Ombres Obscures - Angèle Spring - E-Book

Ombres Obscures E-Book

Angèle Spring

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Beschreibung

Des attaques touchent les différentes capitales du monde, des témoignages commencent à se diffuser à propos de créatures étranges, de loups et d'hommes à la force incroyables. Raina, hôtesse à la vie banale, s'aperçoit qu'une personne avec des yeux d'un rouge étincelant, la suit. Intriguée, elle va tout faire pour découvrir qui est ce personnage énigmatique aux pouvoirs surnaturels. Au fur et à mesure qu'elle s'approche du but, elle va se rendre compte que les témoignages disent vrai, et que de nouvelles espèces coexistent sur terre. Mais le pire, c'est qu'elles détiennent des informations sur l'accident dans lequel ses parents et son petit ami ont trouvé la mort. Malheureusement, tout a un prix, et Raina va devoir abandonner sa vie ordinaire pour entrer dans celle des Ombres Obscures.

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Seitenzahl: 397

Veröffentlichungsjahr: 2022

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Sommaire

Tome 1 : Les Archers

CHAPITRE 1

CHAPITRE 2

CHAPITRE 3

CHAPITRE 4

CHAPITRE 5

CHAPITRE 6

CHAPITRE 7

CHAPITRE 8

CHAPITRE 9

CHAPITRE 10

CHAPITRE 11

CHAPITRE 12

CHAPITRE 13

CHAPITRE 14

CHAPITRE 15

CHAPITRE 16

CHAPITRE 17

CHAPITRE 18

CHAPITRE 19

CHAPITRE 20

CHAPITRE 21

CHAPITRE 22

CHAPITRE 23

CHAPITRE 24

CHAPITRE 25

CHAPITRE 26

Tome 2 : Anastasia

CHAPITRE 1

CHAPITRE 2

CHAPITRE 3

CHAPITRE 4

CHAPITRE 5

CHAPITRE 6

CHAPITRE 7

CHAPITRE 8

CHAPITRE 9

CHAPITRE 10

CHAPITRE 11

CHAPITRE 12

CHAPITRE 13

CHAPITRE 14

CHAPITRE 15

CHAPITRE 16

CHAPITRE 17

CHAPITRE 18

CHAPITRE 19

CHAPITRE 20

CHAPITRE 21

Épilogue

Biographie

Bibliographie

Angèle Spring

Ombres Obscures

Tome 1

Les Archers

CHAPITRE 1

Mon ami et colocataire, Jake Anders, et moi-même, Raina Forring, revenons d’une dure soirée. Le réveil est un peu difficile. Nous décidons d’allumer la télévision pour casser le silence du matin tout en déjeunant sur la table. Jake, comme à son habitude, télécommande en main, zappe et tombe sur une chaîne d’information et là… nous restons tous deux sans voix.

Des attentats ont eu lieu dans la nuit, à Paris, à Londres, à Moscou, à Washington, à Pékin... En fait, dans toutes les capitales du monde.

Nous ne comprenons rien à ce qui vient de se passer, nous nous regardons, bouche bée, laissant tomber nos céréales.

— Mais comment c’est possible ? Il s’est passé quoi ? demandé-je.

— Je ne sais pas, c’est complètement dingue ! répond Jake, abasourdi par ce qu’il vient d’entendre aux informations.

Après avoir fini mon petit déjeuner, je décide d’aller prendre une douche pour me remettre les idées en place. Je me fixe devant le miroir, regardant mes longs cheveux bruns, mes yeux bleus. J’ai un physique assez banal, silhouette sans trop de formes, ni trop fine du haut de mon mètre soixante-cinq.

M’extirpant de mes pensées, je vais enfin sous la douche. Celle-ci me fait beaucoup de bien après la soirée d’hier, mais un pincement au cœur me vient d’un coup. Pendant que je m’amusais, énormément de personnes ont perdu la vie cette nuit. Je n’en reviens pas, ce n’est pas possible que de telles choses arrivent !

Une fois lavée et habillée, je rejoins Jake qui est resté scotché devant la télévision avec ses cheveux blonds en bataille et tout juste vêtu de son jogging gris qui lui sert de pyjama.

— Il y a eu des explosions qui ont détruit une bonne partie des capitales, c’est le chaos total, des milliers de personnes décédées ou blessées. Comment peut-on faire cela ? Et surtout, qui peut organiser de tels attentats ? dit-il.

— Je ne sais pas… C’est juste horrible. Ils ne disent rien sur les auteurs ? demandé-je.

— Non, mais les témoignages, partout dans le monde, sont très troublants. Certains ont aperçu des loups, d’autres des êtres qui arrivaient à sortir des décombres sans difficulté ou encore d’autres disent avoir vu des personnes déplacer les objets sans les toucher, mais, d’après les journalistes, ce sont sûrement des hallucinations qui sont dues aux produits échappés des bombes lors de leurs explosions, ce qui est pour moi beaucoup plus crédible, me répond-il.

— Hum, oui, je suppose, murmuré-je, un peu sous le choc.

Jake décide d’aller, lui aussi, prendre une douche. Je m’installe sur le canapé pour écouter les informations. Les images sont horribles. Toutes ces personnes, sans vie ou blessées, sans parler de tous ces gens qui pleurent, choqués d’avoir perdu leurs proches. J’éteins la télévision, je ne peux plus regarder cela une seconde de plus ! Pour m’occuper l’esprit, je fais un peu de ménage dans l’appartement en attendant que Jake se décide enfin à sortir de la salle de bains. Pire que les filles, celui-là !

Quand il a enfin fini de se préparer, nous sortons faire nos courses, comme c’était prévu, mais les rues sont quasiment vides, le peu de personnes dehors a le regard triste, choqué. On dirait que l’endroit est mort… Les attentats n’ont pas touché que les capitales, mais les villes du monde entier.

De retour de nos emplettes, Jake rallume la télévision pour voir s’ils ont avancé dans la recherche des auteurs de ces actes horribles pendant que je prépare un semblant de repas. Pour être sincère, nous n’avons pas réellement faim avec cette atroce nouvelle.

— Non, mais écoute ça ! Des gens prétendent que ce ne sont pas les produits toxiques, ou je ne sais quoi, des bombes qui ont fait voir aux victimes ces choses étranges, car elles aussi les ont déjà aperçues par le passé ! C’est fou, ça, quand même, qu’il y ait des personnes, même après tout ce qui est arrivé, qui parviennent encore à vouloir faire le buzz ! remarque Jake d’un ton agacé.

— Ce n’est peut-être pas leur but, tu sais, essayé-je.

— Quoi ? Tu ne vas pas me dire que tu crois à ce qu’ils racontent ? me lâche-t-il, étonné.

— Non… je suppose que non, rétorqué-je d’un ton perplexe.

— Tu supposes que non ? Ce n’est simplement pas possible, Raina !

— Oui, tu as raison. C’est vrai que n’importe quel humain ne peut pas déplacer des charges lourdes sans difficulté ou encore pires sans les toucher, mais…

— Il n’y a pas de mais, tu l’as dit, ce n’est pas possible, me répond Jake. Heureusement que l’on ne connaît personne qui habite dans la capitale. Je n’imagine même pas ce que vivent les proches, surtout avec ces idiots qui racontent n’importe quoi !

Je préfère ne pas répondre, quand il est dans comme ça, cela ne sert à rien de discuter avec lui, même si je comprends tout à fait son état d’esprit.

Nous passons la fin de l’après-midi ainsi que la soirée devant la chaîne d’informations, mais ils ne nous apprennent pas grandchose de plus. Les images des capitales sombrées dans le chaos, les témoignages bouleversants des victimes, des proches et des personnes ayant vu ces étranges créatures ou même ces loups errants par-là plongent Jake dans un immense désespoir.

— Non, mais c’est vrai, que peuvent faire des loups dans une grande ville ? Ce n’est pas logique. Je ne sais pas comment ils peuvent prétendre cela. Et les gens les croient en plus ! dit-il, encore agacé par ce qu’il entend.

— Tu sais quoi ? Je vais dormir, je suis épuisée par tout ça…

— Tu arriveras à trouver le sommeil ? Parce que moi non ! me répond-il.

— Je ne sais pas… Je vais prendre un somnifère, on verra bien. Essaie de te reposer un peu, cela ne changera rien que tu rumines devant la télévision, tu sais.

— Oui, c’est vrai, mais pour l’instant je n’ai pas envie de me coucher. Va dormir, tu as raison, tu as une tête atroce, me dit Jake en souriant et en me faisant un clin d’œil.

— Ha ha ! Bon, allez, à demain, lui dis-je en lui lançant le coussin du canapé.

Il fait sombre, je suis dans la voiture avec mes parents et Allen, mon petit copain. Tout d’un coup, un loup surgit sur la route avec ses yeux verts brillants, mon père met un coup de volant pour l’éviter, mais le véhicule finit dans le fossé. Je suis étourdie, je ne sais plus où je suis. Je vois mes parents et Allen sans vie. J’essaie de me libérer, sans succès, quand, d’un coup, un homme avec je ne sais quelle force arrive à me sortir de là, ses yeux sont d’un rouge éclatant et, la minute d’après, reprennent une couleur normale…

— Eh, Raina !

— Jake ! dis-je en me réveillant en sursaut.

— Est-ce que ça va ? me demande-t-il, l’air inquiet.

— Euh oui… Enfin, j’ai rêvé de mon accident de voiture avec mes parents et Allen, mais c’est étrange… dis-je, encore un peu bouleversée.

— Qu’est-ce qui est étrange ? C’est sûrement tout ce que l’on a vu, cela t’a fait remonter ce souvenir.

— Oui, je pense…

— Tu es sûre que ça va ?

— Tu veux bien rester avec moi pour le reste de la nuit, s’il te plaît ?

— Mais oui, bien sûr ! Il n’est pas question que je te laisse comme ça, me dit-il en s’installant auprès de moi.

CHAPITRE 2

À peine une semaine après les attentats, les forces de l’ordre sont débordées, les rues ne sont plus tellement sûres. Les délinquances ont grimpé en flèche, entre ceux qui en profitent pour étendre leurs réseaux de stupéfiant, ainsi que tous les problèmes qu’ils engendrent, les règlements de comptes, et ceux qui en veulent au monde entier de ce qui est arrivé et qui détruisent tout…

D’après les journalistes, personne ne sait encore qui a pu faire ça, pourtant il ne doit pas être seul. Jake, comme beaucoup d’autres, d’ailleurs, pense que c’est une affaire politique, que c’est pour cela que l’on ne nous dévoile rien, que l’on nous cache des choses et que les faux témoignages, comme il dit, sont là pour détourner notre attention du problème. Moi, je ne sais pas… Je repense à ces cauchemars ou du moins à ce souvenir. Est-ce mon imagination qui a créé cela ou est-ce ce qui s’est réellement passé ?

— Raina, tu es avec moi ?

— Hein ? Ah oui, désolée, j’étais ailleurs.

— Oui, j’ai vu ça, me répond Jake, amusé. Et tu étais partie où ?

— Je... je l’ignore moi-même, lui répondissé-je.

Je n’avais pas vraiment envie de lui parler de ça, surtout en sachant, par avance, ce qu’il allait me dire.

— Tu viens ? Tu ne vas pas rester dans la voiture toute la nuit ?

— Non, je me sentirai mieux à l’appartement. En même temps, quelle idée d’avoir voulu manger dehors !

— Oui, les rues ne sont plus très sûres, mais j’avais espéré que notre restaurant préféré serait ouvert. Dommage, tu vas devoir faire à manger, me répond-il en rigolant.

— Alors, là, tu rêves, tu me dois un repas. Soit tu fais à manger, soit tu commandes, dis-je sur un ton amusé.

— Chinois, ça te va ?

— Je m’en doutais. Je te laisse commander, tu sais ce que je prends.

Une fois livrés, nous nous installons pour manger.

— C’est fou, ça. On doit payer limite le double de la commande pour se faire livrer maintenant ! dit Jake en exagérant à peine.

— Au moins, lui, il est ouvert et il livre toujours. Je comprends qu’ils augmentent leurs prix pour livrer, ils risquent de se faire agresser à tout moment.

— Oui, tu as peut-être raison, mais quand même. Quand on y pense, en une semaine, comment est devenu le monde. Un chaos, comme quoi du jour au lendemain tout peut basculer.

— Oui, c’est comme ça. On ne peut rien y faire.

Une fois le repas avalé, Jake s’installe sur le canapé et démarre sa console de jeux.

— C’est à ton tour de débarrasser. Ne me regarde pas comme ça ! me dit-il.

— Tu ne perds pas le nord, toi, en tout cas !

— Après, viens me rejoindre, que je te batte un peu aux jeux vidéo, dit-il en rigolant.

— Oui, j’arrive ! On va voir qui bat qui !

Je débarrasse donc la table. En passant devant la fenêtre, je m’arrête un instant pour regarder dehors. Je crois apercevoir un homme sauter du haut de l’immeuble d’en face jusqu’en bas en atterrissant sur ses deux jambes comme si de rien n’était. D’un coup, il lève la tête dans ma direction, à croire qu’il m’a vue. Ce qui est le plus troublant, ce n’est pas qu’il m’a regardée, mais c’est le reflet dans ses yeux, d’un rouge éclatant…

— Raina, tu comptes rester plantée devant la fenêtre longtemps ou tu vas venir jouer avec moi ?

Je ne réponds pas. Je ne sais plus quoi penser. Est-ce que c’est encore mon imagination qui me joue des tours ? Cela semble peu probable, à moins que je ne devienne folle… Car Jake a raison, les témoignages de ces personnes sont faux. Ce n’est pas possible, cela ne peut pas être réel. Mais, au fond de moi, un doute s’installe. Et si c’était vrai…

— Hou hou, Raina ?

— Oui, excuse-moi, j’arrive.

— Tu es encore partie ailleurs ? me demande Jake.

— Oui, ça doit être ça.

— Il faut que tu me dises où tu vas comme ça. Cela a l’air bien, tu préfères être là-bas plutôt qu’être avec moi, me répond-il d’un ton moqueur.

— Ho, ça va ! Au lieu de t’amuser tout seul, lance le multijoueur, que je te batte !

Après une soirée jeux vidéo qui finit très tard, car Jake ne veut pas s’arrêter en étant perdant, je me décide enfin à aller dormir. Une fois dans mon lit, je repense à ce que j’ai vu, ou cru voir, par la fenêtre. Son regard, le même reflet rouge éclatant comme dans mon cauchemar, cette force... Non, je me fais des films, ce n’est pas possible. Aucun humain ne peut sauter d’un immeuble et atterrir sur ses jambes sans conséquence. Pire, ses yeux, personne ne les a comme ça. C’est forcément mon imagination qui me joue des tours, je ne vois pas d’autre explication rationnelle.

***

Le réveil sonne à sept heures, la nuit a été courte. Entre le jeu vidéo d’hier soir et toutes ces questions dans ma tête qui m’ont empêchée de dormir, je n’ai pas spécialement envie de me lever. Je prends mon courage à deux mains et je me décide, après dix bonnes minutes, à bouger. Je me prépare et choisis, vu le beau temps dehors, de mettre ma jupe noire et un haut blanc. Étant hôtesse d’accueil pour une grande entreprise, je dois faire attention à ma tenue vestimentaire.

— Coucou, coloc !

— Ah, salut, Jake, enfin réveillé !

— Oui, je commence à dix heures aujourd’hui, j’ai un peu de temps devant moi. Je vais faire quelques exercices en attendant !

— Je te laisse à ton sport alors, à ce soir !

— À ce soir, miss, me répond-il avant que je ne quitte l’appartement.

Sur le trajet, je mets la radio sur les informations, car je n’ai pas eu le temps d’allumer la télévision avant de partir.

« Vous êtes bien sur la station d’Iradio. On nous a communiqué, à l’instant, qu’il y avait trois établissements visés dans chaque capitale du monde, mais sans concordance entre eux. Les enquêteurs cherchent encore à comprendre. Est-ce des lieux visés au hasard ou y a-t-il une logique ? On ne sait toujours pas, à l’heure actuelle, qui sont les auteurs de ces actes. L’enquête menée est très compliquée, malgré la collaboration de toutes les forces de l’ordre du monde, désireuses d’élucider cette énigme. À l’heure actuelle, elle n’avance que très lentement. »

Arrivée sur mon lieu de travail, je me gare et reste une petite minute dans ma voiture. D’une part, pour me réveiller un peu plus et, d’autre part, pour écouter la fin des informations, mais ils n’en disent pas plus. Je descends donc de ma voiture, direction mon poste de travail.

— Bonjour, Raina !

— Bonjour, Iris.

Iris est ma collègue de bureau, très jolie avec sa peau mate, ses cheveux châtains, bouclés et ses yeux marron. Elle ramène le soleil dans l’entreprise ! J’adore travailler avec elle.

— Tu as entendu les informations ce matin ? Cela fait une semaine que les attentats ont eu lieu et ils n’ont toujours rien de concret. Et tous ces témoignages, ça fait peur quand même. Tu crois qu’ils disent la vérité, qu’ils ont réellement vu tous ces éléments ? s’inquiète Iris.

— Je ne sais pas, d’après Jake, c’est juste pour nous faire parler d’autre chose, pour que l’on ne remarque pas ce qu’ils veulent nous cacher.

— Oui, cela ne m’étonne pas de lui, me répond-elle avec le sourire. Mais, toi, tu en penses quoi ?

— Franchement, je n’en sais rien. D’un côté, c’est vrai que, quand tu y réfléchis, personne ne peut faire de telles choses. Mais qu’il y ait autant de témoignages différents là-dessus, c’est troublant. Je ne peux pas te dire, on ne le saura sûrement jamais, de toute façon.

— Possible. Bon, allez ! Assez bavardé, nous avons du boulot, me répond Iris avec joie.

Elle adore son job, elle préfère même être ici que chez elle.

***

Midi trente, c’est enfin la pause déjeuner, je suis morte de faim. En même temps, je n’ai pas mangé ce matin. Je propose à Iris d’aller manger en ville, ce qu’elle accepte sans hésitation. Nous nous arrêtons chez l’Italien, en face de l’entreprise où nous travaillons. Nous nous installons sur la terrasse quand, soudain, mon regard reste bloqué sur un homme. Bizarrement, cette silhouette me rappelle quelqu’un, mais je n’arrive pas à me souvenir où j’ai pu le voir. Quand mon regard croise le sien, il a l’air surpris, sort un billet de sa poche qu’il pose sur la table et part sans même finir son verre.

— Raina ? Il y a un problème ?

— Hein ? Ah non, non. Juste cet homme, j’ai comme l’impression de l’avoir déjà vu quelque part, mais je n’arrive pas à me rappeler où.

— De quelle personne parles-tu ?

— Cet homme d’une trentaine d’années, je pense, le brun avec sa veste en cuir noir qui s’en va par là-bas, rétorqué-je à Iris.

— Tu sais, on croise tellement de personnes dans une journée, tu l’as sûrement aperçu quelque part dans la rue, voilà tout.

— Ça doit être ça, je suppose, dis-je sans grande conviction.

Une fois la pause déjeuner terminée, Iris et moi-même retournons travailler. La journée est relativement calme. C’est comme ça depuis une semaine, j’espère que tout reviendra à la normale, enfin, du moins, le plus possible. Je dis au revoir à Iris et rejoins ma voiture pour rentrer à la maison. Sur le trajet, je repense à cet homme sur la terrasse, il me rappelle réellement quelqu’un, bien plus que si je l’avais simplement croisé. Mais vraiment pas moyen de savoir où je l’ai rencontré. Décidément, beaucoup de choses, en ce moment, me trottent dans la tête. Je vais réellement devenir folle si je continue comme ça. Puis, après tout, qu’est-ce que ça peut faire si je l’ai déjà croisé ? À dire vrai, ce qui m’intrigue le plus, c’est sa réaction quand je l’ai regardé. Soit ces deux choses combinées sont un pur hasard, soit il y a quelque chose d’autre. Je crois que je deviens paranoïaque avec toutes ces histoires, il est vraiment temps que je me reprenne !

J’arrive à l’appartement en même temps que Jake.

— Alors, comment s’est passée ta journée ? me demande-t-il.

— Bien, relativement calme pour tout te dire.

— Moi aussi. À la boutique, c’était calme, cela m’a permis de faire un peu de rangement.

Jake travaille dans un magasin qui achète et revend des objets d’occasions.

— Oui, faut voir le bon côté des choses ! dis-je.

— Exactement ! Avec un délicieux repas, cela sera parfait. Je fais à manger, je suis d’excellente humeur ce soir.

— Je ne vais pas te priver de ce privilège alors, lui dis-je.

CHAPITRE 3

La semaine est plutôt calme au travail, les chaînes d’informations ne parlent plus beaucoup des attentats ni des témoignages. Même si ceux-ci continuent à se propager sur les réseaux sociaux, avec des photos et vidéos où l’on voit, soi-disant, ces êtres et, de nouveau, comme des archers vêtus entièrement de noir se promenant dans les villes.

L’armée est venue en aide aux forces de l’ordre pour maintenir le plus possible la paix dans nos rues. Même si les délinquances sont toujours présentes, les choses se sont un peu calmées. Les personnes osent un peu plus sortir, ils essayent de revivre normalement, petit à petit. Aux dernières nouvelles, les auteurs des attentats ont été retrouvés, mais les autorités ne peuvent rien divulguer pour ne pas nuire à l’enquête en cours, ce qui fait, tout autant, polémique chez les citoyens.

Avec Jake, nous décidons d’aller voir si notre restaurant préféré, Le Hol’Sting, a rouvert ses portes depuis. Nous y arrivons et, pour notre plus grand bonheur, les travaux terminés, il officie à nouveau avec ses leds rouges et sa façade un peu rétro chic, tout comme l’intérieur, d’ailleurs, ce qui rend cet établissement très accueillant. Cette atmosphère combinée à la nourriture exquise qu’ils servent en a fait notre destination de choix. Nous entrons donc :

— Bien le bonjour. Une table pour deux, je suppose ? nous demande le serveur.

— Oui, comme d’habitude, dit Jake.

Le serveur nous amène à notre table quasi habituelle, sous la véranda, avec vue sur leur terrasse magnifiquement fleurie.

— Je vous laisse vous installer, je vous apporte le menu.

— Très bien, merci, acquiescé-je.

— Un bon petit restaurant entre colocataires, ça fait du bien, dit Jake.

— Oui, comme si l’on ne se supporte pas assez comme ça, plaisanté-je.

— Parce que tu me subis ? On se demande bien qui est à blâmer !

— Non. Pas besoin de se le demander, je t’assure, dis-je en ricanant.

— Tenez, voici vos menus. Je reviens vers vous dans quelques minutes pour prendre vos commandes, nous dit le serveur avant de repartir.

— Bon, assez plaisanté. Qu’est-ce que je vais prendre ? se demande-t-il.

— Te connaissant, quelque chose de bien calorique.

— Mais c’est que tu es d’humeur à plaisanter ce soir !

— Hum, oui, je crois bien !

Le serveur revient cinq petites minutes après, puis prend nos commandes. Jake a porté son choix sur un hamburger et moi sur des pâtes à l’italienne. Comme à notre habitude, pour finir, nous commandons le dessert à partager, une variété de petites pâtisseries différentes : profiteroles, crème brûlée, brownies...

Une fois le repas avalé, nous retournons à la voiture qui est garée un peu plus loin dans une ruelle. Alors que nous sommes pratiquement arrivés à celle-ci, quatre hommes surgissent devant nous.

— Donnez-nous tout ce que vous avez : téléphones, portefeuilles, bijoux, tout ! nous ordonnent les agresseurs.

Celui qui nous a parlé est brun, assez costaux, habillé d’un jean et d’un T-shirt noir. Celui à sa droite est de peau un peu plus mate, vêtu, quant à lui, d’un jogging sombre et d’un maillot de football. Il tape son poing contre sa deuxième main d’un geste menaçant. Quant aux deux autres, ils sont un peu plus en retrait. Je ne les vois pas distinctement, il fait nuit et la ruelle n’est pas éclairée. On se croirait dans un roman ! Exactement la situation idéale pour se faire agresser comme c’est actuellement le cas, pour tout dire.

— Il en est hors de question ! répond Jake, à ma grande surprise.

L’homme avec le T-shirt noir sort un couteau et le déplie.

— On devrait peut-être les écouter, dis-je d’un ton pas du tout rassuré.

— Tu as entendu la demoiselle ? Donnez-moi tout ou je vais finir par me fâcher.

— Si tu penses que j’ai peur de vous, continue Jake.

— Mais c’est que tu te crois pousser des ailes, blondinet ! On va voir si tu n’as pas peur.

Les quatre agresseurs s’approchent de nous. Je recule de quelques pas quand, soudain, un homme atterrit de nulle part devant Jake et moi. Cette silhouette, je l’ai déjà vue quelque part. Nos quatre apprentis voleurs, surpris, s’enfuient, paniqués. L’homme mystérieux commence à s’en aller.

— Non ! Attendez, ne partez pas comme ça ! crié-je.

L’homme se retourne légèrement et s’en va en courant. Je reste sur place, sans bouger, sous le choc. Maintenant, je sais où j’ai vu cette silhouette. C’est l’homme que j’ai aperçu par ma fenêtre l’autre soir, mais c’est surtout celui de mon souvenir, celui qui m’a sortie de la voiture lors de mon accident, l’année dernière.

— Je rêve ou il avait les yeux rouges et il est apparu devant nous d’un seul coup ? me dit Jake d’un ton tout aussi ahuri.

— Non, tu ne rêves pas, mais je l’ai déjà vu. Je suis presque sûre que c’est lui qui m’a sorti de la voiture.

— Qu’est-ce que tu me racontes, là ?

— Je crois qu’il est temps que je t’explique tout. Enfin, il n’y a pas vraiment grand-chose à dire, c’est plus une intuition. Je ne sais pas réellement comment expliquer cela.

— Prenons une minute pour nous ressaisir et rentrons à l’appartement pour en discuter, d’accord ? me dit-il.

***

Arrivée et installée sur le canapé, je raconte à Jake mon cauchemar de la dernière fois et ce que j’ai aperçu par la fenêtre l’autre soir, l’homme sur la terrasse ainsi que mes drôles d’impressions par rapport à cela.

— Écoute, il y a encore une heure, tu m’aurais expliqué tout ça, je t’aurais dit que ce n’est pas possible. Mais je t’accorde qu’après avoir vu ce type, je commence à me demander si les histoires que les gens racontent ne sont pas vraies.

— Je ne peux te dire comment ni pourquoi, mais je suis pratiquement sûre que oui, tout cela est la réalité. Il faut que je retrouve cet homme.

— Et comment veux-tu t’y prendre ? me demande-t-il.

— Je ne sais pas encore, mais je crois qu’il n’est jamais très loin de moi.

— Vu ce que tu m’as dit, il semblerait, effectivement. Mais si cela se trouve, il est dangereux. C’est vrai, on ne sait rien sur lui, à part le fait qu’il a les yeux rouges et qu’il saute du haut des immeubles sans dommage. Ce qui n’est déjà pas mal sur le plan « attention danger », si tu veux mon avis.

— S’il désirait me faire du mal, il aurait pu le faire depuis très longtemps et, surtout, il ne m’aurait pas sauvée à deux reprises…

— Ou si ça se trouve...

J’interromps Jake dans sa phrase avant qu’il ne dise trop de bêtises.

— Quoi que tu penses, je veux le retrouver. Avec ou sans ton aide, je dois comprendre !

— Oui, je suis désolé. C’est juste que toute cette histoire me dépasse un peu, il faut que je digère toutes ces informations.

— Oui, je comprends. De toute manière, c’est pas ce soir que nous trouverons quelque chose. Allons-nous reposer, nous verrons ça demain, d’accord ?

— Oui, ne t’inquiète pas. Je suis avec toi.

— Merci, Jake, tu es un amour.

Je me dirige vers la salle de bain. Une douche chaude me fera le plus grand bien après une telle soirée. Je reste un bon quart d’heure sous l’eau. Une fois mon petit rituel du soir achevé, je rejoins mon lit.

À ma grande surprise, je me suis endormie sans trop de difficulté, mais tous ces souvenirs hantent mes rêves. Les images tournent en boucle, j’ai un sommeil pour le moins agité et pas récupérateur du tout !

— Je crois que tu n’as pas très bien dormi non plus, vu ta tête, me dit Jake que je croise dans la cuisine.

— Non, effectivement, affirmé-je en bâillant.

— On se voit ce soir, pour tu sais quoi ?

— Ce n’est pas un secret, tu peux le dire et, de toute manière, on se voit ce soir, nous sommes colocs, lui déclaré-je d’un ton mi-fatigué mi-amusé.

— Ce n’est pas faux, excuse-moi. Un bol de café me fera du bien, je ne suis même pas sûr que cela soit suffisant.

— La journée va être bien longue, je te l’accorde. Bon, c’est parti, on se motive. À ce soir !

Une fois arrivée sur mon lieu de travail, je dis bonjour à ma chère collègue, Iris. Heureusement qu’elle est là ! Mais c’est vrai ! C’est une fan incontestable des aventures surnaturelles. Elle peut peut-être m’aider !

J’attends un peu dans la journée pour lui en parler, histoire de trouver une manière d’aborder le sujet.

— Dis-moi, Iris, je ne sais pas pourquoi, mais je repense à toutes ces vidéos qui circulent. Tu en penses quoi ?

— Tu aimes ces choses-là maintenant ?

— Je n’ai jamais détesté, c’est juste que je ne suis pas une grande fan absolue comme toi.

— Oui, ce n’est pas faux, me répond-elle en rigolant. Sinon, pour ta question, comme tu l’as dit, je suis une fan, alors bien sûr que j’y crois ! Tiens, voilà un site Internet où sont répertoriés toutes les vidéos, toutes les photos et tous les témoignages ! Tu as de quoi t’amuser, me dit-elle avec un large sourire.

— Oh. Merci, je vais y jeter un œil ce soir.

— Mais pourquoi un tel intérêt tout d’un coup ?

— Avec toutes ces histoires, cela a piqué ma curiosité, lui dis-je.

Je n’avais pas spécialement envie de parler de ce qu’il s’est passé hier soir. Elle me prendrait certainement au sérieux, même un peu trop, je pense, à mon goût. Je ne suis, pour le moment, sûre de rien et je ne veux pas ébruiter l’information, ce qui pourrait, d’ailleurs, en plus, le faire fuir, s’il arrivait à savoir que je le recherche. C’est un risque que je ne souhaite pas prendre. Elle me donne le morceau de papier, avec le site Internet, que je range soigneusement dans la poche de mon jean noir.

La journée de travail terminée, je rentre à l’appartement. La première chose que je fais, quand j’arrive, c’est de prendre mon ordinateur portable, de me poser sur le canapé, de sortir le bout de papier de ma poche et de taper, sur mon clavier, le nom du site Internet sur la barre de recherche. Une fois connectée, je ne sais par où commencer. Il y a une rubrique vidéo, une rubrique photo et une rubrique témoignage, comme me le disait Iris tout à l’heure. Je clique sur le bouton et je regarde la première qui apparaît sur l’écran. On y aperçoit un homme vêtu entièrement de noir ainsi que d’une cagoule, on ne voit aucun signe distinctif de son physique, à part une corpulence basique. Il se bat avec quelqu’un. Du moins, l’homme vêtu de noir tire des flèches avec son arc sur un autre à l’apparence tout à fait normale, brun, habillé d’un jean et d’un polo gris. Lui, il arrête les projectiles de son adversaire en mettant tout simplement sa main devant lui, ce qui donne l’impression de la présence d’un mur invisible. C’est réalisé comme un film tourné sur un téléphone portable, c’est juste incroyable. La vidéo terminée, je m’apprête à visionner la suivante quand Jake passe la porte d’entrée.

— Viens ! lui dis-je en lui criant presque dessus tellement je suis surprise par ce que je vois.

— Qu’est-ce qui se passe ?

— Regarde, c’est juste impossible !

Jake dépose ses affaires et me rejoint sur le canapé, je relance la vidéo pour lui faire voir.

— Ah, oui en effet, mais tu es sûre qu’elles ne sont pas truquées ?

— Peut être certaines, mais, toutes, je ne pense pas. Attends, on en regarde d’autres. Il y a des photos aussi et des témoignages. Il faut qu’on les visionne, cela nous donnera peut-être des indices sur l’homme que l’on recherche.

Nous passons la soirée à examiner ce qui se trouve sur le site. On y voit des vidéos et des photos de phénomènes étranges, des loups, des gens avec des sortes de pouvoirs et quelques rares images avec ces hommes vêtus de noir. Des vidéos où ils s’attaquent mutuellement, d’autres où ils sauvent des vies ou le contraire…

— Regarde ce loup, il a les yeux qui deviennent verts ! remarque Jake.

— Comme celui qui a traversé la route le soir de l’accident, murmuré-je tout bas.

— Bon ! Je n’en reviens pas de ce que je vais dire, mais je crois que j’ai eu tort, cela existe vraiment.

— Apparemment, oui, mais je ne sais toujours pas comment retrouver l’homme d’hier soir.

— On ignore même ce qu’il est.

— J’espère, au fond de moi, trouver une image de lui sur ce site.

— Cela serait trop facile, voyons. Bon, et si on faisait une recherche Google ? propose Jake.

— Et que veux-tu écrire ? Homme qui saute d’un immeuble sans aucune blessure ?

— Pourquoi pas et ajouter yeux rouges aussi, on ne sait jamais, me répond Jake en plaisantant à moitié. Il me prend le PC et tape ce que l’on vient de dire, le moteur de recherche trouve plusieurs sites avec des articles sur ce sujet à mon plus grand étonnement. Nous avons ouvert tous les liens, lu le contenu de tous les sites. Certains ne donnent rien, d’autres émettent quelques hypothèses ou sont des discussions sur des forums. On clique donc sur le dernier lien qui ouvre une page relayant une photo d’un article de 1858 qui reconfirme un peu ce que l’on avait pu lire dans les précédents, mais qui, eux, ne datent pas d’aussi longtemps.

Paris, 7 mai 1858

Ma recherche a enfin abouti. Après avoir réussi, non sans mal, à capturer un de ces êtres. Je peux dire que OUI, les vampires existent ! Ces personnes à la force surhumaine, qui guérissent d’une blessure juste en buvant un peu de sang, avec leurs yeux qui deviennent rouges quand ils se sentent en danger, visiblement.

J’ai pu le capturer grâce à l’orchidée obscure que l’on ne trouve que très rarement dans les grottes, une fleur avec des pétales rose et dont l’intérieur est piquant. J’ai mis pratiquement cinq ans à faire des recherches sur ce qui pouvait atteindre ces créatures de l’ombre sans devoir les tuer et un an de plus pour réussir à avoir cette plante ! Mais cela en valait la peine. Grâce à elle, j’ai pu endormir cette chose et l’enfermer dans ma salle de recherches. Maintenant, je sais, j’en suis convaincu, c’est un vampire. Il a besoin de sang pour se soigner, pour se nourrir. Quand il est en manque, il devient très agité et n’arrive pas à guérir rapidement, voire quasiment pas. La lumière du jour, par contre, n’a pas l’air de le déranger. D’après mes recherches, certains ont la possibilité de marcher le jour alors que d’autres en sont incapables, mais il n’a rien voulu me dire à ce sujet. Cela reste encore sans réponses, je dois continuer mon travail là-dessus. Je suis sûr que je peux découvrir davantage de choses sur lui et, même, sur d’autres créatures. J’en suis pratiquement certain, il n’y a pas que des vampires qui règnent dans l’ombre, dans l’obscurité.

— Tu crois que l’homme que l’on recherche est un vampire ? demandé-je à Jake.

— Franchement, je ne sais pas quoi te répondre. Après tout ce que l’on a vu et lu ce soir, j’ai l’impression que je suis dans un rêve là.

— Malheureusement, non, c’est la réalité.

— Si c’est un vampire, comment penses-tu le retrouver ?

— Je n’en ai pas la moindre idée.

— Ho là ! Tu as vu l’heure ? Il faut se coucher, sinon ça va être encore une longue journée demain.

Effectivement, il est vingt-trois heures passées. Une fois l’ordinateur éteint, je saute sous la douche, puis je rejoins enfin mon lit. J’ouvre le tiroir de ma table de chevet et prends un somnifère pour m’endormir, car je sais que, sans ça, il me sera impossible de trouver le sommeil, pas après toutes ces nouvelles informations.

CHAPITRE 4

Cela fait maintenant quatre jours que nous avons regardé ces vidéos et que nous cherchons toujours un moyen de le retrouver. Quatre jours qu’il hante mes pensées et mes rêves. Et toujours aucune idée de comment réussir à le revoir.

— As-tu le dossier de monsieur Nilatre, par hasard ? me demande Iris.

— Le quoi ?

— Le dossier de monsieur Nilatre.

— Ah oui ! Excuse-moi, j’étais ailleurs. Tiens, le voilà !

— Merci. Cela t’arrive souvent en ce moment, je trouve.

— Oui, tu as peut-être raison. J’ai besoin d’une bonne pause, je crois bien, pour me réveiller un peu.

— Ça tombe bien, l’heure du déjeuner arrive bientôt. Tu veux que l’on mange ensemble ?

— Oui, pourquoi pas. Et si on allait chez l’Italien ? proposé-je à Iris.

— Si tu veux. Au moins, nous serons à côté du bureau, ça nous laissera plus de temps pour profiter du soleil, assises sur la terrasse, me dit joyeusement Iris.

Pour ma part, j’espère surtout pouvoir le recroiser là-bas, comme la dernière fois.

Le moment arrivé, nous prenons la direction du restaurant. Comme à mon habitude depuis lundi, je regarde dans toutes les directions ainsi que chaque personne que je croise en espérant enfin le voir !

— Tu cherches quelqu’un ?

— Non, pourquoi ? rétorqué-je à Iris nerveusement.

— Je ne sais pas. Tu regardes tout le monde comme si tu t’attendais à voir quelqu’un. Je me pose simplement la question.

— Ah. Non, c’est que, dimanche soir, on s’est fait agresser, Jake et moi. Juste quelques menaces, ensuite ils sont partis pour je ne sais quelle raison, mais, depuis, je suis un peu paranoïaque. Voilà, c’est tout, assuré-je pour essayer de masquer la vérité.

Enfin, d’un côté, ce n’est pas totalement faux. J’ai juste un peu modifié la réalité.

— Mais pourquoi tu ne me l’as pas dit ? s’étonne Iris.

— Je n’avais pas envie de t’inquiéter, puis il n’y a rien eu de grave, ils sont repartis sans rien nous faire, donc ça va !

— Oui, mais quand même ! Je comprends mieux pourquoi tu es si distante depuis lundi.

— Oui, c’est possible.

Arrivées chez l’Italien, nous nous installons à une table sur la terrasse. Je choisis une place d’où je peux voir tout ce qui se trouve autour de moi en espérant toujours le croiser.

— Mais dis-moi, lundi, quand tu m’as demandé ce que je pensais de ces histoires bizarres, cela avait un rapport avec ton agression ? m’interroge Iris.

— Pourquoi y aurait-il un rapport ? rétorqué-je toujours nerveusement.

— Parce que tu m’as demandé mon avis le lendemain de l’agression, parce que, précédemment, tu ne prêtais pas attention à toutes ces choses-là et aussi à cause de ta façon de me parler.

— Écoute, je ne sais pas quoi te dire… commencé-je en réfléchissant en même temps à ce que je pourrais lui répondre. Tu as raison, je me demande juste pourquoi ils sont partis d’un coup, comme ça, sans nous avoir préalablement dépouillés comme ils le souhaitaient. Comme si quelque chose les avait fait fuir. Enfin, c’est ce que je me suis dit et, avec toutes ces histoires, je me suis sûrement fait un film dans ma tête, c’est tout.

— Oui, c’est compréhensible. Si tu as besoin, je suis là, tu sais.

— Je te remercie, Iris, mais ne t’inquiète pas. Ça va passer.

Le temps de pause et le repas achevés, nous repartons quand, soudain, j’aperçois, au loin, l’homme que je recherche. Mon regard croisant le sien, il change aussitôt de direction. Je le suis donc, il commence à mettre de la distance entre nous. J’entends Iris m’appeler, mais je n’y prête pas plus attention que ça. Je dois avant tout rattraper cet individu, je me mets à courir en espérant regagner un peu de terrain. Il prend la direction d’une ruelle à l’abri des regards, se retourne vers moi avant de sauter et d’atterrir sur le toit de l’immeuble. Il m’observe encore avec ce fameux reflet rouge dans les yeux et disparaît de ma vue à mon plus grand désespoir. Déçue de n’avoir pas réussi à m’approcher de lui, je rejoins la route en direction de l’entreprise afin de ne pas être en retard. Une fois arrivée au bureau, évidemment, Iris me demande pourquoi je suis partie soudainement. Réponse que je n’ai pas, je lui dis que j’ai cru voir un vieil ami d’enfance, mais que je me suis trompée. Je n’ai pas trouvé mieux et je ne suis pas sûre qu’elle ait cru à mon histoire, mais elle en est restée là pour autant.

La journée achevée et enfin rentrée à la maison, je me repose un peu sur le canapé en attendant Jake qui ne devrait pas tarder.

— Dure journée ? me demande-t-il, une fois arrivé.

— Tu n’as pas idée ! Je l’ai vu ce midi.

— Qui ça ?

— À ton avis ! L’homme que l’on recherche, bien entendu !

— C’est vrai ! Raconte-moi tout ! dit-il en se dépêchant de me rejoindre.

— Avec Iris, nous avons mangé chez l’Italien. En face de CORPAS, l’entreprise où je travaille.

— Oui, je sais où tu bosses, Raina. Et alors ?

— Oui, bon, ça va. Eh bien, sur la route du retour, je l’ai vu. Il a remarqué aussi que je l’avais repéré, malheureusement pour moi, car il s’est enfui. J’ai donc voulu le rattraper, mais nous avons atterri dans une ruelle et, là, d’un seul bond, il a atteint le toit de l’immeuble…

— Ah oui, quand même ! Mais tu es sûre que c’était lui ?

— J’en suis certaine.

— Et Iris, elle t’a dit quelque chose ?

— Évidemment, elle m’a demandé ce que j’avais eu à partir d’un coup. Je lui ai dit que j’avais cru voir un vieil ami d’enfance, mais que je m’étais trompée. Je ne savais pas quoi inventer d’autre.

— Il y a mieux comme excuse, je te l’accorde, ricane Jake. Et elle t’a cru ?

— Je ne pense pas, mais elle n’a pas cherché plus loin.

— Bon, ça va, alors, tant mieux. Et qu’est-ce qu’on fait pour ton cher individu ? Car, là, on n’arrivera jamais à lui parler s’il s’enfuit dès qu’on le voit.

— Oui, je sais, mais je n’ai aucune idée de comment l’approcher. Qu’est-ce que ça peut m’énerver ! Je n’étais pas loin de lui !

— Oui, mais on est tombé sur plus fort que nous, on ne fait pas le poids contre lui.

— Il doit bien avoir un moyen, il faut juste trouver lequel. On va finir par y arriver. Gardons espoir.

Je me couche tôt, la journée m’a épuisée. Comme à mon habitude depuis quelque temps, je ne trouve pas le sommeil facilement, je cherche de quelle façon je pourrais l’approcher quand, soudain, j’ai une idée qui ne va sûrement pas plaire à Jake.

Une fois debout, je me prépare et je pars acheter des croissants et des pains au chocolat pour le petit déjeuner, histoire d’essayer de l’amadouer par rapport à la superbe idée que j’ai eue hier soir. Arrivé à l’appartement, Jake, à peine réveillé avec son fameux jogging gris en guise de pyjama, s’installe sur la chaise. Le saluant, je me mets à préparer la table.

— En quel honneur ai-je droit à un succulent petit déjeuner ? C’est rare que tu te déplaces jusqu’à la boulangerie de bon matin.

— J’ai eu une petite idée pour approcher de nouveau cet homme, mais je ne suis pas vraiment sûre que tu vas apprécier.

— Dis-moi pour voir. Mais tu crois vraiment que c’est avec un croissant que je vais accepter sans plus de précisions ?

— Qui ne tente rien n’a rien… C’est bien, ça ?

— Dis-moi plutôt quelle est ton idée. Au moins, on sera fixés.

— Bien, vu qu’il n’est jamais très loin et qu’il m’a sauvée à deux reprises et peut-être bien davantage, si je me mets en danger, il viendra encore me secourir.

Jake en crache son jus d’orange.

— Tu n’es pas sérieuse, là, j’espère ?

— En fait, si, je suis très sérieuse, mais attends avant de dire non ! Réfléchis un peu...

— Non, toi, réfléchis, Raina ! me dit Jake en colère. Et si ton gentil vampire, ou je ne sais quoi, n’est pas là ? Si on te met en danger et que tu meurs parce qu’on avait tort ? Tu y as pensé, un peu ?

— Écoute, je comprends très bien ta réaction, mais c’est la seule chose que l’on puisse faire pour s’approcher de lui. Je dois savoir qui il est et pourquoi il n’est jamais loin de moi. Et ne me dis pas que c’est pas le cas. Je te rappelle qu’il m’a sauvée au moins deux fois, plus celle avec toi, et que c’est bien la cinquième que je le vois, si ce n’est plus. Alors, il est forcément très près !

— Et tu as un plan ? me dit-il d’un ton désespéré.

— Non, mais je ne suis pas forcément obligée de me mettre en danger totalement, juste assez pour que lui le croie.

— Écoute, laisse-moi le temps d’y réfléchir, car, là, ce que tu me demandes est énorme. Je n’ai plus faim, désolé, je vais prendre ma douche, me dit-il en se levant de sa chaise.

***

Le soir venu, Jake ne m’a pas adressé la parole depuis notre conversation plutôt tendue, je décide donc de briser la glace.

— S’il te plaît, ne fais pas la tête. Viens, on va se promener au parc. Cela fait longtemps que nous n’avons pas été là-bas. En plus, la nuit, c’est reposant.

— Je ne fais pas la tête, j’essaie juste de trouver une autre solution que de te mettre en danger.

— Écoute, pour l’instant, sortons. Nous en discuterons par cette belle nuit étoilée calmement, lui assuré-je.

— Bon, d’accord, j’arrive.

Il enfile sa veste et nous prenons la direction d’un beau, grand parc en centre-ville, un endroit parfait pour se promener ou balader son chien. Certains y font leur jogging aussi et, la journée, les enfants y jouent. Il y a plusieurs constructions pour les petits : des balançoires, des toboggans, des parcours, des murs d’escalade et j’en passe. J’adore venir ici, la nuit surtout, sous les étoiles, je trouve cela reposant, relaxant.

Une fois arrivés, nous commençons notre tour. Nous prenons le chemin qui mène à côté du petit zoo où se trouvent des canards, des oies, des oiseaux en tous genres, et même des chèvres. Mais, soudain, nous croisons un joggeur en panique qui s’enfuit. En nous avançant un peu plus, nous pouvons voir le grand espace vert du parc, mais aussi un homme, comme sur les vidéos. Un autre, vêtu entièrement de noir, vise, avec son arc, un loup en face de lui.

— Jake, je t’ai parlé du loup dans mon cauchemar ? lui dis-je, paniquée.

— Euh oui, Raina, mais, là, ce n’est pas le moment. Si on s’en allait ?

— Si c’est le moment justement, il a les mêmes yeux verts.

— Nous en reparlerons quand nous serons ailleurs, me dit-il, un peu dépassé par la scène qui se déroule devant nous.

Le loup esquive la flèche de l’archer et saute à la gorge de celui-ci.

— Écoute, je suis désolée, mais je sens que je dois le faire.

— Faire quoi ? me demande-t-il.

Je ne réponds pas et me mets à courir dans la direction du combat qui a lieu entre l’homme et le loup. Je ne sais pas ce que je fais réellement. Je me dis que c’est le moment ou jamais de vérifier si ma théorie est bonne. D’un coup, je suis projetée sur le sol par quelqu’un avant d’avoir pu aller jusqu’au bout.

— Pourquoi est-ce que tu as fait ça ? me dit celui-ci.

Je me frotte la tête et lève les yeux. Je fais un bon quand mon regard croise le sien.

— Toi ! Ne t’enfuis pas une nouvelle fois ou sinon je recommence ! dis-je sous le choc.

— Qu’est-ce que tu me veux ?

— Toi, qu’est-ce que tu me veux ? Tu n’es jamais très loin de moi. La preuve, encore ce soir ! Tu es qui ? Enfin, je devrais plutôt dire : tu es quoi ?

Jake arrive en courant vers nous, encore en panique.

— Raina, tu vas bien ? Tu es complètement folle ! Et toi, ne lui fais pas de mal, sinon…

— Je ne lui ferai pas de mal, ne t’inquiète pas.