Mon cœur réparé au fil d’or - Joseph Patrick Picillo - E-Book

Mon cœur réparé au fil d’or E-Book

Joseph Patrick Picillo

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Beschreibung

"Mon cœur réparé au fil d’or" – Amour, blessures et renaissances est un voyage poétique au cœur des élans, des chutes et des renaissances de l’amour. Dans une langue sincère et lumineuse, l’auteur dévoile l’intimité d’un cœur brisé puis reconstruit, offrant à chaque page des éclats d’émotion brute. Ce recueil parle à tous ceux qui ont aimé, perdu, et trouvé, malgré la douleur, la force de se relever. Une ode à la résilience, à l’amour vrai, et à la beauté fragile de l’âme humaine. parcours.

À PROPOS DE L'AUTEUR

Joseph Patrick Picillo est un artisan passionné, façonnant matière et lumière avec exigence et sensibilité. Marqué par les épreuves, il trouve dans la solitude et l’écriture un espace d’introspection et de libération. Ses textes traduisent un besoin sincère d’aimer, de transmettre et d’éclairer ceux qui traversent des moments difficiles.

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Seitenzahl: 243

Veröffentlichungsjahr: 2025

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Joseph Patrick Picillo

Mon cœur réparé au fil d’or

Amour, blessures et renaissances

© Lys Bleu Éditions – Joseph Patrick Picillo

ISBN : 979-10-422-7405-4

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

À toi, la femme qui a marqué mon cœur comme nul autre…

Je veux te dédier ces mots, non pour rappeler les blessures du passé, mais pour reconnaître ce qu’elles m’ont permis de devenir. À travers ce que nous avons partagé, tu m’as poussé à me questionner, à plonger au plus profond de moi-même et à trouver une force que j’ignorais posséder.

Ce livre est né autant des épreuves que de la lumière que tu as apportée. Grâce à toi, j’ai appris à transformer les silences en mots, les doutes en art, et la douleur en renouveau.

Alors, merci, non pour les souffrances, mais pour le chemin qu’elles ont ouvert en moi.

Puisse le jour être un cadeau réparateur.

Qu’il vous lègue toute sa lumière, afin d’illuminer vos nuits les plus sombres et faire rayonner vos âmes de la beauté du soleil.

J. Patrick Picillo

Préface

À vous qui tenez ce livre entre vos mains, sachez que vous plongez dans les pages d’un cœur mis à nu, dans l’intimité d’une âme qui s’est souvent perdue pour mieux se retrouver. Mon cœur réparé au fil d’or – Amour, blessures et renaissances est bien plus qu’un recueil de poèmes, c’est une confession, un journal de bord émotionnel traversant les montagnes russes de l’amour, de la douleur et de la renaissance.

Ces poèmes sont nés de mes expériences, de mes chutes et de mes élans. Ils sont venus à moi dans des moments de clarté, parfois dans le tourment, souvent dans la sérénité. L’amour, la rupture, le vide laissé par l’absence, mais aussi la résilience et l’éveil à une vie renouvelée sont les thèmes qui composent ces lignes. En écrivant, j’ai découvert que chaque épreuve, même la plus déchirante, cachait un trésor, un enseignement précieux, un élan de vie.

Les mots qui suivent sont ceux d’un cœur qui a connu la passion dans toute sa force et la douleur dans toute sa profondeur. Vous y lirez les échos de mes émois les plus purs, les cris de mes peines les plus insondables, mais aussi l’apaisement d’un renouveau lumineux. Car au bout de chaque chute, il y a ce moment où l’on relève la tête, où l’on comprend que la vie est un cadeau, un voyage mystérieux que l’on n’a jamais fini d’apprivoiser.

J’espère que mon histoire, mes poèmes sauront toucher votre propre sensibilité, réveiller vos souvenirs et, peut-être, vous apporter un peu de réconfort. Car dans chaque chagrin, il y a une renaissance qui s’annonce, et dans chaque amour perdu, il reste toujours une parcelle d’éternité.

À vous, lecteurs, je laisse maintenant mes mots, mon cœur ouvert. Puissiez-vous y trouver un reflet de vos propres émotions, un écho de vos propres histoires, et peut-être même un peu d’apaisement dans ce monde souvent chaotique.

Une enfance dans l’amour

L’enfance dans l’amour, c’est un monde où chaque geste tendre est une graine semée dans l’âme, une semence d’infini qui pousse et éclaire nos vies, bien au-delà des années.

J. Patrick Picillo

J’ai grandi dans une famille italienne où le modèle parental était un symbole d’amour, de loyauté et de fidélité. Ma mère, née en Tunisie sur un territoire français, était une femme aimante, dévouée au foyer et entièrement dédiée à ses enfants. Mon père, originaire de Sicile, avait quitté sa famille, ses parents et ses douze frères et sœurs, pour s’installer en France et travailler dans la maçonnerie.

De l’extérieur, notre convivialité et notre manière expressive de communiquer pouvaient donner l’impression de disputes constantes : des gestes amples, des voix fortes, une énergie débordante. Mais en réalité, c’était tout le contraire. Plus il y avait d’enfants et de bruit dans les échanges, plus notre maison semblait vivante. L’amour s’exprimait partout, même dans les désaccords, les remarques ou les taquineries, souvent destinées à faire éclater de rire plutôt qu’à vexer.

Dans cette éducation pleine de chaleur, il y avait bien sûr des moments plus stricts. Un père sicilien, lorsqu’il devait taper du poing sur la table, ne le faisait pas à moitié. Il fallait filer droit. Pourtant, cela ne faisait pas de lui un tyran. Aujourd’hui, une simple réflexion à son enfant peut vous obliger à vous justifier auprès des services sociaux. À l’époque, un père sicilien n’avait pas toujours la culture ni la délicatesse du dialogue. Ses gestes et ses paroles pouvaient sembler brusques, mais ils étaient souvent maladroits plutôt qu’intentionnellement durs. S’il arrivait qu’il lève la main pour une fessée, chose rare, il pouvait ensuite ne plus manger pendant trois jours, rongé par le remords.

Ma mère, elle, incarnait la mamma italienne dans toute sa splendeur : sans interdits, entièrement dédiée à son foyer, à son homme, et à ses enfants.

Elle faisait tout son possible pour que nous ne manquions de rien. Elle était une femme dévouée, à la fois pilier de la maison et protectrice inlassable. Elle veillait sur nous avec une attention presque maternelle au sens absolu, refusant de nous laisser partir trop tôt dans ce monde parfois rude. Jusqu’à nos trois ans, elle nous gardait près d’elle, repoussant autant que possible le moment de nous conduire à l’école. C’était pour elle une déchirure, mais aussi un acte d’amour, car elle savait qu’il fallait bien nous laisser prendre notre envol.

Elle incarnait une féminité chaleureuse et élégante. Toujours apprêtée, maquillée avec soin, et parée de ses bijoux, elle rayonnait d’une beauté intemporelle qui semblait refléter la force de son caractère. Pourtant, derrière cette apparence impeccable, se cachait une femme simple et aimante, qui vivait pleinement pour sa famille.

Avant chaque sortie, elle me répétait inlassablement cette phrase qui résonne encore en moi :

En sicilien : « Lu signuri t’aiuta » (« Que le bon Dieu t’aide ».)

Ces mots étaient plus qu’une bénédiction, c’était une promesse rassurante, un ancrage dans sa foi et son amour. Dans ses yeux, j’étais toujours cet enfant qu’elle voulait protéger, qu’elle confiait à une force supérieure lorsqu’elle ne pouvait plus veiller sur moi.

Ma grand-mère, celle que j’aimais d’un amour particulier, a également marqué mon enfance. Après le décès de mon grand-père, elle est venue vivre chez nous. Dans les familles italiennes, on n’abandonne pas les anciens. Ils restent près de nous, dans cette continuité de l’amour et du respect. Pendant vingt ans, elle a vécu auprès de ma mère, apportant une présence précieuse qui ajoutait encore à la richesse de notre foyer.

Elle était comme une deuxième maman pour moi. Sa douceur, sa sagesse et sa simple présence donnaient un « plus » inestimable à notre famille. Elle cuisinait souvent avec ma mère, et je me souviens encore des odeurs qui emplissaient la maison, de la chaleur, de leur complicité. J’aimais l’avoir près de moi. Elle représentait à la fois un ancrage dans nos racines et un exemple vivant de ce que signifie vraiment l’amour familial.

Aujourd’hui, elle n’est plus là, mais je suis encore profondément marqué par cette femme exceptionnelle. Elle reste gravée dans mon cœur et dans mes pensées. Elle a été, et reste, une figure importante de ma vie, et je lui parle encore souvent dans l’invisible, car son empreinte est indélébile.

J’ai eu la chance d’avoir des frères et sœurs, et malgré nos différences, nos parcours de vie, et parfois même les silences ou les désaccords qui s’installent, je les aime profondément. L’amour fraternel ne disparaît pas avec les divergences d’opinions ou la distance, même lorsqu’il devient difficile à exprimer. Ce lien, tissé dès l’enfance, reste ancré en moi. Je garde de très bons souvenirs fraternels, des moments simples et authentiques qui me rappellent l’importance de cette connexion, même lorsque la vie nous éloigne.

Il n’y avait ni philosophie, ni calculs, ni certitudes ou incertitudes. Pas de plans à long terme. Nous vivions tout simplement dans l’amour, sans jamais nous poser de questions.

Dans ma famille, tout se vivait avec une authenticité désarmante. L’amour, les échanges, les rires, mais aussi les disputes, tout était spontané, vrai. C’est un cadre où il n’y avait pas de place pour la tromperie ou la superficialité. Cette manière d’être, si belle et pleine de chaleur, m’a profondément marqué. Pourtant, avec le recul, je réalise que ma sensibilité était différente de celle des autres. Peut-être étais-je plus observateur, plus réceptif à ce qui m’entourait, plus vulnérable aussi. J’avais une capacité accrue à ressentir les choses, un besoin de comprendre et de donner un sens à tout ce qui se jouait autour de moi.

À l’époque, mes pensées étaient néanmoins fortement influencées par ce modèle familial. Je voyais l’amour comme une évidence, un prolongement naturel de ce que j’avais toujours connu. Si j’avais su alors ce que je comprends aujourd’hui, j’aurais sans doute pris plus de temps pour réfléchir avant de m’engager dans des histoires amoureuses. Mais dans ma famille, on ne donnait pas de directives ni de conseils. Personne ne m’a jamais dit comment aimer ni comment choisir.

Quand je ramenais une petite copine à la maison, ma mère ou mon père se contentaient de me donner leur ressenti, souvent en quelques mots : « Elle est bien » ou « Elle n’est pas bien. » Pour le reste, c’était à moi de me débrouiller. J’appréciais cette liberté, mais je comprends aujourd’hui qu’un peu plus de guidance aurait pu m’aider à mieux appréhender ce qu’implique vraiment une relation.

S’unir à quelqu’un, ce n’est pas juste une histoire de sentiments ou d’attirance. C’est un équilibre subtil entre deux histoires de vie, deux bagages émotionnels. Si la personne en face de vous n’a pas connu un cadre aimant ou s’il reste en elle des blessures profondes, cela peut influencer l’avenir d’une relation de manière inattendue. À l’époque, je ne réalisais pas cela. Dans ma famille, il n’y avait pas cette prise de conscience des impacts du passé ou des traumatismes sur les choix amoureux. Nous vivions dans l’instant, dans la simplicité de l’amour présent.

Aujourd’hui, je sais que l’amour est bien plus complexe. Il demande une compréhension mutuelle, une maturité, et parfois un travail intérieur pour réparer ce que la vie a brisé. Ces réflexions, je les fais avec le recul, en observant mon propre chemin, mais aussi en me souvenant de la légèreté avec laquelle je me lançais autrefois dans mes amours.

Un destin tracé par l’ambition

L’enfant que j’étais voyait déjà l’homme que je voulais devenir.

J. Patrick Picillo

Dès mon plus jeune âge, quelque chose en moi semblait écrit à l’avance. Une envie presque instinctive de créer, d’agir, de bâtir. J’avais tout juste dix ans, et l’insécurité qui aujourd’hui enferme parfois les enfants dans des routines étroites n’était pas une préoccupation. J’ai grandi dans le Sud de la France, au Grau-du-Roi, une ville de pêcheurs où les étés étaient bercés par le bruit des vagues et l’effervescence des activités en bord de mer.

Mon grand-père maternel, qu’on surnommait « Carabine », était pêcheur. De lui, j’ai hérité une partie de mon esprit travailleur. Mais à l’époque, les ressources étaient limitées : demander une pièce de 10 francs à nos parents, c’était un luxe. Pourtant, avec 10 francs (l’équivalent de 1,50 €), il y avait mille possibilités : une pomme d’amour ou un tour de manège à la foire, le Luna Park. J’ai très vite compris une vérité essentielle : dans ce monde, il fallait apprendre à créer de la valeur pour obtenir ce que l’on désirait.

Dans notre famille, il était courant que les enfants travaillent l’été, surtout à l’arrivée des forains. À dix ans, je montais les manèges ou rangeais les autos tamponneuses, mais cette routine ne suffisait pas à combler mes ambitions. Même en travaillant à la grande roue, mon esprit s’agitait : j’étais déjà tourné vers quelque chose de plus grand. J’observais les grands frères du quartier, qui gagnaient bien mieux leur vie et ne perdaient pas leur temps dans les petits boulots. Leur exemple me fascinait.

Très vite, j’ai décidé de suivre leur modèle, mais à ma manière. Avec quelques copains, nous avons démarché les restaurants et poissonneries, leur proposant nos services. En quelques jours, nous étions capables de ramasser jusqu’à 100 kg de moules par jour. Notre petite équipe fonctionnait comme une véritable entreprise : deux plongeurs, deux trieurs, et deux livreurs. Nous partagions tout, et nos gains, 100 francs chacun par jour (15 €), représentaient une petite fortune pour des gamins de notre âge.

C’est dans les HLM où j’ai grandi que se sont forgées mes premières amitiés profondes, parfois fraternelles. Ces liens, indéfectibles pour certains, m’accompagnent encore aujourd’hui. Mon frère de cœur Stouff avec qui nous avions la permission de jouer jusqu’à ce que les lampadaires s’allument, et Zitoune que je considère comme un cousin proche, car nos familles se soutenaient et vivaient ensemble en grande famille en Tunisie. Je partage avec lui des confidences et un parcours parfois parallèle et tant d’autres personnes que je pourrais citer, la mixité d’un quartier… Ils se reconnaîtront.

Un jour, cependant, notre petit commerce de moules s’est vu bloqué : les restaurateurs et poissonniers ont cessé d’acheter nos produits à cause des contrôles d’hygiène et de sécurité sanitaire. Pour d’autres, cela aurait été une fin. Pour moi, c’était un défi. J’ai élaboré un plan B : vendre directement aux habitants des HLM. Avec un carnet et un simple stylo, nous avons organisé un système de porte-à-porte : des sachets d’un kilo de moules nettoyées, prêtes à cuisiner, à des prix imbattables.

Les gens appréciaient : au-delà de l’économie, nous leur simplifions la vie.

Cette capacité à rebondir et à trouver des solutions m’a suivi jusqu’à l’adolescence. Au collège, lors de mon premier stage, j’ai choisi le bâtiment, et plus précisément l’électricité. J’adorais construire : manier des outils comme le marteau-piqueur ou la rainureuse, toucher à la matière brute. Ce n’était pas qu’un stage ; c’était une révélation. À la fin de la période, j’ai demandé à mon maître de stage de travailler tout un été dans son entreprise. Mon objectif était déjà clair : commencer comme stagiaire, devenir apprenti, puis ouvrier. Mais je ne voulais pas m’arrêter là. Mon ambition était de devenir chef d’entreprise.

Je m’étais promis de ne pas travailler toute ma vie pour les rêves d’un autre. Je voulais réaliser les miens. Et cette promesse, je l’ai tenue. Aujourd’hui, après vingt ans à la tête de ma propre entreprise, je regarde ce parcours avec fierté. Tout semblait inscrit en moi dès l’enfance : ce besoin de créer, d’apprendre, d’évoluer. Un destin, peut-être, mais surtout une détermination avec le tracé de mes propres mains.

Le poids des héritages

Son héritage était fait de douleurs et de renoncement, mais dans sa quête de vie, elle a oublié que la liberté ne se construisait pas en trahissant ceux qui nous aiment.

J. Patrick Picillo

Dans mon modèle éducatif et ce cadre familial, il m’était profondément ancré que, d’abord, je devais trouver ma voie professionnelle avant de fonder une famille. L’innocence de ma jeunesse et le regard d’un jeune homme sans expérience m’avaient fait croire que mon rôle était d’aimer une femme, une seule, pour toute la vie. Mais je n’avais pas pris en compte que la personne que j’allais rencontrer porterait avec elle son propre vécu, son propre modèle familial et éducatif.

Je me suis mis en couple très jeune, à 16 ans, avec cette magnifique blondinette que j’ai aimée très fort.

Il y a dans cette histoire une part de beauté, mais aussi un certain poids du destin, comme si certaines choses échappaient à notre contrôle.

Mes parents, très attachés à nos traditions, m’avaient inscrit tout petit au catéchisme. Dans notre famille chrétienne, c’était une étape presque naturelle, surtout pour un petit Italien. Il fallait que je suive « mon chemin dans l’amour sous la protection de Dieu », comme ils disaient.

C’est au catéchisme que j’ai rencontré, pour la toute première fois, celle qui deviendrait ma première femme. Nous n’étions alors que des enfants, 4 ou peut-être 5 ans. Je me souviens de nous, jouant dans la cour de l’église. Sa maman encadrait une activité organisée les mercredis après-midi, « Le Fripounet ». C’était un moment que nous attendions avec impatience : coloriages, chants, goûters et chasses au trésor, tout cela rythmait notre innocence.

La vie a fait que nous nous sommes perdus de vue pendant des années. Puis, à l’adolescence, nos chemins se sont croisés de nouveau. Je ne pouvais pas lutter contre ce qui semblait être une évidence. Pourtant, une ombre a plané sur ce bonheur retrouvé : cette jeune fille, avant de devenir ma petite amie, avait été celle de mon frère de cœur.

Je n’avais rien anticipé, et quand je l’ai appris, je m’en suis beaucoup voulu. Peut-être même que je m’en veux encore. Lorsque nous nous sommes revus, c’était une destinée comme inévitable, mais je ne pouvais me résoudre à trahir mon ami. J’ai évité et refusé les avances et j’aurais d’ailleurs dû à ce stade déjà comprendre le comportemental incorrecte c’était pourtant un signe. Leur histoire s’était terminée, et un jour, c’est lui-même qui est venu à moi, me dire :

« Fonce. Je préfère qu’elle soit avec toi plutôt qu’avec un autre. »

Nous avions 16 ans. Je savais que c’était un moment difficile pour lui. Elle avait été l’un de ses premiers amours, et voilà que ça tombait sur moi… Pourtant, je crois qu’il avait compris, au fond, que les choses se faisaient naturellement. Aujourd’hui, avec le recul, je pense qu’il peut en rire. Peut-être même qu’il peut ironiquement me remercier : après tout, je lui ai sans doute épargné bien des souffrances.

Je pensais pouvoir être celui qui lui ferait découvrir le vrai amour, celui que je croyais pur et sans défaut, loin du climat de violence, de trahison et d’alcoolisme qu’elle avait vécu avec ses parents dans son enfance.

Mais cela n’a pas manqué. Malgré tout mon investissement et ma volonté, j’ai fini par comprendre que l’ancrage de son passé, indélébile, avait repris possession de son mental. J’ai fait de mon mieux. J’ai essayé de lui offrir stabilité et équilibre : une maison, une voiture, un mariage et deux beaux enfants. Mais malgré mes efforts, elle n’a pas pu se défaire de son passé. Je ne peux pas non plus rejeter toute la faute sur elle, peut-être étais-je trop travailleur et pas assez fêtard à son goût.

Avec le temps nous étions peut-être deux personnes différentes et je suis maintenant dans l’acceptation de dire que nous avions certainement tous deux un destin différent. Après 15 ans d’union, j’ai été trahi. Son ambition, à ce moment-là, était de ne pas laisser passer sa jeunesse, quitte à se délester de toutes ses contraintes pour profiter.

Ce désir insatiable de liberté l’a conduite à faire des choix dévastateurs, non seulement pour elle, mais surtout pour notre famille. Son départ a été un cataclysme. Ce n’était pas seulement une rupture, c’était une explosion qui a soufflé tout ce que nous avions construit, détruit 15 années de vie commune en un instant.

Elle se permettait de céder à tous les excès, à l’inconséquence de ses désirs, sans se soucier des conséquences. La chose la plus douloureuse dans tout cela a été de voir mes enfants mis en situation d’insécurité. Elle les exposait à un monde instable, dangereux, tout en poursuivant une quête de plaisir immédiat, peut-être était-ce inconscient et manipulé par ses propres traumatismes.

J’ai souffert au-delà des mots. Pas seulement d’une séparation amoureuse, mais d’un rejet de tout ce que nous avions vécu ensemble, d’un oubli brutal de tout ce qui nous avait unis, de toutes les épreuves que nous avions traversées côte à côte. Le décès de sa mère, alors qu’elle était enceinte de notre premier enfant, l’a laissée dévastée.

Nous avions traversé ce chagrin ensemble, et je croyais que nous en étions sortis plus forts, que l’amour que nous partagions nous aurait permis de surmonter tous les obstacles. Pourtant, elle s’est laissé engloutir par des forces plus sombres, se réfugiant dans des comportements destructeurs, rejetant la faute sur moi, refusant d’accepter la réalité de ses choix.

Je n’avais jamais imaginé qu’une personne que j’aimais aussi profondément pouvait me faire vivre un tel enfer. Pendant que je souffrais en silence, perdu dans la douleur d’un avenir brisé, elle vivait dans l’insouciance de son nouveau départ.

J’ai encaissé les humiliations, les comparaisons dégradantes, comme des coups de poing en pleine face, visant à me terrasser, à m’empêcher de me relever. Pourtant, ce qui était un poison pour moi, je n’avais pas peur de l’affronter. Même ses fréquentations, qui devenaient des menaces, n’ont pas suffi à me briser.

Je ne pouvais pas comprendre comment elle, qui avait connu tant de pertes et de souffrances, pouvait se tourner ainsi contre la famille que nous avions bâtie. Pourtant, il y a eu des moments de lumière, des gestes d’humanité dans ces années noires.

J’ai recueilli ses deux frères, ces jeunes hommes perdus après le décès de leur mère et l’indifférence de leur père. Je leur ai offert un toit, un refuge, en espérant leur donner un avenir. Aujourd’hui, ces hommes me respectent profondément, reconnaissant ce que j’ai fait pour eux, et je sais qu’ils n’oublieront jamais ce que nous avons traversé ensemble. Je les porterais toujours dans mon cœur, comme des enfants que l’univers a placés sur mon chemin pour que je puisse les protéger. Je suis fier également de leur vie et de leur parcours.

Mais au milieu de toute cette souffrance, il était difficile de comprendre comment nous en étions arrivés là. Elle rejetait toujours la faute sur moi, ne voulant jamais voir ses propres erreurs ni admettre l’impact de ses choix. Nous avons essayé de reconstruire une relation, de trouver un terrain d’entente, mais rien n’y faisait. Il y a des personnes qui ne font jamais ce travail intérieur, qui ne peuvent pas accepter de reconnaître leur part de responsabilité. Elles préfèrent accuser les autres, chercher des boucs émissaires, plutôt que d’affronter la vérité et d’assumer la douleur de leurs actes.

Et c’est dans cette impasse que nous nous sommes retrouvés, à vivre dans une tension constante, sans pouvoir retrouver l’équilibre, l’harmonie et la paix nécessaires pour avancer.

Aujourd’hui, je sais que certaines blessures ne se refermeront jamais. Certaines personnes, malgré tout l’amour et la patience que l’on peut leur donner, ne se changeront pas.

Et parfois, c’est la seule vérité à accepter : il faut savoir lâcher prise, accepter que certains chapitres de la vie ne s’écrivent pas comme on le voudrait.

Et c’est ainsi qu’un matin, après quelques mois de séparation, dans l’urgence de la situation et sans que j’aie eu le choix, la garde exclusive de mes enfants m’a été attribuée. À l’époque, mon fils avait 6 ans et ma fille 3 ans. La suite a continué à être très compliquée, un divorce inévitable…

« Notre histoire ne pouvait se terminer dans la douceur ni la sérénité. »

Le poids des héritages invisibles

Mettre en lumière l’héritage émotionnel, c’est oser affronter les vérités que l’on préfère ignorer.

J. Patrick Picillo

Les héritages familiaux ne sont pas seulement des objets, des terres ou des biens matériels. Ils se tissent dans les émotions, les peurs, les attentes et les non-dits, influençant silencieusement la manière dont nous vivons et aimons.

Dans ce chapitre, je m’efforce de comprendre comment ces héritages invisibles, portés de génération en génération, peuvent imprimer une empreinte indélébile sur la construction de soi. C’est un chemin de réflexion, non pas pour juger, mais pour prendre conscience de ce qui façonne nos vies, parfois sans que nous en ayons conscience.

Il existe des fardeaux que l’on porte sans jamais les voir. Ils ne s’enferment pas dans des coffres, ne se transmettent pas par des mots clairs ou des rituels familiaux. Ce sont des traces silencieuses, des ombres déposées au creux de l’âme par des générations passées. Ces héritages invisibles façonnent bien souvent nos vies avant même que nous ayons conscience de leur existence.

Quand un parent porte en lui des traumatismes non résolus, il n’est pas rare que l’enfant en hérite, non par malveillance, mais par l’étrange alchimie de la transmission émotionnelle. Les blessures d’un parent – qu’elles viennent de l’abandon, de la perte ou de la peur – s’inscrivent parfois dans les gestes du quotidien, les silences, les regards.

Ces blessures se glissent dans les mots simples, dans les interdits qui ne sont jamais expliqués, dans les précautions qui, à force d’être répétées, deviennent des vérités.

Un enfant élevé dans un climat de peur finit souvent par voir le monde à travers cette même lentille. Ce n’est pas de sa faute, pas plus que celle de ses parents. Mais il grandit avec cette impression diffuse que la vie est un terrain instable, que le bonheur est fragile, que l’amour peut blesser, ou qu’un pas de trop pourrait tout faire s’effondrer.

Ces enfants, devenus adultes, portent en eux une quête constante d’équilibre, mais aussi une grande sensibilité. Ils peuvent être lumineux, généreux, mais à l’intérieur, une petite voix leur rappelle sans cesse de se méfier, de garder un pied en retrait, au cas où.

Dans une relation amoureuse, ces héritages deviennent parfois visibles. Un partenaire peut ressentir des barrières invisibles, une réticence à se laisser aller pleinement, ou une peur qui surgit là où il n’y a aucune menace. L’amour, au lieu d’être un refuge, peut être perçu comme un risque, une intrusion et même une menace. L’autre devient une source d’inquiétude, une promesse d’abandon ou de blessure.

Je l’ai vu, je l’ai vécu. J’ai compris que certaines craintes, certains éloignements, ne parlaient pas de moi, mais d’une histoire plus ancienne. Ces blessures n’appartiennent pas toujours à ceux qui les portent ; elles viennent de plus loin, comme une rivière qui charrie des sédiments d’une source oubliée.

Mais que devient un enfant lorsqu’il porte ces héritages ?

Parfois, il lutte pour se libérer, pour bâtir sa propre vie. Mais souvent, il reste captif, incapable de dénouer les fils de ce qui l’enchaîne. Un parent traumatisé, par exemple, peut surprotéger son enfant, lui transmettre des peurs qui ne sont pas les siennes, ou bien attendre de lui une perfection qui compensera un vide intérieur. L’enfant, voulant bien faire, endosse alors des responsabilités invisibles. Il devient le miroir d’une souffrance qu’il n’a jamais choisie.

Ces enfants, devenus adultes, se battent pour construire leur propre équilibre. Mais comment poser des fondations solides quand le sol tremble encore sous leurs pieds ? Comment se libérer des peurs qui ne leur appartiennent pas, mais qui semblent inscrites dans leur ADN ?

Il faut du temps, beaucoup de temps. Et surtout, il faut du courage. Le courage de regarder ces héritages en face, de nommer les blessures, non pour juger, mais pour comprendre. Ce travail demande une force immense, mais il ouvre la porte à une libération profonde.

Ce que je crois, c’est que chaque personne porte en elle la capacité de briser ces chaînes invisibles. Cela demande parfois de l’aide, de la patience, et une infinie bienveillance envers soi-même. Mais c’est possible. Parce qu’au-delà des blessures, il y a toujours une lumière, une résilience qui attend d’être réveillée.

Ce texte, je l’écris pour ceux qui portent un poids qu’ils ne comprennent pas toujours, mais qui les empêche d’avancer. Je l’écris aussi pour moi, pour témoigner de ce que j’ai vu, ressenti et appris.

L’amour est une force puissante, mais il ne peut réparer ce qui refuse d’être vu. En revanche, il peut offrir un espace sûr, une invitation à se libérer.

Vers une nouvelle promesse

Elle est entrée dans ma vie non pas comme une réponse, mais comme la promesse de ce que je n’osais espérer.

J. Patrick Picillo

Dans cette épreuve douloureuse, des marques profondes se sont gravées, comme au laser, dans mon cœur. Des traumatismes, le sentiment de honte, d’être sali, l’inconfort de me remettre en cause, d’avoir perdu toute ma valeur, un dégoût et une humiliation.

J’ai fait ce que j’ai pu, et tous les jours je priais pour que l’univers fasse son travail et mette sur ma route une femme exceptionnelle.

Je l’imaginais sous tous ses traits et j’avais une idée bien précise de comment elle serait.

Un matin, alors que je devais intervenir chez un client, en limite de propriété, je croise un regard.