit-il, c’est le Champ de Mars que vous demandez; eh bien, je vous en fais cadeau pour vos œufs de Pâques. Je vous le donnerais bien tout de suite, malheureusement je ne l’ai pas sur moi, et vous aurez la peine d’aller le prendre vous-mêmes. Vous trouverez bien tout seuls, n'est-ce pas? C’est à une demi-heure d’ici, entre la Seine et l’Ecole-Militaire.
*
Les délégués de Passy et de Grenelle, avec force remerciements, s’apprêtaient déjà à filer, quand M. le ministre de la guerre les arrêta sur le seuil de la porte.
—Messieurs, dit-il avec sa rude franchise d’ancien militaire, inutile de tant vous presser. Mon collègue est trop généreux; on voit bien que ça ne lui coûte rien.
—Comment cela, exclama M. Waldeck-Rousseau?
—Parfaitement, reprit son interlocuteur, le Champ de Mars m’appartient en propre, c’est M. Grévy qui me l’a donné, et je serai très obligé à ces messieurs de n’y pas toucher le moins du monde vu que je le trouve très bien comme il est.
M. Waldeck-Rousseau haussa légèrement les épaules:
—Voilà, ma foi. une étrange prétention; le Champ de Mars est ma propriété et je prétends en disposer comme bon me semble.
—Il est à moi, et ces messieurs ne l’auront pas!
—Ilest à moi et ces messieurs peuvent dès maintenant en user à leur convenance!
Les deux hommes se levèrent et, pâles de rage, s’avancèrent l’un sur l’autre, tandis que “ces messieurs, ” absolument abasourdis et se confondant en excuses, répétaient sur des tons divers:
—Mon Dieu! mon Dieu, quel ennui!... Une semblable discussion... Nous sommes vraiment désolés... Si noua avions pu supposer que nous vous causerions un pareil dérangement, etc., etc.
Avec tout cela, comme deux ministères revendiquent la propriété du Champs de Mars, il y a tout lieu de penser qu’il n’appartient ni l’un ni à l’autre.
Alors à qui appartient-il? Peut-être à moi.
Il faudra que j’en aie le cœur net et que je voie cela en rentrant.
*
Ces désaccords, résultats directs d’une administration que, selon le cliché, toute l’Europe nous envie, sont beaucoup plus fréquents qu’on serait porté à le croire, et je citerai à ce sujet, une impayable histoire de guérite, qui s’est passée, il y a quelques années, dans une petite ville de province, assez voisine de Paris.
Cette petite ville, chef-lieu de brigade militaire depuis des temps immémoriaux, possédait entr’autres curiosités, un général, un factionnaire et une guérite. Il arriva, par suite d’une décision ministérielle, que le général commandant reçut son changement de résidence, et s’en alla, emportant son factionnaire. La guérite demeura seule, servant de refuge aux chiens perdus, et s’ennuyant à en périr, dans une rue où, bon an mal an, il ne passait pas quinze personnes.
Cet état de choses dura deux ans, après quoi, le conseil municipal s’aperçut tout à coup que cette inutile baraque gênait horriblement la circulation publique. Il s’en émut, chercha un moyen, et c’est ainsi qu’un beau matin le maire arriva en personne chez le colonel du régiment de dragons garnisonné dans la petite ville.
—Mon colonel, dit ce magistrat, il faudrait pourtant se décider à débarrasser le trottoir de la guérite du général. Elle encombre et elle ne sert à rien.
—Je ne vois pas bien, répondit le colonel, en quoi elle encombre tant que ça. Si cependant, il en est ainsi, vous pouvez faire une chose bien simple, c’est de la démonter et de la jeter au feu.
—Le conseil est beaucoup trop bon, mon colonel, pour que vous n’en profitiez pas, car la guérite vous appartient de droit, en tant que fourniture militaire.
—C’est absolument ce qui vous trompe; la propriété en revient à la ville.
—Je vous demande pardon.
—Moi aussi.
Et cette lutte de générosité se prolongea pendant trois heures, au bout desquelles le colonel, naturellement impatient, trancha net la discussion en flanquant le maire à la porte.
*
Le cas était beaucoup trop grave pour que le con seil municipal pût se résigner à se tenir pour battu: une double pétition fut donc adressée au ministère de l’intérieur au ministère de la guerre, revêtue de nombreuses signatures, et exposant les multiples calamités qui résulteraient pour la ville du maintien de la guérite abandonnée. Les deux administrations étudièrent l’affaire plusieurs mois, discutèrent le pour et le contre, entrèrent dans les considérations les plus abstraites et, finalement, tombèrent d’accord pour déclarer que ça ne les regardait ni l’une ni l’autre.
La guérite en riait comme une bête.
Bref, après des années entières-de pourparlers, de luttas et de dé-marches, la baraque fut définitivement enlevée et transportée dans un chantier municipal, où elle s’émiette, s’effondre peu à peu, et termine sa noble carrière dans une pourriture mélancolique.
Vous concluez peut-être de ce dénoûment que la question a été tranchée? Ah! bien, oui! Si la petite ville a pris la lourde charge de donner l’hospitalité, sur ses terrains, à la guérite du général, croyez bien qu’elle en reçoit la juste récompense. Elle émarge au budget de la guerre, pour une somme de VINGT sous par an, qui lui est généreusement et scrupuleusement ordonnancée pour le remboursement de ses frais d’entretien.
Et le jour où cette indemnité ne sera pas soldée jusqu’au dernier centime, la magistrature française aura vraiment de l’agrément.
Vous pouvez m’en croire sur parole.
Jules Moinaux, dont les étincelantes revues judiciaires concourrent depuis si longtemps et dans une si large part à la fortune du Charivari , nous dévoile un petit incident, extrêmement original et neuf, qui vient de se passer à Ploermel, en Bretagne.
Cette petite ville, illustrée par la musique de Meyerbeer, est dotée d’une population dont le nombre se chiffre par quelques centaines d’habitants; d’une gendarmerie composée d’un gendarme, d’un brigadier et d’un maréchal-des-logis; d’une sous-préfecture composée du sous-préfet et du portier du sous-préfet; d’un tribunal composé d’un président et de deux juges, et d’un barreau exclusivement composé d’un seul membre: Me Allain, pour ne pas le nommer.
Ce jeune homme pourrait, s’il le voulait, personnifier à merveille le type de l’avocat, en passant successivement, dans une même cause, d’un côté à l’autre de la barre, en défendant avec autant de conviction et de feu le bon droit de deux parties adverses dont il ferait ensuite ressortir l’inanité et le non-fondé des plaintes; en devenant enfin, son propre adversaire et en se collant lui-même au mur par des arguments aussi triomphants et irréfutables qu’ils seraient coulés bas cinq minutes après. Il arriverait ainsi à une merveilleuse habileté dans l’art de retourner les gants et embellirait rapidement son existence qui n’est précisément pas pavée de louis d’or.
Il ne le fait pas cependant, et pour deux raisons. La première c’est que s’il est pauvre il est honnête; la seconde c’est que, quoi qu’il fasse, il ne peut venir à bout de plaider, même d’un seul côté de la barre.
Je m’explique.
*
Personne n’ignore que, pour rendre un arrêt, un tribunal doit être composé de trois membres, et que dans le cas où l’un des juges fait défaut, il est remplacé aussitôt par un avocat au choix, désigné par le président.
Or, dans ce dernier cas—Me Allain étant le seul avocat du barreau de Ploermel—comme dit le vulgum pecus , y a pas d’erreur, et c’est toujours son tour.
C’est si bien toujours son tour que le pauvre gar çon, en moins de quatre ans, a fait fonctions de juge près de quatre cents fois, c’est-à-dire que, toutes pro portions établies, déduction faite des dimanches, jours " fériés, vacances du jour de l’an, vacances de Pâques, grandes vacances, etc., il a siégé à lui tout seul un peu plus que les trois magistrats réunis, lesquels, à tour de rôle, éprouvent le légitime besoin d’aller pêcher des ablettes ou des brèmes et d’aller voir si le printemps s’avance dans les campagnes chères à feu Brizeux.
Ce choix , qui ne se renouvelle jamais, est extrême ment flatteur pour le jeune avocat; malheureusement il laisse à désirer au point de vue lucratif; les fonc tions de juge par occasion n’étant aucunement rétri buées. Me Allain a naturellement fini par s’en lasser, en sorte que, ces jours derniers, s’avançant devant le tribunal pour y présenter une défense quel-conque, et ayant entendu le président lui dire: “Maître Allain, mon honorable assesseur, M. X..., étant resté chez lui pour se purger, vous allez avoir le plaisir de vous installer à ma droite et de le remplacer dans ses hautes fonctions ", dame! il s’est fâché tout rouge, a déclaré qu’il en avait assez et que, cette fois, il ne siègerait pas.
—Maître Allain, lui dit le président, que vous veuilliez ou que vous ne veuilliez pas, c’est exactement le même prix. Je vous fais sommation de siéger auprès de moi; de par la loi, qui vous y oblige.
—Monsieur le président, répondit l’avocat, si la loi m’y oblige, c’est une autre histoire; qu’on aille chercher le seul gendarme de Ploermel pour qu’il me traîne de force près de vous.
*
Les choses n’allèrent pas aussi loin; on n’alla pas déranger pour si peu la gendarmerie de Ploermel, mais maître Allain fut condamné séance tenante à une suspension d’un mois, laquelle vient d’être réduite de moitié en appel.
Et voilà un pauvre diable qui, après avoir, pendant près de quatre années, jeté à contre-cœur, sur la paille des cachots, des gens que sa mission le portait quand même à innocenter, se trouve à l’heure qu’il est dans cette situation exceptionnelle, qu’il est ensemble batonnier, avocat, conseil de l’ordre, juge, président et, pour en finir, rien du tout.
Mais c’est le tribunal qui s’amuse!
Pensez donc: plus d’avocat, partant plus de juge, et c’est, pour les trois magistrats, la faculté d’aller pêcher des brèmes, d’attendre le printemps à la gare, ou de se purger pendant quinze jours de suite, sans que personne ait le droit de rien dire.