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Parmi les ustensiles de la rhétorique, l’excuse est loin d’être le plus futile. Coiffée comme une figure de style, elle adopte toutes sortes d’allures et de textures. Élégante ou dépouillée, en béton ou bidon, elle peut être inventive ou irrecevable, bien tournée ou superficielle, sincère ou de pure forme.
Chacun de nous connaît des personnes incapables de s'excuser et d'autres qui le font à tout propos. Chacun de nous côtoie des personnes qui trouveront Mille excuses à leur inconséquence et d’autres qui les chercheront toujours désespérément.
Les excuses peuvent tenir la route ou déraper, désarmer, désarçonner... Improbables ou imparables, elles raffolent des protocoles : ne dit-on pas que l'on « présente » ses excuses ?
Mille excuses décline les facettes de ce délicat exercice indispensable à la vie en société, ce petit rite grâce auquel nous ne lavons plus nécessairement notre linge sale à coup de massue, de fleuret, ni de loi du Talion.
Recueil de 23 saynètes
Texte modulable pour 4 à 16 comédien(ne)s
Distribution minimale : 2 comédiennes et 2 comédiens
Durée : une heure
À PROPOS DE L'AUTEUR
Entre l’écriture et la scène,
David Ruellan ne choisit pas. Comédien, metteur en scène, il joue des heures durant sur le papier au risque de le froisser, sans même songer à s’en excuser.
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Seitenzahl: 44
David Ruellan
Mille excuses
Comédie à répétition
ISBN : 979-10-388-0816-4
Collection : Entr’Actes
ISSN : 2109-8697
Dépôt légal : février 2024
Illustration de couverture : Lorenzo Chiavini
©couverture Ex Æquo
©2024 Tous droits de reproduction, d'adaptation et de traduction intégrale ou partielle réservés pour tous pays.
Toute modification interdite.
Éditions Ex Æquo
À mon père缍
« Mais bouffant le même crayon
Posée devant la même planche
On se raccroche aux mêmes branches
Excusez si je tourne en rond »
Anne Sylvestre
« Excusez-moi
De ne pas être plus habile
De ne pas danser sur un fil
« La vie est courte, mes excuses aussi. »
« Une seule excuse vous manque et tout est dépeuplé. »
« Il faut toujours se demander à qui profite l'excuse. »
« Longtemps je me suis excusé de bonne heure. »
UN
Excusez-moi.
DEUX
Pourquoi ?
UN
Pour le peu de considération que j’ai pour vous.
DEUX
Mais on ne se connaît pas !
UN
Oui, c’est sûr que ça n’aide pas. Mais comme je ne peux pas savoir si j’en aurais davantage si nous nous connaissions, je vous prie tout simplement de m’excuser et d’en rester là. Je ne saurais trop vous inciter à faire preuve de la même prudence et à vous abstenir de toute remarque qui me renseignerait un tant soit peu à votre sujet et risquerait d’aggraver les choses.
DEUX
Bon, bon, j’accepte vos excuses, alors.
UN
Ça me paraît sage, en effet. (
UN
Excusez-moi.
DEUX
Plaît-il ?
UN
Je ne vous avais pas vu.
DEUX
Dites donc, ne soyez pas grossier ! Dites tout de suite que je passe inaperçu !?
UN
Pas du tout, c’est simplement que je ne vous avais pas vu !
DEUX
C’est ça, bien sûr, et moi je suis paranoïaque, alors !! Voulez-vous bien cesser de m’insulter ?
UN
Mais je n’ai pas encore commencé ! Espèce de malade !
DEUX
Ah ! Vous voyez ! Je n’invente pas, vous m’insultez ! Je ne suis pas dingue, quand même !
UN
Pauvre taré !퀍
DEUX
Grossier personnage !
UN
Excusez-moi.
DEUX
(Surpris.)
Pourquoi vous excusez-vous ?
UN
De vous avoir mal regardé.
DEUX
Oh, il n’y a pas de mal, je ne l’ai pas pris pour moi.
UN
Tant mieux. J’ai eu peur que vous vous mépreniez : je n’avais pas du tout l’intention de vous lancer un regard noir, mais comme justement, je broyais du noir, c’est parti tout seul !
DEUX
UN
Excusez-moi.
DEUX
Pardon ?
UN
J’ai dit : excusez-moi.
DEUX
Pourquoi ?
UN
De vous avoir troublé.
DEUX
Mais vous ne m’avez pas troublé !
UN
Ça c’est ce que vous dites, mais j’ai bien senti que je vous troublais, avouez-le !
DEUX
Mais pas du tout, alors là, vous faites totalement fausse route !
UN
DEUX
Vous ne me troublez pas, vous ne me troublerez jamais, vous entendez ?
UN
Ça va, j’ai compris ! Excusez-moi, je ne voulais pas troubler votre quiétude.
DEUX
C’est vous qui êtes sacrément troublé, oui ! Espèce de cinglé !
UN
Excusez-moi, je vous avais pris pour quelqu’un d’autre.
DEUX
Ne vous excusez pas, vous ne vous êtes pas trompée : je suis quelqu’un d’autre.
UN
Vous êtes sûre ?
DEUX
Sûre et certaine : vous aviez raison à deux cent pour cent, je ne suis pas celle que vous n’avez pas cru que j’étais. Je suis quelqu’un d’autre encore…
UN
Ah, d’accord ! Dans ce cas, excusez-moi de m’être trompée en croyant que je me trompais.
(Un heurte Deux.)
UN
Excusez-moi.
DEUX
Faites attention, quand même ! Vous pourriez regarder où vous allez !
UN
J’étais dans mes pensées, je suis désolée !
DEUX
(Se massant l’épaule.)
Vous pouvez être désolée !!
UN
(Deux aveugles se rencontrent et se rentrent dedans.)
UN
Excusez-moi !
DEUX
(Simultanément.)
Oups, pardon !
UN
Je suis désolé, mais vous pourriez regarder où vous allez, quand même !
DEUX
Non mais dites donc, vous ne vous êtes pas vu ! Vous m’avez foncé dessus ! Je veux bien fermer les yeux, mais la prochaine fois, faites attention !
(Deux s’éloigne.)
UN