Maïté Coiffure - Marie-Aude Murail - E-Book

Maïté Coiffure E-Book

Marie-Aude Murail

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Beschreibung

"Tout le monde lui fit des compliments. De toute sa scolarité, Louis n'en avait jamais autant récolté." Ein Wunder für Louis: In der Schule ein Versager, daheim vom ehrgeizigen Chirurgen-Vater deswegen ständig unter Druck gesetzt, entdeckt Louis während eines Schulpraktikums in einem Friseursalon seine Begabung. Französische Lektüre mit Annotationen für das 5. und 6. Lernjahr

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Maïté Coiffure

Marie-Aude Murail

Maïté Coiffure

Vocabulaire parLaure Soccard

1. Auflage 0002/2015

Das Werk und seine Teile sind urheberrechtlich geschützt. Jede Nutzung in anderen als den gesetzlich zugelassenen Fällen bedarf der vorherigen schriftlichen Einwilligung des Verlags. Hinweis zu § 52 a UrhG: Weder das Werk noch seine Teile dürfen ohne eine solche Einwilligung in das Internet oder ein Netzwerk eingestellt werden. Dies gilt auch für Intranets von Schulen und sonstigen Bildungseinrichtungen. Ein weiterer kommerzieller Gebrauch oder die Weiterleitung an Dritte sind nicht gestattet.

© für die Originalausgabe: Maïté Coiffure, Text by Marie-Aude Murail, 2004 l’école des loisirs, Paris

© für diese Ausgabe: Ernst Klett Sprachen GmbH, Rotebühlstraße 77, 70178 Stuttgart, 2014.

Alle Rechte vorbehalten.

Internetadresse: www.klett-sprachen.de

Redaktion: Sylvie Cloeren

Layoutkonzeption: Elmar Feuerbach

Gestaltung und Satz: Satzkasten, Stuttgart

Umschlaggestaltung: Elmar Feuerbach

Titelbild: Alamy Images / Martin Phelps

ISBN 978-3-12-909056-5

Table des matières

Vocabulaire thématique autour du monde de la coiffure

Liste des abréviations

Maïté Coiffure (texte intégral)

1Le stage

2Mardi 21

3Mercredi 22

4Jeudi 23

5Vendredi 24

6Le défilé de mode

7Samedi 25

8Toussaint

9Férié

10Reprise

11En grève

12Plein emploi

13Galère

14Le droit chemin

15L’engagement

16Apprentissages

17L’explication

18La vie sans Louis

19La présence

20Le principe de réalité

21Le mot de la fin

Le passé simple

Le gérondif

Biographie

Bibliographie (extrait)

Le monde de la coiffure

Dans la liste suivante, vous trouvez tous les mots et toutes les expressions du texte qui ont à voir avec le monde de la coiffure.

D’un côté, il y a des mots qui sont très utiles dans la vie de tous les jours, d’un autre côté il y a des termes techniques (Fachwortschatz) que vous ne devez pas apprendre pour parler du roman.

les objets dans le salon de coiffure

die (Einrichtungs-) Gegenstände im Friseurladen

un miroir

Spiegel

une glace

(Hand-)Spiegel

un bac

Waschbecken

un casque à cheveux

Trockenhaube

un registre des rendez-vous

Terminkalender

un présentoir (L’Oréal)

Verkaufsständer (für L’Oréal-Produkte)

les produits

die Produkte

un (flacon de) shampooing

un shampooing cheveux gras

un shampooing anti-poux

un shampooing traitant

(Flasche) Shampoo

Shampoo für fettige Haare

Shampoo gegen Kopfläuse

Pflegeshampoo

une bombe de laque

Dose Haarspray

un colorant (d’oxydation)

Färbemittel (Bleichfärbemittel)

un oxydant

Oxydationsmittel, Bleichmittel

une poudre décolorante

Entfärbungspulver

un tube de gel coiffant

- pour créer un effet-mouillé

Tube Frisiergel

- um einen Wet-look zu stylen

les outils de coiffure

die Frisierwerkzeuge

les ciseaux mpl, une paire de ciseaux*

les ciseaux sculpteur dentés

Schere

Effilierschere (zum Ausdünnen von Strähnen)

une brosse

Bürste

un peigne

un peigne démêloir

un peigne de coupe

Kamm

Kardätsche

Haarschneidekamm

un rasoir

Rasiermesser, Rasierer, elektrischer Haarschneider

un rouleau, un bigoudi

Lockenwickler

une pince à cheveux

Haarklammer

une touillette

Farbmischschale

un pinceau

Pinsel

une papillote d’aluminium

Alu-Streifen (zum Färben von Strähnen benutzt)

une trousse de manucure

Maniküreetui

le vernis

Nagellack

les activités dans le salon de coiffure

die Tätigkeiten im Frisiersalon

mouiller les cheveux

die Haare anfeuchten

laver les cheveux shampouiner

die Haare waschen

rincer

ausspülen

sécher

le séchage

trocknen

das Trocknen

couper

schneiden

une coupe

une coupe en brosse

une coupe courte

rafraîchir la coupe

Haarschnitt

Bürstenhaarschnitt

Kurzhaarschnitt

nachschneiden

bien court sur les côtés

an den Seiten recht kurz

plein d’échelles

voller (ungewollter) Stufen

faire un carré dégradé

einen gestuften Bob schneiden

un piquetage

abstufender Schnitt

coiffer

frisieren

(se) peigner

donner un coup de peigne

(sich) kämmen

kämmen, frisieren

démêler les cheveux mpl

die Haare ausbürsten

rebiquer les pointesfpl

die Spitzen stylen, formen

une teinture

Färben

touiller

die Farbe vorbereiten, mischen

faire des mèchesfpl

Strähnen einfärben

faire un balayage mèches-foncées, mèches claires

helle und dunkle Strähnchen einfärben (bürsten)

faire un balayage sur les mèches de recouvrement

Strähnen in die die Deckhaare einfärben

faire des mèches rouges sur la base foncée

rote Strähnchen auf dem dunklem Grundton (des Haares) einfärben

les cheveux prennent

die Haare nehmen die Farbe an

être éclairci

blondiert sein

faire une mise en plis

die Haare einlegen (Wasserwelle)

la coiffure

die Frisur

les cheveux mpl

les cheveux déliés

Haare

offene Haare

les cheveux ramassés en chignon

die Haare zu einem Knoten zusammengefasst, aufgesteckt

châtain clair

hellbraun

les tressesfpl

tresser

le tressage

les tresses afro

Zöpfe

flechten

das Flechten

Afro-Zöpfchen

une frange

Pony

déstructurée

fransig

effilée

ausgedünnt

une chevelure

Haar

une frisette

kleine Löckchen

une boucle

Locke

une crinière de bouclettes fauves

wilde Lockenmähne

le look surfeur

Surfer-Look

un effet ébouriffé

strubbeliges Aussehen

les pointes effilées

ausgedünnte Spitzen

une permanente

une permanente souple

une permanente froide alcaline

Dauerwelle

leichte, sanfte Dauerwelle

eine alkalische Kaltwelle

une perruque

Perücke

Expressions générales

 

C’est pour un rendez-vous ?

Sie möchten einen Termin ausmachen?

Une coupe simple.

Nur Schneiden.

Une coupe-brushing.

Schneiden, Waschen und Föhnen

Voulez-vous passer au bac ?

Kommen Sie bitte mit zum Waschbecken.

Liste des abréviations

antonyme de

mot de la même famille

°

après l’article, pas de liaison

[‘]

pas de liaison

arg

argot

cond

conditionnel

etw

etwas

f

féminin

fam

familier

fig

figuré

fpl

féminin pluriel

inv

invariable

iron

ironique

jdm

jemandem

jdn

jemanden

litt

littéraire

m

masculin

mpl

masculin pluriel

péj

péjoratif

pop

populaire

qc

quelque chose

qn

quelqu’un

subj

subjonctif

verlan

argot, langage qui inverse les syllabes

vulg

vulgaire

C’est une banale song,mais pour moi super-song.

Alain Souchon

1

Le stage

– Un stage ! s’exclama monsieur Feyrières. Mais qu’est-ce que c’est encore que ces inventions ? Les gamins ne savent pas aligner trois phrases de français et il faut qu’ils fassent des stages. Un stage de quoi, d’abord ?

Il s’adressait à son fils à l’autre bout de la table.

– Mais j’en sais rien, grommela Louis. C’est à nous de trouver, qu’elle a dit, la prof.

– « Qu’elle a dit, la prof », le singea son père. Un stage de balayeur, voilà ce que tu trouveras. Non, pas balayeur, il faut dire « technicien de surface », maintenant.

Monsieur Feyrières ricana. Lui, il était chirurgien. Bel homme, la voix forte, il meublait à lui seul toute la salle à manger. Pourtant, il y avait quatre autres personnes à table : Floriane, sept ans, Louis, quatorze ans, madame Feyrières et Bonne-Maman.

– Si c’est qu’une affaire d’une semaine, dit cette dernière, je pourrais peut-être lui dégoter quelque chose.

Monsieur Feyrières adressa à sa belle-mère une grimace qui se voulait un sourire d’encouragement.

– J’ai ma coiffeuse qui prend des apprenties, poursuivit Bonne-Maman. Un stagiaire, c’est pas très différent.

Monsieur Feyrières écarquilla les yeux.

– Un stage de coiffure ? Pour Louis ?

– Ouah, trop de chance, murmura Floriane. Moi, je veux faire coiffeuse quand je serai grande.

Madame Feyrières eut un regard indulgent pour sa petite dernière, qui passait ses mercredis à faire des coiffures à sa Barbie Raiponce. Puis elle se tourna vers sa mère.

– Tu sais, maman, je ne vois pas trop ce que Louis ferait dans un salon de coiffure.

– Y a pas de sot métier, répliqua Bonne-Maman qui avait commencé dans la boulange à seize ans.

– Ça serait superbe, ricana monsieur Feyrières en faisant semblant d’admirer une enseigne sur le mur opposé : « LOUIS, coiffeur pour dames ».

Mais comme personne n’avait d’autre idée de stage, Bonne-Maman promit d’en parler à Maïté, la patronne du salon.

– Ça ne t’ennuie pas ? s’inquiéta madame Feyrières.

– M’est égal, grogna Louis.

Une fois dans la chambre à coucher, madame Feyrières redoutaun accès d’humeur de son mari. Il allait sûrement se plaindre des idées loufoques de Bonne-Maman.

– Dans le fond, dit-il en desserrant sa cravate, ce n’est pas une mauvaise chose, ce stage. Louis va apprendre ce qu’est le travail, balayer, ranger, rester des heures debout. Je ne te reproche rien, Véra, mais tu l’élèves dans un cocon, ce gosse. Il est temps qu’il découvre le principe de réalité !

Monsieur Feyrières parlait fort, avec de grands gestes, comme s’il était entouré de ses étudiants.

– Le travail manuel a ses vertus, approuva sa femme d’une petite voix.

Monsieur Feyrières lui jeta un regard de pitié:

– Oui, la vertu de vous faire comprendre que vous avez intérêt à poursuivre vos études.

Dans sa chambre, Louis pensait précisément à ses études. Il ramait en maths, ne comprenait pas ce que lui voulait la prof de français, s’endormait en allemand. De temps en temps, il avait un sursaut, un peu par amour-propre, un peu parce qu’il avait peur de son père. Il triait les devoirs et les photocopies qui tapissaient le fond de son sac à dos. Puis il s’enfonçait de nouveau dans un marécage de rêves et d’idées confuses.

Le jour peinait à se lever lorsque Louis partit pour le collège, le lendemain. Il eut envie de faire un crochet par le quartier piétonnier. Maïté Coiffure se trouvait rue de la Cerche, en face d’une briocherie. En passant devant la vitrine, Louis ralentit le pas. 9h-20h, c’était l’horaire affiché à l’entrée, mais un néon blêmeclignotait déjà à l’intérieur. Une femme en pantoufles passait une serpillière sur le carrelage. Elle se redressa, une main sur les reins, et regarda vers la rue. Louis vit qu’elle l’avait vu. Il rougit et détala. Cette femme accablée par la fatigue le poursuivit toute la matinée. Était-ce elle, Maïté Coiffure ?

– J’ai trouvé un stage à Radio Vibrations, se vanta Ludovic à la cantine. Le présentateur est super-cool, tu peux voir les vedettes et tout. La semaine dernière, ils ont reçu les L5 dans leur studio.

Ludovic Janson avait un père anesthésiste, qui travaillait souvent avec monsieur Feyrières. Celui-ci avait donc décidé que Louis et Ludovic étaient amis et que Floriane et Mélissa, les deux petites sœurs, s’adoraient. Par une heureuse coïncidence, Ludovic et Louis (deux prénoms si proches !) étaient réunis dans la même troisième, cette année.

– T’as trouvé quoi comme stage, toi ?

Louis regarda son camarade en faisant craquer ses doigts. Il ne comprenait toujours pas pourquoi Ludovic s’asseyait à côté de lui en classe, en face de lui à la cantine. Par moments, il avait envie de lui dire : « Au fait, tu sais quoi ? J’en ai rien à foutre de toi. »

– Rien à foutre, grogna Louis.

Et il tira de ses phalanges un craquement sonore.

– Oui, mais qu’est-ce que tu vas dire à la prof de français ?

Ludovic était un bon élève un peu stressé.

– Je vais faire un stage dans un salon de coiffure, dit Louis pour voir l’effet produit.

– Tu te fous de moi ?

Louis pensa « oui » et répondit :

– Non.

– T’as pas peur ? Les coiffeurs, c’est tous des Michoubidou…

Ludovic fit une mimique efféminée tout en tourniquant le poignet.

– Très ressemblant, le complimenta Louis. Mais c’est des coiffeuses chez Maïté Coiffure.

Il revit en pensée la femme qui passait la serpillière.

– Il y en a une, une blonde, quand elle se penche pour les shampooings, tu vois tout.

Ludovic en eut le sifflet coupé pour le restant de la journée. Quand Louis sortit du bahut, à dix-huit heures, le jour se recouchait déjà dans un bon petit édredon de brumes. De loin en loin, trouantla pénombre, les vitrines des magasins brillaient d’une façon surnaturelle. Louis se sentit attiré de nouveau par Maïté Coiffure. Il eut un temps d’arrêt sur le trottoir. Ce n’était plus le même endroit. Le salon baignait dans une lumière dorée que diffusaient des vasques en forme de coquillage. À la caisse, au milieu des flacons de shampooing, d’après-shampooing, d’avant-shampooing, trônait l’authentique madame Maïté, une dame un peu forte, maquillée comme une voiture volée. Elle parlait à une cliente en lui posant une main grassouillette sur le poignet. Elles semblaient amies depuis des années. La cliente s’éloigna, suivie du tendre sourire de la patronne, qui se tourna ensuite vers une autre dame en train de sortir son chéquier. Louis comprit que madame Maïté allait l’aimer autant que la précédente, et il plongea le regard dansles entrailles du salon.

Il y avait trois femmes en batterie sous des casques à cheveux, feuilletant la presse people pour savoir si Michaël Jackson a vraiment voulu jeter son bébé par la fenêtre, combien a coûté la villa de George Clooney (sept millions d’euros) et le nom de la maladie mystérieuse qui a frappé le Prince Rainier (une bronchite, on est bien rassurée).

Un petit jeune homme en chemise blanche, le col très ouvert, virevoltait autour d’une vieille dame, un coup de peigne là, un psschit de laque ici, la glace, la glace, s’il vous plaît ! Il appelait une gamine en blouse blanche qui accourut avec un miroir tout rond pour que la cliente puisse admirer son chignon sous tous les angles.

Le salon de coiffure avait une mezzanine. Tandis qu’il se tordait le cou pour voir l’étage supérieur, Louis crut que la blonde inventée pour l’usage exclusif de Ludovic venait de s’incarner. Elle descendait l’escalier, juchée sur des talons aiguilles comme on n’en voit qu’assez tard sur les chaînes cryptées. Un tee-shirt blanc barré d’un Maïté Coiffure lui moulait le buste, et ses seins magnifiques lui ouvraient la route comme la figure de proue d’un bateau. Louis eut envie d’y enfouir la tête et il avança le front. Bing ! Il se prit la vitrine. Dur, le principe de réalité.

À la maison, il retrouva sa petite sœur au salon. Elle jouait aux Barbie tout en regardant Charmed à la télévision. Louis s’assit sur la moquette et se mit à triturer Raiponce. Il s’aperçut que les longs cheveux blonds faisaient des nœuds et entreprit de les démêler avec la brosse qui traînait toujours sur le canapé.

– Tu es rentré, Louis ? fit soudain la voix de sa mère.

Le garçon rejeta la poupée. Madame Feyrières entra dans le salon, toute souriante.

– J’ai une bonne nouvelle pour ton stage. J’ai parlé avec Nadine.

Nadine Janson, la mère de Ludovic et Mélissa. Louis fronça les sourcils, inquiet.

– Elle connaît quelqu’un qui travaille à Radio Vibrations et qui accepte les stagiaires.

– Et alors ? fit Louis, incapable d’en articulerdavantage.

– Mais ça va être… « cool », non ? balbutia sa mère. Ludovic y sera aussi.

La colère alluma une brèveflambée dans les yeux de Louis.

– Je ne veux pas.

– Tu ne veux pas ? répéta madame Feyrières sans paraître comprendre.

– C’est un abruti.

Madame Feyrières joignit les mains de saisissement.

– Ludovic ? Mais c’est un bon élève !

– Et alors ?

Floriane, qui suivait la conversation avec un grand intérêt, crut judicieux de venir en renfort.

– Moi, c’est pareil. Je trouve que Mélissa, elle est abrutie.

– Mélissa ?

Madame Feyrières suffoquait.

– Mais c’est une charmante petite fille.

– Oui, elle est charmante, concéda Floriane, mais elle est abrutie.

Louis se mit à rire. Puis il vit que sa mère était toute désemparée. Elle avait voulu bien faire.

– T’inquiète, lui dit-il. Je vais faire le truc de Bonne-Maman.

– Quel truc ?

– Mais son machin de coiffure, bougonna Louis.

Il sentit qu’il devenait très rouge et il tourna le dos à sa mère en faisant craquer ses doigts.

Bonne-Maman prit rendez-vous avec Maïté, un jeudi.

– C’est son jour de creux, expliqua-t-elle à son petit-fils.

– Mais elle t’a dit qu’elle était d’accord ?

– D’abord, elle veut te voir. Tu aurais pu cirer tes chaussures.

Louis songea qu’il avait gardé son sweat taché de Nutella. La nervosité de sa grand-mère commençait à le gagner d’autant que Bonne-Maman avait fini par lui avouer qu’elle était nouvelle cliente dans ce salon.

Ce jeudi matin, l’heure était au recueillement chez Maïté Coiffure. L’apprentie reliait les points d’un dessin dans un Mickey magazine oublié par un petit client. La belle blonde, retenant son souffle, passait sa deuxième couche de vernis blanc nacré. Madame Maïté affrontait les mystères de la TVA dans son livre de comptes, les lunettes glissées au bout de son nez, tandis que le petit coiffeur finissait la coupe en brosse d’un vieux monsieur que tout le monde appelait « le colonel ». Madame Maïté gratifia Bonne-Maman d’un sourire qui en disait long sur l’amitié qu’elle lui portait.

– C’est mon petit-fils, dit Bonne-Maman en désignant Louis. Vous savez, pour le stage…

– Ah ? Oui.

Le sourire se rétrécit. La patronne dévisagea Louis, dont les joues se mirent à flamber.

– Il a les papiers du collège à faire signer ? demanda -t-elle.

– Oui, madame, répondit Louis en allant chercher sa voix dans les timbres les plus graves.

– Il a une chemise blanche ?

Un peu troublé par cet interrogatoire à la troisième personne, Louis répéta « oui, madame ».

– Faut pas hésiter à le faire travailler, intervint Bonne-Maman.

Le petit coiffeur s’approcha alors du comptoir et glissa à l’oreille de la patronne :

– Shampooing-coupe pour le colonel.

– Merci, Fifi. Il avait un vestiaire ? questionna Maïté.

– Garance s’en occupe, répondit Fifi.

Les yeux de Louis étaient allés de l’un à l’autre pendant l’échange. Fifi, Garance, le colonel, on tournait un film ?

– Quand veut-il commencer ? demanda la patronne en s’intéressant de nouveau à Louis.

– Le stage, c’est du lundi 20 au vendredi 24.

– Bien. Alors, une chemise blanche, les cheveux propres. On ouvre à neuf heures. Mais, le lundi, c’est fermé. On décalera du mardi au samedi.

Sur le chemin du retour, Bonne-Maman résuma ses impressions :

– Son homme doit pas rigoler tous les jours.

Louis se demanda s’il n’allait pas regretter Radio Vibrations.

un gaminfam un enfant

aligner aneinander reihen

un bout Ende

grommeler ne pas parler clairement

singer qn refaire qn en se moquant de lui

un balayeur qn qui nettoie les rues

un technicien de surface un balayeur

ricaner rire pour se moquer

Bonne-Maman la grand-mère

dégoter trouver

un encouragement → le courage

un apprenti → apprendre

poursuivreici : continuer à parler

un stagiaire → un stage

écarquiller les yeuxici : ouvrir tout grand les yeux avec surprise

indulgent ≠ sévère

Raiponce Rapunzel

sot idiot

répliquer qc répondre qc

la boulange la boulangerie

faire semblant jouer la comédie

une enseigne une pancarte

ennuyer qn ≠ plaire à qn

grogner grommeler

redouter avoir peur de

un accès d’humeur schlecht gelaunt sein

loufoquefam fou

dans le fond après tout

desserrerici : défaire

balayer → un balayeur

debout ≠ assis, allongé

élever qn dans un cocon surprotéger qn

un gossefam un enfant

être entouré être au centre

une vertu un bon côté

la pitié Mitleid

poursuivre continuer

ramerfam avoir beaucoup de difficultés

un sursautici : un moment de nouvelle énergie

l’amour-proprem le respect de soi-même

trier sortieren

tapisser se trouver

s’enfoncer entrer profondément

un marécage Sumpf

peiner avoir des difficultés

lorsque quand

faire un crochet passer

une briocherie une boulangerie

une vitrine la fenêtre d’un magasin

ralentir aller moins vite

blême presque blanc

clignoter s’allumer et s’éteindre

une serpillière Wischlappen

le carrelage Fliesen

se redresser se relever

les reinsmpl le bas du dos

détaler partir vite

accablé par la fatigue être très fatigué

poursuivre ne pas laisser tranquille

se vanter prahlen

une vedette une star

les L5 un groupe français de chanteuses

une coïncidence Zufall

être réuni être ensemble

faire craquer ses doigts mit den Fingergelenken knacken

au fait à propos

n’avoir rien à foutre de qnarg jemand ist einem scheißegal

une phalange Fingerglied

sonore qui fait du bruit

se foutre de qnarg se moquer de qn

un Michoubidouici : un homosexuel

efféminé ≠ masculin

tourniquer tourner

un poignet Handgelenk

se pencher sich beugen

avoir le sifflet coupéfam ne plus savoir quoi dire

un bahutfam un collège ou un lycée

un édredon Daunendecke

la brume Nebel

trouer faire un trou

la pénombre → l’ombre f ≠ la lumière

briller faire de la lumière

attiré angezogen

un endroit un lieu

baigner être plongé

doré de la couleur de l’or

diffuser envoyer

une vasque Wasserbecken

grassouillet ≠ mince

tendre gentil, doux

un chéquier → un chèque

autant que genauso viel wie

précédent ≠ suivant

plonger le regard dans qc regarder qc intensément

les entraillesfpl l’intérieur m

en batterie ensemble

être rassuré être tranquillisé, calmé

un col Kragen

virevolter tourner rapidement

une blouse Kittel

une mezzanine Zwischengeschoss

tandis que pendant que

se tordre le cou sich den Hals verrenken

s’incarner apparaître

juché sur posé sur

un talon aiguille Bleistiftabsatz

crypté verschlüsselt

mouler qc prendre la forme de qc

un buste le haut du corps

les seinsmpl Brust

une figure de proue une statue à l’avant d’un bateau

enfouir mettre

le front le haut du visage

Charmed une série américaine

une moquette un tapis

triturer qc jouer nerveusement avec qc

un nœud Knoten

entreprendre de commencer à

traîner se trouver là sans raison

soudain tout à coup

froncer les sourcilsmpl die Stirn runzeln

articulerici : dire

davantage plus

balbutier parler de manière confuse et hésitante

bref court

une flambée l’explosion violente d’un sentiment

un abruti un idiot

joindre faire toucher

un saisissement un trouble

judicieux intelligent

venir en renfort venir en aide

pareil la même chose

suffoquer avoir des difficultés à respirer

concéder être d’accord

désemparé qui ne sait plus quoi dire

t’inquiètefam ne t’inquiète pas

un machin un truc, une chose

bougonner grommeler

un jour de creux un jour où il n’y a pas beaucoup de clients

cirer nettoyer

songer penser

taché befleckt

d’autant que um so mehr als

le recueillementici : le silence

relier un point à l’autre faire la liaison entre deux points

retenir son souffle s’arrêter de respirer

une couche Schicht

nacré perlmuttfarben

affronterici : s’occuper de

la TVA MwSt

un livre de compte Buch zur Kontoführung

glissé tombé

gratifier qn d’un sourire sourire aimablement à qn

désigner montrer du doigt

rétrécir diminuer

dévisager qn regarder qn avec curiosité

flamber brûler, rougir

un timbrepour la voix Klang

grave tief

°hésiter ne pas pouvoir se décider, ne pas savoir quoi faire

intervenir dire

un comptoir Tresen

glisserici : dire

un vestiaireici : un vêtement

propre ≠ sale

décalerici : changer

2

Mardi 21

Le vendredi, puis le samedi, Louis passa devant Maïté Coiffure. À chaque fois, il cherchait Fifi des yeux et le détaillait. Le pantalon noir très ajusté, les chaussures de cuir avec une talonnette (Fifi voulait se grandir), la chemise un peu bouffante, la gourmette au poignet. Louis se regardait un peu plus loin dans une vitrine. La parka, le jean, les baskets. Ça n’allait pas. Une colère l’envahissait, une colère sans phrases.

Ce lundi matin, il n’avait pas cours avant dix heures. L’appartement était vide. Louis en profita pour fouiller dans la penderie de son père. Monsieur Feyrières n’était pas très grand et son fils avait bien poussé ces derniers temps. Louis essaya une chemise blanche et dut constater qu’il n’avait pas encore la carrure de son père. Mais en laissant du flou ? Il ouvrit le col, un bouton, deux, puis mit les mains dans ses poches-revolvers.

– Genre, dit-il à son reflet.

Il renonça au pantalon à pinces et choisit dans ses propres affaires un jean bien repassé. Il s’examina une seconde fois dans le miroir.

– Ça le fait.

Restait le délicat problème des chaussures. Pas d’autre solution que de craquer les cent euros de Bonne-Maman. Qui aurait imaginé, quinze jours plus tôt, que Louis emploierait l’argent de son anniversaire à acheter des chaussures de vieux ? C’est pourtant ce qu’il fit. Dans la salle de bains, il put enfin s’admirer de la tête aux pieds.

– T’es amoureux ? fit une petite voix dans son dos.

Floriane le dévorait des yeux. Louis porta un doigt à ses lèvres. Son cœur était secret-défense. Même lui n’y avait pas accès.

Le mardi, il était en avance. Dans la lumière mal réveillée du néon, la femme de ménage nettoyait mollement les miroirs. Louis resta quelques instants à battre la semelle sous la bruine en rentrant les épaules. Puis il s’aperçut que le cuir de ses chaussures se ternissait. Il ressentit de nouveau cette muette colère contre lui et courut se réfugier sous l’auvent de la briocherie. Sans le vouloir, il bouscula une personne qui s’y trouvait déjà.

– Ah… mais, protesta une jeune femme qui grelottait dans un imperméable.

– S’cusez.

Il lui jeta un regard de côté. C’était la belle blonde, mais méconnaissable. Les cheveux hâtivement ramassés en chignon, le visage sans fard et les yeux rougis, elle reniflait en se serrant elle-même entre ses bras. Louis fut à la fois peiné et déçu. C’était comme une statue de déesse que des brutaux auraient jetée à terre.

– Ah ! s’exclama la jeune femme quand le salon de coiffure s’illumina.

Elle partit en trottinant sur ses trop hauts talons. Louis la suivit peu après. Il eut un petit choc en poussant la porte du salon. Madame Maïté était déjà là, impeccablement maquillée. Or, Louis ne l’avait pas vue entrer. Elle semblait s’être brusquementmatérialisée derrière son comptoir.

– C’est pour un rendez-vous ?

Elle avait oublié Louis.

– Non, le… le stage, bredouilla-t-il, cherchant autour de lui l’appui de sa grand-mère.

– Le stage ? Ah, oui, le stage… Mon Dieu, soupira madame Maïté. Bon, ne mouillez pas le carrelage. Allez mettre vos affaires au vestiaire.

– Oui, madame.

Louis éprouva pour la première fois de sa vie la sensation qu’il était responsable de lui. Il suspendit sa parka à un cintre, puis vérifia sa tenue dans un des miroirs.

– Bonjour, tout le monde ! fit une voix gaiement perchée.

– Bonjour, Fifi. Si ça ne vous ennuie pas, il y aurait le petit stagiaire à occuper aujourd’hui.

Louis se fit l’effet d’un boulet. Mais Fifi lui sourit.

– Je vais vous apprendre à faire le café, lui glissa-t-il, le ton confidentiel.

Il fallait en proposer aux clientes pour les aider à passer le temps.

– Ou du thé, si elles préfèrent. Là, c’est les sachets. Vanille ou Earl Grey. Et vous pourrez aussi donner un coup de balai, hein ? Vous verrez avec Garance ?

Il parlait très poliment, avec plein de petits gestes délicats. Louis évitait de le regarder en face. Fifi n’était pas très beau et essayait de masquer sous du fond de teint une acné des plus pénibles à voir. Mais il était d’une gentillesse inaltérable.

– Vous voulez porter une tasse de café à Clara sur la mezzanine ?

– Oui, monsieur.

– Oh, vous pouvez m’appeler Fifi.

– C’est votre nom ? s’étonna Louis en songeant aux trois neveux d’Oncle Donald.

La candeur du garçon fit rire le jeune coiffeur.

– Non, c’est Philippe.

Louis s’en voulut de sa propre stupidité. Il prit la tasse de café et monta à l’étage.

– Bonjour, mademoiselle. Votre café.

– Hon, lui répondit-on.