Nuits de noces - Violaine Bérot - E-Book

Nuits de noces E-Book

Violaine Bérot

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Beschreibung

Depuis la mort de mon père, j’assiste, impuissante, à la douleur de ma mère face à la disparition de cet homme follement aimé, qu’elle avait il y a très longtemps arraché à l’Église. 
Leur histoire, je la connais surtout par elle qui l’a toujours racontée.
À partir de son interprétation, mais aussi de mes propres observations d’enfant puis d’adulte, j’ai voulu donner à entendre combien fut bouleversant de côtoyer de si près leur explosif amour.
Très vite m’est apparue cette évidence : il me fallait écrire depuis sa place à elle, ma mère, aussi incestueux que puisse paraître ce geste.
À toi, donc.
À vous deux.
Violaine Bérot


À PROPOS DE L'AUTEURE


Née en 1967, Violaine Bérot vit dans les Pyrénées. Dans le travail littéraire singulier et poétique qu’elle poursuit depuis presque trente ans et une dizaine de romans, parus pour la plupart aux éditions Lunatique et Buchet Chastel, Violaine Bérot explore les non-dits, les liens familiaux, les choix de vie et les existences à la marge. Nuits de noces est son premier ouvrage à La Contre Allée.

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Seitenzahl: 24

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Nuits de noces

Violaine Bérot

© (éditions) La Contre Allée (2023)

Collection La sentinelle

Nuits de noces

Violaine Bérot

Se termine cette année que tu ne termineras pas.

Se termine cette année et moi

seule

moi

si vieille et presque morte

moi même pas capable d’être morte

même pas

tandis que toi.

1.

Dès le premier moment aperçu et aimé

instantanément

lui

l’homme interdit

le prêtre

devant la foule.

Dès le premier moment convaincue

moi

que lui serait

l’homme de ma vie.

Et mon propre père

sévère, dur, une terreur

mon propre père qui veillait sur moi comme les poules sur leurs grains

mon propre père disait

« qu’elle aille à la messe, là au moins elle ne rencontrera pas de garçons »

mon propre père

– haha –

bien pris à son propre piège.

Dix-neuf ans et demi j’avais

pas même vingt

et pourtant l’absolue certitude

l’instantanée certitude

lui

lui et aucun autre

lui, l’homme interdit

l’homme de messe

pour moi

rien que pour moi.

Et de l’adversaire

même pas peur

pourtant

l’adversaire

pas une femme, pas une jolie fille, non

bien mieux, bien plus grand, bien plus fort

l’adversaire suprême

Dieu

Dieu et toute la Sainte Église

et moi j’avais dix-neuf ans et demi

et même pas peur

même pas.

2.

Pourtant la peur

la peur je connaissais.

Il suffisait que je croise mon père

que je pense à mon père et au père de mon père

à ces hommes qui m’avaient engendrée

et la peur alors

cette putain de peur.

Mais avec lui non

avec lui ma peur elle s’envolait, pfuit, disparue, un miracle, plus de peur, fini

devant lui je me retrouvais

apaisée

sensation inconnue

– apaisée, moi –

plus rien à craindre, aucune peur, envolée la peur, pfuit.

L’allégresse d’une jeune fille de dix-neuf ans et demi

et des heures durant parler de cet homme avec l’amie d’enfance

et lui jurer

jurer à l’amie

que l’homme aimé

le prêtre

un jour

plaquera tout

enverra promener l’Église

la Très Sainte Église

pour l’amour de moi.

Et rire

rire comme des gamines

rire du père terrible qui envoie sa fille à la messe

qui l’envoie dans les bras du curé

sa fille que personne ne doit toucher

– personne –

mais qui a le droit d’aller visiter

en son presbytère

l’adoré

– en tout bien tout honneur

mais quand même.

Rire de la bonne farce jouée au père

qui envoie sa fille

dans la gueule

du loup.

3.

Du père

des mâles de ma famille

de leur folie furieuse

de comment tout tremblait autour d’eux

des femmes terrorisées, soumises, atterrées, muettes

même à l’amie je ne racontais pas l’entière vérité.

Trop de honte d’être née de là

d’eux.

Pourtant à lui

au prêtre

à lui

en parler

je ne sais pas pourquoi

je ne sais pas comment

en parler c’est venu

c’est venu tout seul