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L'Equilibre. Une notion intangible sur laquelle tout existence s'appuie. Un précepte inaliénable, le fondement de toute vie. Le bon fonctionnement d'un monde permet aux autres de subsister. Si l'un déraille, cela engendre le chaos et risque l'anéantissement de tous. Imaginez qu'un grain de poussière vienne dérailler cette belle mécanique... nous basculons alors dans un Fiasco Enchanté.
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Seitenzahl: 310
Veröffentlichungsjahr: 2022
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Nous ne nous portons pas responsables d’un éventuel diabète ou de vos futurs rendez-vous chez le dentiste pour cause d’orgie à venir.
Âme sensible s’abstenir !
Fiasco(n.m) : Sens 1 – échec complet Sens 2 – éjaculation précoce
Il était une fois...
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Jusqu’à la fin des temps…
Annonce
Emy Bloom
Sawaën K.
Le son des carillons se propagea dans l’air, telles des clochettes emportées par le vent. Ces notes de musique marquèrent le renouveau, le recommencement du cycle de la vie rythmé par les saisons et les fêtes qui les glorifiaient. Une rotation immémoriale où chacun avait son rôle à jouer.
Comme toujours, la mission incombée à leur naissance fut un véritable succès. La vie des petits humains fut comblée de magie et de cadeaux tout droit sortis de l’Atelier du Père Noël. Pour les lutins travailleurs, voir à travers les miroirs magiques le fruit de leur dur labeur était une véritable joie. Quand l’heure arrivait, les fenêtres interdimensionnelles s’ouvraient et ils avaient la possibilité de constater l’émerveillement de tous les humains, petits comme grands, à la vue de leurs cadeaux. Le déballage des étrennes posées sous les sapins au petit matin était un rituel à ne jamais manquer.
Esprits nés de la magie, les lutins de Noël se donnaient corps et âme pour que tout soit prêt à temps. Jamais ils ne rechignaient à la tâche ; ils accomplissaient leur destinée avec bonté et douceur. Telle une nourriture spirituelle, chaque sourire, chaque exclamation, chaque geste de tendresse légitimaient leurs existences. Et le résultat brillait de beauté à chaque fois ; la liesse et les sentiments d’allégresse émanant du Monde de l’Entre-Deux recouvraient le Monde Enchanté d’une nappe de cristaux colorés. Pour ces petites poussières de bonheur, les petits elfes trépignaient d’impatience au retour de leur saison favorite. Toutefois, l’enchaînement des célébrations de fin d’année réclamait à leur corps exaltés un repos bien mérité à l’aube de ce nouveau jour.
À chaque saison, ses fêtes associées à une émotion de pur émerveillement. De fait, l’Atelier changeait ses couleurs en l’honneur de la Saint Valentin, du Nouvel An Chinois, de Pourim, et ainsi de suite durant toute l’année écoulée. Ainsi, un grand ménage s’opérait entre chaque période. Nos joyeux lurons reprirent donc le chemin de la fabrique avec des sourires illuminant leurs visages. Alors qu'ils parcouraient les routes enneigées d’un pas léger, les autres esprits du Monde Enchanté les rejoignirent dans leur procession. On pouvait entendre les chants mélodieux provenant des différents quartiers prendre vie pour devenir une symphonie qui voyageait jusqu'aux lointaines contrées. L’Atelier représentait le point névralgique de ce monde féérique, celui où tous se retrouvaient pour préparer les célébrations à venir. Bien que techniquement accessible à tous les habitants de ce monde, sa direction permutait en fonction des évènements. Mais les représentants siégeant à la Coalition favorisaient l’aide mutuelle. L’harmonie régnait si bien parmi ces êtres magiques que l’on pouvait voir des souris rafistoler une des machines grippées à force d’usure, des lapins sauter d’une section à une autre avec des seaux et des balais, ou encore des bonnes fées lancer des sorts pour que les outils s’animent et se rangent à leur place par eux-mêmes. L’ambiance était sereine, joyeuse et festive. Tous étaient heureux de pouvoir contribuer à leurs manières à ces sentiments euphoriques qu’ils transmettaient.
Le temps s’égrena paisiblement jusqu’à ce que des tintements harmonieux de cloches se fissent entendre, annonçant la fin de la journée. De formes et de tailles différentes, chacune produisait un son bien distinct, pourtant, la mélodie créée suscitait un élan de joie chez ses hôtes. Elle était douce, vibrante et enchanteresse. Tous s’arrêtèrent pour l’écouter avant de se diriger vers la sortie. Malgré leur fatigue, personne ne voulait se quitter. Alors, d’un commun accord, ils se rendirent au chalet en pain d’épice bordant la forêt de réglisses pour un goûter bien mérité. Même s’ils n’étaient pas attendus, ils savaient que la porte leur était toujours ouverte ; ils seraient accueillis comme des princes et des princesses, avec bienveillance, par le maître des lieux et sa famille. Il y avait toujours une fournée de délicieuses mignardises qui traînaient dans la grande cuisine. Bien qu’il était de notoriété publique que les membres de cette demeure incarnaient la gourmandise à son état le plus simple, il était tout aussi reconnu que le chef pâtissier prenait bien garde à ce que chacun ait droit à ses petites attentions. Les lutins s’approprieraient tous les cookies aux pépites de chocolat tandis que les lapins préfèreront les carrots cake, sans oublier le péché mignon des fées et cupidons présenté sous la forme de rainbow muffins ou de toutes autres gâteries colorées et pailletées de mille éclats. Oui, ils le savaient, cela augurait un véritable festin ! Mais s’ils devaient être francs avec eux-mêmes, ce n’était pas ce fabuleux banquet qui attirait tant ces joyeux gaillards dans cette maison. Ce qu’ils appréciaient pardessus tout en réalité était d’écouter le Père Noël leur narrer ces fabuleuses légendes oubliées. Il fallait dire que ce conteur d’exception possédait une voix mélodieuse qui donnait vie à ses histoires. Qu’il en fût le protagoniste principal ou totalement absent, tout n’était qu’aventure fantastique ou quête épique. Et aujourd’hui encore, il parvenait à les surprendre car jamais il ne se répétait.
En file ordonnée, les convives s’installèrent confortablement dans l’immense salon avec une assiette bien garnie en main. Un feu brûlait dans l’âtre imposant et une bonne odeur de pin se répandait dans le foyer. Certains d’entre eux quémandèrent une tasse de chocolat chaud remplie de guimauves ; d’autres se contentèrent d’un thé à la cannelle. Ils gardèrent le silence, profitant de la sérénité ambiante en attendant patiemment que le maître des lieux les rejoignît. Quand il apparut enfin, il les gratifia d’un doux sourire, les remerciant de leur venue impromptue tout en s’assurant que le grand nettoyage n’eût pas été trop éprouvant. Une fois sa propre tasse fumante et quelques petits biscuits décorés de vermicelles extravagants en main, il se posa dans son énorme fauteuil moelleux et confortable. Un enfant le rejoignit et s’installa sur ses genoux. Le spectacle était magnifique à voir. Quoi de plus beau que d’être témoin d’un moment si intime, un instant si pur où l'on pouvait presque goûter sur le bout de sa langue l’amour d’un père pour son fils ? Après une tendre caresse sur la tête de son petit ange, l’iconique esprit reporta son attention sur ses invités.
— Puisque nous voici rassemblés de nouveau, voulez-vous entendre une nouvelle histoire ? leur demanda-t-il de sa voix de ténor si chaleureuse.
— Oui ! s’exclama l’assemblée ainsi que l’angelot avec tant de ferveur qu’il sentit son cœur fondre d’amour.
— Bien, bien… Voyons voir… Vous ai-je déjà raconté la légende du Grinch ?
— Ouiiii, s’écrièrent-ils en rigolant.
— Ah oui, c’est vrai… Et les facéties de Jack Frost ?
— Papa ! se plaignit le chérubin sur ses cuisses.
— Oh oh oh ! rigola un instant l’homme en jouant de leur impatience. Très bien, alors aujourd’hui, je m’en vais vous conter la plus grande histoire du monde : celle de la vie.
Un silence monacal régna dans la pièce, toute l’attention portée sur lui. Sans se départir de son aura de mystère, le Père Noël continua d’un ton grave :
— Vous tous ici présents connaissez l’importance de nos rôles auprès du Monde de l’Entre-Deux. Chaque être, qu’il soit bon ou mauvais, est une pierre à l’édifice qui forme un tout, un équilibre si fragile et pourtant essentiel à notre existence… Mais néanmoins, alors que vous n’étiez encore qu’une pensée positive dans l’esprit des petits humains, un péril menaça cet équilibre si sacré, débuta-t-il d’une voix rauque et menaçante.
Son auditoire, totalement captivé, eut un hoquet de surprise à cette annonce. Dans leur monde si ordonné, jamais pareille situation ne fut envisagée. Ils ne pouvaient qu’imaginer les catastrophes que cela aurait engendrées. L’Équilibre des Mondes était une question de survie pour tous.
Le Père Noël, fier de son effet, poursuivit d’une parole apaisante :
— Imaginez le chaos s’abattre sur les Mondes ainsi que les conséquences sur nos précieux humains. Nous aurions pu nous éteindre, les uns après les autres jusqu’à ce que la lumière se transforme en obscurité, que la vie devienne morne avant de ne plus être que néant. Oui, mes chers enfants, cela aurait pu sonner la fin de nos existences.
— Père Noël, ce n’est qu’une histoire pour nous faire peur ! se plaignit un auditeur, son nez se trémoussant d’anxiété. Cela ne peut être vrai ! Pourquoi vouloir nous effrayer ?
— Mon cher petit Panpan, apprends que toute histoire ou légende est issue de faits bien réels. Nous, conteurs, sommes là pour rappeler que rien n’est jamais acquis. Un simple grain de sable peut faire dérailler la machine pourtant bien huilée qu’est la vie. Une minuscule particule qui, tel un battement d’ailes de papillon, déclenche un cataclysme… Tous les contes sont les gardiens de nos souvenirs, de notre passé. Ils nous mettent en garde. C’est pour cela qu’il faut les écouter, les comprendre et les chérir. Ils nous rappellent que tout acte à une conséquence. Les volontés des uns ont toujours des répercussions sur les autres.
— Mais pourquoi n’en a-t-on jamais entendu parler ? insista le joli lapin blanc, avide de réponses, sa patte rebondissant sur le sol.
— Rah Pan, veux-tu bien fermer ton bec et le laisser raconter son histoire ? le rabroua un oisillon hamsa aux ailes émeraudes.
Les spectateurs commencèrent à se chamailler avant que le Père Noël ne ramenât le calme.
— Allons, allons ! L’heure n’est pas aux querelles ! Il n’est pas surprenant que vous n’ayez jamais entendu cette histoire. C’est un récit qui s’est perdu au fil des années, ne devenant plus qu’une légende auprès des anciens. Il est donc de mon devoir de vous le conter afin qu’à votre tour, vous puissiez garder à l’esprit son message…
Le maître des lieux, ravi d’avoir aiguisé leur curiosité, les observa à tour de rôle. Leurs mines intenses démontraient leur volonté de connaître les vérités ayant bâti ce monde. Il adorait raconter les anecdotes qui avaient ponctué sa longue vie. Elles étaient drôles la plupart du temps, parfois emplies de bon sens mais, il devait se l’avouer, cette note de peur dans le regard de son auditoire s’avérait nouveau. Aussi, plongea-t-il dans ses lointains souvenirs… La dernière fois qu’il avait relaté cet évènement remontait à plusieurs décennies. Il devenait important de rappeler aux nouvelles générations qu’un tout petit acte pouvait changer à tout jamais le cours des univers…
Levant son regard un instant, le Père Noël aperçut une ombre dissimulée dans le fond de la pièce. Il ne put s’empêcher de lui faire un clin d’œil et fut récompensé d’un sourire si chaleureux et tellement empli d’amour que ses joues prirent un instant cette même teinte carmine qui colorait son habit quotidien. Cet esprit connaissait tout aussi bien que lui cette odyssée mais son attitude prouvait son plaisir à la redécouvrir. À travers ces mots, c’était l’Histoire qu'ils allaient revivre, écartant le voile sur des évènements enfouis depuis si longtemps…
Pris dans ses pensées, le narrateur au costume rouge se ressaisit tout en buvant une gorgée de son nectar brûlant. Apparemment, il prenait trop de temps, s’il se fiait au toussotement faussement discret d’une fée impatiente dans le même état d’esprit que le reste de l'assemblée. Il était l’heure de se lancer dans son récit. Alors il se redressa et commença enfin :
— Il était une fois, il y a fort longtemps, alors que le Solstice d’Hiver approchait à grands pas, l’Héritier de Noël ne désirait pas accomplir sa destinée.
Il y eut une vague d’indignation. Cela fit sourire le conteur, comprenant parfaitement le choc suscité. Après tout, qui aurait l’idée de se rebeller contre sa nature même ? Quel être enchanté ne voudrait pas perpétuer la tâche qui l’avait vu naître ? C’était tout bonnement invraisemblable !
Et pourtant…
— Laissez-moi vous conter le périple de ce jeune héros en quête de sa place dans ce monde qui faillit disparaître dans les méandres de l’Oubli…
L’aube perça à travers les nuages d’un blanc immaculé, parant le ciel d’une nuance impétueuse chassant le froid de la nuit. Un souffle de vent déambula parmi les masses cotonneuses qui s’entrechoquèrent dans le silence infini. Aussitôt, des flocons s’échappèrent pour dévaler lentement à travers les arbres et les collines, fondant dès leur arrivée sur le sol immaculé. La saison hivernale débutait à peine, aussi les grosses chutes de neige recouvriraient bientôt le paysage d’un voile laiteux.
Des faës d’Hiver commencèrent à virevolter aux premiers rayons du soleil, parcourant la forêt pour réveiller les créatures de leurs songes. Elles s’amusèrent quelques instants avec des oisillons sous le regard perçant de leurs parents, sautèrent dans le tas de noisettes d’un écureuil et pourchassèrent des lapins matinaux. Facétieuses, elles essayèrent de capturer quelques flocons pour les emporter en ville mais ceux-ci disparurent bien trop rapidement. Au loin, les lumières s’allumèrent et les habitants commencèrent à arpenter les rues à destination de leur lieu de travail.
Chaque saison avait ses propres festivités que tous respectaient scrupuleusement et toujours avec entrain. À l’approche du Solstice d’Hiver, le Monde Enchanté se paraît des couleurs de Noël. Tout brillait de mille feux, réchauffant les corps et les cœurs malgré les basses températures de cette période. Partout les décorations fleurissaient aux balcons ; des poinsettias rouges saupoudrés d’étincelles dorées, entretenus avec amour tout au long de l’année, ornaient à présent les recoins des fenêtres et des guirlandes de pin lumineuses coloraient les façades, ajoutant une allure féérique au paysage. Le long des rues, des statuettes d’oursons enlaçant des cadeaux et des bonhommes de neige souriaient aux passants. Les réverbères étaient habillés de festons argentés et autres emblèmes tandis que des champs de cannes à sucre embellissaient les jardins entourés de baies de canneberges gelées. Sur la place principale, du haut de ses trente mètres, trônait le fameux sapin ingénieusement égayé par tous les esprits enchantés. On apercevait de-ci de-là de petits morceaux de papier se balançant au gré du vent, petits messages adressés par les enfants : des souhaits de cadeaux par milliers mais aussi des vœux d'espoir, d'amour et de paix. On ne pouvait qu’avoir le sourire en traversant ces ruelles dépeignant l’euphorie gagnée par la foule.
En périphérie de la ville, des volutes de fumée commençaient déjà à s’échapper des cheminées de l’usine de Noël. Les lutins étaient rigoureux dans leur travail, arrivant toujours à l’heure sans jamais rechigner à la tâche. Ils fabriquaient les cadeaux désirés par les humains, les testant et les réparant si nécessaire. De la simple petite poupée au dernier modèle de réalité virtuelle, tout y passait. Ils prenaient à cœur de créer la satisfaction et le bonheur ; deux émotions supportant leur monde.
Depuis un local surplombant la fabrique, devant son bureau quelque peu surchargé de lettres par milliers, le Père Noël observait à travers les parois vitrées le bon fonctionnement de son entreprise florissante. Esprit primordial et immuable, il restait en tout temps le chef d’orchestre de cette symphonie si bien huilée. Un dirigeant iconique qui assurait leur survie à tous. Toutefois, la vie pesait sur ses épaules et il était temps que son unique héritier assume ce devoir acquis de naissance.
Assis sur son imposant siège aux moulures minutieusement sculptées, l’homme soupirait. Sa main se crispait sur la missive devant ses yeux et son ventre proéminent cognait contre la table en pin massif. Son regard d’un bleu vif habituellement empli de bonhomie parcourait ligne après ligne dans un rituel devenu trop répétitif. La partie administrative était ce qu’il détestait le plus au monde mais chacun avait son rôle à jouer dans le courant de la vie et le sien s’apparentait à régler les litiges entre ses employés et l’éducation de son successeur. Il grommela en lisant un avertissement qui n’était au final qu’une pâle copie de tous les précédents. La constance semblait pourtant être une notion totalement étrangère au sujet de ses problèmes. Alors que son courroux atteignait les sommets des pics enneigés, il abattit soudainement son poing sur la surface compacte.
— Binky !
Son cri tonitruant se répercuta à travers la loge privée où il gérait ses affaires, traversa la vitre teintée de glace et plongea l’immense salle en contrebas dans la stupeur. Pendant un instant, l’activité s’interrompit, juste une seconde d’éternité qui faillit détraquer les engrenages millénaires. Puis, chacun reprit son travail, indifférent à la pagaille familière.
Un petit être accourut par l’escalier jouxtant le bureau du maître des lieux. À chaque pas monté, les clochettes de son chapeau pointu résonnaient, un son à peine perceptible dans le brouhaha ambiant. Tellement insignifiant qu’un second appel vociféré résonna alors qu’il ouvrait la porte sans prendre la peine d’annoncer son arrivée.
— Te voilà !
Menu, le fidèle secrétaire portait l’habit vert traditionnel de son espèce auquel il y avait ajouté une ceinture ocre et des lunettes de vue qui lui donnaient des airs de premier de la classe. Habitué à de tels éclats de la part de l’esprit d’Hiver, il garda une expression impassible.
— Votre tension Père Noël, prévint le lutin d’une voix atone.
— Où est-il !? répliqua ce dernier en ignorant ses recommandations.
Binky souffla profondément avant de se lancer, connaissant la sensibilité des propos qu’il rapportait. Quand son supérieur employait ce ton-là, il était inutile de demander des précisions. Il savait parfaitement qui était le sujet de tous ses tourments.
— D’après les faës d’Hiver, il serait chez les fées marraines. Une de leurs protégées vient de trouver le grand amour et elles ont voulu fêter ça dignement, invitant tous les esprits à se joindre à cette liesse.
— Par les cascades givrées de caramel fondant ! Il n’y a pas de temps pour de telles frivolités alors qu’il reste tant de choses à faire ! Ce petit est une véritable épine dans ma botte ! À croire qu’il veut me rendre renne !
— Attention à ne pas vous le faire amputer…, répliqua Binky, caustique. Cela serait malvenu pour le Grand Soir. On pourrait penser que vous avez encore abusé du lait de poule de la Mère Noël.
— Il a encore manqué les cours de la veille ! poursuivit-il sans faire attention à l’humour plus que douteux de son second. Encore ! Noël est dans moins de trois semaines et il n’est toujours pas prêt à m’épauler ! tonna le Père Noël excédé en se levant.
Sa barbe blanche tremblotait sous sa rage et le pompon de son bonnet vint cogner ses tempes, l’agaçant davantage. Il remonta par réflexe son pantalon rouge et ceignit plus serré la bandelette noire qui maintenait en place son habit immémorial avant de se positionner devant le lutin imperturbable. Malgré la différence de taille, le petit elfe ne craignait aucunement les coups de colère de son maître, somme toute justifiés, devenus récurrents ces dernières années. En effet, celui-ci semblait éprouver quelques difficultés d’éducation avec sa propre progéniture. Ironique quand on savait le nombre d’esprits qui suivait à la lettre tous ses ordres.
— Ramenez-le-moi et en vitesse ! ordonna-t-il avant de le dépasser pour sortir de la pièce exigüe.
Loin de s’être calmé, il vociféra sur ses sujets en leur ordonnant de s’activer. Les festivités de Noël approchaient à grands pas et ils avaient encore énormément de choses à gérer en plus des demandes de dernière minute. D’un œil averti, il parcourut les tuyaux à la recherche du moindre défaut, scruta les tapis déroulants où les jouets étaient assemblés avec méticulosité et vérifia la bonne progression des diverses constructions en cours jusqu’à l’emballage de ces dernières. Pendant son inspection rapide, son assistant s’était rapproché.
— J’envoie des faës d’Hiver le ramener, signala son subordonné, mais avant ça, il y a quelques soucis à régler.
— Nom d’une brochette de marshmallows ! Que se passe-t-il encore ? se plaignit-il.
Le regard de Binky scintilla alors qu’un parchemin scellé apparut. Il décacheta le sceau, le vélin se déroulant sur plusieurs mètres, alors qu’il commençait à lister les problèmes du jour.
— Cometa est nerveuse depuis sa mise à bas. Bien que les soins fournis soient semblables à d’habitude au chenil, elle se montre de plus en plus réticente à quitter ses petits. Il faut que vous alliez la rassurer, Père Noël.
— Ce n’est pourtant pas sa première portée !
— Quelques cupidons juvéniles ont glissé leurs carreaux dans des cadeaux pendant que les lutins avaient le dos tourné. On essaye de vérifier les boîtes une à une mais votre perception nous aiderait grandement, enchaîna Binky, l’air impassible.
— Un souci qui ne réclame pas ma présence, rétorqua-t-il irrité.
— Des lapins ont commencé leur récolte dans les rivières de chocolat mais les faës d’Hiver m’ont informé que ce n’était pas en prévision de Pâques.
— Foutus léporidés impatients ! Qu’en font-ils au juste ?
— Ils les distribueraient en douce à quelques souris qui, paraît-il, les refourgueraient à des petits enfants dans l’espoir de voir leurs dents tomber rapidement.
— Par le nez rouge de Rudolph ! Ce n’est vraiment pas la période pour causer des problèmes dentaires aux parents !
Binky approuva d’un hochement de tête.
— C’est bien ce que je pensais alors j’ai fait préparer votre traîneau. Nous nous rendons directement dans le quartier de La Petite Souris.
— Comme toujours Binky, ton efficacité est inégalable ! dit le Père Noël avec fierté. Si seulement mon bon-à-rien de fils pouvait être aussi rigoureux que toi…
— C’est trop d’honneur, Père Noël, répondit le lutin toujours placide.
Les deux esprits se dirigèrent vers le parc de stationnement. En chemin, le guide suprême de l’Hiver s’arrêta de nombreuses fois pour accorder quelques mots encourageants à ses disciples. Il mettait un point d’honneur à toujours complimenter leurs services car il savait que sans leurs concours, rien ne serait prêt à temps pour l’évènement le plus attendu par les petits humains. Ils formaient un tout, tel l'ingrédient indispensable permettant de réussir une fournée de cookies. L’eurythmie de leur monde ne pouvait fonctionner que si chacun veillait à faire correctement son travail. Il s’assurait également à ce que l’ambiance restât toujours festive pour ne pas laisser la lassitude envahir cette routine immuable. La constance était le fondement de leur vie ; la joie leur source.
Une fois arrivés dehors, le Père Noël murmura quelques paroles affectueuses à ses neuf rennes personnels, ses précieux compagnons de toujours qui l’accompagnaient à chacun de ses déplacements, avant de grimper dans le véhicule, Binky à ses côtés. D’un coup de bride, la fastueuse luge décolla puis, après s’être stabilisée dans les airs, s’élança haut dans le ciel, traversant la nuée duvetée et prenant le cap vers sa première mission matinale.
Loin de la périphérie de la ville où se situait l’Atelier du Père Noël, la vie somnolait encore dans le quartier réservé aux fées marraines, malgré la matinée avancée. La veille avait été un jour d’allégresse à célébrer. Une jeune femme avait redécouvert les joies de l’amour à l’approche de Noël. Elle avait perdu son boulot puis son appartement et s’était retrouvée à la rue. Tout n’était alors que désolation dans son univers, chose inacceptable pour ces êtres de lumière. Une fée marraine, spectatrice opportune, avait alors décidé de reprendre la situation en main. Déguisée en mendiante, elle l’avait subtilement dirigée vers une auberge de campagne en recherche de ses talents de cuisinière. Le hasard voulu qu’un bel homme célibataire y séjournait, rêvant du grand amour et espérant secrètement que la magie de Noël devienne réalité en la rencontrant. Bien évidemment, il avait fallu l’aide de quelques cupidons et faës d’Hiver pour venir à bout de cette romance mais le résultat escompté était plus que satisfaisant. L’ambiance hivernale, ses flocons de neige, une touche de ces reflets argentés ; tout sublimait cet instant et la perspective d’une belle soirée de Noël romantique. Tout le monde attendait avec impatience que les deux tourtereaux s’échangeassent leurs vœux d’amour éternel sous le sacro-saint gui.
Enfin, presque tout le monde.
Dans l’une des chambres, allongé entre deux fées marraines et un cupidon, Andros s’éveilla doucement. Son regard se perdit dans les nombreuses tentures accrochées au plafond qui obstruaient la vision de photographies de filleuls épanouis ayant connu la grâce d’une fée marraine, que ce soit à travers des couples amoureux, des familles soudées ou des amis très proches. La pièce en elle-même était décorée à l’image de l’être enchanté qui y résidait : tout n’était qu’amour et bonheur. Dans la précipitation de la soirée, tous enivrés par cette fièvre euphorique, les noceurs avaient fini submergés par les vapeurs des esprits de l’Amour. Le charme des cupidons s’était transformé en un désir intense qui avait fait perdre les vêtements des uns et des autres. L’on retrouvait différents habits ici et un arc oublié là. Et au-delà de tout ça, des corps enchevêtrés étincelants de plaisir assouvi.
Un regard à la fenêtre avertit le jeune homme de la matinée avancée. Son attention dévia légèrement, s’attardant sur la frise de vignes entremêlées dans les cadres de bois et qui s’échappaient vers l’extérieur. Andros se redressa en bâillant. Un nouveau jour comme la veille semblable au lendemain, pensa-t-il avec lassitude. Un ennui qu’il n’était pas pressé de découvrir. Il se leva doucement, évitant de réveiller ses compagnons d’une nuit, puis s’étira. Une fois debout sur ses jambes musclées, il fit quelques exercices d’assouplissement dans toute sa parfaite nudité.
— Des grognements de si bon matin ? marmonna soudain une voix fluette derrière lui. J’en connais un qui a besoin d’amour.
Andros se retourna vers le lit et plongea dans des iris ambrées où se mouvait un éclat rosé de félicité. L’entité s’était redressée avec volupté, ses boucles aux reflets lilas auréolant son visage mutin derrière lequel deux arcs de plumes à la blancheur virginale saillaient. La main d’une fée marraine était posée sur son ventre glabre alors que sa propriétaire restait pelotonnée sous les couvertures. D’un coup d’œil rapide, Andros repéra la seconde femme à ses cheveux violets dépassant d’une autre couette. Il focalisa de nouveau son attention sur son vis-à-vis dont l’expression se parût d’érotisme. En digne apprenti de Cupidon, ce dernier maîtrisait sa sensualité à la perfection, clignant plusieurs fois de ses paupières alourdies par des cils d’un noir charbonneux et une moue étirant ses lèvres. Andros sourit et s’approcha d’une démarche féline qui émoustilla le cupidon. Il s’abaissa jusqu’à ses lèvres qu’il mordillait de ses petites dents blanches et partagea avec lui un baiser de connivence. Puis, d’une voix de velours à faire se recroqueviller même les orteils d’un golem, il trancha :
— Je n’ai pas besoin d’amour.
— Quoi ?!
Sous le choc, le bellâtre le regarda chercher ses habits sans réagir. Quand Andros mit la main sur son pantalon de laine rouge, il s’extirpa enfin de son nid douillet et se planta devant cet esprit qui lui avait fait atteindre les étoiles cette nuit-là.
— Qu’est-ce que tu as dit ? voulut-il se rassurer.
— Je n’ai pas besoin d’amour, petit cupidon.
— N’importe quoi ! Tout le monde a besoin d’amour !
Une fois le bas enfilé, Andros s’empressa de s’éloigner et de retourner à la recherche de ses vêtements disparus.
— On se porte très bien sans amour, rétorqua-t-il avec indolence.
— Mais tu es un esprit d’Hiver ! s’exclama le jeune homme ahuri.
Andros, toujours torse nu, se retourna, une moue taquine peignant ses commissures. Il se pencha vers lui, son souffle caressant tendrement sa joue, et susurra d’une voix doucereuse :
— Tu as raison. Je ressens l’amour de l’Hiver et de la neige. C’est dans ma nature.
Il partit d’un rire moqueur en secouant la tête avant de s’éloigner et de trouver autour de lui le reste de ses affaires. Piqué au vif, le cupidon se planta à nouveau devant lui.
— Je ne vois pas ce qu’il y a de drôle !
— Ce qu’il y a de drôle, tendre adonis, c’est cette suffisance qu’ont les enchantés envers l’Amour. L’Amour ne vous appartient pas et n’est pas utile à tous.
— Bien sûr que si ! insista-t-il. Tout le monde a besoin d’amour !
Enfin entièrement habillé, Andros empauma son partenaire d’une nuit et l’embrassa sauvagement. Puis, le laissant à bout de souffle, il quitta la chambre qui l’avait accueilli durant cette nuit luxurieuse. Sans un regard en arrière, il referma la porte en pousses végétales et parcourut les couloirs labyrinthiques de l’arbre abritant la demeure des fées marraines vers la sortie. À peine eut-il posé le pied dehors que des faës d’Hiver l’accostèrent immédiatement. Trois petites lucioles vinrent virevolter autour de lui et parlèrent de leurs voix stridentes.
— Père Noël vous cherche…
— Vous avez manqué les cours !
— Il est très en colère…
— Vous devez vous rendre au plus vite…
— Vite dans sa loge !
— Et sans attendre !
Agacé, le jeune homme les chassa d’un geste tout en continuant son chemin.
— Père Noël…
— Les cours !
— Il n’écoute pas…
— Désobéissant !
— Il doit vous voir…
Andros s’arrêta brusquement puis, se concentrant, il conjura un vent glacé qui emporta les petites faës dans une cacophonie de cris de mécontentement. Satisfait de s’être débarrassé de ces importunes, il se dirigea vers le centre-ville. Il fit halte dans une échoppe pour emporter une pâtisserie tout en charmant les vendeuses nymphiques qui soupirèrent face à la tentation dégagée par leur visiteur. Il décréta qu’un bon nectar fumant valait le détour et entra dans l’antre du chocolatier. Une fois ses besoins primaires comblés, il s’accorda une pause près de la fontaine d’où s’écoulait du nectar brun à l’odeur entêtante puis, enfin, il daigna se rendre à l’Académie.
Située en plein centre-ville, la bâtisse comportait de nombreuses annexes, toutes de tailles et de formes différentes, visibles à travers les champs de réglisse où virevoltaient des faës des plantes. L’entrée principale s’ouvrait au bout d’une allée pavée sur un immense sas gardé par un golem. À son arrivée, la créature de roches s’anima.
— Tu es de retour, Andros…
— Obligation familiale, Orny !
— Ils sont tous en colère contre toi.
— La colère ne fait pas vivre notre monde. Ça leur passera !
— Ce matin, tu as cours de Langues.
Andros s’immobilisa un court instant.
— Comme c’est ironique, grommela-t-il dans sa barbe.
L’étude des Langues n’avait pas sa préférence, bien qu’explorer les cavités buccales de ses amants éphémères suscitait un rictus infime sur son visage blasé. On lui prodiguait toujours les mêmes leçons, inlassablement. De fait, il connaissait par cœur le programme. L’envie de fuir cette routine immuable l’oppressa de nouveau. À présent sur place et n’ayant rien de mieux à faire, il se dirigea d’un pas pesant vers sa salle de classe.
Andros traversa la cour encadrée par les différents bâtiments. Autour de lui, des colibris chantonnaient des hymnes de la vie hivernale alors qu’une brise légère faisait carillonner quelques attrape-rêves ésotériques. Le silence l’enveloppait dans sa couverture duveteuse tandis que ses pieds bottés foulaient la neige dense amassée sur le sol. Il pénétra à l’intérieur d’un immeuble s’élevant sur trois étages, poussant la lourde porte de chêne dans un grincement désagréable. La chaleur de la cheminée centrale le réchauffa immédiatement. Il suivit du regard la colonne de fumée qui se soulevait jusqu’au dôme vitré puis prit la direction des escaliers qu’il grimpa jusqu’au palier suivant. L’absence de chuchotements qui régnait marquait davantage son retard. Totalement indifférent, le jeune esprit parvint jusqu’à la salle exclusivement réservée à ses futures fonctions qu’il avait déjà maintes fois fréquentée. Cette pièce, il la connaissait par cœur. Quand il ouvrait la porte, la première émotion qui s’imposait à ses pensées était « austère ». Un concept étrange pour le Monde Enchanté. Aucun ornement scintillant, sapin et autres branches de gui ne comblait les murs. À la place, des drapeaux des différents pays du Monde de l’Entre-Deux étaient fixés sur les pierres froides, entourant une cartographie qui en recouvrait tout un pan.
« Cours de Langues. »
Oh ! Comme il aurait aimé que cette leçon soit partagée avec des fées ou des cupidons ! Cependant ce genre d’apprentissage ne nécessitait pas de développer ses compétences pour embrasser mais plutôt celle de la réflexion. Point de batifolage ici, son professeur lui dictera des phrases pas toujours compréhensibles d’enfants qu’il devra traduire dans différentes langues… Un véritable calvaire !
Au centre de la pièce, deux larges bureaux se faisaient face. Sur le premier étaient disposés une pile de livres à côté d’un bloc-notes et des stylos. Une tasse construite à partir de cristaux colorés reposait en bout de table, son breuvage ambré depuis longtemps refroidi. Perché sur le second bureau, Pr Herco l’attendait.
Andros ne put que ressentir de l’irritation en découvrant son précepteur tout guilleret, chantonnant des chants de Noël dans plusieurs dialectes. Les années avaient inévitablement marqué ses traits, pourtant il possédait toujours son âme d’enfant. C’était un lapin aux grandes oreilles qui, dans sa jeunesse, avait parcouru le monde des humains et apprivoisé les us et coutumes de chaque peuple. Depuis un incident dû à sa vieillesse, son destin avait pris une nouvelle direction. Il s’était alors donné pour mission de partager son immense savoir avec les aspirants de l’Académie. La plupart de ses leçons se suivait en groupe, selon l’espèce et le besoin de chacun. Les petites souris apprenaient particulièrement le zozotement des enfants alors que les lapins se contentaient d’un vocabulaire restreint.
Andros se savait à part. Unique. Et ce, depuis sa naissance. Un rôle imposé qui se reflétait par sa solitude. Un destin qui ne prenait pas en compte ses aspirations, lui, l’Héritier de Noël. Il prétendait à vivre autre chose mais cela lui était inaccessible. Son existence même était faite d’obligations qui marquaient son isolement. Il ne pouvait l’exprimer à haute voix mais il enviait les autres… Tous œuvraient en équipe, partageant leurs états d’âme avec leurs semblables. Alors que pour Andros, qui paraissait toujours entouré, ses compagnons semblaient rester par intérêt. Personne ne se liait vraiment à lui, seulement à l’image qu’il dégageait : celle d’une icône qui, un jour, allait reprendre le poste le plus important de Noël. À leurs yeux, il était tel un prince, une entité née pour accomplir sa mission, peu importait ses propres désirs. Personne ne comprenait le poids de ce bonnet rouge et de ses exigences car tous l’intégraient à leur quotidien comme d’une évidence.
Inconscient des sentiments errants qui embrumaient l’esprit de son élève, l’instructeur débuta enfin sa leçon. Une leçon ne démontrant aucune différence avec les précédentes, aussi Andros se sentait-il déjà épuisé à l’idée que la journée ne faisait que commencer. L’ennui grignotait chaque jour sa patience et son enthousiasme perdu depuis longtemps. Et les choses ne s’amélioreraient pas au cours suivant.
Bien que l’enseignement de cette matinée eût été écourté par son retard, il fut soulagé de quitter la salle. Dehors, les autres étudiants chahutaient, rigolaient et discutaient joyeusement. Une fois encore, une muraille invisible séparait Andros de tout ce petit monde alors qu’il parcourait les couloirs et changeait de bâtiment. Il parvint à une dépendance immense où il retrouva des décors à taille réelle pour la pratique de l’Infiltration des Foyers. Des décors de maison aux architectures les plus farfelus, en passant par des appartements dernier cri à la cabane dans le jardin ou encore au bunker soi-disant infranchissable… Tous les cas de figure possibles avaient été conçus pour son entraînement. Chacune de ces pièces proposait des niveaux de difficulté variés. C’était un parcours de santé pour lui tant il en connaissait chaque recoin. Et ce, même avec un temps limité pour venir à bout de l’exercice, afin de devenir tel un gentleman cambrioleur. Mais l’heure n’était pas aux projections… Devenir Père Noël n’était pas une mince affaire ! En plus du poids de son habit et de sa hotte, il devait se déplacer avec l’allégresse des cupidons, la discrétion des souris, devenir invisible aux yeux des curieux sans déclencher les alarmes, ni se casser le dos dans les conduits de cheminée ou de se faire mordre les fesses par des canidés peu accueillants… On n’imaginait pas tous les dangers qu’il prenait pour satisfaire les humains !