Mont Blanc et Aiguilles Rouges à ski - Anselme Baud - E-Book

Mont Blanc et Aiguilles Rouges à ski E-Book

Anselme Baud

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  • Herausgeber: Nevicata
  • Kategorie: Lebensstil
  • Sprache: Französisch
  • Veröffentlichungsjahr: 2016
Beschreibung

Plus de 400 descentes à ski dans les massifs du Mont Blanc et des Aiguilles Rouges !

Le majestueux Mont Blanc figure parmi les plus grands sanctuaires mondiaux du ski. Il offre une fois l’hiver venu un éventail unique de pentes de rêve. Anselme Baud, guide de montagne et précurseur du ski extrême, nous invite à découvrir ce fabuleux terrain de jeu.
De l’amateur de belles pentes au freerider extrême, les passionnés de grand ski trouveront dans ce guide toutes les informations nécessaires pour tracer des lignes parfaites !

Des classiques en ski de rando aux pentes les plus extrêmes, ce topo réunit la description précise et complète de plus de 400 descentes, pour un maximum de sensations !

EXTRAIT

Si le but et l’intérêt du ski hors-piste ou de randonnée est de chercher l’éloignement et de goûter aux délices de la découverte, il est des cas où il devient opportun ou prudent de suivre certaines traces faites par d’authentiques professionnels ou de fins pratiquants. Copier le bon choix devient utile et formateur. Même si le guide se sent un peu trop suivi, il pourra de temps à autre être fier d’avoir aidé, voire protégé certains adeptes. Veiller cependant à garder ses distances et à ne pas déclencher une avalanche au-dessus de lui et de ses clients !…

CE QU'EN PENSE LA CRITIQUE

Dans son genre, voici une bible. - Alpinisme & Randonnée

Plus qu’un topo-guide, le dernier ouvrage d’Anselme Baud est un vrai beau livre, agréable à lire, pleins de renseignements et d’idées. - Vertical

Anselme Baud vient-il de sortir la Bible du ski de montagne dans les massifs du Mont Blanc et des Aiguilles Rouges ? - Montagnes Magazine

C’est le topo de ski qui manquait dans nos bibliothèques. - Bulletin des Guides

Une pépite. Un guide complet, pratique et documenté. Petit conseil d’ami : ne sortez pas sans lui. - Ski Français

À PROPOS DE L'AUTEUR

Né à Morzine en 1948, Anselme Baud a marqué l'histoire du ski de pente raide dans les Alpes. Guide de haute montagne en 1973, il est l'auteur d'un nombre impressionnant de premières descentes extrêmes dans les Alpes, les Andes, en Antarctique ou encore en Himalaya. Professeur à l'ENSA, il a encadré pendant plusieurs années la formation des guides de montagne en Bolivie et au Népal.

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À Danielle, qui a subi tant d’absences dues à l’élaboration de cet ouvrage, et à mon cher fils Edouard, parti faire la trace pour rejoindre tous nos chers compagnons déjà là-haut…

Le ski, l’alpinisme et, de manière générale, les sports de montagne sont des activités intrinsèquement dangereuses. L’auteur et l’éditeur ne peuvent en aucun cas être tenus responsables d’accidents, blessures, inconvénients ou désagréments résultant de l’utilisation de ce guide.

Les massifs du Mont Blanc et les Aiguilles Rouges

Avant-propos

Le projet de réaliser ce guide est né dès la parution du premier ouvrage de la collection « les 100 plus belles à ski », édité chez Denoël en 1981. Le grand frère bénéficiait des atouts de cette collection créée par Gaston Rébuffat, le célèbre alpiniste-écrivain-conférencier. Pour compléter cette première énumération des descentes du massif, il m’a paru nécessaire de décrire tous les itinéraires à ski, à l’image du guide Vallot. L’idée de ce genre de topo s’avérant assez hasardeuse, j’hésitai à commencer, craignant opposer les joies de la glisse à l’austérité d’un tel projet.

Paulo Mondron, alpiniste et télémarkeur belge, avec qui j’avais réussi le Vinson en Antarctique et le McKinley en Alaska, fut enthousiaste à l’idée de ce livre. Ayant lui-même créé sa propre maison d’édition et publié deux topos sur les Andes, il devint alors le compagnon idéal en plus de l’éditeur. La collaboration de Béatrice Bressand fut dès le début de ce travail non seulement efficace, mais surtout toujours très motivante, étant elle aussi une fervente adepte de la randonnée, du ski et de l’escalade. Son mari Christophe, guide et skieur-alpiniste passionné, a complété agréablement l’équipe. Soucieux de l’exactitude des données techniques, il apporta par ses réflexions opportunes de pratiquant un complément de détails, sans oublier son aide indispensable à l’« ordi ». D’autres compagnons, clients, stagiaires… ont participé, certains sans le savoir, à la recherche de la vérité de cet ouvrage, en parcourant avec moi de nombreux itinéraires.

Ce genre de topo peut provoquer une polémique : pourquoi inciter davantage de pratiquants à découvrir nos belles descentes, parfois cachées, dont on était sûr de jouir parce qu’on était seul ? En effet, mais cette crainte assez égoïste n’empêcherait pas le nombre de skieurs de croître : leur fournir les meilleurs renseignements possibles, et surtout augmenter les choix, est peut-être aussi le moyen d’éviter la sur-fréquentation des itinéraires classiques et sans doute certains échecs.

Le propre du guide n’est-il pas de conduire ses compagnons dans le meilleur chemin, en sécurité ? Cela ne suffirait pas si sa tâche n’était éclairée par sa propre envie de jouir en permanence de sa vie en montagne et de faire partager ses plaisirs en transmettant ses valeurs à ceux qui l’ont accompagné. Aider à la découverte, ouvrir vers l’émerveillement, goûter ensemble aux joies puis au bonheur jusqu’au ravissement de chacun. Satisfaction aussi de « l’avoir fait », d’avoir imprimé sa trace d’un jour, d’analyser ses lignes en revivant la descente depuis le bas. Lorsque l’harmonie des reliefs et la composition des lumières et des ombres s’ajoutent sans s’immobiliser, l’étonnement dépasse la contemplation. La question des efforts de la montée devient réponse et les traces de la descente ne doivent qu’être marque de respect, lignes éphémères imprimées seulement dans les souvenirs d’une tranche de vie bien vécue.

Dans la face nord du Tacul

Introduction

LE MONT BLANC

Le Mont Blanc est le roi de l’Europe. Majestueux, incomparable, paisible dans ses éclats de lumière ou irrité par les tempêtes et les ouragans, il règne tel un monarque sur ses glaciers et ses vallées profondes et crénelées de dentelles de granit. Depuis toujours, sa cime est convoitée, effrayant ses sujets de ses colères meurtrières, obsédant les autres plus téméraires. Le 8 août 1786, les deux chamoniards Gabriel Paccard et Jacques Balmat foulèrent son ultime bosse blanche. Depuis cette date, plus de repos : ce furent d’abord les caravanes de conquérants, puis les premiers intrépides sans guides, les observateurs avides de découverte et les chercheurs en tout genre. Puis la technologie aidant les impétueux profanateurs, nous fûmes les témoins ou acteurs d’expériences multiples. Depuis le laboratoire du professeur Jansen (financé par Eiffel) jusqu’au banquet sponsorisé par une marque de champagne, en passant par les premiers atterrissages volontaires d’avions ou d’hélicoptères, sans oublier cette automobile déposée au sommet pour une publicité et qui resta de longs mois prise dans les congères de l’arête des Petits Mulets (4690 m)…

Mais, fort heureusement, l’homme n’est pas seulement avide d’exploits médiatiques ou d’intérêt pécuniaire. Il élabore aussi son projet de gravir le sommet pour lui, pour son bien-être, son ego, on dit aussi pour mieux connaître ses propres limites. Son envie de partager ses bonheurs avec des compagnons forts d’un même enthousiasme justifie souffrances et fatigue. Après l’ascension, l’homme se sent plus fort et empli d’une paisible sérénité. Instants précieux de bonheur, parfois aussi éphémères que nos traces dans la neige.

De là-haut, le Mont Blanc se laisse admirer, mais n’est jamais dominé ni conquis. Pour l’éternité, il alimentera les rêves et invitera à la contemplation, à la paix, au respect de la nature. Aussi, gardons ces bonheurs acquis dans nos mémoires. Protégeons-le, contre les pouvoirs facétieux ou pervers de l’homme. Prouvons-lui notre respect en le préservant de nos excès exemplaires, à l’image du passage traumatisant des camions dans le tunnel. Osons regarder sa cime sans honte et poursuivre nos traces dans l’éclat de ses neiges éternelles.

Le Mont Blanc et la Vallée Blanche

Anselme Baud

À lui seul, le massif du Mont Blanc représente un choix fabuleux de descentes à ski et d’itinéraires allant de la randonnée d’initiation aux descentes extrêmes à fort engagement technique. Les orientations très variées, les conditions météo qui le sont autant, les reliefs d’une grande richesse et une grande facilité pour passer d’un versant ou d’un pays à l’autre, tout cela est à l’origine du fort développement du ski de randonnée dans ce secteur. De plus, les nombreuses installations mécaniques, surtout dans la partie nord (France), ont permis à Chamonix de devenir non seulement la « Mecque » de l’alpinisme, mais aussi celle du ski. Géographiquement, le massif du Mont Blanc est défini par les vallées profondes qui l’entourent (vallée de Chamonix, val Montjoie, vallée des Chapieux, val Veni, val Ferret italien, val Ferret suisse, vallée de Trient) et qui appartiennent à trois pays frères par la langue et la culture (France, Italie, Suisse). Sur un plan strictement géologique, ce massif cristallin est à associer au massif voisin des Aiguilles Rouges. Un souci pratique, lié aux accès communs depuis la vallée de Chamonix, m’a convaincu d’intégrer ce dernier à ce même topo plutôt que de le traiter séparément avec les massifs proches du Chablais. J’ai également choisi d’inclure dans ce topo quelques courses périphériques situées sur d’autres versants et appartenant à des secteurs géographiques différents. Ce sont des itinéraires « belvédères », qui offrent une vue panoramique sur les différents versants du massif. Ainsi, le versant nord du massif du Mont Blanc est bien visible depuis les Aiguilles Rouges ; le Mont Joly et les cols de la Fenêtre ou de la Cicle (Contamines) permettent de repérer tous les secteurs des Miage ; le versant sud du Mont Blanc (val Veni) peut bien s’observer depuis le col Chécrouit. Idem pour le versant du val Ferret depuis la Testa Bernard ; en Suisse, les remontées mécaniques de Vichères-Bavon (route du Grand Saint Bernard) nous laissent dominer le val Ferret et reconnaître toutes les descentes de La Fouly à Martigny ; enfin, l’Arpille et les secteurs Bel Oiseau et Fontanabran (Finhaut) offrent un bel aperçu du versant Trient.

SÉLECTION DES COURSES

Le choix d’une course s’impose parfois de lui-même ou bien il est plus personnel. Cependant, devant l’évolution extraordinaire de notre discipline, il devient difficile de tout répertorier, tant les nouvelles lignes proches des remontées mécaniques et descendues par des hordes de skieurs sont innombrables. Difficile également de donner des conseils de sécurité puisque les règles du jeu semblent changer si vite. Ainsi, le conseil d’attendre deux jours après une grosse chute de neige est devenu, semble-t-il, bien obsolète. Aujourd’hui, les plus téméraires n’hésitent plus à se lancer dès le lendemain d’une chute de neige dans des descentes telles que le glacier Rond ou la Mallory à l’Aiguille du Midi… Est-ce bien raisonnable ? Ce phénomène s’accentue encore puisque, depuis 1995, la fréquentation ne cesse de s’accroître et skieurs et surfeurs toujours plus nombreux se lancent à l’assaut de pentes de plus en plus raides. Heureusement, les versants suisse et italien, au relief beaucoup plus abrupt, sont moins équipés et par là, plus sauvages. C’est sur ces versants que s’inventeront des aventures plus engagées et plus éprouvantes, mais qui laisseront sans doute davantage de traces dans nos esprits…

Dans le versant nord du Trident

J’ai choisi de retenir dans ce guide 156 courses principales, complétées dans la plupart des cas par une ou plusieurs variantes ou descentes secondaires. Ces 156 courses principales ont toutes été retenues en fonction de leur fréquentation et du besoin d’information du plus grand nombre de pratiquants potentiels. D’autres critères m’ont dicté ces choix : l’intérêt de la descente, la réputation du sommet, les conditions d’accès, son importance historique, l’anecdote qui s’y rapporte, sans omettre le caractère esthétique du parcours. La plupart sont assez précisément décrites.

Deux grands types de courses sont à distinguer :

les courses « grand public », en général faciles ou moyennement difficiles, très connues et souvent parcourues (Crochues - Bérard, Passon,…) ;

les courses typées « pente raide », couloirs connus ou plus ou moins connus, qui sont d’un niveau de difficulté plus élevé (couloir de l’Éboulement, glacier Rond, glacier du Milieu,…).

Les variantes principales sont pour la plupart décrites en détail.

D’autres courses par contre, peu nombreuses, ne sont pas reprises dans ce guide, car elles présentent à mon sens moins d’intérêt, ou trop de dangers objectifs, ou encore sont trop rarement en conditions (rappels, etc.). Elles sont citées avec pour seule indication une cotation technique.

Il s’agit :

soit de descentes accessibles seulement par la voie de montée (ou en hélicoptère) et réservées à des skieurs-alpinistes de très haut niveau (Linceul, face nord du Triolet, Pilier d’Angle, Innominata…). Inutile de préciser qu’elles ne sont que très rarement parcourues…

soit de descentes que je n’ai pas réalisées moi-même et que je ne me permets pas de décrire.

Par ailleurs, j’ai choisi de ne pas retenir certaines descentes relativement peu connues, lorsqu’existe une autre descente très similaire, voire parallèle, notamment pour en garder une ou deux en « secret »… Mais il est vrai aussi que le ski actuel peut encore évoluer : qui aurait imaginé il y a vingt ans que toutes les descentes se feraient aujourd’hui avec les deux pieds attachés sur une même « planche » ?…

Le choix de courses proposé ici est finalement assez personnel et il a le mérite d’exister, même si, dans un proche avenir, un autre ouvrage pourrait voir le jour avec un choix sensiblement différent.

D’autres adeptes du ski extrême, auteurs de prestigieuses premières, auraient probablement pu réaliser ce topo. La liste est déjà longue des compagnons disparus : le fougueux Patrick Vallençant, le puriste Heini Holzer, Jean-Marc Boivin, roi de l’équilibre et de l’opportunisme, sans oublier les fabuleux surfeurs, comme Bruno Gouvy le visionnaire, Alain Moroni, tué dans sa dernière glissade en face nord de l’Aiguille du Plan, Marco Siffredi, disparu sur les plus hautes pentes de l’Everest en septembre 2002, ou Dédé Rhem, emporté sous les cables d’Helbronner en 2004.

Il reste heureusement beaucoup de survivants parmi les pionniers qui ont sillonné le massif du Mont Blanc : Yves Détry, Daniel Chauchefoin, Serge Cachat-Rosset, Jacky Bessat, Laurent Giacomini, Jean-Pierre Mansard, Dominique Pottard, Eric Bellin, Jérôme Ruby, Stéphane Dan, Véronique Périllat en monoski, les guides Jean-Franck Charlet, Roland Cretton, Sam Beaugey, Rémy Lécluse, Francis Bibollet, le vétéran suisse et toujours jeune Sylvain Saudan, le genevois Dominique Neuenschwander, les italiens Stefano de Benedetti et Toni Valeruz et, bien sûr, l’un de ceux qui ont consacré le plus de leur vie au ski extrême : l’annécien Pierre Tardivel. Citons aussi parmi les plus jeunes Emmanuel Ballot ou Eric Monnier. La plupart d’entre eux ont laissé leur nom dans les annales du ski extrême et pourraient raconter leurs passionnantes aventures, leurs fortes émotions et leurs victoires sur eux-mêmes (et non sur la montagne, nuance !). Comme beaucoup d’autres skieurs ou alpinistes moins connus, ils rêvent tous longtemps après de cette descente d’un jour et de leur signature sur le manteau blanc.

CHOISIR SA DESCENTE EN FONCTION DES CONDITIONS DE NEIGE ET DE LA MÉTÉO

Pour les skieurs-alpinistes, la région du Mont Blanc, qui bénéficie d’un enneigement suffisant quelles ques soient les années, offre un choix de courses très important. Ses trois accès (France, Suisse et Italie par le tunnel du Mont Blanc) desservent trois secteurs aux conditions d’enneigement et de météorologie variées. Il est ainsi rare d’être immobilisé pour mauvaises conditions… Entre ces trois pays, il existe des différences sensibles de climat : c’est là que réside toute la richesse de ce massif si varié et pourtant limité en superficie.

On peut ainsi constater que la partie ouest, autour des Contamines, est enneigée tôt en début d’hiver. Au sud, en Italie, à moins d’un grand coup de fœhn, la neige arrive souvent plus tard. Côté Suisse, le climat est, comme en Italie, assez doux et les quantités de neige sont parfois insuffisantes en début de saison. En outre, dans ces deux pays, les fins de saisons peuvent être difficiles pour les altitudes moyennes et basses. En revanche, la vallée de Chamonix, au relief très rocheux ou glaciaire, nécessite un enneigement important pour offrir de bonnes conditions de ski, mais lorsque les perturbations du nord ou de l’ouest se succèdent, les quantités de neige se conservent très longtemps, permettant un ski de qualité jusque tard dans le printemps (mai à fin juin).

Au niveau de la qualité de la neige, les conditions météorologiques permettent d’orienter certains choix. Prenons par exemple le massif des Aiguilles Rouges. La moindre influence du fœhn y favorise une différence notable d’un versant à l’autre : le versant nord bénéficie d’une neige toujours abondante et souvent de meilleure qualité que le versant sud et, de surcroît, l’enneigement venant d’ouest est toujours plus important.

Le vent du nord-est est quant à lui à l’origine de certaines plaques inhabituelles (gros risque d’avalanche) dans les versants opposés, celles-ci reposant alors sur la couche déjà transformée en versant sud-ouest ou nord-ouest (Pas de Chèvre, glacier Rond…). Au demeurant, lors des chutes de neige habituelles, ce sont les versants est qui restent instables selon la surface servant de base. Par exemple, deux énormes plaques d’accumulation déclenchées par les pisteurs sur les pistes du Point de Vue aux Grands Montets en hiver 2002. En somme, tout dépend essentiellement des vents et de la fréquence des changements de température (formation de type « mille-feuilles » du manteau neigeux).

Pour ce qui est du ski de couloir, on peut établir que les versants est et sud sont assez tôt en conditions (parfois en décembre). Les autres versants (nord notamment) sont plus tardivement enneigés (glace) avant la période très favorable allant du 15 avril au 1er mai. En effet, pendant la période froide de l’hiver, la neige peut difficilement coller sur la glace. En revanche, au printemps, la température plus élevée permet à la neige plus humide d’adhérer à la pente. C’est ainsi que les faces nord du bassin d’Argentière sont plus souvent en bonnes conditions après la fermeture des remontées mécaniques de Lognan… ! Certaines belles et difficiles descentes sont réalisées grâce aux premières neiges d’automne (Bionnassay, Miage, etc.). S’il n’y avait pas les pénibles accès ou retours à pied, ce choix conviendrait très bien car, à cette période encore tempérée, la nouvelle neige colle très bien sur les glaces encore tendres. On découvre, grâce au réchauffement général, que les hivers sont moins froids et que la neige colle plus vite et souvent dans les faces (l’exemple de la fin d’hiver 2016 avec un enneigement assez exceptionnel, où les traces étaient visibles sur toutes les lignes possibles des versants nord).

Précision gestuelle du télémark

En dehors de ces considérations d’ordre météorologique, rien ne vaut l’expérience, « le flair ». Ainsi, une fois sur le terrain, il est possible de détecter les variations de qualité de la neige grâce aux textures ou aux couleurs. L’interprétation des micro-reliefs permet de profiter d’une meilleure neige dans un contexte globalement défavorable. Si le but et l’intérêt du ski hors-piste ou de randonnée est de chercher l’éloignement et de goûter aux délices de la découverte, il est des cas où il devient opportun ou prudent de suivre certaines traces faites par d’authentiques professionnels ou de fins pratiquants. Copier le bon choix devient utile et formateur. Même si le guide se sent un peu trop suivi, il pourra de temps à autre être fier d’avoir aidé, voire protégé certains adeptes. Veiller cependant à garder ses distances et à ne pas déclencher une avalanche au-dessus de lui et de ses clients !…

50° en neige dure !

TECHNIQUES ET MATÉRIEL EN SKI DE PENTE RAIDE

L’apparition des skis paraboliques et plus larges a provoqué une « révolution technique » : facilité en toutes neiges, augmentation de la vitesse de déplacement, déclenchement plus rapide des virages, bonne tenue en courbe, en compétition et en freeride et excellentes godilles. Cependant, en ski de montagne, il convient d’apporter des nuances à ces résultats avantageux : la plus grande vitesse sur glacier demande davantage d’attention car les crevasses « arrivent » aussi plus vite ! Sur neige dure en pente raide, il faudra éviter des skis bien taillés (ligne de côte très étroite au patin, type extrême carve) avec lesquels le dérapage est difficile à contrôler. De même, si dans les années 70-80 nos meilleurs skis de pente raide étaient des skis de slalom (étroits et assez durs), il n’en est plus de même aujourd’hui. Pour les modèles moins typés et donc beaucoup plus adaptés aux besoins des randonneurs et freeriders, un des critères de choix restera le poids, puisque dans de nombreux cas, les skis de carving sont plus lourds que leurs prédécesseurs, ce qui peut devenir un inconvénient si on doit les porter longtemps.

Au niveau de la technique à proprement parler, le principe de base en pente raide est de maîtriser sa vitesse. Cependant ce principe évolue, comme de skier en neige molle ! Ainsi, ce manque de vitesse de déplacement (qui habituellement favorise la réalisation du virage) doit être remplacé par un allégement conséquent. Depuis les années 1970, j’enseigne aux futurs professionnels en formation à l’École Nationale de Ski et d’Alpinisme et à mes clients une technique qui se révèle, encore aujourd’hui, bien adaptée (virage peu fatigant, facile à déclencher et sûr !) : le virage à l’arrêt (ou virage « frappé-tiré »). Ce type de virage convient essentiellement sur neige dure ou peu stable et quasiment à l’arrêt.

Virage à l’arrêt

Préparation

À partir d’un dérapage latéral : flexion du corps (buste tourné vers l’aval), poids sur le ski aval, ski amont très en avant.

Stopper le dérapage par flexion et rentrée du genou aval.

Placement des bâtons (bâton amont vers la spatule, bâton aval vers le milieu du ski).

Déclenchement

Appui sur les deux bâtons.Soulever et frapper le ski amont.

Suite au frappé du ski amont, allègement conséquent du ski aval qui s’oriente logiquement vers l’intérieur du virage. Le buste est face à la pente.

Rappel des skis au moyen d’une flexion rapide : on « tire » les genoux, l’arrière des skis passe la pente (2e temps d’allègement du skieur, en appui principal sur les deux bâtons).

Une attitude de recul est remarquée mais, pendant ce temps très court, le skieur n’est pas en appui sur la neige avec ses skis.

Conduite

Reprise d’appui progressif en développant les membres inférieurs (déploiement).

Conduite du dérapage en contrôlant la vitesse, poids du corps sur le ski aval, retour en flexion.

Remarque : l’appui sur les deux bâtons est essentiel. Le bâton amont ne gêne pas le passage des skis, il est souvent tenu sans la dragonne, laissant libre la main sur la hauteur.

Virage en mouvement

En pente moins raide ou par conditions de neige favorables, on peut tenter un virage avec une vitesse modérée. À partir d’un dérapage arrondi :

– position fléchie et poids du corps sur le ski aval ;

– placer le ski amont très en avant et en divergence ;

– grâce à la vitesse, même faible, le déclenchement est possible avec les skis divergents. Le déclenchement se fait aussi grâce à un frappé du ski amont qui déclenche le premier temps d’allègement (réaction d’appui), suivi du repli (tiré) des genoux.

Remarque : ce frappé du ski amont correspond seulement à un appui très bref, le poids du corps n’étant pas déplacé sur ce ski amont. Le but de ce mouvement rapide permet de libérer spontanément le ski aval orienté vers l’aval, qui devient l’élément moteur du virage.

En résumé

À l’arrêt, prendre appui sur les bâtons et sur le pied aval. Soulever le pied amont, le frapper violemment pour obtenir une réaction d’appui. Le second temps d’allègement, flexion-pivotée, en sera plus efficace. Le ski aval précède l’ensemble du mouvement tournant. Ce type de virage « prudent » convient parfaitement en neige très dure et terrain étroit. Je dois reconnaître que la tendance depuis quelques années se dirige vers des virages plus longs, ceci en raison du choix de la majorité des skieurs qui préfèrent skier en neiges molles, quitte à déclencher les coulées ou même de graves problèmes. Impatience, intolérance…

ÉVOLUTION DE LA FRÉQUENTATION DES PENTES RAIDES

Si l’on aborde la question de l’évolution du nombre de descentes exposées et raides réalisées ces dernières années, on ne peut que reconnaître une forte augmentation du nombre de pratiquants et s’étonner de cette démocratisation. En effet, dès que la neige tombe et recouvre abondamment les faces et couloirs du massif du Mont Blanc, des skieurs audacieux s’y engagent. Grâce au snowboard, de nombreuses courses sont devenues beaucoup plus accessibles. Avec l’enthousiasme et la soif des premiers étonnants surfeurs extrêmes (Gouvy, Siffredi, Rhem, Ruby, etc.), les freeriders ont vite été convaincus de la possibilité de s’engager très tôt dans toutes les pentes. Le plus souvent, ces descentes sont réalisées en neige molle, là où autrefois nous n’osions pas nous engager, de crainte des coulées. En fait, avec beaucoup d’observation, d’expérience et de culot, les spécialistes n’hésitent plus trop et les accidents sont assez peu nombreux. Il n’est pas rare d’observer plusieurs descentes étonnantes dans la face nord de l’Aiguille du Midi, en mai et en pleine après-midi… ! La technique est aussi de provoquer les coulées depuis le haut, de se mettre à l’abri et de descendre assez vite. À l’agilité et la technique doivent s’ajouter aussi un « gros moral » indispensable pour certaines descentes. Il est vrai que lorsque l’on se permet de descendre plusieurs fois le glacier Rond et la Mallory dans la journée, on acquiert une certaine expérience… ?! Vrai aussi qu’après les descentes remarquables et époustouflantes de l’Everest par Marco Siffredi en surf et le slovène Karnicar à ski, les 1000 mètres de l’Aiguille du Midi paraissent bien petits… quoi que ! N’oublions pas les lois de l’équilibre et de la pesanteur…

FICHE TECHNIQUE

Une fiche technique accompagne chaque course décrite. Conçue afin de préciser les données essentielles de chacune de celles-ci, elle a été établie selon des critères choisis personnellement : le lieu de départ, les moyens d’y accéder, les caractéristiques techniques et d’autres informations, concrètes et abstraites, indispensables au projet et à sa réalisation. La présentation de la plupart des itinéraires avec pour certains des conseils, des anecdotes ou des réflexions, permettront au lecteur de se représenter au mieux chacune des courses. L’itinéraire indiqué est celui qui paraît le plus fréquenté, le mieux adapté et, pour la plupart des numéros, celui que l’auteur a suivi, skié et apprécié.

Voici l’explication des différents critères repris dans chacune des fiches techniques de ce guide. Chaque critère est représenté par un symbole.

Départ : c’est le lieu précis d’où l’on part avec les skis (ou snowboard). Les moyens d’y parvenir sont généralement indiqués (télés, voiture, train…). Si l’arrivée d’une course est différente, cela sera précisé.

Dénivelée : indiquée à la montée et à la descente par une flèche. Elle est simple (pour une course à la journée) ou double (pour une randonnée en deux jours : J1, J2).

Orientation : elle correspond à l’orientation principale de la course ou, pour certaines, à la partie décisive considérée (couloir principal ou autre zone intéressante de la course). Selon la période au cours de la saison de ski et la température ambiante, cette indication n’est pas toujours significative des qualités de neige, notamment pour les versants soumis au soleil rasant en début d’hiver et très actif en mai ou juin.

Période : considérée comme étant la plus favorable de la saison. Néanmoins et ceci d’une année à l’autre, il arrive que cette période soit bien fluctuante (en raison de l’évolution actuelle provoquée par le changement climatique). Pour être plus certain du bon choix, il est nécessaire de recueillir les informations correspondantes (centre de pisteurs, météo locale, bulletin nivologique, bureau des guides…).

Durée : temps nécessaire à un skieur-alpiniste normalement entraîné et progressant à un rythme régulier pour réaliser une course. L’horaire est calculé depuis le lieu marqué départ et il comprend le temps nécessaire à la montée et à la descente, en tenant compte de quelques arrêts. Il est évident que celui-ci est très variable selon l’entraînement, les conditions de neige, le chargement du skieur… L’horaire est détaillé par jour lorsque nécessaire et compte une moyenne d’1h pour parcourir 350 à 400 mètres de dénivelée à la montée. Cet horaire est estimé plus court depuis l’allègement du matériel, de l’entraînement assidu et… des possibilitées d’appeler les secours.

Photo : la fiche technique reprend le numéro de la page où l’on pourra trouver une photo d’ensemble de l’itinéraire et/ou de ses variantes avec indication du parcours. Ces photos ne peuvent cependant remplacer la carte IGN dont elles ne sont qu’un complément d’information.

Un trait continu reprend l’itinéraire de descente principal et sa (ses) variante(s).

En pointillés sont reprises les parties cachées d’un itinéraire.

En tirets sont reprises de courtes descentes permettant d’effectuer certaines liaisons entre deux itinéraires ou pour varier l’itinéraire habituel proche.

Les flèches de couleur orange indiquent certaines descentes ayant déjà été réalisées, mais n’ayant pas été retenues dans ce guide car elles sont exceptionnellement difficiles, trop rarement en conditions et trop souvent risquées. En outre, elles requièrent souvent des aides extérieures (hélico, rappels, etc.).

Niveau technique : ce niveau est une valeur abstraite qui est directement liée au skieur et à ses capacités techniques. Nous procédons à une cotation en quatre degrés avec chacun trois subdivisions et un cinquième degré ouvert vers le haut. Essentiellement liée à l’inclinaison de la pente et aux caractéristiques du relief, elle n’est pourtant que technique. En outre, la valeur globale de la course (marche, engagement, durée, difficulté d’itinéraire…) est identifiée par la cotation traditionnelle d’alpinisme (F : facile, PD : peu difficile, AD : assez difficile, D : difficile, TD : très difficile, ED : extrêment difficile, ABO : abominablement difficile et extrêmement risqué).

Le niveau technique requis pour la descente considérée correspond à celui du skieur qui maîtrise bien son évolution en neige ferme (dure ou légèrement adoucie par le soleil, ou froide, mais permettant assez peu aux skis de s’enfoncer). À l’inverse, en conditions de neige lourde ou poudreuse dans laquelle les skis s’enfoncent beaucoup, la valeur technique est radicalement différente car une chute peut être vite enrayée. Dans ce cas, pourquoi ne pas skier toujours en neige molle ? Plusieurs éléments de réponse peuvent être apportés :

– il faut que le manteau neigeux soit assez stabilisé pour ne pas s’effondrer au passage d’un skieur ;

– que les dangers objectifs du type chutes de pierres, ruptures de corniches, coulées de fonte,… soient moindres ou contrôlables ;

– que la reconnaissance du parcours à la montée soit suffisante pour convenir des marges de sécurité (plaques de glace, rochers émergents, etc.).

Pourtant, au vu du nombre de skieurs et surfeurs extrêmes qui dévallent régulièrement les pentes dans ces conditions de neige molle, force est de constater que ces critères ne sont plus aussi respectés qu’auparavant…

En tout cas, la cotation technique ne peut se définir autrement qu’en neige ferme comme critère de référence.

Niveau 1 : skieur capable de sortir des pistes et de skier dans les pentes n’excédant pas 30 °, les forêts ouvertes, les couloirs et combes larges, avec des dénivelées peu importantes (moins de 800 mètres) et peu de risque d’avalanches.

Exemples : Pré du Rocher (Plan de l’Aiguille), Arpille de la Ravoire, Bec Rond à Bavon, col des Dards, lacs Jovet.

Niveau 2 : skieur hors-pistes dans des reliefs plus accidentés et des forêts plus denses, des neiges parfois relativement difficiles et parfois dures, dans des pentes atteignant 35 ° avec des dénivelées dépassant 800 mètres.

Exemples : Aiguillette des Houches, col Infranchissable.

Niveau 3 : accès au ski-alpinisme, technique suffisante pour contrôler son évolution en couloir, pente atteignant 40 °, dénivellation et moyenne de pente plus soutenue et engagée.

Exemples : Mont Blanc du Tacul, traversée des Miage, glacier d’Armancette.

Niveau 4 : ski de pente raide atteignant 50 ° sur des passages courts, couloirs étroits et reliefs très difficiles. Terrains glaciaires très accidentés.

Exemples : glacier Rond, glacier du Milieu, Spencer, Grandes Jorasses.

Niveau 5 : entrée dans le ski extrême, avec dénivelées importantes (plus de 1000 mètres) dans des couloirs et des pentes de forte inclinaison dépassant les 50 °. La maîtrise technique du skieur, son matériel et sa préparation mentale doivent être optimales. Ce niveau 5 est ouvert vers le haut et comprend par conséquent des pentes à plus de 55 °, très rarement enneigées et exceptionnellement skiables.

Exemples : couloir Cordier, le Linceul aux Grandes Jorasses.

Pente : celles-ci sont relevées directement sur les cartes IGN du secteur au 1/25 000 et par mesure sur place dans certains cas. Cependant, ces données sont toujours à relativiser. Inutile de préciser que la qualité de la neige va déterminer la difficulté réelle de la pente. Une pente à 35 ° verglacée est en effet nettement plus difficile à skier en sécurité qu’une pente à 45-50 ° en poudreuse. Par ailleurs, l’éclairage de la pente est un facteur supplémentaire pour mettre en évidence son relief et même la valeur de son inclinaison. Ainsi, les pentes à l’ombre, type face nord, deviennent un peu plus difficiles.

De plus, bien que l’inclinaison soit un élément essentiel dans la fiche technique, sa valeur doit être lue en parallèle avec la dénivelée. On évitera donc d’indiquer la pente moyenne, mais plutôt les passages les plus raides avec la hauteur s’y rapportant (par exemple : 45 °/250 m). L’inclinaison de certains passages courts en haut d’un couloir (peu ou très enneigé) ou dans certains dévers peut évoluer de plusieurs degrés. Ainsi, la pente moyenne du fond du couloir Gervasutti à la Tour Ronde ou du couloir sud du col Armand Charlet est de 45 °: en fait, les pentes latérales skiées atteignent amplement les 50 ° !

Dangers : j’ai préféré le terme de danger à celui d’exposition, parce qu’il me semble plus concret d’annoncer les risques objectifs rencontrés au cours d’une excursion (avalanches, chutes de séracs, de pierres, de corniches, impacts lors d’une glissade, etc.) que les risques subjectifs qui devraient être maîtrisés par le skieur-alpiniste. En effet, le danger d’un glacier tourmenté et de ses crevasses cachées, la plaque à vent régulièrement en suspens, les pierres décollées par l’action du fœhn ou du soleil trop actif, la coulée qui démarre d’un versant non visible, etc. doivent être indiqués s’il sont connus et repérés régulièrement. Ils ne sont heureusement pas présents à chacun de nos passages, mais font partie du contexte de nos aventures alpines : peut-être même leur apportent-ils un certain piment… ?

Danger 1 : peu de risques de glissade après une chute. Peu de dangers objectifs. Engagement correspondant au ski en montagne, assez peu éloigné des secteurs sécurisés (remontées mécaniques, routes, villages).

Danger 2 : en cas de glissade après une chute, le risque de heurter ou percuter un relief (rocheux) ou des arbres peut avoir des conséquences sérieuses. Les dangers objectifs (chutes de pierres, séracs, corniches, avalanches) existent et menacent surtout en conditions défavorables de la montagne (chaleur, vent, etc.). La course est éloignée ou techniquement engagée.

Danger 3 : la chute n’est plus permise et seul le hasard ou la chance éviteraient le pire. L’éloignement ou la difficulté technique augmentent le risque. Il est indispensable que le skieur soit techniquement très expérimenté et moralement très solide afin de parfaitement contrôler à tout moment ses prises de décision.

Matériel : la liste ci-dessous n’est pas exhaustive. Il me semble cependant utile que certains détails soient mis en évidence, afin qu’elle soit vérifiée et adaptée à chacun. Utile pour les uns, sujet de polémique pour d’autres, mais dans tous les cas nécessaire avant de partir.

Le sac hors-piste à la journée (HP) : il contiendra une pelle, une sonde, un DVA (airbag, Recco…). En plus, mettre dans un petit sac plastique : un bonnet, une paire de gants légers de rechange, une paire de lunettes (masque), un tee-shirt. Dans un autre sac de couleur différente, le matériel minimum de réparation : rondelle de bâton, rouleau adhésif (type strappal), caoutchoucs élastiques de chambre à air, piles de rechange DVA, couteau, allumettes ou briquet, matériel de secours et pharmacie, petite lampe frontale, peaux de phoque si montée.

Le sac de randonnée de un ou deux jours (RM) : il contiendra, en plus du premier, ce qui concerne la réparation éventuelle de fixations ou crochets de chaussures (fil de fer, ficelle, pince-étau, couteau-outils). Prévoir un supplément en habillement, une vraie veste duvet légère… Souvent, pour ce type de sortie, il est nécessaire de prévoir un piolet, des crampons, une corde plus ou moins longue (main courante ou rappel pour corniche), un baudrier… Penser aux sacs en plastique pouvant être utiles en maintes occasions, y compris dans le rôle de corps morts. Il n’est pas exagéré de prévoir un petit réchaud de survie. Sur glacier, compléter par le matériel de sécurité requis (broches à glace, anneaux de sangle ou de cordelette, mousquetons, matériel pour effectuer un mouflage).

Le sac de haute montagne et couloirs raides (HM) : en plus du contenu des deux premiers sacs, prévoir le matériel technique de ski-alpinisme requis pour la course choisie (pieu à neige, fil de fer pour installer une lunule ou abalakov, casque, etc.).

L’équipement et le matériel habituel de montagne tel que celui de navigation, de confort ou de sécurité (crème solaire, airbag, sifflet, altimètre, boussole, carte, téléphone, radio, GPS, fusées de détresse…) n’est pas mentionné ici, mais il n’en est pas moins indispensable.

Dans la trousse de pharmacie, on peut prévoir, outre de l’aspirine, des comprimés pour calmer les maux de gorge, la toux, les inconforts de l’estomac, de quoi soulager et soigner les plaies, les brûlures, les coups ou les courbatures (arnica), le reste de la pharmacie devant être indiquée par un médecin ou un pharmacien.

Dans certains cas d’éloignement important, une attelle (nouveaux matériaux adaptés), voire un traîneau de secours peuvent être aussi emportés, mais seulement dans le cas de skieurs évoluant en équipe.

ÉVOLUTION DU MATÉRIEL

Le matériel évolue sans cesse et fait progresser la technique, les performances ainsi que le confort et la sécurité. En somme, grâce à l’évolution du matériel, le skieur-alpiniste peut atteindre plus vite et plus facilement un bon niveau. Cependant, le marché nous propose une quantité impressionnante de produits et il est parfois difficile de faire le choix entre le nécessaire et le gadget. Ne cédons pas à la surconsommation… D’autre part, une utilisation adéquate du matériel répond à une information de bonne qualité. Il est ainsi courant de voir au départ de l’Aiguille du Midi (pour la Vallée Blanche) des skieurs harnachés de nombreuses sangles ou cordelettes, voire d’autobloquants (poignées !), pendus au baudrier. Si tout cela était correctement attaché, il n’y aurait pas autant de risques à s’y prendre les pointes des crampons et risquer de basculer en face nord !

Un autre exemple fréquent est de croiser ou doubler des randonneurs sur un plat ou une légère montée avec les cales en place et les couteaux : serait-ce pour « rentabiliser » leurs achats que ces compagnons utilisent à mauvais escient tout ce matériel ?…

Chevalier de la Légion d’honneur

Légèreté, efficacité et polyvalence sont probablement les critères les plus recherchés par le skieur-alpiniste.

J’utilisais les skis que j’avais apprécié dans les entraînements et compétitions de slalom durant l’hiver.

Dès 1973, je raccourçis la longueur de 2,07 m à 2,04 ! Nous avions le souci de garantir l’équilibre avant arrière et l’accroche sur les neiges très dures.

Les skis actuels, conçus avec de nouveaux matériaux plus résistants, ouvrent ainsi la porte aux skis courts. Où l’on est surpris de constater l’exemple de Kilian Jorget, le coureur des cimes, descendre avec des skis quasiment n’importe où, autant en neiges difficiles que sur les rochers – le temps où nous passions la veille d’une descente difficile à limer, aiguiser nos carres est bien révolu. Notre paire de skis était alors si précieuse et nous prenions soin de notre « formule un ». Comme le gain de poids de tous ces matériels est divisé au moins par deux, nous n’hésitons plus à emporter l’équipement, même si le plaisir d’une belle descente n’est plus toujours le critère principal. L’évolution actuelle est de descendre avec les skis aux pieds sur tous les terrains, même rocheux, avec cordes, piolets et autres engins. Rien de surprenant puisque l’homme est ainsi conçu et désire découvrir en permanence.

Habillement. On va plutôt se diriger vers des produits légers, mais en prévoyant de les doubler, tels que pulls fins (polaires ou autres) et, pas nécessairement très chauds. Idem pour les pantalons, les gants… L’avantage étant de pouvoir composer en cours de route ou même selon la course, s’alléger encore en fonction de la durée, de la difficulté, de la météo… De même, il est indispensable de pouvoir changer des sous-vêtements mouillés. À part pour les sportifs très performants « qui ne s’arrêtent jamais », il faut admettre que, même avec les nouvelles matières, se changer permettra d’éviter un coup de froid qui pourrait devenir un lourd handicap pour le soir ou le lendemain. En effet, avec un sous-vêtement mouillé, on ne se réchauffera pas à l’arrêt (et pire à la descente !), même en se couvrant davantage par-dessus.

Sur la tête, un bandeau n’est pas toujours suffisant pour se protéger du froid ou de l’humidité. Le bonnet (ou le casque chaud) est toujours préférable.

En bas, un sur-pantalon léger permettra justement de doubler le premier, agréable à porter et plus proche d’un collant en laine ou en polaire stretch. Sinon, les tenues gore-tex sur un collant léger conviennent parfaitement, d’autant que le bas de celles-ci est muni de fermetures (ou élastiques) évitant le complément en guêtres.

Les combinaisons totales ne sont pas très pratiques et sont mieux adaptées au ski hors-piste d’hiver. De surcroît, dans les pentes raides, surtout en neige dure, il est plus prudent d’avoir une tenue qui ne glisse pas trop en cas de chute…

Chaussures. Un vaste choix permet de trouver le modèle bien adapté à ses pieds et à ses goûts. Devenues presque aussi dures que celles de piste, les chaussures de randonnée ont surtout l’avantage de la « semelle » à crampons. J’ai utilisé longtemps des chaussures de piste, très légères, à entrée arrière, avec seulement deux crochets et une semelle « vibram ». Elles avaient l’avantage du gain de poids, de la qualité technique et de la commodité (chaussons hyper légers, préformés au four !). Cependant, il est préférable de ne pas utiliser des chaussures très rigides, hautes et lourdes en randonnée, d’autant plus qu’en descente (même en hors-piste), le manque de flexion avant-arrière de la cheville devient un handicap, surtout en forêt et dans les couloirs étroits.

De façon à personnaliser sa chaussure de randonnée, on peut remplacer le chausson traditionnel à lacets par un chausson normal de chaussure de ski alpin (plus confortable et plus technique…). Et si l’avant-pied n’est pas assez serré, il suffit d’ajouter entre la coque et le chausson une semelle pour rehausser le pied et être ainsi mieux maintenu !

Skis. Les skis paraboliques et larges sont si agréables qu’il serait regrettable de poursuivre avec les anciens longs et étroits. Néanmoins, il vaut mieux éviter les modèles trop larges, trop taillés et trop lourds qui conviennent mieux au hors-piste ou aux déposes en hélico ! Les skis de randonnée actuels sont excellents en toutes neiges et suffisants en neige dure et en couloir. Le trou à la spatule paraît indispensable. Attention à ne pas négliger l’entretien des skis (fartage, réparations de la semelle et affûtage des carres). La différence est essentielle, notamment en neige « savon », fraîche humide.

Mon père Jacques Baud (2e à gauche) et ses compagnons à Morzine vers 1930

Fixations. De la fixation simple et ultra légère, conçue davantage pour la performance, aux fixations de randonnée plus lourdes mais pratiques, le choix est vaste. À cela s’ajoutent les plaques adaptables sur les fixations de pistes. Deux modèles (le « sécurafix », l’original, difficile à régler, ou l’« alpine-trekker », la copie, plus pratique) permettent de garder les avantages techniques des chaussures et des skis de piste. Cette adaptateur s’utilisera plutôt pour les randos courtes ou pour monter à l’accès d’un couloir sérieux.

Peaux. Avec les skis légers et paraboliques, il n’est pas nécessaire de recouvrir toute la surface du ski. S’il nous reste des peaux plus étroites, l’astuce est de passer d’un bord à l’autre en zigzagant en une sorte de S.

Le système du crochet reste très commode et garantit l’utilisation malgré un défaut de collage. De plus, le crochet de la spatule est muni d’un caoutchouc et du réglage en longueur permettant de changer la longueur du ski le cas échéant et d’ôter les peaux sans déchausser les skis !

Attention à bien éviter de plier la peau à moitié en collant le bout directement au milieu car il sera alors difficile à décoller. Pour régler ce problème, penser à garder un petit carré de plastic (emballage de l’achat) pour toujours protéger cette extrémité. Sinon, le poser plutôt sur la partie sans colle, sous le crochet. On peut aussi farter la peau pour améliorer sa glisse et assurer son vieillisement. En journée, je la roule plutôt en escargot pour la plier rapidement dans le sac.

QUELQUES CONSEILS DE L’AUTEUR

Préparation d’une sortie : observation régionale

Connaître au mieux l’enneigement et sa qualité, par les informations locales (bulletins météo, bureaux des guides, écoles de ski, pisteurs…).

Se méfier des courants du sud ou sud-ouest qui font beaucoup varier les conditions du massif du Mont Blanc (même la météo locale, malgré sa bonne volonté et ses excellentes capacités, connaît parfois des difficultés d’une vallée à l’autre par conditions de fœhn). Le responsable de la course doit en outre faire la préparation sur carte avec feuille de route (altitudes, cap, distances, temps estimé, GPS). Prévoir un objectif de remplacement en cas de changement météo, d’un télé retardé ou d’une trop grande affluence. En effet, un beau projet du matin peut aussi se terminer très tard, dans des conditions de neige désastreuses ou aux limites de la prudence. Il faut savoir être opportun, observer, écouter la montagne. L’homme doit s’adapter et décider en s’aidant des multiples sources d’informations de son époque (contacts sur place, livres, topos…).

Vérifier son matériel.

En route : observation locale

Sur place, si possible se renseigner sur la provenance du vent pendant et après la dernière chute de neige. La température a-t-elle évolué selon l’isotherme zéro, le rayonnement solaire ou l’effet du vent ont-ils été plus forts que la normale ?

Vérification des moyens mis en place (télés, organisation des transports… !).

En cas de départ en montée, se dévêtir assez tôt pour éviter de transpirer. Prévoir des arrêts judicieux, à l’abri des coulées, du vent, au soleil… et éviter de stopper en pleine pente (choisir un replat pour redémarrer doucement).

Garder les distances entre chacun des skieurs présente entre autres avantages de ne pas se gêner, de profiter de la belle montagne et de l’observer dans le silence, d’éviter de surcharger une pente de neige et, le cas échéant, de ne pas être emportés tous ensemble, de faire un demi-tour ou une conversion à son propre rythme…

La montée en peaux de phoque commence à un rythme assez lent, en longues foulées et souvent sans utiliser les cales ! La trace, pieds assez écartés, doit s’anticiper sur le relief pour éviter les conversions. Utiliser toute la largeur de la pente (aux limites de la sécurité) en gardant une inclinaison constante. Sauf pour rechercher la performance, on évitera les traces trop raides. En général, une bonne trace régulière, sans arrêts pour souffler, est aussi rapide qu’une trace directe faite avec les cales de montée durant laquelle certains pratiquants s’arrêteront souvent par nécessité !

Sur glacier, pour une cordée de plus de deux personnes, on conseillera un encordement de type « téléphérique » avec un ou deux anneaux autobloquants (ou shunts).

À la descente : observation locale

En cas d’accumulation de neige, pratiquer un sondage plus ou moins élaboré (du sondage au bâton jusqu’à la réelle coupe de neige organisée, sondage de battage). En cas de neige dure, examiner la pente, le relief, les ruptures de pentes ou barres rocheuses qui doivent faire prendre conscience du risque de chute ou de glissade.

Dans un beau champ de poudreuse, il faut toujours rester distants les uns des autres et se discipliner en « traces de peigne » de préférence : cela à l’avantage d’utiliser le minimum de terrain, de descendre un par un en se surveillant, de ne pas surcharger la pente, de respecter les traces des précédents, de laisser de la place aux suivants (la montagne est à tout le monde !), de ne pas trop s’éloigner en coupant ailleurs le manteau neigeux déjà fragilisé par les skieurs précédents et surtout, d’essayer de laisser une belle signature ! C’est davantage qu’un champ de spaghetti, laid et pas confortable à skier !

Anticiper suffisamment pour prévoir chaque arrêt à l’abri, quitte à traverser davantage pour trouver une arête, une croupe, un rocher ou un arbre…

Sur glacier, se méfier des pentes dont le pied est coupé par une crevasse ou une rimaye. Attention toujours aux pentes convexes

En cas d’obligation de franchir une pente de plus de 30 ° d’inclinaison dont la couche de neige est incertaine, voire dangereuse, vérifier qu’il n’y a pas un autre chemin plus sûr… Avant de se décider, s’imaginer dans une situation où l’on serait seul, sans DVA, sans secours immédiat (même si ce n’est pas le cas, cela évite de prendre des risques inconsidérés !). Se vêtir davantage (foulard, cache-nez, masque…). Bien attacher son sac à dos (sauf s’il est trop lourd et qu’il gêne tout mouvement rapide, auquel cas on peut enlever une bretelle), ôter les dragonnes des bâtons.

S’il y a départ de plaque, pousser très fort sur les bâtons avec l’objectif de traverser vers la surface immobile. On peut dans certains cas utiliser les blocs glissants et, d’un pied à l’autre, se dégager en amont de la masse de glissement, mais cela demande une agilité et des réflexes accrus !

Dans la plupart des cas, il faut éviter de tirer droit vers l’aval, la vitesse de l’avalanche augmentant rapidement (neige poudreuse jusqu’à 300 km/h !).

Dans le cas où l’on risque d’être recouvert, il faut se battre et essayer de rester en surface, si possible sans avaler de neige et, lorsque l’on est immobilisé, tenter de se garder une cavité pour respirer (tout cela est très théorique, mais il faut le garder en mémoire pour optimiser ses réflexes). Notons que les systèmes de protection Avalung ou ABS ont déjà fait quelques preuves et qu’ils peuvent être efficaces.

En neige molle ou en couloir, toujours s’écarter de la ligne de descente du skieur en amont (coulée, chute…).

Penser à durcir les sécurités des fixations.

Privilégier l’utilisation du DVA et du système Recco.

Je pourrais donner encore de nombreux autres conseils, mais je rappellerai que trop d’accidents sont dus à des négligences basiques et que la somme de petites erreurs est souvent la cause de l’accident…

Encordement sur glacier

L’encordement sur glacier n’est pas toujours bien adapté à l’évolution à ski. Aussi je préconise de procéder comme suit.

Pour une cordée de 2 personnes :

attacher le bout de la corde au baudrier avec un nœud ou un mousqueton de sécurité ;

faire 2 à 3 anneaux autour du buste (au-dessus de la bretelle du sac !) ou, si la corde est suffisamment longue, s’encorder en « N », avec pour chaque partie lovée dans le sac 3 mètres supplémentaires ;

s’encorder grâce à un nœud (cabestan plutôt que 8) sur 1 (ou 2) mousquetons de sécurité à son baudrier ;

placer le système auto-bloquant (nœud de machard, prussik ou « shunt » de Petzl) relié au pontet du baudrier par un nœud tête d’alouette.

Chaque skieur s’étant encordé de cette manière avec un intervalle de 15 à 25 mètres offre l’avantage :

- soit, lors d’une chute en crevasse de son compagnon, de le retenir immédiatement et d’organiser sa récupération (amarrage solide grâce au complément de corde lovée et mouflage) ;

- soit, si le skieur chute lui-même, de mettre en place un second auto-bloquant (nœud de cœur ou autre auto-bloquant au pied), de libérer le nœud du mousqueton du baudrier et de commencer son auto-sauvetage.

Pour une cordée de 3 personnes ou davantage :

le premier et le dernier s’encordent comme ci-dessus. Ensuite le ou les autres skieurs sont attachés à l’aide d’une longue queue de vache (potence de 30 cm maximum). Ceci est valable sur un glacier peu crevassé et peu tourmenté.

Dans le cas d’un glacier bien crevassé avec de nombreux obstacles et des reliefs très marqués, je préconise l’encordement en « téléphérique » du ou des compagnons médians. Procéder comme suit :

passer la corde dans le mousqueton de sécurité du baudrier ;

mettre en place deux autobloquants sur la corde, un de chaque côté du mousqueton. Il peuvent être reliés directement au pontet à l’aide d’un court anneau et du mousqueton de sécurité.

L’avantage de ce système est que lors d’une évolution comprenant de nombreux virages, ruptures de pentes, crevasses recouvertes, etc., le ou les skieurs médians peuvent assurer le premier, qui peut ainsi prendre davantage de distance pour le franchissement d’un obstacle. Il leur suffit de « débrayer » l’un des deux autobloquants, puis de revenir en « débrayant » l’autre. Cette technique évite les situations fâcheuses et hors sécurité d’un espace ne convenant pas aux intervalles des obstacles (crevasses). Elle permet aussi de se régler au rythme de la descente ou de la montée et surtout de s’assurer convenablement.

Très rarement, en cas d’isolement d’une seule cordée de 2, il est possible de s’encorder comme ci-dessus en pratiquant des nœuds au milieu de la corde (pour enrayer une chute en crevasse). Cependant il est indispensable dans ce cas que chacun dispose d’une corde assez longue pour secourir le compagnon dans la crevasse, en doublant la corde d’assurance immobilisée dans la lèvre de la crevasse. Il faut aussi être conscient qu’en utilisant ce système, les nœuds posent un réel problème pour le mouflage du haut et pour l’auto-sauvetage. En effet, si le freinage créé par les nœuds permet d’enrayer assez efficacement une chute, ces mêmes nœuds deviennent cependant un lourd handicap qui nécessitera une intervention extérieure pour libérer la cordée. Dans ce cas, les compagnons seraient beaucoup plus efficaces s’ils faisaient partie de la cordée en devenant des « corps morts »... vivants et utilisables, se substituant ainsi aux nœuds ! Ne pas hésiter à consulter les excellentes explications par dessins fournies par certains fabricants de matériel, comme Petzl.

Évaluer le risque et repérer le danger

Recueillir des informations (BRA,…) est indispensable, mais cela ne suffit pas car celles-ci ne sont que des probabilités. Il faut donc les affiner par une évaluation personnelle du risque. Pour cela, il est nécessaire de prendre trois facteurs principaux en considération :

les conditions nivologiques et météorologiques (connaissances !) ;

la topographie du terrain (inclinaison, orientation, profil, zones d’écoulement) ;

les personnes qui constituent le groupe ou que l’on peut côtoyer ou qui nous regardent (facteur humain très important).

Pour chacun de ces facteurs, repérer les signes négatifs.

Attention !

lors de précipitations de neige importantes, la situation devient dangereuse bien plus tôt pour les avalanches à déclenchement provoqué que pour les grandes avalanches à déclenchement spontané ;

la neige fraîche accompagnée de vent est la cause principale des avalanches ;

le premier jour de beau temps après une période de précipitations est assurément le plus dangereux. Mais le danger peut perdurer pendant plusieurs jours, voire plusieurs semaines, en certains reliefs favorables.

Gérer le risque et décider

Étudier et replacer les trois facteurs principaux dans trois périodes successives :

avant (préparation) ;

pendant (au début de chaque séquence de progression en partie visible du terrain) ;

pendant (sur chaque zone estimée délicate).

Procédure à respecter pour chacun des facteurs :

détecter le danger (signes négatifs, signaux d’alarme) ;

analyser le danger (doutes faibles, doutes, doutes sérieux, doutes très sérieux) et décider (oui ou non) ;

Si oui, chercher encore à minimiser le danger.

Procédure à respecter pour minimiser le danger probable :

intervalles ou distances entre chaque participant à la sortie ;

choix du parcours (utilisation du terrain) ;

vitesse et mode de progression adaptés aux conditions ;

contact visuel et auditif ;

zones de regroupement judicieuses ;

éviter les zones critiques (pentes convexes en neige fraîche ou profonde) ;

ne jamais s’engager dans une pente plus forte (changement de pente) sans un arrêt préalable pour observer le terrain en aval ;

être correctement équipé (DVA, pelle, sonde, Recco…) ;

éviter de skier en amont ou en aval d’un autre skieur ;

respecter la trace unique lorsqu’elle s’impose.

Conclusion

Humilité (par rapport au milieu naturel qui ne se contrôle pas !)

Modestie (par rapport aux autres)

Curiosité (apprendre à connaître la neige)

Prudence (réfléchir, observer)

Skier dans les descentes les plus abruptes, les pentes les plus raides ou les plus étroites reste toujours très motivant, voire même grisant. L’évolution vers les extrêmes se comprend dès lors que l’on peut garder une marge plus ou moins réelle de sécurité.

Avec les températures plus douces de nos dernières décennies, la neige parvient à tenir sur les faces et couloirs les plus escarpés, même en plein hiver. Auparavant, les vents glacés de l’hiver et les températures constantes au-dessous de –20°, interdisaient même l’idée de skier en faces nord. Seules les ascensions hivernales extrêmes étaient pratiquées par les alpinistes exceptionnels tels que Bonatti, Desmaison, Seigneur et leurs équipiers. Ainsi, il fallait attendre la fin de l’hiver pour débuter le ski de printemps, puis la transformation des neiges en névés ou couches compactes, skiables grâce à l’action du soleil. De même que les ascensions étaient plus logiques en neige dure pour accéder aux sommets. Depuis quelques années, les neiges d’hiver conviennent très bien au ski en pente raide car elles s’accrochent davantage grâce aux températures plus élevées.

Pour autant, certains risques dus aux avanlanches demeurent bien qu’en pente très raide, la « purge » se fasse essentiellement lors de la chute de neige. Si je réitère les mises en garde ou certains critères inhérents au ski en pentes raides, c’est aussi en observant autant de traces partout dans certaines périodes, comme au printemps 2016.

En revanche, je trouve regrettable l’afflux dans certaines pentes comme le Glacier Rond, ou sans scrupules ni respect, les skieurs se bousculent et s’envoient leurs coulées parfois traumatisantes, devenant bientôt meurtrières.

Renoncer n’est pas une forme de lâcheté, cela peut même être une preuve de courage et d’intelligence. Sentir le danger ou craindre le pire, ce n’est pas avoir peur : au contraire, c’est écouter certaines de nos intuitions, même si l’audace et l’opportunité demeurent une part intégrante de nos aventures en montagne.

L’AUTEUR

Né à Morzine en 1948, Anselme Baud a marqué depuis de nombreuses années l’évolution du ski de pente raide dans les Alpes. Guide de haute montagne en 1973, il est l’auteur d’un nombre impressionnant de premières descentes extrêmes dans les Alpes (face nord de l’Aiguille Blanche de Peuterey, face nord de l’Aiguille du Midi, arête de Peuterey, col Armand Charlet, etc.), dans les Andes (Vintinani, Huayna Potosi, etc.), en Antarctique (couloir nord-ouest du Vinson), ou encore en Himalaya (Dhaulagiri, Yalung Kang). Professeur à l’ENSA, il a pris part pendant plusieurs années à la formation des guides de montagne en Bolivie et au Népal. Outre son activité de guide de montagne qu’il exerce à Chamonix, il encadre régulièrement des expéditions d’alpinisme et de ski sur tous les continents et a participé à la réalisation de plusieurs films d’expéditions et de ski extrême (réussite des sept plus hauts sommets du monde avec clients). Slalomeur de haut niveau, parachutiste, puis parapentiste des premiers vols, télémarkeur lors de la renaissance de cette discipline au début des années 80, il reste le montagnard toujours prêt à de nouvelles aventures sportives en pleine nature.

Anselme Baud

CARTES UTILISÉES

FRANCE :

IGN 3531 ET Saint-Gervais-les-Bains (Top 25)

IGN 3630 OT Chamonix-Mont-Blanc (Top 25)

SUISSE :

1345 Orsières (1 : 25 000)

1344 Col de Balme (1 : 25 000)

1324 Barberine (1 : 25 000)

1325 Sembrancher (1 : 25 000)

1365 Grand Saint Bernard (1 : 25 000)

282 Martigny (1 : 50000)

292 Courmayeur (1 : 50000)

ABRÉVIATIONS

km: kilomètre(s)

m: mètre(s)

h: heure(s)

min. : minute(s)

ref. : refuge

bel. : belvédère

pass. : passage(s)

HP: hors pistes

RM: randonnée de montagne

HM: haute montagne

CRÉDIT PHOTO

Toutes les photographies proviennent de la collection Anselme Baud, à l’exception des suivantes : Emmanuel Moy (274), René Robert (167), Jean-Pierre Mansard (37 bas), Toru Nakano (139 haut), Damien Deschamps (141), Christopher Baud (195), Fabian Bodet (221), Shutterstock + Fotolia (couverture).