Naufrages en Miroir - Sophie Détample-Caron - E-Book

Naufrages en Miroir E-Book

Détample-Caron Sophie

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Beschreibung

Il suffit parfois d'une rencontre pour se sentir mieux...


Ce roman est un feel-good qui raconte l'histoire de quatre naufragés, un naufragé réel, jeune surfeur échouant sur un phare de pleine mer, et trois naufragés de la vie, dont une femme se retrouvant subitement handicapée, une femme maltraitée et un "homme largué". Ces personnes en souffrance vont se rencontrer de façon fortuites et se rassembler pour monter ensemble un projet commun.


Un roman feel-good qui parlera à tous les "naufragés" de la vie !



À PROPOS DE L'AUTEURE


L’auteure hypersensible a trouvé, depuis sa plus tendre enfance, refuge dans les livres. D'une âme poète son stylo l'a très tôt aidé à évacuer son trop plein d'émotions qui la rendait timide, susceptible et asociale. En grandissant Sophie Détample-Caron s'est découvert une vocation : « sauver les autres » et pousser constamment l’ « être » à chercher à comprendre le fonctionnement de son cœur afin qu’il soit en résonance avec sa santé et avec le reste de l’humanité. Malgré plusieurs déboires personnels Sophie est resté courageuse. Elle a refusé de s’aigrir et a décidé de faire publier ses romans et ses recueils de poésies pour partager les richesses issues de son imaginaire, inspirées par des situations, des individus, des scénarios et des paysages réels. Elle a décidé de rester dans une dynamique de remise en question et de reconstruction. Les notions d'Amour, de Partage et d'Humanité restent les mobiles principaux de ses écrits.

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Ähnliche


Sophie Détample-Caron

Naufrages en Miroir

Roman complet

NAUFRAGES EN MIROIR

Du même Auteur :

 

* La Nounou, Edition Jets d’Encre, 2017

* La Secte du Bâton doré, Edition Jets d’Encre, 2018

* Un soir une histoire, Edition Jets d’Encre 2018

* Une ombre au tableau, Edition Jets d’Encre 2019

* Naufrages en Miroir-partie 1, Auto-éd janvier 2020

* Naufrages en Miroir -partie 2, Auto-éd février 2020

* Poésies Choisies, Auto-édition 2019

* Poésies Masquées-2020, Auto-édition 2020

* Le Club des 13 Crimes et Sentiments,

Auto-édition octobre 2020

 

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant, aux termes de l’article L.122-5, 2e et 3ea, d’une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à son utilisation collective » et, d’autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d’exemple et d’illustration, « toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l’auteur ou des ayants droit ou ayant cause est illicite » (art. L. 122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

 

Code ISBN : 9798520480440

Marque éditoriale : Independently published

 

(Achevé d’imprimé par Amazon kdp le 14/06/2021)

 

 

 

 

 

 

 

 

Roman Complet

 

 

 

Ce roman « feel-good » regroupe les deux parties de la précédente édition :

 

Les échoués de Saint Lauris

&

Au-delà des maux, les sentiments

 

 

 

 

Note de l'auteur

 

 

Les malencontreuses coquilles orthographiques ou grammaticales qui s'étaient glissées dans les versions précédentes en deux parties ont été corrigées dans ce « roman complet ».

 

Un auteur n'est rien sans lecteur. Un petit mot, une remarque, un encouragement stimule et donne l'impulsion nécessaire pour continuer.

 

N'hésitez pas à laisser un commentaire sur ma page auteur d'amazone dans laquelle vous pouvez retrouver l'ensemble de mes livres.

 

Vous pouvez aussi me retrouver sur la page facebook :

 

https://www.facebook.com/romansamourpassion

 

Merci infiniment et Bonne lecture.

 

Sophie

Sophie Détample-Caron

 

 

 

 

 

 

 

Naufrages en Miroir

 

 

 

 

Roman complet

 

 

 

 

 

 

A

 

 

 

 

tous les naufragés de la vie que j’ai pu rencontrer.

Puisse ce roman vous redonner le courage de continuer à avancer malgré les épreuves.

 

Avant-propos

 

 

 

Mon intention est de faire un parallèle entre plusieurs sortes de « naufrages » : naufrage de la mer, naufrage de la vie, naufrage du cœur, naufrage de l'âme... je voulais démontrer que rien n'est figé et que tout est une questionde point de vue, qu'à l'issue d'épreuves, de malheurs, de souffrances et de terribles moments de solitude on pouvait continuer à avancer en se battant pour parvenir à surmonter l'insurmontable et construire une nouvelle vie à plusieurs, dans l'entraide l'amour et le partage pour aboutir à un avenir meilleur...

 

À vous chers lecteurs de me dire si j'ai oui ou non, réussi mon pari...

 

 

 

 

 

 

 

Première Partie

Les Echoués de Saint Lauris

 

 

 

 

 

 

« Toutes les légendes semblent de cette teinte : bleu naufrage ; d’un tragique outremer. Dans l’eau les formes paraissent indécises, sans plan ni architecture. Elles manquent de permanence. Nulle ne s’attarde, aucune n’est jamais nette. Le clapotis, la houle et les vagues, le roulis et le tangage empêchent l’œil de cadrer, de prendre des repères, de faire le point. Est-ce ovale ou serpentin ? Éloigné ou proche ? Les embruns, les brouillards de tempête ou les brumes de chaleur jetant un voile sur la surface... la mer est belle mais floue... Elle est comme une femme qui refuse de se montrer nue. L’écume, les vapeurs, les nuées lui font un costume qui la rend plus mystérieuse et plus désirable ; et dans lequel elle ondule ou danse sans relâche. La mer est une ballerine immense. Et une créatrice d’illusion... »

 

« Mystères et légendes de la Mer » de Yves Paccalet

 

 

 

 

 

-1-

Un jeune fou

...

 

« L’idée du voyage appelle la légende. Le mythe incite à lever l’ancre. On met le cap au large, on cingle dans l’océan, on se coule au royaume des sirènes, des pieuvres et des serpents géants. »

(Mystères et légendes de la mer d’Yves Paccalet-2004)

 

…...

 

Sur la plage de Hugh Town, sur l’île de Sainte Mary’s, au sud de l’Angleterre, dans l’archipel des Sorlingues, un groupe de jeunes surfeurs s’entraînaient sans relâche. Ces charmants athlètes attiraient les regards, en particulier celui des jeunes filles admiratives de leurs magnifiques pectoraux si amoureusement dessinés ; elles gloussaient, jubilaient et s’esclaffaient en les voyant progresser debout sur leur planche, bravant fièrement les éléments maritimes ; dès qu’elles les apercevaient se faire gifler par une vague qu’ils ne parvenaient pas totalement à dompter, les demoiselles éclataient de rire. Ces jeunes sportifs savaient bien qu’ils provoquaient hilarité et admiration par leur prouesse ; c’est ainsi que l’orgueil et la sensation de toute-puissance qu’il engendra évolua progressivement dans la tête de Gaëtan le rendant, aux yeux de tous, de plus en plus pédant et désagréable de jour en jour. Il ne parvenait plus à avoir une conversation simple sans éprouver le besoin de se mettre constamment en avant en brandissant ses précieux muscles thoraciques ou ses abdominaux en tablettes de chocolat. Il était très bien sculpté, certes, mais il s’était transformé peu à peu en une sorte de machine publicitaire obsessionnelle et imbue ; il en devenait exécrable. Ses amis s’éloignèrent de lui et la gent féminine, déçue d’être délaissée au profit d’un océan de démonstrations narcissiques, s’en détourna également.

 

Le jeune homme ne comprenant pas ce qui se passait ne mouftait pas les entraînements pour autant : il était réellement un excellent surfeur, il le savait pertinemment ! C’est ainsi que dans sa tête se mit à germer un projet grandiloquent qu’il décida de concrétiser : puisque tout le monde lui tournait le dos, il partirait seul défier l’océan. Il se sentait capable maintenant de glisser sur n’importe quelle vague ; les fameuses « vagues scélérates » et même les « vagues tueuses » ne lui faisaient pas peur !

Sans en parler à personne, ce jeune fou mûrit lentement son projet pendant plusieurs mois jusqu’à ce matin-là, à l’aube, où il décida de s’en aller alors que tout le monde dormait encore... ; il estima la météo idéale pour partir avec son sac à dos. Sans avertir qui que ce soit, ce jeune présomptueux imprudent, totalement inconscient des dangers de la mer, quitta la côte sur sa petite planche de surf, pour un périple de plusieurs jours en solitaire, à la conquête du grand Océan.

 

 

-2-

 

...Naufrage sur un Phare...

 

« Au sein de ces volumes liquides l’eau devient plus sombre, plus bizarre, plus angoissante, moirée de glauque et de noir, avec des phosphorescences laiteuses et des reflets d’enfer. En quelques minutes, le plongeur ne sait plus où sont le haut et le bas, l’avant et l’arrière. Il dissout sa raison dans la mer comme une pincée de sel. Il se fond au Grand Tout... » (1)

 

… et c’est ainsi que Gaëtan fit naufrage...

….

J-1/ Je me réveille, je flotte, je me sens mouillé... Je suis allongé, ma tête cogne contre quelque chose de dur par intermittence. Le mouvement des vagues secoue mon bras, la moitié de mon torse et ma jambe. Je me hisse péniblement sur le rebord. Il semblerait que je n’ai rien de cassé. Où suis-je ? Qu’est-ce que je fais ici ? Suis-je en train de rêver ? Après quelques instants je parviens à me redresser, je suis épuisé. Je regarde alentour. Je suis sur la bordure d’un phare entouré de rochers. La fatigue a raison de moi. Même si j’ai froid, je suis enfin au sec. Le vent va m’aider et je peux me laisser aller dans les bras de Morphée ; je suis sauf, c’est l’essentiel.

 

J-2/Mon esprit est encore confus.. Il navigue quelque part entre le rêve et la réalité. Je ne me souviens plus de ce qui s’est passé. Pourquoi et comment suis-je arrivé là ? Enfin, je n’ai rien de cassé et je suis en vie, c’est déjà ça. Pour le reste nous verrons plus tard.

 

J-3/… Un carnet, un bout de crayon, une boussole, un vieux morceau de savon, un gobelet en inox, un petit canif et un santon... c’est tout ce que j’ai trouvé dans l’unique tiroir du bureau en bois que renferme la pièce principale à l’intérieur du phare ! un peu comme de vieux trophées oubliés restés là par erreur exprimant une trace de vie passée à attendre et à observer le reflet intermittent de la puissante lumière diffusée au rythme du vent et du mouvement des vagues. Y avait-il donc un « gardien » ici, vivant au siècle dernier en solitaire observateur et victime impuissante du mouvement de l’océan se jetant paralternance régulière contre les roches acérées de cet îlot ? Combien de temps a-t-il pu vivre en ces lieux avant de « craquer » ? Depuis quand ce phare est-il abandonné ? Je me demande encore et encore ce que je fais là. Comment ai-je atterri ici dans cet univers isolé de tout ? Quelle en est la finalité ? Ai-je le droit d’avoir un quelconque espoir ? Vais-je m’en sortir ? Suis-je puni pour un méfait que j’aurais oublié ? Suis-je déjà mort sans le savoir ?

 

J-4/ Ce matin l’aube pointe à l’horizon et les nuages humides pleurent finement mêlant quelques gouttes froides désagréables à la brume, effaçant pour un instant les lignes parfaites de la rencontre entre la mer, ce petit îlot de terre émergée et le ciel ; mon regard brouillé rendu aveugle aux remous impétueux de la houle sauvage et indomptable se pose incompréhensif sur les bouées amarrées au phare dont le mouvement de tangage me donne la nausée.

 

J-5/ La tempête fait rage.. J’ai faim, j’ai froid. Je bois mon urine depuis deux jours. C’est dégoûtant, mais au moins ça m’aide à tenir. Je dors en boule, calfeutré comme je peux, tout près du mécanisme du phare qui me fournit un minimum de chaleur. En tout cas ici au moins je suis au sec. Même si je dors peu. Le sifflement du vent et le bruit de la mer m’angoissent et me rappellent à quel point je suis une fourmi dans l’univers, qui peut se faire écraser à tout moment, victime insignifiante face aux « éléments ». De plus je me demande si ce phare n’est pas hanté ; parfois j’entends en dessous de moi comme une sorte de hurlement grave et continu et je ressens des vibrations, des secousses et des tremblements un peu comme si des prisonniers souterrains cherchaient à se manifester. Cela me fait peur, je l’avoue. Que va-t-il m’arriver ? Quelle va en être la finalité ? Vais-je me faire soudainement happer par un quelconque monstre marin ou bien les trépassés de l’au-delà sont-ils déjà missionnés pour venir me chercher ? Je ne sais plus que penser.

 

« Ce phare de pleine mer est considéré comme un « purgatoire » voire un « enfer » ; la grotte souterraine qui passe en dessous émet parfois, selon le sens du courant marin, des bruits et des souffles étranges donnant l’impression que cet endroit est hanté ; cela a toujours angoissé énormément les gardiens de ce phare qui ont tous rapidement démissionné... » 1

 

J-6/ Il pleut toujours, ce bruit de martellement en dessous et ce souffle incessant, là, dehors, commencent à me rendre fou.. Je suis de plus en plus tourmenté... je ne bouge plus. Je compte les minutes et les heures. J’attends désespérément une accalmie... par moment il me prend l’envie de sortir et de me jeter à l’eau pour que tout ce brouhaha insupportable cesse dans ma tête. Mais je me raisonne, je m’accroche. Je me dis que si je suis là ce n’est pas vain. Je veux comprendre de quoi il retourne. Le choc a dû être rude ! Et même si je ne me rappelle de rien, j’ai l’espoir que la mémoire me revienne. Ce sera peut-être le cas quand je réussirai enfin à dormir plus profondément...

J-7/ La torpeur me gagne.. La tempête et les bruits ne me dérangent plus. Je suis épuisé.

J7/ suite/je viens tout juste de me réveiller... J’ai dû dormir toute la journée et une partie de la nuit. Je me sens un peu mieux. Le vent commence à se calmer, il pleut toujours mais la mer est nettement moins agitée. Les bruits étranges ont cessé... j’ai encore sommeil. Je vais finir ma nuit. La suite demain.

 

J-8/Aujourd’hui la mer s’est calmée. J’ai réussi à récolter un peu d’eau dans mon gobelet...avec ce qu’il est tombé la nuit dernière, je la bois à petite dose, avec délectation.

J-9/Le ciel s’est dégagé, j’ai enfin aperçu au loin une grande bande de terre ; sans doute la côte ! Elle ne semble pas si éloignée ! Mais il me paraît impossible d’y aller à la nage à partir de mon maudit rocher, car les vagues et la houle s’agitent sans arrêt ! Ce phare semble de plus en plus haut ce monticule sortant de l’eau est de plus en plus proéminent. Comment suis-je arrivé vivant jusqu’ici, porté par les flots, sans m’écraser contre les roches pointues et sauvages de cet îlot isolé ? Y a-t-il d’étranges tourbillons et un phénomène local de marée par ici ? Pourtant, c’est bien une plate-forme qui m’a réceptionné la semaine dernière, me semble-t-il...

...

« Être à Tévennec c’est se heurter au règne absolu du minéral qui oppresse. La moindre parcelle de cet îlot provient du centre de la Terre, de l’enfer magmatique en effervescence sous nos pieds. » (1)

...

J-10/ Je me retrouve face à moi-même : naufragé, isolé et prisonnier de ce phare et de son rocher au milieu de ces fleurs artificielles aux mobiles funéraires que le dernier bateau a dû laisser juste avant de couler... ce n’est qu’une supposition...en fait je n’en sais rien.. Comment le saurai-je ? Ce funeste présage plastifié représente-t-il le symbole prémédité de ce qui m’attend ? L’avenir. Dans quelle mesure peut-on le prévoir, l’anticiper, l’éviter ?...

J’aimerais comprendre, savoir, réaliser. Mais je suis tout seul, un pauvre naufragé sur un rocher qui sera peut-être mon cercueil. L’âme d’un marin précédemment décédé par ici, va-t-elle m’emporter ? Sa vengeance morbide m’attirera-t-elle auprès de lui ? Je ne sais plus où j’en suis, je le reconnais.

Comment donc me suis-je retrouvé ici, seul au monde, en plein cœur d’un océan en furie, enfermé au milieu d’un énorme bloc semi-bétonné sur un îlot pierreux extrêmementdangereux ?Paradoxalement, la puissante lumière salvatrice de ce phare continue àguider une quantité impressionnante de bateaux et d’avions en leur évitant une errance aveugle et meurtrière... Comment un tel instrument d’espoir vital et indispensable pour les humains voyageurs peut-il en même temps générer autant de tristesse et de désespoir à mon âme qui se meurt de solitude et d’absence d’intérêt de la part des créatures de mon espèce ?

 

J-11/....C’est sous un soleil de plomb que je couche ces mots sur le carnet. Enfin ! Ça fait du bien et ça me redonne un peu d’énergie. Je me réchauffe. Je passe des heures à fixer le santon et à lui faire la conversation... il a les bras en l’air et il sourit. Je crois qu’il représente « le ravi » de la crèche provençale ! C’est curieux, je me demande ce qu’il fait là. Mais peu importe, en ce moment c’est mon unique compagnon d’infortune, car comme moi, il est prisonnier de cet endroit... et il continue à sourire, encore et toujours. Cela fait plus de dix jours que je suis ici, ne sachant toujours pas pourquoi, ni par quel miracle, je suis encore en vie.

 

J-12/ J’ai retrouvé les débris d’une planche de surf, venus s’échouer à mes pieds au petit matin. Elle doit être à moi, mais je ne me souviens pas. C’était donc cela ? Intrépide et totalement inconscient je serais parti seul avec ma planche pour provoquer l’océan, à la conquête d’un rouleau géant que j’ai voulu défier ? Quelle folie ! Me suis-je donc pris pour un super héros invincible et immortel ? Que je sois encore en vie à cette heure relève du miracle, même si je me retrouve échoué et totalement isolé sur ce phare oublié. J’ai réussi à confectionner bien maladroitement une canne à pêche grâce aux tiges en plastiques des fleurs artificielles et du fil de nylon qui les reliait entre elles ; j’ai confectionné l’hameçon avec un petit bout de ferraille rouillé qui « pendouillait » juste à côté du crochet servant à verrouiller la porte du phare. Grâce à cela j’ai pu attraper quelques poissons que j’ai dû manger crus ; ce n’était pas très ragoutant mais c’est toujours mieux que de mourir de faim. Je ne sais pas faire du feu avec des pierres. De toute façon tout ce qui pourrait éventuellement brûler est trempé. Le besoin de boire me tenaille en permanence, l’eau de pluie n’a pas suffi, j’ai des crampes d’estomac, j’ai dûme résoudre à boire un peu d’eau de mer ; c’est écœurant. Cela n’étanche pas vraiment la soif, et il paraît qu’à la longue « ça rend fou » et ça déshydrate complètement ; mais pour le moment c’est déjà mieux que rien. J’espère qu’un bateau aura bientôt la bonne idée de passer par ici avant que mon agonie ne devienne une réalité. Je n’ai aucun moyen d’envoyer un SOS ; il n’y a pas de fusée de détresse ni aucune radio. J’ai bien tenté de trafiquer la lumière du phare pour attirer l’attention mais j’ai échoué. Je ne comprends rien à son mécanisme, je n’ai jamais été doué pour bricoler ou réparer quoique ce soit...et puis tout doit être automatisé et si ça se trouve on ne peut rien modifier. Mon esprit commence à s’ensommeiller et à être quelque peu confus par moment. Cela doit être les effets de la déshydratation qui commencent à se faire sentir.

...

« Droit devant et à distance, la silhouette de Tévennec tapie sur les flots monte la garde. Ses pinces rocheuses ouvertes n’attendent que l’imprudent ou le désespéré qui sera, voudrait-il leur échapper, happé par la meute enrochée dans l’onde alentour. Partout se ressentent les forces telluriques qui sommeillent en profondeur, dans ce paysage et qui engendrèrent, il y a des centaines de millions d’années, les lentes et inexorables collisions les plus titanesques du globe à l’origine de nos continents. ; » 2

 

J-13/ Aujourd’hui il fait encore beau et la mer paraît assez calme. L’îlot sur lequel est placé le phare est entouré de petits rochers. L’accès pour un bateau ne doit pas y être très facile... Je pensais que peut-être je pourrais nager... car après tout un phare se situe rarement loin d’une côte... mais je ne vois rien ; il y a du brouillard au loin et je ne sais pas où se situe l’horizon ni où se trouve une éventuelle trace de civilisation... je n’ai pas de carte, je ne sais pas où je suis. Il n’y a aucun nom sur ce phare, il y a juste la boussole qui m’indique le nord... je ne sais pas quoi faire... j’espère encore et encore qu’un de ces jours un visiteur viendra...et me repêchera... avant qu’il ne soit trop tard et que je ne sois déjà mort, desséché, déshydraté, cuit par le sel et le soleil... comme un hareng saur !

La houle a ramené une petite bouteille en plastique... j’y ai glissé un SOS ; un phare n’est jamais trop loin d’une côte... le problème étant que je ne vois rien et que l’eau est toujours agitée par ici, il semblerait qu’il y ait des courants marins sous terrains... j’ai essayé d’en repérer la direction et lancé ma bouteille le plus loin possible, dans le sens du vent et des vagues. On verra bien.

 

J-14/ Je suis fatigué, je n’ai plus guère envie de me battre ; j’ai décidé de prendre les choses avec philosophie et résignation. Après tout, à quoi bon lutter ? Je viens de terminer un petit morceau de poisson. Cela a étanché ma faim et juste un peu ma soif. Cet après-midi je me suis assis auprès de mon santon, je lui ai fait la conversation et l’ai installé sur une sorte de cocon douillet avec un peu de terre. Je l’ai allongé et je lui ai mis des fleurs en plastique tout autour... il ne souffre pas, il se repose simplement, paisiblement et toujours content... les bras en l’air, il sourit et se détend... perpétuellement heureux... je l’envie, car lui ne se pose aucune question existentielle ; il n’exprime aucun mécontentement, il vit les situations au présent et, pour l’heure, il se trouve dehors, au soleil en train de bronzer, doucement humidifié par l’air marin ; la température est clémente et il est protégé. Le bougre le sait : rien de dramatique ne peut lui arriver tant que je serais là ; nous formons une bonne équipe, je crois...

 

« Alors qu’il n’était qu’un élément épars de la croûte terrestre refroidie, ses roches rappellent les stigmates subis lors de périodes géologiques démesurées. Chronos est ainsi devenu le gouverneur de cet îlot dont l’immuable et apparente longévité nous incline à penser que l’éternité serait à notre portée. Tévennec n’est pas une masse rocheuse inerte. Les tensions géologiques qui ont marqué son évolution perdurent en son sein. Elles évoquent le temps des mondes disparus, alors que les plus vieux continents émergeaient du lent refroidissement du magma originel. Tévennec est le territoire de l’oubli où sue l’intangibilité du temps. Il s’érige en sanctuaire naturel de cette temporalité qui nous hante et que nous ne pouvons maîtriser, celle des temps d’avant et de l’au-delà... » (2)

J-15/ Je me sens de plus en plus las... j’ai faim, j’ai soif et j’ai froid... je suis désespéré et j’ai envie de baisser les bras... mais je le sais il ne le faut pas...et puis... mon petit compagnon lui, ne les baisse jamais alors je tiens le coup et j’attends, j’attends et j’attends encore... je ne sais trop quoi...

 

J-16/ La tempête fait rage à nouveau... je suis resté à l’intérieur... j’essaye de rassembler mes souvenirs pour m’occuper l’esprit et tenter de comprendre ce que je fais ici. Je suis né et j’ai grandi à Mulhouse ; cette grande ville magnifique, cosmopolite, dure et fragile à la fois, au centre de tout mais aussi tellement éloignée de la mer que cela en devient cruel et douloureux. Aussi, après mes études de langue je me suis expatrié dès que possible au sud de l’Angleterre, dans les Sorlingues où je me suis installé après avoir hérité d’une petite maison côtière d’un vieil oncle anglais. Hélas, mes souvenirs s’arrêtent là !

 

J-17/ Je suis de plus en plus fatigué et déshydraté. Je ne parviens presque plus à réfléchir ni à bouger. Je crois que mon combat est vain et que je vais y rester.

 

J-18/. (Prière du naufragé)

« Toi, le dieu qui règne sur les mers, calmes donc ta colère ; je te demande pardon O grand Poséidon, je sais que je t’ai fait offense, à cause de mon arrogance. Je me suis cru tout puissant, je suis parti seul, défier l’océan ; mais tu as combattu les titans et préparé mon linceul.

Je me suis cru invincible, immortel mais je le reconnais, toi, indicible et intemporel tu es.

À ce jour j’ai compris la leçon, par ce parcours moribond je te supplie d’ôter ton aiguillon et de me laisser en vie. Ainsi pourrai-je parler de toi, narrer ta clémence et tes lois et tout le monde entendra parler de ta sentence. Je dirais combien tu es puissant et moi insignifiant. Pitié ô grand roi, je t’en prie, épargne-moi ! »

 

J-19/ Je tremble et j’ai froid mais curieusement maintenant je suis content d’être là. La lune a veillé sur moi durant la nuit, toute ronde, elle était tantôt dorée, tantôt rosée. Elle a su apaiser mon âme. Ce matin les gros nuages gris me parlent et les superbes rais de lumière des rayons de soleil s’imposant malgré tout, ont pour effet de me redonner du baume au cœur. Je sens vibrer en moi une énergie nouvelle faite de communion avec les éléments et de paix retrouvée. Même si je suis toujours sur mon îlot et un prisonnier de la mer, je me dis que cette aventure m’aura permis de découvrir une certaine sérénité profonde que je ne connaissais pas jusque-là. Alors, si je dois mourir aujourd’hui, tant pis... j’ai enfin compris que la nature est reine, qui sommes-nous pour la défier ? Nous devons au contraire toujours la respecter et garder constamment conscience que nous ne sommes que des larves sur cette terre si belle, si vivante et si autonome... ce n’est pas elle qui a besoin de nous mais bien nous qui avons besoin d’elle ! C’est donc à nous de nous mettre à son service et non l’inverse...  « J’ai été un jeune fou, impétueux et inconscient des éléments, je m’incline devant vous et vous en demande humblement pardon... je vous promets que si je survis à cette mésaventure, je vous rendrai à toujours hommage et je me mettrai au service de mes pairs comme il se doit.. »

« Lorsque la mer est amicale ou quand elle se met en colère, lorsqu’elle devient glauque ou grise, quand elle se creuse de cobalt intense, lorsqu’elle se pavane de saphirs ou revêt les ors et les rubis du crépuscule, alors elle chante ou pleure au cœur des Hommes. Et il est temps pour le marin, et le rêveur, de se fondre dans sa splendeur. C’est alors que les mythes et les légendes se révèlent » (2)

J-20/ Le sommeil me gagne... je suis épuisé... je m’endors, à la fois vide et plein... fatigué mais serein... j’ai l’impression d’avoir gagné un trophée magique extraordinaire, d’avoir réussi à toucher le cœur de la mer... je ferme à demi les yeux ; et comme pour me répondre, un dauphin fait un saut devant moi, un peu plus loin... il m’apporte un message que je réussis à entendre ; il raisonne dans ma tête à la manière d’un écho, comme s’il venait de très loin.

« Le surfeur se considère impunément comme « invincible » et se prend pour le roi des éléments alors qu’en réalité son courage n’a d’égal que sa stupidité. Poséidon, le dieu des mers, lui a donné une bonne leçon. Mais comme ce pauvre fou, surfeur naufragé, s’est montré repentant et a adressé une prière pour lui demander pardon, alors, le dieu n’a pas été inflexible et a accepté sa requête ; il s’est montré clément et l’a épargné encore une fois. »

..Les yeux me piquent, mes lèvres sont desséchées, mes membres sont engourdis... mais je vis encore et je suis heureux... mon « ravi » l’est aussi... nous nous endormons paisiblement, main dans la main...

 

J-21/ « Monsieur, monsieur, vous m’entendez ? » J’entendais une voix dans le lointain. J’ouvris péniblement les yeux, j’aperçus à travers le brouillard de mon regard incertain deux petits yeux perçants d’un bleu acier pénétrant mon âme de façon presque indécente, auréolé d’un casque argenté et qui m’observaient. J’eus à peine le temps de comprendre qu’il s’agissait d’un pompier qu’un rayon de soleil brûlant se refléta dans le casque d’argent rutilant, m’obligeant à fermer les yeux. Je me sentis alors soulevé et installé confortablement dans une sorte de coquille douillette, rigide mais chaude ; c’est alors qu’une pointe me piqua le bras, m’arrachant un gémissement. Je sentis une main apaisante se poser sur ma tête. Une douce voix féminine me rassura : « ne vous inquiétez pas, ce n’est rien, je viens de vous piquer. Je vous installe une petite perfusion pour vous réhydrater. » C’est seulement à ce moment-là que je compris que j’étais sauvé ; ce n’était donc pas mon heure et je ne mourrai pas ici tout seul sur ce rocher. Dieu des mers, merci ! Une torpeur m’envahit alors ; apaisé, j’arrêtai enfin de lutter et je m’endormis... je me sentis à peine soulevé de terre et perçu, dans un semi-coma, les palles d’un hélicoptère tout balayer de leur souffle tel un ventilateur géant... je serrai mon santon dans les mains et replongeai dans l’inconscience.

 

...Conférence...

 

L’auditoire était littéralement fasciné ! Chaque membre assistant à cette conférence était resté suspendu aux lèvres de Gaëtan lors de la narration de son trépidant récit. C’était un peu comme si on y était, également naufragé, à son côté.

À la fin de la première partie, une main timide se leva pour intervenir. Gaëtan s’interrompit : « je vous en prie Monsieur, quelle est votre question ? »

« Bonjour, je m’appelle Ludovic, je suis étudiant journaliste et je me demandais à quoi correspondaient les citations que vous insérez à votre récit. Étiez-vous conscient d’être sur le phare de Tévennec, à la pointe du Raz en Bretagne ? Comment expliquez-vous votre si longue dérive ? »

Gaëtan sourit : « Pardon, j’ai oublié de préciser. Non j’étais réellement dans une situation de naufragé. J’avais partiellement perdu la mémoire et tout sens de l’orientation ; je ne savais ni où j’étais, ni comment ni pourquoi j’avais atterri dans cet endroit inconnu et hostile. Comme vous pouvez le voir sur le diaporama, toutes les phrases en italique correspondent à des précisions géographiques, typologiques et historiques tirées du récit de Marc Pointud, journaliste, qui raconte dans son ouvrage « Lumière sur Tévennec – Les portes de l’enfer » son expérience volontaire de vie en solitaire (avec ravitaillement) pendant 69 jours sur ce phare abandonné et délaissé par ses nombreux gardiens l’ayant considéré comme maudit et hanté !