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"Les fleurs du parc" est un recueil de poèmes composé de sonnets, de vers libres et de textes en prose. Ses thèmes principaux sont les animaux, la métaphysique et l’actualité. L’ouvrage témoigne d’un trajet intellectuel, où l’auteur s’exprime avec un regard contemporain sur la vie et sur l’Univers.
À PROPOS DE L'AUTEUR
Ph. Leroux a réuni, pour cet ouvrage, soixante ans d’écriture. Ses premières admirations vont de Rimbaud à Brassens, en passant par Prévert et plusieurs journalistes de Charlie Hebdo tels que Cavanna, Charb, Nicolino. Féru de sciences humaines, il espère transmettre une image partielle mais réaliste du monde et de notre société.
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Seitenzahl: 227
Veröffentlichungsjahr: 2025
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Ph. Leroux
Les fleurs du parc
Poèmes classiques et modernes
Recueil
© Lys Bleu Éditions – Ph. Leroux
ISBN : 979-10-422-5909-9
Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
– Littoraux organisés figurativement et mathématiquement ; notre planète est d’origine artificielle et se trouvait prédisposée à l’existence humaine, Ed. Amalthée, 2020 ;
– Qu’est-ce que le temps qui passe ?, Ed. Amalthée, 2017 ;
– « La fête des animaux » (CD de vingt et une chansons).
Les livres édités ne sont plus disponibles en librairie ; pour tout l’ensemble de ces titres, s’adresser à : [email protected]
Où avez-vous découvert la poésie, en quelles circonstances ? Personnellement, ce fut d’abord à l’école ; et ainsi, je pense, à l’instar du plus grand nombre d’entre nous. Cette statistique a beaucoup contribué à la constitution du présent livre (animé d’un esprit scolaire au bon sens du terme), puis à sa dédicace implicite, qui va aux professeurs de lettres.
Ne vous attendez pas pour autant à un travail trop académique ; à une poésie très intelligible, oui ; trop figée, non. (Quand je suis « académique », c’est techniquement, sur le modèle des sonnets de Rimbaud et de Baudelaire.)
Je me suis tout de même donné une contrainte intellectuelle ; celle d’être présentable, de pouvoir figurer dans la bibliothèque d’un lycée. Pour cela, j’ai dû m’expurger de quelques textes un peu « chauds » sensuellement parlant. En effet, renseignements pris auprès du corps enseignant, malgré Mai 68, les choses n’ont pas changé depuis mon époque de lycéen (1962-1968) : pas de sexe dans le cours de français ou seulement de façon très implicite. Faut-il le reprocher ou saluer l’idée de fiche la paix aux ados ?Car il faut bien distinguer des évocations littéraires, plus ou moins suggestives, d’un cours d’éducation sexuelle. Même si le sujet s’accommode bien d’un peu de vécu poétique, je crois qu’il se trouverait toujours des élèves pour y péter un câble (pour trop s’émouvoir) ; tandis que leurs parents viendraient reprocher telle précocité problématique de leur rejeton.
Ma démarche d’autocensure, j’en suis bien conscient, est, sinon prétentieuse, au moins très utopique, puisqu’elle suppose une considération institutionnelle de mon travail. De façon plus réaliste, je me dis qu’un prof’ qui m’aura feuilleté chez un bouquiniste pourra citer mon livre sans risquer de se faire radier.
Sous un autre angle, il est amusant de juxtaposer ma stratégie à la réalité de tous les mômes qui parviennent désormais à se goinfrer de vidéos pornos dès douze ou quatorze ans. Un peu d’élégance dans le sujet les aiderait peut-être à mieux grandir. Mais bon, voici la version lycéenne de mon travail en 2024, privée de trois ou quatre textes, dont un sur la religion.
C’est le moment de découvrir les nombreux autres thèmes de la poésie. Citons, par exemple, les animaux, l’actualité, la métaphysique… Soit trois sujets immenses et qui n’épuisent pas, il s’en faut, l’inventaire concerné.
Le titre ? Mon écriture poétique en doit beaucoup au 19e siècle. À la suite, il me semble que : « Les fleurs du parc » est à la fois déférent et amusant, advenant après : Les fleurs du mal.
Certes, soyons lucides, cela peut d’abord sonner comme une platitude ou une mention de botaniste. Cela peut sembler dépourvu de métaphore et comme un retour à une poésie trop simple. Or c’est tout différent…
Assurément, le ténébreux n’est pas mon genre d’écriture. Mais la métaphore, tellement indissociable de la poésie, s’impose dans mon titre, pourvu qu’on l’étaye convenablement. Ainsi, consultez votre culture personnelle (ou bien votre dictionnaire) pour observer qu’il existe, en effet, toute sorte de « parcs », et tout d’abord, à côté du parc botanique, un formidable parc zoologique, source inépuisable d’inspiration poétique.
Réalisez aussi comme, depuis un siècle, avec la Shoah d’Hitler, le goulag de Staline et le laogaï de Mao, puis avec tous nos camps de réfugiés et de pauvres gens divers, l’être humain s’inflige encore de très nombreux « parcages » ; et s’il faut en exclure les cités dortoirs. Et s’il ne faut pas citer aussi les parcs d’élevage industriel.
Alors voilà. Je ne prétends pas à une œuvre exclusivement pessimiste et d’actualité (on trouvera quantité de thèmes plus neutres et intemporels). Mais quand même, à travers plusieurs textes (« Surpopulation », « La ville », « La voiture » et autres), je souhaite décrire le parcage moderne et quotidien, et puis délivrer une vraie impression du monde et de l’univers autour.
Sous cet intitulé floral, voici donc de nombreux animaux, puis le sujet du cercle ou celui de l’astre solaire, puis des tableaux politiques ou métaphysiques… Voici l’essai d’évoquer le fabuleux paysage dispensé à un être humain moyennement nanti d’aujourd’hui ; dans l’abrupte brièveté du destin individuel, celui-ci souvent rangé dans un immeuble cubique et promis à un cimetière tout aussi ordonné.
C’est par conséquent très divers et hétérogène, dessous : « Les fleurs du parc » ; et définitivement calé sur l’infini du ciel… Autour de cette très jeune humanité moderne, engrossée par deux cents drapeaux distincts et presque autant d’armées, puis des milliers de langues différentes. (Ce monde est très « touristique », mais polars politiques inclus.)
Bon ; j’invite à ne surtout pas confiner les sens des mots « fleur » et « parc » dans leur sens botanique.
Dessous le titre général, on va trouver plusieurs parties :
– Les académiques
– Les malingres et les mal foutus
2) Adieu Juliette
3) Les petites heures du milieu
4) Les fiançailles
5) Premiers poèmes
Le recueil, que j’arrête momentanément à 2024 et mes soixante-douze ans, est globalement construit à l’envers, c’est-à-dire à rebours de sa composition chronologique. Nous commençons donc avec des textes récents, pour finir avec les plus anciens. J’espère que c’est un peu étrange ou amusant ainsi. (Cette inversion chronologique est juste un peu atténuée par le classement alphabétique des sonnets.)
« Adieu Juliette » est un hommage et un souvenir, de la part d’un auteur qui a démarché de nombreuses personnalités sans pour autant cesser de ramer pour trouver un éditeur.(Mais qui va persévérer jusqu’à la fin de sa vie vaillante, tant il croit en ce qu’il écrit ; auprès de choses tellement étranges aperçues en librairie, en poésie, en philosophie et ailleurs.) J’y loge mes tout derniers textes, qui sont en vers libres, voire en prose.
En seconde partie, vous auriez dû trouver mon travail de chansons. Hélas, cela ne rentrait pas dans la boîte sans un bouquet de complications.Sur une soixantaine de textes, une quarantaine a été écrite il y a plusieurs décennies, quand j’avais dans l’idée de devenir : « auteur, compositeur, interprète ». Depuis cette époque, j’ai beaucoup chanté (trente-cinq ans), mais les chansons des autres (Brassens, Souchon, Gainsbourg, Dutronc…) et au chapeau seulement ; cela paye infiniment moins qu’un cachet, mais n’embrigade pas dans une carrière qui vous mange l’inspiration et le temps.
Décembre 2024
1)Les académiques
2) Les malingres et les mal foutus
1) La modernité de la forme
Un tel mode d’expression, le sonnet, peut sembler suranné à un jeune public. Mais pour penser ainsi, il faut, d’une part, avoir manqué radicalement l’aspect intemporel de la poésie (même s’il est parfois très ardu et rébarbatif de lire les vieux textes) ; il faut, d’autre part, être fort distrait de son enfant moderne, la chanson, qui, de Brassens à Nougaro, de Gainsbourg à Souchon, a pris le relais des grands poètes du passé.
Au sein de la poésie, le sonnet a une place privilégiée que je m’explique d’abord ainsi : quand il est bien écrit (et bien lu), c’est un chef-d’œuvre de concision et d’expressivité. C’est un tableau, une « monographie fulgurante », dans une forme originale, élégante et spécifique, illustrée en particulier par Rimbaud et Baudelaire.
La concision et l’expressivité ; ces qualités font du sonnet, à mon sens, un objet définitivement moderne. Un, parce que nous manquons beaucoup de temps ; deux, parce que l’esprit saturé de journaux et d’actualités, de livres et de télévision, nous sommes quelque peu désensibilisés et ne réagissons plus qu’à des produits percutants et rapides.
Certes, le sonnet est une petite chanson sans musique ni refrain pour s’imposer à votre esprit. Mais il en a la force, la brièveté et les rimes.
2) La rime
J’ai appris à l’école, puis lu dans les traités sur le sujet, que la disposition classique des rimes pour un sonnet est : ABBA, ABBA, CCD, EED ou EDE. (Donc cinq rimes seulement pour les quatorze vers et les premières dites « embrassées ».) À la suite, mes premiers essais dans la discipline (« L’enterrement du cinglé », « La fête », « Les lavandières »), entrepris vers mes quinze ans, furent ainsi conformés.
Puis j’ai découvert Rimbaud et Baudelaire, qui sont pour moi, de très loin, les deux plus grands auteurs français de sonnets. (Je n’ai jamais rien lu de plus beau, de plus accompli dans ce genre que : « Le dormeur du val », si bien lu par Reggiani vers 1970. /auprès de tous ces textes charmants, concrets et parfaits que sont : « La maline », « le cabaret vert », « Le buffet », « Rêvé pour l’Hiver » ou « Ma bohème ».) Or, Rimbaud, parmi les quatorze sonnets qu’il a seulement écrits, pratique bien plus souvent sept rimes que cinq ; et celles des quatrains sont beaucoup plus souvent « croisées » qu’« embrassées ».
Pareil avec le sombre Baudelaire, ce prince outragé, ce précurseur du blues et d’une poésie charnelle. Différemment moderne que Rimbaud, plus mystique et tourmenté, un peu morbide, mais si sensuellement, et si bien possédé ! Déjà « gothique » et peintre expressionniste. Puis soudain vraiment drôle, aussi, avec, par exemple, l’humour noir de : « La cloche fêlée », le fantasme de : « La géante » ou la perversion de cinéma dans : « Le revenant »)1.
Techniquement, c’est avec lui comme avec Rimbaud : très souvent sept rimes au lieu de cinq (quand ce n’est pas deux comme dans : « Sonnet d’Automne » ou quatre dans : « Bien loin d’ici »). De même, les rimes des quatrains des soixante-sept sonnets présentés dans Les fleurs du mal sont très souvent « croisées » et non pas « embrassées » ; auprès de diverses variantes et dérogations pour les tercets.
Ainsi, depuis le portail technique ouvert par ces deux maîtres, je me suis souvent appliqué à sept rimes, qui font, il me semble, un poème plus coloré qu’avec cinq.
Je me suis pareillement référé à leur pratique variable des rimes masculines et féminines, où l’opposition à la règle peut s’avérer aussi fructueuse que son respect.
3) Le classement alphabétique
Je lis dans une modeste anthologie du sonnet (Folio 2005, classique n° 46) que chaque poème est un petit livre en soi (je lis à peu près), mais que leur recueil peut, à son tour, constituer une composition intelligente ; que leur juxtaposition, telle ou telle peut se trouver pensée, ordonnée, bref, donner l’occasion d’un autre et plus grand poème… Je n’aurais pas choisi ce mot, mais bon ; je suis bien d’accord qu’un recueil peut se trouver très « composé ».
J’ai donc listé mes textes et tenté de les ordonner. Et c’est sans ironie qu’à la suite de cette confrontation aux infinies possibilités, j’ai choisi de les présenter par ordre alphabétique ! C’est ce classement qui, par exemple, juxtapose « Le crapaud » et « Le cercle » ou bien « Le soldat » et « La surpopulation ». Et je trouve ces résultats fortuits très formidables ; ici, pour un contraste qui nantit chaque sujet de sa particularité ; là, pour une promiscuité tellement sociologique ! Tandis que cultiver sciemment de tels critères allait me donner toute sorte de dilemmes insolubles.
Je m’en remets donc à ce beau classement arbitraire, qui produit tant de ce que la vie comporte. À savoir des proximités parfois choquantes, des hasards parfois « luminescents », des accidents, une diversité…
À la suite, ma « chronologie à rebours » est parfois approximative. Mais peu importe. Priver le livre d’Arthur Rimbaud de chronologie serait scandaleusement désinvolte vis-à-vis de son itinéraire. Puisque le bonhomme s’est accompli de seize à vingt ans, avec des étapes formelles et thématiques très différentes et spectaculaires. Pour ma part, je débarque beaucoup vers quarante ans et plus ; une modestie s’impose. (Tandis que ma longévité m’a permis une certaine ambition réflexive, comme on lira.)
Enfin, dernier ou premier argument pour un tel classement alphabétique : son caractère consultable. Il est en effet très facile d’y retrouver un sujet, voire d’en chercher un.
4) Les thèmes et les variantes dans mon travail
C’est peut-être la principale originalité de mon travail : je ne m’interdis aucun sujet et m’efforce plusieurs fois (« Le cercle », « Le ciel », « La surpopulation », « Le temps »…) d’une écriture à la fois poétique et scolaire.
Je sais pertinemment qu’un tel aspect « scolaire » est le plus souvent péjoratif et rarement revendiqué à la suite. Pour autant, n’est-ce pas à l’école qu’une majorité d’entre nous a pris connaissance et émerveillement de la poésie ? Par conséquent, je me réclame tout à fait de ce caractère, qui va si bien, par ailleurs, à la forme ouvragée du sonnet.
On ne trouve jamais de « variantes » chez les grands auteurs. C’est une forme, j’en conviens, de politesse envers le lecteur, voire de modestie. Je n’y ai donc cédé que lorsque je trouvais « une autre idée » vraiment intéressante et impossible à jeter. Le lecteur jugera.
Seul le temps m’aura manqué (investi dans d’autres dossiers) pour constituer une œuvre plus importante dans ce mode d’expression.
NB : pour bien lire un sonnet académique, il faut toujours trouver et prononcer ses douze syllabes ainsi que sa césure. Et cela n’est pas toujours évident, par exemple, en présence d’un enjambement, voire de plusieurs césures ! /Ne me lisez pas trop vite, mon travail est peu à peu très studieux.
Philippe Leroux (2013-24)
Note bibliographique
Il se trouve, certes, beaucoup d’autres auteurs français de sonnets que Rimbaud et Baudelaire. Par exemple, je relis toujours avec plaisir Spleen de Laforgue. Tandis que Heredia est l’auteur des plus belles médailles qui soient. Mais la grande majorité me sont trop moyens ou compliqués, ou trop « culturels », ou autrement embarrassés. Quant aux textes étrangers (le sonnet nous vient d’Italie ; il fut aussi pratiqué par Shakespeare, Lorca et d’autres « géants »), je les ressens comme intraduisibles eu égard à la déperdition formelle et sonore.
Vous trouverez environ sept dizaines de sonnets académiques et autant de malingres. Sur l’ensemble, j’ai fini par discerner cinq thèmes : les seuls animaux/choses et objets/les humains dans leurs décors/histoires personnelles/un peu de clarté métaphysique. Mais il appartiendra à mon lecteur d’y relier chaque texte, car je n’ai pas voulu renoncer au classement alphabétique avec ses si plaisantes juxtapositions aléatoires.
La couturière des greniers ; (qui tôt se cache
Et tisse patiemment son piège de fils mous
Dont l’insecte captif, par de tremblants remous,
Essaie de déchirer la trame qui l’attache).
Et pour s’enfuir, les huit pattes d’un double rat !
Leur arpège allouant le dégoût et la peur,
Plus rarement la compassion, pour cette sœur
Sans ailes ni destin, dans l’angle de ses draps.
… Qu’étouffer et manger ses malheureuses proies
Ou chatouiller les pieds d’un long Jésus en croix,
Pauvre gibier d’église et minuscule fauve.
Déjà dans la poussière avant que d’être morte,
Elle ira, comme nous, franchir la grande porte,
Égérie du néant que son venin ne sauve.
NB : d’une fraction de millimètre à vingt-cinq centimètres, comportant la tarentule et la mygale, l’araignée est un grand sujet, que mon texte effleure seulement. Du coup, j’aurais bien titré : « L’araignée d’Épinal ».
C’est une tige épaisse et qui se ramifie,
Un tronc plus ou moins fort, par un buisson couvert,
Aux feuilles qui varient, de formes et de verts,
Puis de jaunes rousseurs, quand l’hiver s’édifie.
Puis le soleil abonde et l’écorce ruisselle ;
Les fruitiers sont en fleurs et Vincent a raison !
Le feuillage mûrit, pousse une autre saison,
L’hiver fait ses manchots de branches sans nacelle…
L’oiseau y donne messe, y bâtit ses châteaux,
En brindilles de bois, radoucies d’un peu d’herbe,
En cercles minutieux, qu’il couvera tantôt.
Forêts de ces géants aux hôtes endémiques,
Insectes et rongeurs, et hibou magnétique,
Étrange féerie de ces troupes superbes.
NB : pour le huitième vers, j’ai aussi pensé à :
L’hiver lui fait manteau de blanches étincelles.
Quant à Vincent, il s’agit de Van Gogh, bien sûr, puisque ce grand artiste a peint de très nombreux tableaux d’arbres fruitiers.
Le dernier tercet ne comporte pas de verbe, en effet, et je crois que cela convient à la stature immobile de la forêt, que seule l’industrie humaine peut détruire.
Le Capital va-t-il crever le Saint-Esprit
Ou lancer son propre djihad, sans confession,
Depuis l’essor carboné de deux cents nations ?
L’anticyclone est mal placé, week-end pourri.
Un frisson dans les feuilles mortes du jardin ;
Des corneilles voûtées sous le vent, croassant ;
Les gens tout calfeutrés, plus le moindre passant,
La télé qui m’endort, alarme et baratins…
Pour autant, de chez moi, est-ce la fin du monde ?
Dimanche, on reçoit les enfants ; lundi, ciné.
Et puis, jeudi, un resto, toujours avec ma blonde !
Mes placements sont-ils moraux ? Qui en profite ?
Trop de CO2, trop de nations acharnées…
La pluie s’est abattue, la planète crépite.
NB : le premier quatrain d’« Avant l’orage » est sans doute le plus moderne de tout le recueil. On dirait de la prose ou le bulletin des guignols de l’info sur CANAL+ (1988-2018).
Pour autant, ses lignes ne sont peut-être pas très claires pour tout lecteur. La question est : l’économie de marché et le développement économique vont-ils, comme quelques-uns l’espèrent, venir à bout des frontières et des chauvinismes armés, des théocraties et de l’obscurantisme religieux ou bien se répandre, se vautrer dans divers « dommages collatéraux » ? (Malgré les pénétrantes formidables effectuées par Internet et la musique ?)
La tremblante bougie, qui d’un souffle vacille,
La fluette brûlure et son humble clarté
Qui, depuis cinq mille ans, chasse l’obscurité,
Imitant, de la nuit, l’étoile qui scintille.
La clepsydre de feu et ses larmes de cire,
Qui fond avec le temps comme la vie qui crève,
Qui va s’évanouissant, mais combattant sans trêve
Pour préserver l’esprit du néant qui l’aspire.
Sir, vous flambez ; voici votre château en fête !
Tandis que le suif gras noircit la maisonnette
Et que le moine rond va d’un cierge mystique.
Plus tard, longtemps plus tard, au temps de l’électrique,
La chandelle revient dans le film historique
Et poudroie les salons de lumière obsolète.
NB : ce n’est que le principe de la bougie qui a cinq mille ans ; on parlait alors de chandelle. La « bougie », plus moderne, date du Moyen-âge, où la cire provenait de la ville algérienne de Bougie (« Bugaya »). /Avant de devenir intransitif, « poudroyer » a signifié « saulpoudrer » (Petit Robert 2011). /Au denier vers, une lumière « imparfaite » aurait fait un intéressant jeu de mots entre l’imparfait de la vie qui vieillit (conjugaison de passé) et l’efficience des éclairages modernes.
Une chanson de couleurs ; ses notes de rouges,
De jaunes et de bleus, chaque son silencieux ;
Muette sentinelle, qui jamais ne bouge,
Mais décrit dans l’espace un ballet délicieux.
Un petit arbre de fleurs coupées, son nuage,
Vibrant sur un faisceau de tiges et d’ombelles ;
Charmant fouillis jeté, fête dans un feuillage
Et son tableau tremblant de fibre et de dentelle.
La beauté concentrée d’une femme et d’un chat,
Une poudre et ses grains, la nuance d’un Fa,
La grâce et les soupirs d’une bête endormie.
Qui varie peu à peu, de cette vie instable,
Et dépose autour de lui, épars sur la table,
Tous les pétales morts de sa pauvre momie.
Pour un peu de monnaie, le voici qui démarre,
Vous emmène au boulot, vous ramène chez vous,
Vous offre une ballade, au gré de votre goût,
Le gros bus dévoué, dont on crie les retards.
Son énorme moteur, ses tonnes de ferraille
Se glissent dans les rues, évitant les vélos,
Les autos mal garées et le piéton falot ;
Il roule sans accroc, c’est toute sa médaille.
J’ai tellement d’argent que ma carte est gratuite !
On est vite baron avec des droits sociaux,
Dans un pays moderne, aux grands outils géniaux.
Dans les heures de pointe, on peut même toucher
Le grand surpeuplement des pays submergés ;
C’est tout notre avenir d’économie en fuite.
Variante au deuxième tercet :
C’est parfois une femme, aujourd’hui, au volant
Et le même ouvrier, courtois et vigilant ;
Tout un métier ; la belle vie n’est pas fortuite.
« Fortuite » ? Beaucoup de scientifiques et de philosophes sont très fascinés, voire inspirés par le cadrage de la vie fortuite, avec seulement de folles religions pour vouloir les contredire. Pour autant, la vie qui se construit pas à pas, s’affine et se protège, tout cet immense effort historique mérite de contrebalancer la réflexion.
Maître soleil est de retour ! Il enveloppe
chaque objet, chaque peau, tout esprit alentour.
L’herbe jaunit, l’eau s’évapore. Ô, ciel-tambour,
Tendu de brume bleue, comme un oiseau sans notes !
… Un oiseau silencieux, sur la ville plus lourde,
Où vont mille métiers, de maçon à docteur.
Des touristes anglais flânent avec lenteur ;
Une môme à son portable a l’air d’être sourde !
Le bitume est brûlant et le piéton transpire.
On se vêt d’un mouchoir, les corsages sont pires
Et les yeux masculins caressent leurs pareilles.
Si le cosmos avait un seul jour été nu,
Rien jamais, non jamais, n’y serait advenu ;
Aucune molécule, aucun show de soleil !
NB à : « Canicule panthéiste » ; puisque : « Ex nihilo nihil » (puisque : « De rien ne peut rien advenir »), le dernier tercet exprime en filigrane le miracle d’une matière sans origine. L’Univers n’a jamais été vide, car alors il ne s’y serait jamais rien produit. Il a donc toujours comporté une matière diverse depuis laquelle toutes les structures sont advenues, en particulier les étoiles et leurs galaxies, et puis l’étonnante espèce humaine. /Dans un tel Univers où, bien sûr, tout obéit au cause à effet, il est très extraordinaire et marrant d’observer que « tout commence » par du surnaturel ! (À la condition, certes, de ne pas donner son esprit à un aveuglant : « Creatio ex nihilo » décrété par la religion catholique, mais d’y préférer toutes les sidérations accessibles à une métaphysique rationnelle.)
Des guillemets autour de « tout commence » puisque, autre axiome accessible à la déduction : l’Univers infini et sa matière comportée n’ont jamais eu de « début », de début global, juste une infinité d’évènements structurels internes.
Ne vous fiez pas à la définition généralement nébuleuse du panthéisme dans les dictionnaires. Pensez plutôt à une admiration de l’Univers héritée de Spinoza, d’Einstein et des réflexions contenues dans le poème.
Son dessin idéal est d’un étrange aplomb,
Concerte les savants, atteint l’astre et l’éclipse,
Planètes et soleil et même leurs ellipses ;
Il apporte la roue, le vélo, les ballons…
Le rond de son tracé est si puissant qu’il roule
Hors du cahier ouvert de l’écolier songeur ;
Qui y trouve la lune et le cadran des heures,
Puis calcule avec soin les secrets de sa boule.
C’est drôle que le cercle, en tous points accompli,
Dont le parfait contour scintille sans repli,
Sans aucun accident, sans une aspérité…
C’est drôle que le cercle et son grain d’infini
(ce nombre Pi qui vient, mais jamais ne finit)
Ouvrent aussi la montre et le temps visité.
NB : le dessin du cercle : « atteint même l’ellipse » puisque, en plus de sa forme, les formules de celle-ci comportent plusieurs fois la valeur Pi.
Variante au dernier vers : « le temps ébruité » ; c’est plus joli, mais moins explicite de la condition humaine.
(Essai d’une variante circulaire grâce à
l’alternance des quatrains et des tercets.)
Son dessin idéal et d’un étrange aplomb
Concerte les savants, atteint l’astre et l’éclipse,
Planètes et soleil et même leurs ellipses ;
Il apporte, la roue, le vélo, les ballons…
Le rond de son tracé est si cousu qu’il glisse,
Qu’il advient du compas dans un matheux délice
Puis conforme la lune et le cadran des montres.
C’est drôle que le cercle, en tous points accompli,
Ni pointu ni bancal, sans aucun accident,
Sans une aspérité, un relief, une dent,
Dont le parfait contour scintille sans repli…
C’est drôle que le cercle ait ce grain d’infini,
(ce nombre Pi qui vient, mais jamais ne finit),
Puis qu’il rythme le temps dans le rythme des montres.
NB : j’ai aussi griffonné :
C’est drôle que le cercle ait ce grain de ternaire,
Ce nombre Pi qui court sans finir par se taire,
Ce trois (comme le temps, l’espace et la matière)
Qui poursuit l’infini et fascine les nerfs.
C’est le petit joufflu de la géométrie,
Lisse comme un poisson, rond comme un petit pois,
Sans une aspérité, dans un seul trait compris,
Objet parfait, silencieux, qui se tient coi…
Le polygone est tout en segments, qui font du
Bruit ; c’est un cercle contesté, parmi ses bosses.
La droite est monotone et l’ellipse tordue ;
Le cercle est une fée, le carré, son molosse !
C’est un angle complet qui touche à l’infini,
Qui couronne les rois et protège les nids ;
Rien ne casse son trait, sa courbe est une table !
Forme fermée, son calcul est interminable !
Le cercle est donc divin, du Livre solennel,
Et comme un vieux pilier de l’espace éternel
NB : le vers neuvième est un peu obscur ? Je pense l’éclairer au dernier tercet (forme fermée ou étanche ou finie). /Le onzième vers parle du divin des panthéistes, qui voient Dieu dans la nature, le cosmos (Spinoza, Einstein…). « Le livre solennel » n’est donc ni la Bible ni le Coran, mais celui, bien plus mythique et intemporel, de toutes les sciences de l’Univers