Nouveaux Horizons - Emy Bloom - E-Book

Nouveaux Horizons E-Book

Emy Bloom

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Beschreibung

Lorsque nous perdons l'essentiel, que reste t-il de nous? Nous nous retrouvons à rassembler les morceaux brisés, survivant plutôt que vivant. Puis, un jour, la décision de recommencer à zéro surgit, apportant avec elle une lueur d'espoir renouvelée. C'est l'histoire de Glenn, confronté à une série d'échecs et de pertes, qui choisit de s'envoler vers de nouveaux horizons dans un coin tranquille du sud de la France. C'est aussi celle d'Hervé, un père célibataire, réalise qu'il se ment depuis des années, depuis la perte prématurée de l'amour de sa vie. Les rencontres fortuites sont parfois les plus magnifiques. Explorez celle entre un flamant rose rouge carmin cherchant sa place parmi ses congénères et celle d'un lion qui, derrière son apparence majestueuse, dissimule ses failles et ses fragilités.

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Veröffentlichungsjahr: 2022

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RÉSUMÉ

Malgré son apparence de géant un peu trop franc, Hervé est quelqu’un d’avenant, de jovial, de prévenant, voire très protecteur, auprès de ceux qu’il aime. En clair, c’est un mec sans soucis qui croque la vie à pleines dents. Pourtant, cela n’est qu’un simulacre. Ce n’est qu’un simple jeu de dupe, de faux semblants, car la réalité est tout autre. La honte lui colle telle une seconde peau depuis tant d’années… Elle se nourrit de ces choses qu’il cherche tant à cacher. Hervé va alors décider de se prendre en main et de s’offrir une seconde chance vers de nouveaux horizons. Il ne peut pas encore le deviner, mais sa rencontre avec Glenn, un homme d’une grande sensibilité, va bouleverser ses certitudes.

Glenn se considère comme inadapté et cela depuis sa petite enfance. On a tendance à lui reprocher d’être introverti et timide, le faisant passer pour quelqu’un de suffisant.

Une succession de malheurs vont faire que Glenn tombe dans une profonde dépression. Avec l’aide de son meilleur ami Stuart et de ses parents, il décide alors de saisir l’opportunité de partir vers un nouvel horizon.

Il est à cent lieues de se douter que le destin va mettre sur son chemin Hervé, ce père célibataire qui l’intrigue, qui l’attire. Ils se reconnaissent en l’autre, s’apprivoisent. Leur relation est loin d’être innée, chacun à ses blessures du passé, ses propres démons à combattre.

Nouveaux horizons, c’est l’histoire d’un flamant rose rouge carmin ne trouvant pas forcément sa place parmi les autres et d’un lion ; qui, derrière sa majestueuse apparence, cache ses fêlures et fragilités.

Notons que cette romance est un Spin off de Once Upon a Time, pouvant être lue indépendamment.

REMERCIEMENTS

Cette histoire est un hommage à ces anges qui nous ont quittés trop tôt. Elle est aussi pour ces survivants qui ont dû faire face à cette perte, continuer à vivre malgré l’absence.

Elle est, de même, pour ces êtres authentiques tels que Glenn. Votre hypersensibilité est en réalité la plus belle de vos qualités. Ne l’oubliez pas.

Ce spin off est un roman auquel je tenais. Hervé m’a marquée dans ma chair. Je ne pouvais pas ne pas lui rendre cet hommage. C’est dans les affres de la douleur que j’ai accouché de ce récit, un voyage introspectif qui m’a permis de renaître à moi-même, grandie et transformée.

Ce livre, c’est une partie de mon intimité que je vous livre. Fille unique d’une maman célibataire, ma mère s’est démenée pour m’offrir une vie la plus normale possible. Cette histoire, je la lui dédie, tout autant qu’à l’homme qui est devenu mon papa de cœur, mon confident, mon repère paternel.

Cet hommage est également pour toutes ces personnes magnifiques que j’ai eu l’opportunité de croiser, avec qui j’ai échangé des instants à jamais gravés dans mon cœur ainsi que celles qui m’ont aidée à vous présenter aujourd’hui ce roman.

Glenn et Hervé m’ont appris une chose essentielle : c’est dans l’imperfection de l’être que l’on reconnaît notre propre perfection. Soyons nous-mêmes, soyons fiers, vivons, aimons.

DÉDICACE

« Renoncer aux choses est moins difficile qu’on ne croit : le tout est de commencer. Une fois qu’on est arrivé à faire abstraction de quelque chose qu’on croyait essentiel, on s’aperçoit qu’on peut aussi être d’autres choses, et puis encore beaucoup d’autres. »

Italo Calvino

« Je t’enverrai un baiser avec le vent. Et je sais que tu l’entendras. Tu te retourneras et sans me voir, je serai là. »

Pablo Néruda

TABLE DES MATIÈRES

RÉSUMÉ

REMERCIEMENTS

DÉDICACE

TABLE DES MATIÈRES

PROLOGUE

PREMIÈRE PARTIE 1 : ÂMES PERDUES À LA DÉRIVE

GLENN

1 — QUAND TOUT S’ÉCROULE…

2 — RÉACTIONS EN CHAÎNE…

3 — NOUVELLES PERSPECTIVES…

HERVÉ

1 — DERRIÈRE LE MASQUE

2 — RÉSILIENCE

3 — LE TEMPS DES CHOIX…

DEUXIÈME PARTIE : RENCONTRE DE DEUX ÂMES SEMBLABLES

1 — UN NOUVEAU DÉPART

2 — UNE NOUVELLE DYNAMIQUE

3— OSER, QUITTE À TOUT PERDRE — GLENN

4 — OSER, QUITTE À TOUT PERDRE — HERVÉ

ÉPILOGUE

BIOGRAPHIE

BIBLIOGRAPHIE

PROLOGUE

Ce matin-là, j’emballais mon matériel avec fébrilité. Comme à chaque fois, j’appréhendais ces rencontres à venir. Ce projet qui était l’aboutissement de plusieurs années de travail me tenait réellement à cœur. Mes premières vidéos avaient fait des émules et m’avaient apporté une certaine notoriété. J ’avais été depuis sollicité pour des conférences, des interviews dans des magazines spécialisés... Le but était de donner de la visibilité à ces familles dites « atypiques », leur permettre de se mettre en lumière, là où la société avait tendance à les cataloguer et vouloir les cacher. Je souhaitais prouver que ces a priori étaient complètement désuets, que l’orientation sexuelle des parents ne rentrait pas en ligne de compte pour le bien-être d’un enfant. Il y avait déjà eu de belles avancées. Le Pacs, puis le mariage pour tous avaient préalablement été un grand pas vers cette acceptation. Pourtant l’homophobie latente était toujours présente et cela rejaillissait aussi sur des âmes innocentes. Cela m’ulcérait. Je ne pouvais rester là sans rien faire. C’est ainsi qu’était née ma série de documentaires sur les familles homoparentales. J ’avais eu la chance de tomber sur des hommes et des femmes qui s’étaient livrés sans réticences, partageant leur parcours, quel qu’il soit, pour réaliser leur rêve. Plus qu’un témoignage, c’est une part d’eux-mêmes qu’ils m’offraient, nous laissant nous introduire dans leur intimité. Mais le couple que j’allais rencontrer aujourd’hui était différent, très différent de ceux que j’avais déjà interviewés. Ils étaient, à l’image de leur histoire, aussi atypiques que bouleversants.

Une fois bien installé dans le train, je saisis mon téléphone, j’enclenchai l’enregistrement. Après avoir pris une grande inspiration, je débutais.

« Bonjour tout le monde ! J’espère que vous allez bien ! Je tenais à vous remercier de votre fidélité et de vos encouragements quotidiens. Ma série de documentaires sur les familles homoparentales a un franc succès et cela, c ’est grâce à vous ! Alors je vous renouvelle une fois de plus ma sincère reconnaissance !

Vous avez été nombreux à réagir à la dernière vidéo que j ’ai postée le mois passé. Samuel nous a offert un témoignage poignant sur sa quête pour devenir père. À la suite de la diffusion de ce reportage, beaucoup ont demandé des nouvelles de ce père célibataire et de sa fille Mélodie. Vous l ’aurez compris, Hervé a, lui aussi, marqué les esprits.

C’est la raison pour laquelle j’ai décidé de faire mon enquête et vous savez quoi ? Il a accepté de me rencontrer pour nous confier à son tour sa propre histoire.

Je vous donne donc rendez-vous dans quelques jours pour le découvrir lui et sa famille recomposée, dans l ’un des plus beaux villages de France, aux Baux-de-Provence.

À très vite les amis ».

Une fois mon discours finalisé, j’appuyai sur ma télécommande et stoppai mon enregistrement.

Je devais l’avouer, ça n’avait pas été simple de le convaincre. J ’avais dû solliciter l’aide de Samuel pour qu’il accepte de me livrer son témoignage. Il faut dire que son histoire est loin d’être idyllique. Veuf et père célibataire, beaucoup le pensaient perdu. Pourtant, la vie s’était chargée de lui offrir un nouvel horizon inattendu.

Arrivé à destination, je découvris avec émerveillement ce magnifique domaine entouré d’oliviers. Hervé et son compagnon étaient tranquillement installés sur la terrasse, profitant de cette belle journée ensoleillée. Quand ils m’aperçurent, je remarquai instantanément une certaine tension dans leurs postures. Je savais que cet exercice était loin d’être évident pour eux. Pourtant, ils se prêtèrent au jeu, désirant faire passer leur message.

Après avoir pris le temps de discuter autour d’un café sur le déroulement de l’enregistrement, ils s’assirent côte à côte, leurs mains jointes. Une fois la caméra allumée, chacun se mit à raconter son histoire, expliquant comment ils en étaient arrivés à ce rêve de famille recomposée.

PREMIÈRE PARTIE 1 : ÂMES PERDUES À LA DÉRIVE

GLENN

1 — QUAND TOUT S’ÉCROULE…

Rien n’est plus difficile pour chacun d’entre nous que de situer ce qu’il a fait et de se situer soi-même, à sa juste valeur, à sa juste mesure. Ni trop haut ni trop bas, sans se flatter outrageusement et sans se traîner dans la boue ; une autre façon à la mode de se vanter en secret. Plus d’une fois, j’ai été médiocre ou un peu pire.

Jean d’Ormesson

Pour une majorité de gens, leur existence est une succession de jours avec ses joies et ses peines ; ses réussites et ses échecs. Ils se résignent à y faire face, s’y conforment ou fuient cette réalité. Pour ma part, l’intégration ne s’est jamais faite. Ma vie n’a été qu’un enchaînement de souffrances, d’incompréhensions, d’inadaptations. Encore aujourd’hui, je vivote continuellement d’un sentiment extrême à l’autre sans jamais pouvoir ressentir un moment d’accalmie dans ce tumulte. Cela ne date pas d’hier et pourtant, à ce moment-là de ma vie, ma situation n’avait fait que s’aggraver.

Sommes-nous tous égaux face à l’adversité ? Avons-nous la même capacité de nous redresser lorsque tout s’écroule autour de nous ? Chaque nouvel échec creusait un peu plus le sillon du doute dans mon âme meurtrie.

Tout avait commencé avec cette lettre. Une simple lettre manuscrite, délaissée sur le comptoir de la cuisine. Le projet sur lequel je travaillais, en tous points insatisfaisant, car sans aucune perspective d’évolution, m’avait mis dans un état de dissension épouvantable. Complètement éreinté, je m’étais empressé de rentrer chez moi, souhaitant pouvoir me retrouver dans la sécurité de mon appartement, auprès de celui qui partageait alors ma vie. J ’entrevoyais déjà le cours de la soirée à venir : après une douche salvatrice, je lui aurais concocté une des recettes favorites de ma grand-mère, une ratatouille digne de ce nom. Ça aurait été tel un feu d’artifice aussi gustatif que coloré. Puis, nous nous serions lovés dans le canapé, regardant au gré de nos envies une émission avant de finir l’un dans l’autre. Oui, c’était un beau songe.

Il faut dire que ces derniers temps, Jules s’était éloigné de moi. J ’en étais en partie responsable, j’en avais pleinement conscience, n’étant pas très réceptif non plus. Mes angoisses me grignotaient toujours un peu plus, me suivant telles des ombres. Dans ces moments-là, j’avais tendance à me refermer sur moi-même, attendant que le tumulte passe. Notre couple était bancal, c’était un fait. Mais qui aurait pu prédire ce qui allait arriver ?

C’est trempé et grelottant de froid que je rebroussais chemin. L’averse que j’avais essuyée le temps de regagner notre domicile me donnait l’apparence d’une serpillière usagée. Il était 18 h 30 d’après l’imposante horloge accrochée sur le mur du salon qui me faisait face. Jules n’allait pas tarder à rentrer. Je m’étais donc précipité dans la salle de bain, passant devant ce comptoir sans y prêter attention, trop préoccupé par cette humidité qui me collait à la peau, me faisant l’effet d’être englouti dans un carcan. Après m’être changé, je m’étais préparé un thé afin de me réchauffer, mes idées vagabondant… Ce n’est qu’en reposant cette tasse que je l’avais vue. Tout en la prenant, mon cœur avait commencé à s’affoler. Cela faisait bien longtemps que nous ne nous laissions plus de doux mots. Je me revois la regarder avec curiosité, tanguant entre envie et appréhension… C’était son écriture. La lettre n’était pas longue, mais elle m’était adressée. Et juste ainsi, le temps d’une simple lecture, ma journée grisâtre était devenue orageuse.

« Glenn,

Quand tu liras cette lettre, je serai parti. Tu vas sûrement te poser mille questions, comme à ton habitude. Je l ’avoue, c ’est un acte de couardise de rompre de la sorte, mais j ’ai préféré coucher sur le papier la raison de ce départ plutôt que de devoir, une fois de plus, entrer dans une énième confrontation avec toi. Je ne peux pas. Je ne peux plus y faire face.

J ’ai rencontré quelqu ’un et… ça a été comme un électrochoc. Je pensais t’aimer assez fort pour tout accepter, mais je me suis rendu compte que je ne m ’épanouissais plus heureux dans notre relation. Au fil du temps, elle est devenue pesante. Il est clair que nos besoins, nos ambitions, notre vision de la vie commune n ’ont jamais été les mêmes. J ’estimais pouvoir surmonter cela. Je te jure que j ’ai essayé, mais je ne serai jamais cet homme casanier, ce compagnon auquel tu aspires, qui se satisferait de vivre dans cette bulle si sécurisante à tes yeux. J ’ai cette prétention de désirer d ’autres contacts humains, de me mélanger à la foule. La vérité est simple : j ’étouffais dans ce vas-clos, mais je préférais me taire que de devoir faire face à tes éternelles défiances. J ’en ai pris conscience que je n’en pouvais plus de devoir apaiser tes craintes, pour la plupart, injustifiées.

Je l ’avoue, cet homme comble ces besoins que tu n ’as jamais réussi à satisfaire. Nous avons les mêmes goûts, les mêmes envies. Il est très sociable et à l ’aise en société. En clair, il est tout ton contraire, et c ’est ce que j ’ambitionne : un partenaire qui a la même vision de la vie que moi. La conclusion qui ressort est simple finalement : nous n’étions pas faits pour vieillir ensemble.

Je suis tellement désolé pour nous. Je te jure que mes sentiments envers toi étaient sincères. Je pensais pouvoir réussir à passer au-delà de tes handicaps, mais force est de constater que cela était au-dessus de mes capacités.

Glenn, je sais que tu vas me détester, mais au fond, tu ne peux que confirmer que cette rupture nous pendait au nez. Ce n ’était qu ’une question de temps. Nous n ’allions nulle part. J ’espère que tu trouveras le bonheur avec un homme qui te comprendra et comblera tes attentes.

Jules. »

Voilà, à cette minute, tel un château de cartes qui s’effondre après le passage d’une bourrasque, j’étais sous le choc. Totalement mortifié, je m’affalais sur le sol en lino contre le bar de ce qui était jusqu’alors « notre cuisine ». Mon regard vagabonda dans cette pièce ouverte sur ce salon, tout aussi vide de vie que je l’étais à cet instant. Mes articulations commencèrent à hurler tant mon corps se crispait de rage. La douleur était presque salvatrice en comparaison à celle de mon cœur. Jules m’avait abandonné, tel un objet quelconque ; ne me laissant qu’une simple lettre sur le comptoir. Qui fait cela ? Qui balayait cinq ans de vie commune d’un revers de la main ? Pas une personne qui m’affirmait m’aimer et qui préférait s’enfuir en douce dans les bras d’un autre dans votre dos ! En attendant, je me retrouvais là, comme un con, cette lettre me brûlant les doigts, tant j’étais pris dans un tourbillon de pensées.

En étant franc avec moi-même, Jules avait raison. Cette rupture était prévisible. Pourtant, je n’avais pu prédire un tel acte de sa part. Jules ne m’était jamais apparu semblable à un pleutre ! « Ce n ’était qu ’une question de temps », avait-il écrit. Je ne pus que rire de ma crédulité, car malgré tout, j’avais espéré une autre issue. Je pouvais rajouter ce nouvel échec à la longue liste des déconvenues qui peuplaient mon existence. Ce n’était qu’un énième écroulement. En définitive, ma vie ne se résumait qu’à cela : une succession de déceptions, et tout cela à cause de mes tares…

On m’a toujours fait remarquer que j’étais dissemblable, et ce, depuis mon enfance, autant du fait de ma particularité physique que par mon attitude. J ’ai ce qu’on appelle une hétérochromie1, un terme barbare pour désigner une différence de coloration au niveau des iris. Cette rareté fait que mes interlocuteurs se retrouvent invariablement troublés lors de notre premier contact. Là où beaucoup m’envient ce regard, j’ai ressenti cela comme une inaltérable malédiction, étant extrêmement timide. Et cela ne s’était pas arrangé en grandissant. Pour ma défense, je n’ai pas eu une enfance aussi équilibrée que la plupart des gens.

Quand ma mère s’était fait diagnostiquer un cancer du sein, elle avait dû entamer une longue chimiothérapie qui l’obligeait à faire de nombreux allers-retours à l’hôpital. Mon père était responsable d’une grande chaîne de magasins, ce qui faisait de lui un père souvent absent. À ce moment-là, il s’était retrouvé à devoir transiger avec son travail, l’hôpital et son fils. Ma mère s’occupait de moi à plein temps, alors devoir composer avec cette « charge supplémentaire » dans son agenda de ministre n’était pas chose aisée. Les premiers temps, il avait pourtant essayé, mais force était de constater qu’il ne pouvait tout mener de front. Se rendant compte que cette situation n’était pas viable, il avait été décidé de me laisser aux bons soins de mes grands-parents maternels, ses propres parents étant décédés. Tout avait été fait pour me préserver, je le réalise aujourd’hui. Mais à l’époque, je n’étais qu’un gamin de cinq ans, esseulé et effrayé, qui du jour au lendemain, s’était vu déraciné de sa vie londonienne pour se retrouver dans un patelin égaré dans une campagne provençale qu’il n’avait que trop peu visitée. Imaginez qu’en plus de cette peur de perdre ma mère, j’allais devoir faire face à des quasi étrangers, dans un pays qui n’était pas le mien. Ma sensibilité, déjà à fleur de peau, n’avait fait qu’accroître.

Les débuts avaient été difficiles du fait de la barrière de la langue, ce qui n’avait pas aidé à mon intégration. Mon père avait insisté pour que j ’étudie dans l’école primaire du village, alors que nous étions en plein milieu de l’année scolaire. J ’étais marginalisé, montré du doigt et moqué par mes camarades. Mon enseignante n’avait pas non plus contribué à mon adaptation, refusant de me parler dans ma langue maternelle. On s’acharnait à me répéter de fournir des efforts. Afin de m’inclure à des groupes déjà établis, on m’encourageait à participer aux activités collectives, à me porter volontaire pour des jeux dont je ne connaissais pas les règles. Chaque jour était une nouvelle épreuve, un nouveau refus, une nouvelle humiliation. Je me sentais de plus en plus découragé et abandonné.

Cette opiniâtreté avait déclenché par la suite une phobie scolaire. Je me rendais malade physiquement, je trouvais n’importe quel prétexte pour ne pas retourner auprès de ceux qui m’excluaient. Heureusement, mes grands-parents n’avaient été que patience et amour avec moi, essayant d’apaiser ce besoin continuel d’être rassuré. Face à mon mal-être et ma détresse, ils avaient pris la décision de me faire l’école à domicile. J ’avais des devoirs par correspondance en anglais, mes tuteurs se chargeant de m’inculquer par leurs propres moyens la langue de Molière. J ’étais isolé de mes camarades certes, mais j ’étais en sécurité auprès de ma famille. La situation n’était facile pour personne, j ’en avais pleinement conscience ; pourtant, ils avaient tenu tête aux médisances de tous. Ils partageaient leur temps entre leurs emplois respectifs et moi. Ils m’avaient enseigné des principes, des valeurs aussi. Cela avait duré un peu plus de cinq ans.

Quand ma mère s’était totalement rétablie et qu’on lui avait annoncé sa rémission, j’avais une fois encore été déraciné, faisant un retour sur mon île, auprès de mes parents. J ’avais dû me familiariser à nouveau à une nouvelle dynamique, de nouveau me confronter au monde extérieur. Le changement fut rude et brutal. Passer de la campagne varoise à une ville cosmopolite avait engendré des crises de panique incontrôlables. Trop d’individus, de bruit, d’agitation. Pourtant, mes parents avaient refusé de me laisser poursuivre ma scolarité à domicile. Je devais grandir et évoluer auprès de mes condisciples. J ’avais donc dû subir le retour dans un cadre scolaire classique, avec d’autres élèves de mon âge. Une seule chose m’avait apporté un minimum de réconfort : j’avais pu continuer à perfectionner mon français. Mon père avait estimé qu’être bilingue était un atout pour mon avenir. J ’avais passé cinq ans en France, devenant de fait, un parfait « petit immigré » comme il aimait en rire. Il aurait été dommage de perdre ce qui avait été acquis.

Ce traumatisme m’avait rendu, par la force des choses, plus mature que la plupart de mes camarades.

J ’avais grandi, et ce décalage n’avait fait qu’accroître, au point de m’exclure volontairement, préférant la solitude. Je fuyais littéralement les gens, appréhendant les impétueuses et ingérables émotions que ces interactions engendraient inexorablement. Là où mes pairs, à présent pubères, essayaient de se donner un genre, qu’ils tentaient de devenir « un vrai mec », moi je n’étais que sensibilité. Les rapports de force m’ulcéraient. Je n’arrivais pas à m’identifier à ces groupes. Or, selon les autres et leurs diktats, un garçon ne pouvait être « délicat ». Les Anglais peuvent se montrer originaux, mais il y avait des limites… Je n’étais pas à la hauteur de cette idée de virilité qu’on nous imposait du fait de notre culture. Cela me valut d’être l’objet de beaucoup de plaisanteries. Je me souviens encore des paroles de mon entourage face à mon désespoir de trouver ma place : « On est à un âge où un vrai mec se doit d’être cool, jouer des mécaniques en gros ! » me disaient mes soi-disant camarades avec qui je traînais. « C’est le propre des adolescents qui se cherchent… » essayait de m’inculquer mon père après avoir lâché un énième soupir las, exaspéré de ne pas me voir réagir comme il le désirait. Je savais qu’il avait raison, mais cela ne changeait rien à mon mal-être. Ma mère, plus perspicace, affirmait que j’étais trop émotif et que mes réactions étaient, dans la conscience collective, plus attribuées aux filles. Cela expliquait mon décalage. Ce n’était pas un reproche venant d’elle, mais une simple constatation. « Tu es ainsi Glenn. S’ils ne sont pas capables de se rendre compte du trésor que tu es, alors ce sont eux les perdants, pas toi. Cela passera, tu verras. En grandissant, tu trouveras des personnes qui t’accepteront, tel que tu es. En attendant, essaie de faire un effort. Ce n ’est pas bon d’être mis à l’écart. Tu es intelligent, je sais que tu découvriras un moyen de te sociabiliser ». Mes parents souffraient de ma situation. Malgré leur prévenance, je me retrouvais irrémédiablement seul face à mes tourments. J ’ai dû apprendre à composer avec eux sans que l’on puisse me donner une quelconque solution pérenne. Afin de ne pas leur rajouter de la déception, je ne leur avais avoué que plus tard, bien plus tard, mon homosexualité. Je me faisais honte à moi-même tant je me considérais comme un cliché. Mais je ne pouvais pas passer outre ma nature. J ’étais le mec qui n’avait pas assez de testostérone en lui, pas assez de masculinité aux yeux de certains. En clair, l’image d’un sous-homme, une chiffe molle… Or cette image était totalement erronée, mais à ce moment-là, je m’en étais persuadé. Et cela n’avait fait qu’empirer une fois adulte.

Je n’ai jamais été à l’aise avec des inconnus ou pour communiquer en groupe. On me reprochait d’être introverti et timide. Là où tous pensaient que je me considérais comme suffisant, que je me comportais de manière hautaine avec les autres, personne ne prenait le temps d’entreprendre de faire ma connaissance, d’essayer de comprendre que j ’étais terrorisé, en proie à des crises d’anxiété. J ’étais surstimulé par ce qui m’entourait : les lieux bondés, les bruits, la luminosité… je ressentais cela comme une attaque du monde extérieur. Juguler mes émotions m’était difficile, j’en avais totalement conscience. Pourtant, je persévérais dans mes efforts, malgré les obstacles et les rejets incessants. Mais cela ne faisait qu’aggraver la situation. À trop vouloir faire plaisir, à tout faire pour être apprécié, je me retrouvais dans des situations impossibles. J ’avais toujours cette impression d’être jugé décrypté à la loupe, d’être gauche… En terme simple, un homme dysfonctionnel, voire inadapté face à un contexte banal pour le commun des mortels. Tout s’amplifiait, mes émotions devenaient ingérables. C’était un combat quotidien que je menais pour contrôler ces bouleversements.

Malgré ce handicap, j’avais pourtant réussi à « m’adapter » dans le cadre professionnel en me spécialisant dans l’infographie. Cela combinait ma passion du dessin et de la peinture, héritage de ma grand-mère et cette solitude nécessaire pour m’échapper de cette réalité. Le boulot était plaisant ; en revanche, être sous les ordres d’autres personnes l’était beaucoup moins. Mais je composais avec. Là où j’arrivais plus ou moins à juguler mes ébranlements en communauté, ma vie sentimentale elle, était loin d’être aussi complaisante.

Je me suis toujours considéré comme un « timide amoureux ». Ne pas être estimé comme un « homme » m’avait longtemps posé des problèmes pour séduire. Ma première relation avait été un échec cuisant pour ces mêmes raisons. J ’avais voulu paraître virile, passant outre mon tempérament. À s’échiner à jouer un rôle de composition, on finit par se casser les dents. Je devais fournir des efforts, arrêter de me plaindre, essayer encore et encore… Lui n’avait eu de cesse de me reprocher de ne pas m’assumer et d’être un stéréotype sur pattes. Certes, j’avais perdu ma virginité, mais aussi un garçon pour lequel j’avais de réels sentiments. Par la suite, j’avais fait la connaissance de Stuart. C’était un homme plus âgé que moi. Notre rapprochement aurait pu être sur le papier « presque » idyllique. Étant un artiste, Stuart avait cette sensibilité toute particulière qui faisait qu’il me comprenait mieux que personne. Mais le temps passant, nous nous étions rendus à l’évidence : notre complicité était plus amicale que romantique. Notre relation était confortable, mais sans plus. Nous pouvions nous confier l’un à l’autre, là n’était pas le problème. Seulement, Stuart était dans l’attente d’un compagnon qui puisse le tirer vers le haut, quelqu’un d’émotionnellement stable pouvant le rassurer, apaiser ses propres craintes. Et cela, ce n’était pas dans mes capacités. La rupture s’était faite en douceur, sans heurts. Par la suite, nous étions redevenus de simples amis.

Les années étaient passées et peu à peu, il s’était détourné de moi quand il avait fait la rencontre de celui qu’il avait tant désiré. Malgré des débuts difficiles, Alex avait réussi à apprivoiser l’émotivité débordante de Stuart. Mon ami avait enfin trouvé un alter ego avec qui il filait le parfait amour. Depuis lors, il était moins disponible pour moi, ce que je comprenais. Cela n’empêchait pas que je jalouse son idylle. J ’étais heureux pour lui, mais cela m’avait aussi quelque peu refroidi sur ma condition d’éventuel compagnon de vie. Alex était parvenu à répondre à ses besoins là où j’avais lamentablement échoué. Refusant de revivre une nouvelle déception, j’avais décidé de n’avoir que des relations éphémères, des amants d’une nuit où il n’était pas question d’approfondir quoi que ce soit d’autre qu’un moment charnel. Cela avait comblé un soulagement physique temporaire, mais m’avait aussi apporté un sentiment d’amertume de plus en plus pesant. Je me sentais utilisé, sali, incomplet. Lors d’un énième rendez-vous, j’avais littéralement craqué. Le pauvre type n’avait pas eu le temps de réagir que j’avais fui. Par la suite, j’avais stoppé net mes divagations, me recentrant sur moi-même, faisant le choix d’un célibat imposé, mais nécessaire.

Je n’avais pas songé alors faire une rencontre quelques mois plus tard, de cet homme. Dès que je l’avais vu, j’avais littéralement eu un coup de foudre. Avenant, Jules suintait d’intelligence et semblait ouvert d’esprit… Je m’étais jeté corps et âme dans cette relation imaginant avoir enfin trouvé quelqu’un qui me comprenait, qui m’accepterait moi et mes bizarreries. Stuart m’avait mis en garde à l’époque, m’affirmant que notre histoire ne pouvait perdurer, Jules se jouant de moi. Dès leur première rencontre, il avait vu clair dans ses agissements. Chaque entrevue s’achevait par de vives querelles où je me retrouvais à devoir essayer de calmer les égos de chacun. Malgré l’insistance de mon ami, j’étais aveuglé par mes sentiments. Plus le temps passait, plus je m’obstinais à prendre parti pour celui qui partageait à présent ma vie. Cela avait entraîné des tensions entre Stuart et moi. Il avait fini par accepter ma décision, bien que cela nous ait éloignés. Dès lors, nos échanges téléphoniques s’étaient faits de plus en plus ponctuels, mon compagnon et mon ex ne pouvant pas se voir sans se disputer. Malgré tout, Stuart m’assurait de son amitié et de son soutien.

À nos débuts, Jules trouvait de bon goût de me rappeler que mes différences faisaient mon charme, que mon sens de la réflexion, mon esprit vif et créatif lui plaisaient énormément. Il aimait me taquiner en me déclarant comme quelqu’un de « décalé », mais c’était, toujours selon ses dires, ce qui l’avait séduit, en premier lieu. Il savourait ces petites attentions quotidiennes à mon plus grand plaisir. Je voulais que nous partagions tout ensemble, devenir indispensable à son bonheur. Nous étions heureux, puis, la phase lune de miel s’était oblitérée. Ce qui avait débuté comme un conte de fées avait rapidement viré à des reproches et disputes pour tout et rien. Par la suite, il avait commencé à prendre ses distances. J ’étais, selon lui, trop subtil, trop féminin dans ma manière de penser. Plus le temps passait, plus cela s’exacerbait. J ’avais pourtant essayé de faire des efforts, d’endosser de nouveau un rôle qui, au fond, ne me correspondait pas. Afin d’alléger le poids de ma présence, j ’avais appris à me contenir, taisant mes peurs, prenant à cœur d’être le plus autonome possible, dans la seule intention de lui prouver ma valeur. Je m’étais forcé à sortir dans des endroits bondés alors que je préférais le calme, je m’évertuais à participer à des discussions de groupe là où je savais que tout n’était qu’hypocrisie. Ce manque de confiance, cette hantise excessive de ne pas être « assez bien » pour lui me repliait toujours plus sur moi-même. J ’étais continuellement nerveux, sur le qui-vive, en permanence à vérifier mes faits et gestes. Je l’avouais, j’étais co-dépendant de mon compagnon et cela ne faisait qu’augmenter ma honte et renforcer mes troubles. J ’avais tellement peur de le perdre… Il ne supportait plus mon comportement, ce besoin d’être sans cesse rassuré. Selon lui, j’étais trop versatile, disant oui pour le regretter amèrement la seconde suivante. Nos disputes se terminaient toujours de la même façon : une déferlante de reproches et de cris. « Tu es faible Glenn ! Tu as trente-sept ans bordel ! Il faut que tu grandisses ! Arrête de te la jouer jaloux égocentrique ! J’ai besoin d’un compagnon et pas d’un mec psychorigide et inapte à maîtriser ses émotions ! Tu me fais honte ! » Chaque réflexion était telle une lame dans mon cœur. Ce qu’il ne comprenait pas, c’était que j’étais incapable à répondre à ses attentes. Il m’en demandait trop. Chaque reproche ne faisait qu’accentuer mon mal-être, mon impuissance. Je savais que le problème venait de moi, et tel un serpent se mordant la queue, cela renforçait mes craintes et mes angoisses. J ’étais immuablement face à un dilemme : devoir me taire et souffrir en silence ou surréagir et me retrouver encore plus isolé. C’était sans fin, envenimant toujours plus la situation. Lui ne démordait jamais de ses positions et moi je culpabilisais. J ’étais le fautif quoique je dise. Je ne pouvais que m’excuser encore et encore, lui promettant de m’améliorer et le suppliant de ne pas me quitter. Le pire était que j’étais trop honteux pour me confier à Stuart ou à mes parents. Je préférais la solution de facilité, remettre ce masque d’apparence joviale ; mentir encore, sans discontinuer, jour et nuit. Ils n’étaient pas dupes, mais ils se doutaient que me contredire n’aurait eu aucun effet bénéfique. Malgré leurs prévenances, je m’étais refermé sur moi-même.

J ’avais bien eu quelques scrupules sur ses agissements ces derniers temps. Progressivement, Jules s’était fait distant. Il rentrait de plus en plus tard, prétextant une charge de travail supplémentaire, un dossier urgent à traiter, des réunions impromptues… Malgré mes pressentiments, je n’avais pu envisager qu’il me mente avec tant d’aplomb. Quand on voyait le résultat ! Cela me prouvait une fois de plus ma crédulité. Je m’étais donné corps et âme à cet homme et lui s’était tiré de la pire des manières. Mes certitudes tombaient les unes après les autres, me délaissant avec mille questions qui ne pouvaient se résumer en une seule : pourquoi ? Pourquoi ne pouvait-il pas avoir des sentiments sincères pour celui que j’étais réellement ? Étais-je un si mauvais compagnon que cela ? Pourquoi faire autant d’efforts, si finalement, on se retrouve toujours seul, abandonné comme un encombrant usager ? La réponse était claire dans mon esprit : j’étais inadapté, cassé. Je m’étais laissé bercer de chimères, une fois de plus. Où était-il, ce charmant jeune homme qui me disait m’aimer tel que j’étais ? Pourquoi les gens entretiennent-ils une relation où tout n’est que faux semblants et tromperie ? Pourquoi installer ce lien de confiance, donner cette illusion d’une certaine quiétude, s’ils désirent autre chose pour finalement nous trahir ? Putain d’émotivité, putain de sensibilité ! L’adage veut que le cœur ait ses raisons que la raison ne peut connaître ; la bonne blague ! Ma déficience venait de me coûter mon couple, une fois de plus. À cet instant, il ne restait qu’un pauvre type qui devait se résigner à ne jamais faire l’expérience de l’amour sincère, une relation basée sur l’acceptation et la loyauté. Le pire fut de réaliser que les avertissements de Stuart s’étaient révélés véridiques. Notre couple n’avait jamais été constant, malgré mes efforts. Voilà ce qui conclut cette histoire… Pris dans cette tourmente, je visualisais tous nos souvenirs passés, ces cinq ans de relation qui venaient de prendre fin de manière si abrupte. À croire que j’étais masochiste. Oui, ça devait être ça. Pendant ce temps-là, je me retrouvais là ; seul dans cet appartement froid et austère, épuisé et vulnérable. Je fondis en larmes me recroquevillant sur moi-même. J ’étais totalement perdu. J ’entendis une porte claquer. Cela devait être mon voisin rentrant chez lui. Je l’enviais en l’imaginant rejoindre sa femme et un repas chaud sur la table. Lui était attendu et désiré. J ’en étais réduit à jalouser les autres. En prenant conscience du fond de ma pensée, je m’étais fustigé d’être aussi pitoyable !

Les semaines qui suivirent s’apparentèrent à un mauvais scénario d’une série B. J ’étais apathique, épuisé, à fleur de peau, me retranchant toujours plus sur moi-même. Je subissais plus que je ne vivais. J ’évitais au maximum tout contact, me déconnectant de la réalité. Je ne daignais pas répondre aux messages vocaux qui se succédaient sur mon répondeur, la majorité provenant de mes parents. Je déclinais toute invitation que mes collègues me proposaient. C’était une exclusion forcée que je m’infligeais, mais elle m’était nécessaire. Je ne souhaitais qu’une chose, rester cloîtré seul