Loup-garou - Cantin Boulerot - E-Book

Loup-garou E-Book

Cantin Boulerot

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Beschreibung

Lucie, une jeune adolescente de quinze ans, est envoyée par ses parents en colonie de vacances avant la rentrée scolaire. Après une journée passée à découvrir les lieux, elle se lie d’amitié avec de nouvelles personnes. Cependant, un événement inattendu bouleverse tous ses plans, plongeant ses amis et elle dans une réalité cauchemardesque pour le reste de leur séjour. Leur unique objectif désormais est de survivre au cœur de cet enfer, espérant un jour revoir le monde extérieur.


À PROPOS DE L’AUTEUR

Ce qui a toujours plu à Cantin Boulerot est de pouvoir inventer n’importe quelle histoire et de la partager. Il se lance donc dans la publication de son premier roman intitulé Loup-garou.

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Cantin Boulerot

Loup-garou

Roman

© Lys Bleu Éditions – Cantin Boulerot

ISBN : 979-10-422-0062-6

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L. 122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L. 122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivante du Code de la propriété intellectuelle.

Le départ

5 jours. Seulement 5 jours.

Et en même temps, quelle idée de mes parents de m’avoir inscrit à une colonie de vacances 2 semaines avant ma rentrée au lycée ? J’avais bien mieux à faire que de me retrouver au milieu de plein de gens que je connais pas et qui vont juger tous mes faux pas !

Oulah, je recommence à m’énerver. Calme-toi Lucie, calme-toi.

5 jours. Seulement 5 jours.

Et qu’est-ce que c’est au final 5 jours, c’est rien qu’une petite semaine, ça va pas me faire de mal de prendre des vacances pendant 5 jours. Des vacances où je dois me trouver des amis, éviter de me donner en spectacle, ne pas penser à l’avance que je dois prendre sur le programme de l’année prochaine, penser à m’amuser, et puis les sièges de ce bus sont très peu confortables… Stop ! Il faut que je me change les idées.

« Rebonjour, tout le monde ! Juste pour vous dire que si vous regardez par la fenêtre de droite, vous pouvez voir notre future destination pour passer cette semaine tous ensemble. Et pour ceux qui sont à gauche, vous attendrez l’arrivée ! »

Toujours à essayer de nous donner le sourire, comme si on était heureux d’être là. Bon, voyons voir ce qu’il y a en contrebas.

J’ai penché la tête pour pouvoir observer notre destination « de rêve », et j’ai pu voir que mes parents n’avaient peut-être pas si mauvais goût au final. Le lieu de la colonie était magnifique, on pouvait voir un immense lac dans la vallée en dessous de nous, avec à ses côtés l’endroit où nous dormirons : un petit coin entre le lac et la forêt où sont installées les grandes tentes constituant ainsi notre camp. En passant ma tête de gauche à droite pour scruter les environs, je vois derrière le lac, un bâtiment, comme une espèce de vieille grange abandonnée.

Tiens, qu’est-ce que ça peut...

« Eh, tu veux pas qu’on échange de place pour que tu me laisses regarder ?

(Surprise, je tourne la tête vers la voix qui m’a interpellé. Je vois mon voisin de siège me regarder avec de grands yeux, c’est vrai que ça fait maintenant plus d’une heure qu’on est à côté, et c’est le premier mot qu’il…)

— Dépêche-toi, on va tourner et j’aurais pas eu le temps de voir.

— Oui pardon »

Je m’exécutai, et ce dernier bondit sur ma place en aplatissant sa tête contre la vitre du bus.

« Waouh, mais c’est trop bien ! J’ai trop hâte d’y être, ça va être super !

(Il se retourne vers moi et enchaîne.)

Au fait, je m’appelle Maxime, j’ai 12 ans ! Et toi ?

— Je m’appelle Lucie et…

— Bonjour, Lucie !

(Il me tend sa main, je la serre comme pour lui rendre son bonjour et il l’agite dans tous les sens, comme si je venais d’attraper une nageoire de poisson.)

T’es venu pour quoi toi ? Le canoë ? L’expédition en forêt ? La visite de l’ancienne ferme ? Les veillées avec des histoires qui font peur ?

(En une phrase, il a réussi à m’annoncer toutes les surprises que mes parents m’avaient cachées pour le séjour.)

— En fait, j’ai pas trop choisi de venir…

— Trop cool, ça veut dire que tu sais pas ce qu’on va faire, c’est super je te montrerai ! »

Il m’attrape le bras comme pour me signifier que désormais, il me suivra partout. Super, me voici avec un gamin hyperactif dans les bras. Comment est-ce que je vais pouvoir essayer de m’amuser maintenant ?

Plusieurs dizaines de minutes plus tard, le bus s’arrête, nous signifiant que nous sommes arrivés au terminus. Maxime, tenant encore mon bras me dit :

« Regarde Lucie ! On y est, y a le lac juste en face !

— Oui, j’ai vu Maxime.

— Ça te dit qu’on dorme dans la même chambre ?

(Hors de question que je me retrouve pendant 5 jours à partager ma tente avec un garçon de 12 ans, il faut que je trouve quelque chose !)

— Hey, tu penses pas que tu devrais la laisser tranquille et retourner jouer avec les enfants de ton âge ?

(Un grand blond vient de s’immiscer dans notre discussion avant même que j’aie le temps de répondre.)

En plus, les filles devraient pas partager leur tente avec les garçons, donc va chercher tes affaires, et trouve-toi d’autres bras auxquels t’accrocher.

(Maxime, en entendant mon sauveur, part en courant vers l’entrée du bus comme pour écouter les conseils de notre nouveau copain.)

Ça va, il t’a pas trop saoulé ? »

(Je reste bouche bée sans pouvoir répondre, trop surprise par ce qu’il vient de se passer pour prendre la parole.)

« Eh, oh. Il t’a pas volé ta langue quand même ?

— Bonjour, moi c’est Lucie.

— Euh, bonjour, Lucie, Thomas. »

Je lui tend la main par réflexe et regrette immédiatement, je deviens toute rouge. Thomas me regarde l’air amusé de mon embarras. Il me serre la main en ajoutant :

« Tu devrais te détendre, on est là pour passer des vacances sympas, pas pour passer des exams. »

Il part, me laissant seule dans le bus.

Je me dépêche de descendre pour récupérer mes affaires et rejoindre le groupe. Le moniteur qui nous accompagne est venu nous faire son speech d’accueil.

« Bienvenue à tous dans notre camp de vacances de rêve. Comme vous pouvez le voir, nous avons tout ce qu’il vous faut pour passer la meilleure semaine de votre vie. À votre droite, vous pouvez trouver le point de rassemblement où on se retrouvera tous les soirs à 19 h avant le repas, la cuisine et toute la partie de vie commune. À votre gauche, vous avez les tentes et les toilettes. En face de vous, vous pouvez retrouver le lac avec toutes les activités nautiques qui vous sont proposées, faites attention de toujours être en présence d’un moniteur pour utiliser une machine, que ce soient les jets, les canoës ou autres. Et enfin derrière vous, vous avez la forêt, qui s’étend sur plusieurs kilomètres, donc faites bien attention si vous voulez y aller à ne pas partir seul et à prévenir un moniteur. Et faites attention, on raconte qu’il y a 50 ans, des enfants ont disparu dans la forêt, et depuis, ils jouent avec les voyageurs jusqu’à ce que ces derniers les rejoignent. Mais bon, on en reparlera en veillée autour du feu. En attendant, je vous laisse choisir vos tentes, 6 personnes pas plus et pas de mixité. (J’entends Maxime soupirer à ces mots, et en regardant dans sa direction, j’ai vu qu’il me fixe de ses grands yeux, ce qui me fait froid dans le dos)

On se retrouve à 19 h, dans 4 heures donc au point de rassemblement, je vous laisse quartier libre jusque-là, bon après-midi tout le monde ! Et pensez à vous amuser ! »

À ces mots, tout le monde se dépêche de partir en direction des tentes pour y déposer ses affaires et je me retrouve encore toute seule, n’ayant pas eu l’instinct de partir.

« Excuse-moi ?

(Je me retourne et, devant moi, une fille, je pense d’à peu près mon âge, cheveux roux en bataille, yeux bleus, ou verts, j’ai du mal à les distinguer, me regarde d’un air très gêné de la situation.)

Je suis désolée de te déranger mais je n’ai personne avec qui faire une chambre, je peux venir avec toi s’il te reste une place ?

(Elle me parle d’une voix fébrile et hésitante, comme si elle pouvait s’écrouler à tout moment.)

— Ou-oui, pas de problème, pour tout te dire, je n’ai pas de chambre non plus. On peut aller en chercher une ensemble si tu veux ?

— Je veux bien merci. »

Je me dirige donc vers les tentes, jetant plusieurs coups d’œil frénétiques derrière moi pour vérifier qu’elle me suit encore.

Arrivant au niveau du lieu de couchage, j’essaye de chercher s’il reste des tentes pour 2 personnes, malheureusement, je remarque qu’elles ont été prises comme premier choix par nombre d’entre nous. En divaguant, nous nous enfonçons de plus en plus entre les tentes et je sens un petit doigt tapoter sur mon épaule. C’est la fille qui me suit, voulant me signifier quelque chose :

« On arrive vers le camp des moniteurs, on devrait peut-être retourner chercher vers les tentes qui nous sont réservées ? »

C’est vrai qu’en avançant, je n’ai même pas fait attention que l’on s’éloignait de notre camp.

« T’as raison, on va couper pour voir les tentes qu’on a pas encore… »

Au même moment, nous entendons une voix provenant de la tente des moniteurs.

« Je peux plus attendre.

— Tu te rends bien compte qu’on peut pas faire ça ce soir ? Ils viennent juste d’arriver, attends au moins la 3e nuit.

(Nous arrivons à reconnaître la voix, c’est le moniteur qui nous a accueillis)

— La 3e nuit ?! Impossible, je pourrais pas tenir jusque-là, il faut que ce soit ce soir. »

Soudain, la fille qui me suit me tire le bras.

« On devrait peut-être partir…

— Chut ! Ça a l’air important », dis-je en essayant de parler silencieusement.

Je me retourne vers la tente en tendant l’oreille, mais les moniteurs s’éloignent. Impossible de comprendre la fin de leur discussion.

« On devrait se rapprocher pour mieux les entendre », continué-je sur le même ton.

« Tu penses pas que ça nous regarde pas ?

— Mais t’as pas envie de savoir ce qu’il se passe ? Ça a l’air de nous concerner.

— Oui mais c’est une surprise, et en plus on a pas le droit d’être là normalement. »

Entendant ces mots, je me rends compte que j’étais plutôt ridicule, à jouer les agents pas très secrets en espionnant les moniteurs et ce qu’ils préparent pour un séjour auquel je n’avais de base même pas envie de participer. Surtout que nous n’avons toujours pas de chambre.

« T’as raison, on ferait mieux de vite trouver un endroit pour poser nos affaires. »

Nous repartons vers les tentes en scrutant les moindres places disponibles, prêtes à bondir dessus. Les tentes pour 2 personnes étant déjà prises, nous partons vers les tentes 3 personnes, pour essayer de se sentir le plus à l’aise possible lors des 5 prochaines nuits. En passant entre les tentes, nous entendons une querelle démarrer au loin, curieuses, nous nous approchons :

« J’étais là avant, et puis je te le répète, j’attends des amies qui vont venir avec moi !

— En attendant, t’es toute seule dans une tente pour 3, et on a déjà notre groupe, donc laisse nous la tente et va-t’en trouver une autre ! »

Nous sommes en pleine dispute de chambre d’une fille assez mince, aux cheveux verts avec un appareil photo autour de la taille, qui défend becs et ongles sa position quant à la propriété de la tente, et face à elle, 3 filles, s’étant autoproclamées détentrices du droit de propriété du terrain par le pouvoir du nombre. Parmi elles, l’une étant bien plus agressive que les deux autres, qui semblent rester en retrait et agitant les yeux partout, comme si elles avaient peur de se faire remarquer dès leur arrivée. Malheureusement, elles ont mal choisi leur amie.

« Regarde, je t’avais bien dit qu’elles allaient arriver ! »

Me sortant de mes pensées, je vois cheveux verts nous pointer du doigt, et marcher vers nous d’un pas motivé, me prenant par le bras et enchaînant.

« Mais vous étiez passées où ? Vous avez de la chance que je sois teigneuse, un peu plus et on aurait dû laisser notre tente à madame la grognasse et ses deux toutous ! »

Je sens tout de suite une gêne s’emparer de moi, et je vois les 3 filles concurrentes rougir si fort que l’air ambiant s’est réchauffé.

« Bon, comme tu peux le voir, on est 3, et c’est une tente pour 3, tu vas donc pouvoir te chercher une autre niche pour pioncer, merci ! »

Les accusées n’osent pas répondre et quittent les lieux sans même regarder si une autre tente est libre. Cheveux verts se tourne ensuite vers nous et enchaîne :

« Pfiou, j’ai cru qu’elles allaient jamais me laisser tranquille, félicitations ! Vous venez de gagner 2 places pour un tête-à-tête avec moi, dans la meilleure tente de la colonie, vue sur lac s’il vous plaît, pendant 5 jours, et tout ça pour la modique somme de… Rien ! »

Je reste bouche bée de la performance réalisée sous mes yeux.

« Vous en faites pas, j’suis pas toujours aussi bavarde. En tout cas, si on est amenées à partager une chambre, autant faire connaissance, je m’appelle Charlène, enchantée. »

Je réponds timidement :

« Moi, c’est Lucie, et elle, c’est… »

En commençant ma phrase, je me rends compte que je ne me suis même pas présentée auprès de mon accompagnante, mais celle-ci m’a tout de suite complétée.

« Zoé. »

Tiens, j’aurais presque pu le deviner. Charlène reprit de plus belle.

« Super, du coup j’ai déjà installé mes affaires près de la fenêtre, comme ça si on entend un oiseau en pleine nuit, je pourrai le prendre en photo sans vous réveiller. Ce que je vous propose, c’est que vous posiez vos affaires, vous les rangerez plus tard, et qu’on se dépêche d’aller trouver un mono pour lui dire qu’on part chercher des oiseaux dans la forêt, ça vous dit ? »

Sur le coup, je ne me sens pas trop d’attaque pour partir directement en expédition dans la forêt. Déjà que nous n’avons pas su nous repérer dans le camp, alors en pleine forêt… C’est un coup à nous perdre et à transformer notre séjour en camp de survie. Mais avant même que j’ai le temps de répondre, Zoé prend la parole :

« Est-ce qu’on pourra ramasser des châtaignes ?

— Bien sûr, tu pourras ramasser toutes les châtaignes que tu trouves, renchérit Charlène. »

À ces mots, Zoé se tourne vers moi :

« Tu voudras bien m’aider à ramasser des châtaignes ? Et je te les ouvrirai si tu veux ? »

Je me sens piégé. Certes, je n’ai pas très envie de partir en forêt, mais j’ai là possiblement mes seuls compagnons pour 1 semaine, alors ce n’est pas m’aider que de leur tourner le dos à leur première demande.

« OK, on va ramasser des châtaignes. »

Il n’en faut pas plus pour Zoé, elle prend mon sac, le jette avec le sien dans la tente, ferme cette dernière et nous dit d’une voix grave :

« La forêt, c’est par là ! »

Avant de marcher d’un pas militaire

Dans la direction indiquée. Charlène la reprend :

« Faut qu’on prévienne les mono avant ! »

Zoé fait demi-tour et annonce toujours avec sa voix grave :

« Les mono, c’est par là-bas. »

Je trouve la situation très amusante et me rassure en me disant qu’au moins, si c’est elle qui nous guide, nous ne risquons pas de nous perdre.

Après avoir prévenu un moniteur que nous partons en forêt, nous pénétrons l’endroit à la recherche de trés… de châtaignes et d’oiseaux.

« C’est trop bien, avec tout ce qu’on a je vais même pouvoir faire de la crème de marrons !

— Ce sont des châtaignes Zoé, rétorqua Charlène.

— On s’en fiche, c’est la même chose, ça a le même goût.

— Ouais mais en attendant, ça m’étonnerait que tu trouves des marrons ici.

— Oui mais on s’en fiche ça-a-le-même…

— CHUT, BOUGEZ PLUS, OISEAU !

*CLAC*

— T’es soûlante Charlène, on peut pas discuter tranquille sans que tu nous coupes pour prendre une photo d’oiseau, dis-je en m’incrustant dans la discussion.

— Je te rappelle que de base, c’était mon idée de partir en forêt, et c’était justement pour pratiquer l’ornithologie, donc si vous êtes pas contentes, vous avez qu’à rentrer au camp et jouer à la dînette. »

Sur le coup, je me sens bête. C’est vrai qu’on est venu pour l’accompagner et je me permets de me plaindre alors que je connais Charlène depuis un peu plus d’1 heure. Il va falloir que je fasse attention à mes relations sociales, mais Zoé me prend de cours :

« Pas question de te laisser toute seule, les moniteurs ont dit que fallait toujours être avec des gens quand on est dans la forêt !

— T’as bien raison ma petite Zoé ! »

Cette intervention redonne le sourire à mes 2 compas…

« CHUT, BOUGEZ PLUS, OISEAU !

*CLAC*

— Charlène ! Tu pourrais au moins faire un effort sur ta manière de nous l’annoncer, je rate un battement à chaque fois.

— Moi je trouve ça rigolo ! répond Zoé.

— Merci, ma petite Zoé ! Mais bon, si Lucie nous fait un malaise en pleine forêt, j’suis pas sûr de trouver de quoi appeler les secours assez vite, et j’ai pas envie de devoir lui faire du bouche-à-bouche. Très chère Lucie, auriez-vous l’amabilité de me prêter le silence le temps que j’immortalise ce magnifique oisillon ?

— Ça va Charlène, pas besoin de me prendre pour une bourge n...

*CLAC*

— Pardon, tu disais ?

— Non, rien. »

Si je passe ma semaine à me faire couper la parole par un appareil photo, je sens que mes vacances ne vont pas être très reposantes.

« OH NON ! »

Je sursaute, mais cette fois-ci, c’est Zoé qui en est la cause. Elle court vers un arbre au bord du sentier, les yeux fixés sur ses racines.

« Regardez, le pauvre oiseau s’est blessé !

— Fais-nous voir ça. »

Charlène prend les choses en main pour essayer de calmer la tristesse de Zoé.

« C’est bizarre, on dirait une griffure, comme si l’oiseau avait été attaqué par un loup.

— Oh non, le pauvre.

— Le pauvre peut-être, mais on ne peut rien pour lui, on n’a pas de quoi soigner un oiseau au camp. En revanche, ce qui me pose problème, c’est que ça m’étonnerait que cet oiseau ait pu se balader très longtemps avec une aile aussi amochée, ce qui veut dire que les loups sont dans cette forêt, et donc qu’on n’est pas en sécurité. »

Je suis impressionné par le leadership de Charlène, moi qui la pensais seulement forte pour se faire entendre, elle se révèle aussi être très perspicace.

« Zoé, tu te souviens de la route à prendre pour retourner au camp ?

— Oui.

— Parfait, alors on te suit. Pas besoin de paniquer donc prend ton temps si tu as un doute. Moi je fais attention à ce que personne ne se sépare de toi et Lucie, tu regardes les alentours pour vérifier qu’il n’y a pas de danger immédiat, OK ?

— OK ! Acquiesçons Zoé et Moi, motivés par le discours de Charlène. »

Après 20 minutes de marche dans un silence hallucinant, nous retrouvons le camp et Charlène reprend la parole :

« Maintenant, première chose à faire, aller prévenir les monos de ce qu’on a vu.

— D’accord ! dit Zoé, toujours à fond pour suivre les instructions de Charlène. »

Elle continue vers le camp des moniteurs, et le premier que nous trouvons est celui qui nous a accueillis. Charlène prend alors la parole :

« Bonjour, monsieur.

— Coucou, mais pas de “monsieur”, appelle-moi Guillaume, reprend le moniteur.

— D’accord Guillaume, c’est juste pour vous dire qu’on est allées dans la forêt et…

— Vous avez pensé à prévenir quelqu’un quand même j’espère ?

— Oui, oui, c’est pas le souci, c’est qu’on a trouvé des traces de griffures, vous êtes sûr qu’il n’y a pas de loups dans cette forêt ?

— Des loups ?! »

Il se met à sourire et à ricaner, comme si on venait de lui demander si le père Noël habite ici.

« Oulah, oui je suis sûr qu’il n’y a pas de loups dans cette forêt, ça fait maintenant 10 ans que je suis moniteur à l’année dans cet endroit et j’ai jamais vu de loups dans cette forêt.

— Oui, mais les traces de griffures qu’on a vues…

— Eh bien elles ont dû être faites par un chien, vous savez, la ville voisine est pas si loin, et c’est pas rare que les gens viennent se promener dans cette forêt avec leur chien.

— Oui, mais c’est un oiseau qui a été griffé…

— Ça explique tout, ça devait être de vieilles blessures qu’il a reçu en se cognant contre des branches, rien de grave. Et ne vous inquiétez pas, si des loups étaient dans cette forêt, je serais le premier au courant. D’ailleurs, vous ferez attention, il est bientôt 19 h, on va pas tarder à se rassembler, essayez de pas être en retard, c’est toujours important le premier jour de colo. »

Il part d’un pas décidé vers le point de rassemblement pour commencer les préparatifs. De notre côté, un peu déboussolées par ce qu’il vient de se passer, nous partons vers notre tente pour finir de ranger nos affaires à moi et à Zoé avant de partir vers le point de rassemblement à notre tour aux abords de 19 h.

Nuit I

Une fois, nos affaires rangées et le point de rassemblement rejoint, je remarque plusieurs têtes que j’ai croisées auparavant, comme Thomas ou encore le groupe des filles contre lesquelles Charlène s’est disputée pour avoir la tente. Un instant, une idée me traverse l’esprit, où est Maxime ? Et je n’ai même pas eu le temps de me demander si je m’inquiète pour lui ou si j’ai peur de le voir débouler devant moi et me prendre le bras que j’entends sa voix juste derrière moi :

« Alors Lucie, tu as trouvé des personnes pour dormir avec toi ? »

Je me retourne lentement, comme si un tueur venait de m’annoncer qu’un seul geste brusque signerait la fin de ma vie.

« Je t’ai quand même cherché toute la journée, t’étais passé où ?

— Ah, Maxime, bah j’étais partie avec Zoé et Charlène en forêt.

— Et tu ne m’as même pas proposé de venir avec vous ? C’est dommage, je suis super fort en orientation, j’aurais pu vous montrer les meilleurs coins de la forêt ! »

Pendant qu’il parle, j’essaye de faire des signes de tête aux filles pour qu’elles comprennent que j’ai besoin qu’elles volent à mon secours, mais rien y fait. Au contraire même, je les vois commencer à sourire en voyant ma situation : prise en otage par la parole d’un enfant trop bavard.

« … On pourrait essayer les jets tous les deux demain, ça te dirait ?

— Écoute Maxime…

— Tu peux m’appeler Max. »

Je ne suis pas sûr d’avoir bien compris ce qu’il essaye de faire en se donnant ce surnom.

« Écoute Maxime, là je suis avec Charlène et Zoé et j’aime bien passer du temps avec elles, donc je pense que je vais rester avec elles et on pourra se voir pendant les repas ou pendant les temps d’activités de groupe si tu veux.

— En tête-à-tête ?

— Non.

— Oh. »

Il part vers le reste des ados de la colo, visiblement très déçu de ne pas pouvoir me privatiser sur commande. Quant à moi, je rejoins mes colocataires en attendant la prise de parole des moniteurs.

« Bah dis donc, tu l’as bien remballé le petit là. Vu comment il est parti, t’as dû lui briser tous ses espoirs !

— QUOI ?! Quels espoirs ? Il voulait me retenir contre mon gré pendant 1 semaine, m’empêchant de sociabiliser avec d’autres êtres vivants. »

Non pas que l’idée de ne pas avoir à parler à tout le monde me déplaise.

Sur mes dernières paroles, je n’ai pour réponse de Charlène qu’un mince rire, comme pour me signifier que la situation, que je prends pourtant bien au sérieux, n’était en fait que bien absurde. C’est Zoé, qui reprend en nous disant :

« Moi je le trouve chou pour un petit garçon.

— Oui mais c’est pas pareil, il est plus dans tes âges Zoé ! lui répondit Charlène.

— Bah non. Pourquoi tu dis ça ?

— Attends Charlène, mais en fait, t’as quel âge Zoé ? demandé-je en reprenant la parole.

— Bah j’ai 17 ans. »