Padoésie - Nathalie Ramon-Biriouk - E-Book

Padoésie E-Book

Nathalie Ramon-Biriouk

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Beschreibung

Collection de textes poétiques et narratifs, ce recueil est le résultat de dix ans de travail. Et si cela se voulait très sérieux à vingt ans, c'est d'autant plus amusant à (presque) quarante... Bienvenu.e dans une démarche réflexive sur la fureur de l'adolescence.

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« Tout a droit de cité en poésie […] le poète est libre. »Victor Hugo

Sommaire

L'Héro (XX/XX/2001)

Amie chemin (XX/XX/2002)

Bonjour Tristesse (08/12/2002)

Sans Titre (26/03/2003 - 9h30 à 11h30 - Mathématiques)

Onze Septembre (XX/11/2003)

Auchan (XX/XX/2003)

Comme une drogue (17/03/2004)

Demain (XX/XX/2004)

Solution (12/06/2005)

Quinze Septembre (XX/XX/2006)

Itineris (XX/XX/2006)

Mes désirs font désordre (XX/XX/2007)

Vade Retro Téléphone (XX/04/2008)

Je te laisse méditer là-dessus... (XX/XX/2008)

Toi et Moi (écriture automatique) (XX/XX/2009)

Les Petits Mots (16/05/2010)

Karpman (XX/02/2011)

Je crois que j'ai toujours aimé écrire. Non, y'a pas de « je crois » en fait. J'ai toujours aimé ça. Faire glisser silencieusement des stylos de toutes les couleurs sur mes cahiers, pour rendre les coups de poings et les coups de cœur. Mieux encore, trouver là toutes les possibilités de jeter mes angoisses inaudibles par dessus bord.

Petite, j'étaye le « ils se marièrent et eurent beaucoup d'enfants » des contes merveilleux. Pas assez explicite à mon goût. Quelle robe a-elle préférée ? Où ont-ils décidé de vivre ? Quel prénom ont-ils choisi pour leur premier enfant ? Dans chaque histoire, il y a un sous-texte à écrire pour dompter ma créativité tourbillonnante. Cercle vertueux : je lis énormément et j'imagine tout autant, dans l'infini temps libre de l'enfant bon élève.

Puis un jour, je demande à ma grand-mère comment lire en silence, comme s'il s'agissait d'un super pouvoir qu'elle pouvait me transmettre. Dans un sourire très léger, pour ne pas que je crois qu'elle se moque, elle me répond quelque chose du genre « en me concentrant sur les mots, je n'ai pas besoin de les dire ». Bingo, ça fait tilt. La petite voix dans la tête. Du haut de mon CP, je deviens Supernat. À moi le club des cinq et les 20 ans*.

En multipliant mes lectures, je me rends compte que les phrases ont une musique. Que certaines mélodies résonnent bien plus en moi que d'autres. Les formules courtes parlent vite. Elles n'ont pas le temps. Elles secouent. Les tirades plus longues traînent en bouche comme le vin de plus ou moins bonne qualité bu en fin de soirée pour endormir les dernières idées lucides. Je me découvre un amour secret pour la virgule, celle qui raccourcit les phrases, celle qui permet de reprendre son souffle.

La syntaxe a donc une musique.

Et la musique, je lui voue une véritable obsession.

Non pas que j'aurai voulu être interprète, je me savais déjà trop versatile pour me concentrer et apprendre à jouer d'un instrument. Mais j'aimais, et j'aime toujours, écouter ces violons qui épousent des guitares, ces pianos qui se marient avec des trombones. Je chérie en profane, souvent sans forcément reconnaître l'objet mais en me soumettant à l'émotion qui s'en dégage. Ces sensations, mélangées à mes réflexions du moment, je les ai couchées sur le papier entre 2001 et 2011. Beaucoup et probablement mal. Mais je m'en foutais. J'avais le culot d'écrire autant avec Mozart qu'avec Moby et j'avais l'ego nécessaire pour trouver dans mes textes une beauté souvent fatale. Désillusionnée avant l'âge, je dégueule sur la facilité des sentiments.

Aujourd'hui, j'ai dépassé l’orgueil et la honte, parce que ces écrits font parti d'un passé assez loin pour que je m'en sois détachée. Assez loin pour que je ne veuille pas l'oublier complètement. Assez loin pour me rappeler ces constructions hasardeuses qui canalisaient mon esprit quand les jours étaient trop longs.

Alors j'ai eu envie de les partager. Parce qu'elles ne sont peut-être plus d'actualité. Parce qu'au contraire, elles le sont peut-être plus que jamais. Parce qu'un jour, on a quinze ans et le lendemain quarante. Et parce qu'au-delà de tout, on a cette chance d'avoir vieilli.

Mais aussi parce que que je ne peux m'empêcher de sourire quand je lis, après un texte sur une rupture amoureuse inévitable, que ce dernier a été écrit pendant un cours au lycée. Parce qu'on peut toujours retrouver une nostalgie pour ces classes doucereuses qui ont occupé notre deuxième dizaine. Et que nos vies ne peuvent pas être si différentes puisqu'elles se croisent depuis lors.

Alors bienvenu.e dans les années 2000. Dans un monde qui décomptait ses SMS et ses minutes d'appel d'un forfait hors de prix. Bienvenu.e dans ce monde autocentré, tagué à tort et à travers sur un Facebook naissant, et qui n'avait pas encore donné de définition à l'inclusivité. Dans un monde qui mettait ses gros doigts dans les coins des photos prises à l'appareil photo jetable.

Bienvenu.e dans les fautes et les erreurs d'une gosse de baby boomers. Bienvenu.e dans mes souvenirs illusoires. Bienvenu.e dans mes chimères tangibles.

Peu importent les traces

Du moment qu'ça finit bien.

* Magazine que, justement, les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître puisque que sa publication a été suspendue en 2010.

L'Héro1 (XX/XX/2001)

On stresse, on s'presse

Du côté de Barbès

Rochechouart, plongé dans son sommeil

N'entend pas les dealers qui s'éveillent

Et les accros en profitent

Les seringues piquent

Ici pas de garrot, pas de compresse2, pas d'élastique

On ne fait pas dans le sobre

On fait juste dans la drogue

Ici les shoots font mal, Lola le sait

Ça fait bientôt trois ans qu'elle voit les autres tomber

Pour pouvoir le supporter

L'héro est son alliée

C'est trop tard pour renoncer

Il ne fallait pas commencer

Et Lola sait que son heure viendra

Elle a perdu son bébé, son copain, son emploi

Tout devenait ingérable et ce n'était plus possible

De conjuguer drogue et tapin avec vie de famille

Alors quand elle désespère

Elle sort une cuillère

Une dose et, du zinc,

Son briquet, sa seringue

Mais cette fois la dose sera trop forte, on le saura demain

Les journaux locaux3 titreront « et une camée de moins »

Dans un dernier effort, Lola a pleuré

Trop tard, la dope l'étouffe et elle se sent crever

Un cauchemar continu quand elle baisse les paupières

Et toujours trop, bien trop de lumière

Pour qu'elle garde les yeux ouverts

Alors à bout de souffle, à bout de nerfs

Ses jambes vacillent et elle se perd

Sur le quai du RER4

Dans son coin,

Cône de crack à la main,

Valérie5,

Une autre junkie,

A tout vu,

Tout entendu,

Elle aussi, du ghetto6

A la drogue dans la peau

Et c'est à ce moment-là

En voyant s'effondrer Lola

Qu'elle comprend que son heure viendra

1. Dans la série des textes qui n'ont pas fini à la poubelle (volontairement ou non), voici le tout premier ! À l'époque, mes deux livres préférés sont Go Ask Alice et Wir Kinder vom Bahnhof Zoo