Les locataires - Damien Coudier - E-Book

Les locataires E-Book

Damien Coudier

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Beschreibung

Dans la quête folle de sa femme disparue, Paul explore son immeuble et croise des locataires plus étranges les uns que les autres...

Heather et Paul viennent d’emménager dans un vieil immeuble, alors qu’ils passent leur première nuit dans leur nouvel appartement, Paul se réveille et réalise que sa femme a disparu. Inexplicablement confiné dans cet édifice, il entreprend une quête folle afin de retrouver sa moitié, croisant dans un cauchemar résidentiel des locataires de plus en plus étranges et inquiétants !
Cett œuvre dépeint un univers anxiogène, étrange, aux accents lynchiens et dont les touches insolites sont autant de clins d’œil à Lewis Carroll qu’à Edgar Allan Poe.

Un huis-clos cauchemardesque et singulier.

EXTRAIT

Au sommet des marches s’élevait l’écrasante bâtisse, intemporelle, presque glaciale. Sa façade, construite en pierre de taille, s’habillait par étages, de frises complexes et inquiétantes. Les balcons bâillaient sous les encadrements des fenêtres dont les arches pointaient sur les passants des regards solennels. Un sourire vint ébranler cette ombre de granit.
— Nous serons bien ici !
Elle lâcha cette phrase en soufflant et posa une boîte en carton sur le sol. Sitôt après, elle referma la porte de l’appartement derrière elle. Avec la fatigue, son visage prenait une moue boudeuse, ce qui concédait une imperfection rassurante à sa beauté. Car en toute chose, la perfection est une vanité lourde à porter. Quelques gouttes de sueur vinrent rouler en bas de son cou, aiguisant à merveille sa sensualité ingénue. En bon nombre de circonstances, Heather semblait incapable de laideur.
— C’était le dernier ?

À PROPOS DE L'AUTEUR

Jeune auteur Lyonnais, passionné par le fantastique et ardent défenseur du genre. Damien Coudier considère avant tout le fantastique comme un exercice borderline et polysémique, refuge des doutes et révélateur de soi.

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Table des matières

Résumé4

Préface7

Prologue9

Chapitre 1.Nous serons bien ici11

Chapitre 2.L’heure du thé17

Chapitre 3.Le concierge24

Chapitre 4.Te toucher enfin…30

Chapitre 5.Limbes36

Chapitre 6.Parfum41

Chapitre 7.Au nom du fils49

Chapitre 8.L'écrivain52

Chapitre 9.Passerelle57

Chapitre 10.La chambre silencieuse63

Épilogue78

Du même auteur81

Dans la même collection81

Résumé

Heather et Paul viennent d’emménager dans un vieil immeuble, alors qu’ils passent leur première nuit dans leur nouvel appartement, Paul se réveille et réalise que sa femme a disparu. Inexplicablement confiné dans cet édifice, il entreprend une quête folle afin de retrouver sa moitié, croisant dans un cauchemar résidentiel des locataires de plus en plus étranges et inquiétants !

Huis clos cauchemardesque et singulier, l’œuvre dépeint un univers anxiogène, étrange, aux accents Lynchien et dont les touches insolites sont autant de clins d’œil à Lewis Carroll qu’à Edgar Allan Poe.

Damien Coudier

Les Locataires

Thriller fantastique

ISBN : 978-2-37873-017-8

Collection Atlantéïs : 2265-2728

Dépôt légal janvier 2018

© couverture Ex Aequo

© 2018 Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction intégrale ou partielle, réservés pour tous pays. Toute modification interdite.

Préface

Je n'ai jamais aussi bien imaginé la mort de mon vivant !

Et d’imaginer, je me suis mis à penser, tout comme le premier et le tout dernier des hommes, maladroitement, fiévreusement…

La mort est peut-être le dernier acte de la vie, où se joue la comédie des égos, du moins un temps… Ensuite, elle devient selon chacun : néant, plénitude ou tragédie dissoute dans une conscience supérieure. Que nous restera-t-il une fois morts, si ce n’est faire face à nous-mêmes ?

Finitude et solitude riment affreusement bien, qui peut garantir que nous ne finirons jamais seul ?

La vie a comme garantie la mort, mais la mort ne nous garantit de rien.

Voilà ce que nous sommes, des êtres divins faisant l’expérience de la condition humaine et de son inéluctable mortalité.

Ce n’est peut-être pas la mort qui m’effraie mais l’indifférence brutale de la vie.

Damien Coudier

L’enfer est un cercle de douleur

Prologue

Au sommet des marches s’élevait l’écrasante bâtisse, intemporelle, presque glaciale. Sa façade, construite en pierre de taille, s’habillait par étages, de frises complexes et inquiétantes. Les balcons bâillaient sous les encadrements des fenêtres dont les arches pointaient sur les passants des regards solennels. Un sourire vint ébranler cette ombre de granit.

— Nous serons bien ici !

Elle lâcha cette phrase en soufflant et posa une boîte en carton sur le sol. Sitôt après, elle referma la porte de l’appartement derrière elle. Avec la fatigue, son visage prenait une moue boudeuse, ce qui concédait une imperfection rassurante à sa beauté. Car en toute chose, la perfection est une vanité lourde à porter. Quelques gouttes de sueur vinrent rouler en bas de son cou, aiguisant à merveille sa sensualité ingénue. En bon nombre de circonstances, Heather semblait incapable de laideur.

— C’était le dernier ?

Elle passa le revers de sa main sur son front, bousculant la vague légère de ses cheveux.

— Non, il en reste encore un. Je l’ai oublié en bas, je vais le chercher.

Paul avait le don de ne rien céder à ce que tant de couples redoutaient, selon lui la lassitude faisait partie de l’amour et conduisait les cœurs jusqu’à la tendresse. Son quotidien avec Heather était ainsi, une tendre routine qu’il combattait en surprises et enthousiasmes.

Le dernier paquet acheminé, ils prirent d’assaut le canapé encore recouvert de sa housse protectrice. Autour d’eux, dans un désordre joyeux, se bousculaient les meubles emballés et les cartons éparpillés. Silencieux, ils contemplaient l’espace, projetant leurs pensées et leurs espoirs. Cet appartement avait tout pour plaire, le salon était immense et lumineux, la chambre vaste et épurée. Quant à la cuisine, l’élégance qui la caractérisait avait largement supplanté son côté fonctionnel. Dans cet horizon intérieur, ils nourrissaient les probabilités de leur futur aménagement, laissant leurs songes s’élever par-delà les embrasures discrètes du plafond.

Ils se levèrent et refirent le tour de leur acquisition, posant çà et là quelques affaires dans les pièces qu’ils allaient investir de leurs bibelots et de leur personnalité.

— Les gens ont l’air bizarre ici. Tu as vu comment le papi nous a dévisagé tout à l’heure ? dit Paul en portant un verre d’eau à ses lèvres.

— Ce n’est pas grave ! Il était étonné, c’est tout.

— Oui, mais il aurait pu nous rendre notre bonjour, tout de même ! grommela-t-il.

— Les gens d’ici ne sont pas habitués à voir du monde, encore moins de nouvelles têtes. Depuis combien de temps vivent-ils ici ? Certains ont l’air aussi vieux que cet immeuble, rajouta Heather en riant.

Cet édifice qui, jadis, avait connu son heure de prestige, était à présent promis à l’abandon inexorable de ses occupants. Seuls quelques rares copropriétaires s’entêtaient à vouloir maintenir l’âme et les apparats de sa splendeur passée. Les murs, assombris par des années de pollution, semblaient abriter de sombres secrets, écrasants les arbres et la rue d’une ombre menaçante. Mais cela n’était rien à côté de ses entrailles. Celles-ci étaient parcourues de couloirs fuligineux dont certains étaient brutalement interrompus par des grilles imposantes. Les marches froides des escaliers s’engouffraient dans des intervalles de ténèbres aux résonnances inquiétantes. Les portes, en bois massifs et aux chambranles saillants, assuraient avec aplomb l’intimité des logements et l’ascenseur tapi en son cœur, dévoilait une bouche métallique hideusement torsadée.

Ils se plaisaient dans leur nouvel environnement et même si les voisins paraissaient quelque peu tristement apathiques, voire austères pour certains, Paul et Heather ne s’en attristaient point, bien au contraire.

Les heures passèrent ainsi, en allers-retours incessants, entre rangement et fous rires, égrenant les minutes en secondes, jusqu'à ce que la lune entre en scène.

— Je me sens bien ici ! dit-elle en se jetant sur le lit.

Paul ne se fit pas prier pour la rejoindre.

— Un vrai lit enfin !

Aussitôt allongé, il se mit à gesticuler comme un enfant, testant les affinités de son corps avec le matelas.  Heather fixait le plafond, ses paupières à demi closes dissimulaient un regard évanescent. D'une voix feutrée elle ajouta :

— Tu as pensé à fermer ?

— C'est fait, à double tour, répondit-il.

Très vite la fatigue prit le pas sur cet échange de banalités ; emportés par la nuit et leurs caresses, ils s'endormirent paisibles et heureux.

Chapitre 1

Nous serons bien ici

« Que ne puis-je, porté sur le char de l'aurore, Vague objet de mes vœux, m'élancer jusqu'à toi, Sur la terre d'exil pourquoi resté-je encore ? Il n'est rien de commun entre la terre et moi. »

Paul était assis, en pyjama, le regard absent, sa main fébrile caressait l’empreinte du corps qu’Heather avait laissée sur le lit. Ses doigts redessinaient les courbes de sa présence, tandis que ses yeux rougis par les larmes ne parvenaient plus à se fermer. Rien n’y faisait, la solitude l’avait enchaîné à la réminiscence de cette phrase :

Nous serons bien ici !

Inlassable, insatiable, la douleur du souvenir diffusait son poison, sclérosant chacune de ses pensées. Ecorché par le chagrin, Paul ne cessait de manipuler les faits, essayant de comprendre comment tout cela avait pu arriver. Heather avait disparu.

De longues minutes s’écoulèrent ainsi, stupéfaites, suspendues à l’incompréhension et au questionnement. Prisonnier du temps, de cette boîte dont il ne comprenait plus les mécanismes logiques, Paul ressassait… Ils s’étaient couchés amoureux et sereins, aucun secret, aucune rancœur, ne pesaient dans leur poitrine, alors pourquoi… ? Pourquoi l’irruption de ce vide qui lui creusait les entrailles ? Il ne s’était aperçu de rien, au petit matin, il avait ouvert les yeux, quelque peu étonné de ne plus la sentir contre lui, mais relativisa aussitôt. Après tout, elle pouvait bien se trouver aux toilettes.

—Heather ?

C’est lorsque le silence lui répondit qu’il commença à s’inquiéter.

Paul se souvint s’être levé, avoir parcouru des pièces désespérément vides et muettes ; rien ne trahissait la présence ou le passage de sa belle, pas depuis cette nuit du moins. Son cauchemar prit un nouvel essor lorsqu’il constata que tous les habits d’Heather étaient à leur place, rien ne manquait, rien n’avait bougé. Peu à peu le monde de la rationalité s’écroulait autour de lui. Tous les verrous étaient fermés, les fenêtres closes et leurs clefs respectives étaient toujours là. Paul manqua de sombrer lorsqu’il constata avec effroi que l’entrebâilleur à chaîne de la porte d’entrée était toujours en place. Il n’y avait plus que le silence pour occuper l’espace, si bien qu’il crut un instant qu’il était mort. Mais les pulsations arythmiques de son pouls affolé témoignaient toujours de sa vitalité et décomptaient par saccades les secondes de cette insupportable solitude. Soudain, comme saisi de spasmes, il se mit à trépigner considérant la porte d’un œil torve, puis il courut tel un dément dans toutes les pièces de l’appartement. Cela dura quelques minutes, quand constatant sa folie passagère et la vacuité de ses actions, il se rassit brusquement sur le rebord de son lit. L’enfer est un cercle de douleur qui ne conçoit ni le temps, ni l’espoir ; et Paul en son for intérieur semblait se trouver tout près de son entrée. Bien que la douleur eût voulu l’abattre sur le champ, il ne pouvait se résoudre à rester amorphe plus longtemps. S’extirpant de sa torpeur, il se leva d’un bond, s’habilla de manière désordonnée, accumulant les va-et-vient inutiles, bien décidé à agir.

Dehors la rue s’éveillait doucement, les stores encore baissés ne laissaient rien filtrer de la lumière du jour. L’infliction de cet isolement brutal rendait les pièces de son appartement froides et funestes. Alors qu’il s’apprêtait à sortir, la sonnette retentit. C’était la première fois qu’il l’entendait, sa plainte écorchée et électrique le fit sursauter. N’ayant plus qu’Heather dans ses pensées, il se précipita vers l’entrée et libéra toutes les serrures. Cela ne pouvait-être qu’elle, il fallait que ce soit elle. Sa joie flétrit à l’instant même où il ouvrit. Personne… seulement le vide obscur et caverneux d’un couloir inhabité. Agacé, Paul referma la porte. A peine avait-il tourné les verrous que la sonnette retentit à nouveau. Cette fois son œil alarmé scruta préalablement le judas, il vit un enfant de l’autre côté. L’obscurité du couloir donnait une couleur terne à son visage, il se tenait à quelques centimètres de la porte, stoïque, étrangement impassible, les yeux grands ouverts. Paul se fit discret, réfléchissant à ce qu’il devait faire. Mais la voix de l’enfant déchira brusquement le silence.

— Maman ouvre s’il te plaît !

L’appel paraissait si plaintif que Paul fut autant effrayé que surpris. Curieusement, le ton de cette voix, témoignait une familiarité singulière qui aussitôt se mua en quelque chose de beaucoup plus inquiétant. Paul fit un pas en arrière, puis regarda à travers l’ouverture. L’enfant était toujours là, immobile, sa peau et ses vêtements paraissaient gris, sans doute à cause de la faible luminosité du corridor. Quelque chose de sinistre se dégageait de lui. Paul se résolut quand même à ouvrir, le garçon s’était peut-être égaré, ou bien s’était-il trompé, tout simplement. Lorsque la porte s’ouvrit, un courant d’air froid lui pénétra les os. Sur le seuil : personne… pas même l’entité d’une ombre, le couloir était désert. Paul ne s’attarda pas plus longtemps, il referma. Cependant, la vision de cet enfant le hantait et distillait dans son esprit d’improbables conjectures : mauvaise blague ? Hallucination ? Spectre ? À peine s’était-il éloigné d’un mètre que la sonnette retentit une troisième fois.

— Il se fout de moi !

Paul fit demi-tour avec une véhémence teintée d’appréhension. Il lorgna dans le judas, le prisme nébuleux ne trahissait aucune présence. La colère dépassant la peur, Paul poussa sèchement la porte, espérant que celle-ci en cognant sur le mur du couloir viendrait percuter la masse insolente du plaisantin. Mais elle ne heurta que le béton, écornant au passage les motifs raffinés d’un bout de tapisserie. Paul scruta l’étendue du corridor qui lui parut plus sombre qu’à l’accoutumée. La cage de l’ascenseur était silencieuse et la grille de fer qui donnait sur les escaliers était close. Lorsqu’il referma la porte, il sentit une humidité visqueuse caresser le bout de ses orteils. Une flaque de sang s’épandait sur le palier, imbibant la fibre de ses chaussettes. Avec horreur, il fit un bond en arrière et claqua la porte devant lui. Passant sous son interstice, le fluide vermillon gagna l’intérieur de son entrée. Paul courut à la cuisine, laissant des empreintes de pas écarlates. De retour dans le hall et muni d’une épaisse serpillère, il jeta celle-ci au pied de la porte afin d’endiguer la sanglante progression. Il avait la nausée, des gouttes de sueurs roulaient sur son front. Retournant à la chambre, il saisit le téléphone, tous les numéros qu’il composait aboutissaient sur l’écho saturé d’une radio mal réglée. Toutes les lignes étaient parasitées, tout ce qu’il entendait pouvait se résumer au bruit d’une mer électrique, dans laquelle des cris et des pleurs venaient de sombrer.

Enfilant ses chaussures, il se rendit à nouveau vers l’entrée. Les nerfs tendus à leur maximum, il actionna les verrous, prêt à bondir ou bien à fuir, il ne savait pas. La porte s’ouvrit, mais il ne trouva rien d’autre que cette mare immonde. Il enjamba la serpillère gorgée de sang et se faufila dans le couloir. Méfiant, il actionna l’interrupteur. Les lumières vacillaient sous le plafonnier, parfois ardentes, parfois indicibles. Dans cette étrange atmosphère, l’ancienne tapisserie dessinait des motifs angoissants et le plafond scarifié par quelques lézardes paraissait s’être affaissé. Toutes ces choses, à présent évidentes et disgracieuses, ne l’avaient point interpellé durant leur emménagement. Paul savait que cet immeuble était vétuste, mais à présent, il ne reconnaissait plus rien. Lorsqu’il appela l’ascenseur, les câbles de celui-ci s’ébranlèrent, Paul vit à travers la cage de fer, la masse noire de la cabine gravir les étages jusqu’à lui. Les portes s’ouvrirent dans un râle solennel et une loge poussiéreuse lui tendit les bras. Il se glissa à l’intérieur et appuya sur le bouton du rez-de-chaussée à plusieurs reprises.