Speculum - Laura N. Lhand - E-Book

Speculum E-Book

Laura N. Lhand

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Beschreibung

Univers érotique et violent pour les adultes allergiques aux tabous ! La saga évoque l'inégalité entre les hommes et les femmes à travers les sentiments, la violence, le sexe et le sang. L'histoire prend place au coeur d'un monde imaginaire qui s'appuie sur les moeurs passées et présentes de notre réalité, mais la réinvente dans l'objectif de choquer, sensibiliser et pourquoi pas exciter... Un autre monde, un autre temps, deux royaumes distincts séparés par une frontière maritime. Au Nord, Lyreïa, danseuse de Saeäk, est devenue la cinquième épouse royale au prix d'une cérémonie nuptiale choquante et d'un enseignement sexuel physique, dispensé par des maîtres employés par son mari lubrique. Désormais, elle doit poursuivre ses leçons afin d'élaborer sa signature érotique, se distinguer des autres reines, accepter la sexualité aussi brutale soit-elle et être enfin prête à satisfaire les besoins du souverain qu'elle ne demande qu'à connaître. Entre amitiés naissantes, haine ou indifférence, elle essaie de survivre à son quotidien emplie de solitude, au sein d'un monde patriarcal cruel qui la révolte toujours en dépit du luxe offert depuis son ascension sociale. Au Sud, grâce à ses talents de chef d'entreprise, Syrasiel est parvenue à se faire un nom dans la haute société de Falasiel, ville d'une civilisation matriarcale dans laquelle les hommes sont des esclaves et où elle peut assumer sa passion pour la torture masculine. Alors qu'elle gravit dorénavant les marches de la gloire dans les salons des dames prêtes à louer ses serfs sexuels ou sur le sable de l'arène souillé par le sang de ses athlètes, des attentats sévissent dans le royaume. En plus de se sentir anormale par rapport à ses consoeurs majoritairement sadiques, sa fille Nyllia-Mey a quant à elle le devoir d'accepter les services d'un reproducteur destiné à lui donner une héritière.

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Seitenzahl: 326

Veröffentlichungsjahr: 2023

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Remerciements

Je remercie chaudement mon dévoué mari, incroyable partenaire, soutien et conseiller dans l’élaboration du projet Speculum. J’embrasse également ma mère, toute première lectrice bienveillante et confiante. Je n’oublie pas mon précieux compagnon de route, l’écrivain Jean-Baptiste Messier, son aide inestimable au cours de mon cheminement dans l’aventure et ses heures passées à corriger mon texte. Je salue aussi la confiance de l’ensemble des personnes qui ont participé à la campagne de financement participative organisée sur la plateforme Ulule, grâce auxquelles la saga s’est consolidée. J’y inclus évidemment les membres de ma famille et les amis dont l’optimisme ou la générosité ont dépassé mes attentes.

Merci à vous…

Laura N. Lhand

Sommaire

Chapitre 1 : ROYAUME DU SUD

Chapitre 2 : ROYAUME DU NORD

Chapitre 3 : ROYAUME DU SUD

Chapitre 4 : ROYAUME DU NORD

Chapitre 5 : ROYAUME DU SUD

Retrouvez la suite dans le Livre 3 de Speculum

Annexes

Speculum

Nord

Sud

Les Personnages

Royaume du Nord

Royaume du Sud

Note sur les esclaves

Exemple d’attribution d’un numéro : 11860505VEB18

Dessins conceptuels

Dans la même collection

Catégories

1

ROYAUME DU SUD

an 1216

Félina retire de sa bouche le phallus de son serf dans un bruit de succion, essuie le bord de ses lèvres fines, avale impassiblement la mixture blanche récoltée. Attaché en croix par les poignets et les chevilles sur l’un des murs de sa demeure ajourée, son subordonné est élevé à une hauteur optimale pour lui permettre de boire quotidiennement son breuvage laiteux sans avoir besoin de contorsionner son long cou. Rassasiée, elle le regarde.

Âgé d’une quarantaine d’années, mon prisonnier rachitique et sale présente des marques rouges sur le corps. Vestiges de plaies ayant renoncé à cicatriser, ces rougeurs, que je trouve extrêmement excitantes, cerclent particulièrement les extrémités de ses membres trop souvent ligotés. Disposé près de lui, un seau régulièrement vidé et nettoyé par mes subalternes D permet de récolter ses déjections lorsqu’il est suspendu pour un temps indéterminé en fonction de mes désirs, mon humeur, ma fantaisie. Comme l’indiquent les résidus alimentaires collés dans son écuelle encore déposée à ses pieds, son alimentation se résume à une mixture constituée de gras de porc, mêlée à des légumes broyés que ses quelques dents restantes n’ont pas à mâcher. Il m’est impensable de le voir mourir de faim. Sa nudité illustre les empreintes de mauvaises conditions de vie, mais je protège une partie précieuse de son anatomie. Ponctuellement rasé et lavé par ses semblables assignés à la tâche, son sexe préserve effectivement une forme digne et un goût constant, sans porter une quelconque marque de maltraitance. Ses testicules flétris, usés par la vie, ne m’ont jamais fait renoncer à sa semence d’une qualité irréprochable, depuis le jour où, classé originairement dans la catégorie des servants de l’amour, il a croisé ma route.

Approchant le quart de siècle, Félina ne possède pas les atouts d’une belle femme. Son corps longiligne atteint les cent-quatre-vingt-cinq centimètres. Sa poitrine se résume à deux tétons de la taille de deux fraises. Ses hanches étroites ressemblent à celles d’un homme. Dénué d’harmonie, son visage affiche deux grands yeux bleus et sévères, couplés à des sourcils inexistants. Son front occupe la majeure partie du haut de sa figure. Son minuscule nez porte les traces d’une fracture passée mal soignée. Ses oreilles proéminentes sont dissimulées derrière des cheveux hirsutes, qu’elle tente parfois de dompter à l’aide d’une coiffe en paille.

Bien installée pour la saison tempérée, la chaleur omniprésente la pousse à déambuler pieds nus sur le carrelage de son domicile. Vêtue d’un simple voilage transparent qui ne masque pas sa touffe de poils pubiens blonds, elle délaisse son ancien A en piteux état. L’esprit occupé par ses projets, elle parcourt l’étroit couloir de sa résidence, dans le but de rejoindre le hangar qui y est attenant et dont le portail donne directement accès à l’une des rues piétonnes des quartiers riches de Falasiel.

Cette journée s’avère importante pour la cause commune. Cette journée doit marquer les esprits.

Parvenue à destination, elle contemple ce qui ressemble davantage à un abattoir d’animaux qu’à un entrepôt de spécimens serviles dénués de spécification particulière. Le sol est maculé d’une croûte brunâtre que le sang frais versé la veille tend à consolider. Imbibées d’éclaboussures de chair humaine, les parois murales paraissent humides. Des équipements de torture et de mise à mort divers agrémentent les moindres recoins de l’espace malsain. Dans ce cadre idyllique de supplice, la propriétaire vient à la rencontre d’une dizaine de dames fidèles à ses croyances. D’une démarche masculine assurée, elle s’avance vers ses invitées rassemblées près d’une vingtaine d’hommes issus de sa propriété, dénués de matricule, agenouillés et vêtus de pagnes préparés par ses D pour l’occasion. Elle prend la parole.

— Aujourd’hui, nous allons enfin donner du sens à notre communauté. Aujourd’hui, nous allons faire prendre conscience à Falasiel que les mâles, uniquement bons à être mis à disposition dans des cages pour la traite quotidienne, représentent une nuisance à réduire à l’état d’objet utilitaire ou, mieux encore, à exterminer. Stoppons cette injure à notre supériorité. C’est une insulte d’en voir certains exercer l’art, apprendre à écrire, à compter…

Mes auditrices acquiescent par des gloussements ou de petits cris guerriers. J’aime leur motivation.

— Je vous soumets donc mon plan, un plan qui pourra ébranler la confiance de la reine en sa gestion du « terrorisme ». Dans les heures qui viennent, nous attaquerons l’école de Falasiel et tuerons l’ensemble des nourrissons et élèves masculins. L’impact de cette attaque pourra ainsi prouver à notre souveraine que ses mesures sécuritaires, centrées principalement sur la capitale et son palais, ne suffisent pas à protéger l’intégralité de son royaume de notre courroux. Si sa chère métropole, Syrr, tremble sous la menace de groupes rebelles plus importants que le nôtre, nous saurons également lui prouver notre existence en frappant le symbole de l’éducation et en rejoignant dès lors ouvertement le mouvement de la rébellion. La population de notre coin reculé saura a posteriori lui faire entendre l’étendue de sa frayeur et lui transmettre notre message de révolte. Rentrons dans l’Histoire ! La simple tâche qui nous attend est primordiale pour notre clan en pleine floraison. Son envergure sans doute considérable sera notre tremplin vers notre destinée. Faisons entendre notre voix !

Un cri à l’unisson s’élève tandis que le groupe découvre l’idée de leur leader au timbre de voix sec mais tempéré, presque inaudible, participant à lui octroyer le crédit d’une oratrice respectée. Fière de l’effet produit par son annonce, Félina attrape le collier de cuir de l’un de ses subalternes à terre. Le regard strict, elle le relève, puis l’amène au-devant de son public, avant d’écarter son unique vêtement et dévoiler son organe génital.

— Esclaves ! s’exclame-t-elle avec l’intention de capter leur attention. Vous allez prendre part à notre combat. Vous allez servir nos objectifs. Avant l’attaque, vous pourrez manger à votre faim, vous masturber et vous laver. Mais ce soir, vous agirez et, peut-être, mourrez pour nous.

Me débarrasser du numéro d’immatriculation de l’ensemble de mes déchets était indispensable à la survie de mes ambitions. Arracher la chair derrière leurs oreilles, afin de faire disparaître la trace de leur identité gravée dans la peau, a été fastidieux, mais personne ne pourra dorénavant remonter jusqu’à moi s’ils échouent sur le terrain et tombent dans l’anonymat.

Tout en parlant, la meneuse masse les testicules du garçon choisi, doté d’un gabarit risible par rapport au sien et qui, en dépit de sa peur croissante, se surprend à avoir une érection naissante.

— Après le coucher du soleil, nous vous déposerons en charrette devant l’entrée principale de l’institut. Vous serez armés. Votre mission sera d’assassiner toute vie au sein de l’établissement. Si toutefois vous parvenez à sortir vivants de cette expédition, la victoire vous octroiera la jouissance de bénéficier d’une existence plus douce et méritée à nos côtés.

Les doigts de Félina se font désormais plus rigides sur les parties intimes et fragiles du jouvenceau. Ils les enserrent, les compriment de plus en plus fort, les maltraitent.

— Si vous essayez de fuir, de reculer…

Accompagnant son discours d’un exemple pédagogique, elle écrase brutalement les glandes génitales de son jouet avec une poigne insoutenable, jusqu’à entendre ses cris et assister à ses contorsions de douleur. Un craquement sonore se fait entendre au moment où elle semble ne plus avoir de résistance entre sa main. Un filet de sang sort de la verge encore à demi dure de son juvénile captif aux vestiges virils brisés, qu’elle voit s’évanouir et chuter lourdement à ses pieds. Sérieuse et concentrée, elle s’accroupit devant lui, attrape son scrotum, sort un couteau d’un fourreau noué à sa cuisse et le découpe avec précision, avant de l’envoyer violemment vers ses confrères apeurés.

— Si vous me décevez, votre peine sera sans limites et votre mort ne viendra pas vous délivrer.

Proprement, elle tranche la gorge du jeune inconscient, se relève, puis essuie sa lame ensanglantée sur le revers de son voilage. Sous l’effet de la frayeur qu’elle inspire, l’un de ses subalternes laisse échapper un filet d’urine ruisselante.

— Quel dégueulasse, il me pisse sur le pied, celuilà ! fulmine une femme excessivement musclée, à la chevelure crépue.

Dégoûtée par l’affront subi, mon amie, dont la peau basanée sublime sa personnalité, secoue sa sandale pour la débarrasser du liquide jaunâtre et soulève le coupable par son collier, avant de le propulser contre un mur, alors qu’il n’a pas encore terminé d’uriner. Évènement inattendu.

— Une honte ! siffle la souillée.

Légèrement sonné, le fautif s’excuse et se met à pleurer. Trop tard pour les remords ! Émoustillé, le groupe encourage Sachel à continuer sa manœuvre. Motivée par les acclamations de la troupe, cette dernière, après s’être assurée de mon approbation, attache les jambes et le cou de mon pion à de lourdes chaînes. Le large collier rembourré de ce parasite, relié à la ferraille, l’empêche de s’étrangler complètement lorsqu’elle le suspend dans les airs à la force de ses bras, grâce à un système de poulie. Une fois le bout de viande vivant disposé de manière parallèle au sol, elle lui arrache sa culotte, afin de caresser son petit sexe pendant. Je me demande jusqu’où elle compte aller avec sa proie.

— Mais c’est une microqueue que nous avons là ! Regardez ça, les filles, on dirait celle d’un bébé ! Il m’a fait dessus comme un nouveau-né ! rit Sachel, contente de sa trouvaille.

Hilares, les nymphomanes en présence se pressent pour toucher le méprisable phallus désigné. Certaines le décalottent pour essayer de le faire durcir. Parallèlement à cette activité, deux consœurs décident de cajoler un autre esclave à genoux, jusqu’à obtenir une érection satisfaisante. Notre réunion dégénère quelque peu, mais la motivation trouve sa source dans l’amusement.

— Toi, l’excité, va enculer le pisseur ! commande l’une des participantes, fourbe et malfaisante, à l’individu prêt à l’action, grâce aux caresses lui ayant été accordées.

Conciliante, Félina observe.

Mon déchu se lève sous le regard impatient de l’assemblée féminine, s’approche de son pair suspendu peu gâté par la nature, essaie d’obtenir l’autorisation d’agir dans mes yeux. Exaspérante dépendance…

— Ne m’embarrasse pas, vermine. Exécute la requête de mon hôte.

Aucune expression n’habille la face de la maîtresse des lieux.

Prenant sa respiration, mon ustensile humain écarte les fesses de son camarade suffoquant sous la pression du lien lacérant son cou. Pressé par la menace de mon couteau, que je viens faire peser dans le creux de son dos, il enfonce son priape dans l’anus offert à lui. Après quelques mouvements de bassin successifs, sa dextérité déclenche une réaction de la minuscule bite qui se balance. Distrayant…

— Pratiquer cette sodomie te plaît-il ? questionnet-elle, froide.

— Oui… souffle le violeur contraint, tâchant d’ignorer les cris de son collègue ballotté et humilié, les râles d’excitation des spectatrices, ainsi que son abjecte besogne.

La danse sexuelle se poursuit des minutes durant. Sachel, la plus sadique de mes compatriotes, se précipite sous le corps en suspension du minable pris d’assaut aux joues trempées de larmes, dans le dessein de gober son dérisoire gland non sollicité depuis des siècles. Tenace, elle le pompe avidement tout en recevant, avec une délectation perceptible, les coups de testicules du sodomite. Splendide scène !

— Oh, il aime ça, le vilain cochon qui sent le pipi ! roucoule la gourmande en stimulant le pénis piégé entre son palais et sa langue. Il aime ! insiste-t-elle alors que, emportée malgré elle par la fellation, la victime se met à expulser de ridicules petits jets de liquide chauds dans sa bouche. Et ça, l’aime-t-il ? clame-t-elle avant de resserrer ses dents sur son appareil génital.

Mon nigaud hurle et gigote dans tous les sens, tandis que, les yeux écarquillés d’avidité et de folie, ma copine agite la tête pour tenter d’arracher son insignifiant dard à sa base. Du sang ruisselle et finalement, la résistance cède. Sachel tombe à la renverse, en exhibant le morceau de chair entre ses canines. Euphorique, le groupe applaudit. J’en suis satisfaite.

— Bien, prononce l’anguleuse chef en se déplaçant lentement vers les deux pantins encore unis dans l’acte en l’honneur du spectacle improvisé. Maintenant que les festivités sont terminées…

À ces mots, elle se place derrière son automate tremblant, la verge désormais inerte encore plantée dans le rectum de son partenaire intimement abîmé et secoué par des spasmes, puis l’égorge. Le voir s’écrouler dans une série d’inspirations et d’expirations sanguinolentes l’indiffère.

— Il est temps de se préparer, mes agneaux, conseille-t-elle brutalement.

Sûre d’elle, Félina s’empresse d’aller achever le second jeune homme amputé et suspendu dans les airs, tout en dévisageant ses inférieurs tétanisés.

***

Le soleil couchant lèche l’horizon. La mer Daleya ondule tranquillement au-dessous de la coque de quelques bateaux de pêche encore en activité. Les rues piétonnes de Falasiel se désertifient, alors que Nylia-Mey suit Syrasiel et leurs marionnettes de l’amour à quelques pas de distance.

Huilés, parfumés, épilés, dénudés, poignets ligotés derrière le dos, nos servants du sexe sont prêts à satisfaire la commande de la fameuse madame Layel. Un cordage relie les colliers de leurs testicules respectifs. Paupières abaissées, ils marchent les uns derrière les autres dans l’ombre de ma mère, vêtue d’une robe en dentelle rouge, laissant parfaitement entrevoir sa généreuse poitrine. Ils semblent concentrés. Munies de fouets en cuir, deux de nos gardiennes, chargées de la supervision des déplacements de nos A depuis longtemps, les escortent. Prénommées Giel et Kiel, ces jumelles possèdent une autorité naturelle que leurs iris noirs et leur chevelure coupée courte renforcent. J’admire leur assurance.

Contrainte de seconder Syrasiel, rayonnante dans les couleurs du crépuscule assorties à celle de sa tenue excentrique, la jouvencelle traîne des pieds. Si elle a le devoir de reprendre ou développer son activité professionnelle dans un futur proche, elle n’en ressent aucunement l’envie. Impliquée lors des jeux mensuels de la ville et enchantée par les victoires de l’affaire familiale, elle éprouve pourtant une certaine lassitude envers les dessous du métier pour lequel elle est destinée, mais également certains choix maternels en ce qui concerne la location des A ou le traitement accordé aux S.

J’aurais aimé rester dans le parc à véhicules, en compagnie des canassons… Encadrer les orgies organisées par ma génitrice n’a rien d’amusant.

Consciente que la rentrée d’argent à venir s’avère nécessaire à maintenir les conditions de vie convenable de sa famille, elle décide de ne pas exprimer son ennui. Ses yeux préfèrent caresser l’immensité du ciel aux teintes rougeoyantes qui s’étend par-dessus les toits des maisons l’empêchant d’assister au coucher de l’astre solaire. Distraite par les nuages orangés et le vol de mouettes, elle heurte la frêle épaule d’une grande femme munie d’un sac empli de haches.

— Oh, excusez-moi, s’empresse-t-elle de formuler, embarrassée par sa maladresse.

— Regarde devant toi, la prochaine fois, peste la maigre passante sans interrompre sa route.

Le timbre de voix dénué d’émotion de cette mégère ferait frissonner un mort, sans mentionner sa tignasse, son regard sévère et globuleux ou son habit extravagant et taché laissant entrevoir son postérieur disgracieux. Sontce des résidus d'hémoglobine que j’aperçois ?

Agacée, Nylia-Mey observe l'étrange dame rejoindre à pas pressés un grand portail joliment ouvragé d’un entrepôt aux airs sombres.

— Drôle de malotrue, grommelle-t-elle avant de rattraper son groupe parvenu à destination.

***

— Magnifique, il va sans dire ! s’émerveille Syrasiel devant l’imposante villa de Layel, implantée dans un quartier luxueux de Falasiel, au sein duquel les carrioles à chevaux n’ont pas accès.

Fébrile à l’idée de côtoyer la haute société, elle frappe à la porte à double vantail de sa cliente, encadrée par des colonnes couvertes de lierre.

— Le fait d’être contrainte à crapahuter à pied jusqu’ici est largement compensé par la beauté de cette place.

En attendant d’être conviée à entrer dans la bâtisse, elle contemple l’espace entretenu y faisant face. Fontaine, pavés, palmiers illustrent une richesse qu’elle sait reconnaître et apprécier.

— Heureusement que tu m’as écoutée, ma poulette, affirme-t-elle brusquement.

— À quel propos ? s’étonne Nylia-Mey.

— Tu as somme toute mis la toilette argentée qui accentue tes formes. Elle te donne de l’allure, du panache… Tout ce dont nous avons besoin durant cette soirée.

— Ce n’est pas comme si j’avais réellement eu le choix, précise la jeune femme, mirant son inhabituelle tenue brillante suggérée par sa mère lors de ses essayages vestimentaires.

— Et ta coiffure soignée dégage ton visage. Elle est idéale pour paraître sophistiquée.

— Ce n’est pas comme si j’avais réellement eu le choix, répète la demoiselle en palpant son chignon de tresses, également recommandé par son interlocutrice à l’heure des dernières retouches capillaires.

— Je ne comprends pas pourquoi tu t’acharnes ordinairement à laisser tomber négligemment tes cheveux autour de tes jolies pommettes. Mes conseils t’embellissent !

— Tes ordres, plutôt.

— Quoi qu’il en soit, n’oublie pas de sourire, je te prie, conclut Syrasiel, indifférente à la dernière remarque.

À la suite de mon ultime recommandation, Nylia ne peut s’empêcher de marmonner, tandis que les battants de l’entrée s’ouvrent sur un D à la peau sombre, uniquement vêtu d’un pantalon mordoré et satiné. Charmant accueil.

— Bonsoir mesdames. Ma maîtresse m’a chargé de vous conduire dans vos loges provisoires, annonce l’homme élégant. Si vous voulez bien me suivre…

Guidée par le fier domestique, Syrasiel, suivie par Nylia-Mey, Giel, Kiel et ses serfs, pénètre dans la cour intérieure de la propriété de Layel, au centre de laquelle une statue en plâtre blanc, à l’effigie de sa grand-mère guerrière, trône.

Le regard à jamais figé dans la roche de cette célébrité semble encore scruter d’invisibles ennemis. Stupéfiant.

— Elle est belle, cette combattante, constate Nylia-Mey, impressionnée.

— Elle a surtout eu l’honneur d’être emportée par les dieux avant que la vieillesse ne vienne souiller sa beauté et altérer sa gloire.

Le commentaire prosaïque de la responsable de mission agace sa progéniture. Elle ne s’en rend pas compte.

— Entrez donc, je vous prie, propose l’esclave joliment habillé. Je vais de ce pas quérir ma patronne.

Le guide s’en retourne alors que Syrasiel découvre la pièce lui étant attribuée pour la soirée.

— En ligne, ordonne-t-elle à sa troupe masculine.

Mes produits sexuels s’alignent sous la lumière tendre diffusée par des appliques murales, derrière lesquelles des bougies se consument déjà doucement. Leurs corps sculptés, magnifiés par l’atmosphère tamisée, appellent mes caresses.

— Bon. Je compte sur vous pour démontrer vos talents, séduire, combler les attentes des consommatrices qui vous réclameront, ainsi que mes espérances. Plus elles seront satisfaites, plus je le serai, articule-t-elle avant de mordiller sa lèvre inférieure maquillée de rouge. Obéissez, agissez en conséquence des directives, comme vous savez parfaitement le faire, et tout ira bien dans le meilleur du monde.

Ses doigts glissent sur les tracés des abdominaux de chacun de ses serviteurs, les yeux rivés droit devant eux. Elle feint d’ignorer que leur posture irréprochable cache la peur de décevoir ou d’une éventuelle punition.

— Ponctuelle, formule soudainement Layel, vêtue d’une robe couleur or, décolletée et échancrée au bas du dos.

Syrasiel se tourne en direction de sa voluptueuse cliente, postée dans l’encadrement de la porte.

Impeccablement plaquée, la coiffure laquée de cette femme radieuse se termine en épais chignon ambré. Maquillés de poudre brune, ses yeux en forme d’amande sourient et se marient idéalement avec son visage pointu à l’aspect très féminin. Portrait superbe.

— Je suis honorée de faire appel à vos services et enchantée de faire votre connaissance, déclare la riche héritière d’une voix imprégnée par les nuances de la bourgeoisie.

Les talons aiguilles pailletés de cette créature rayonnante claquent sur le sol, au rythme de ses pas, lorsqu’elle s’approche de moi et me tend ses mains. Je les réceptionne dans les miennes et les presse doucement. Connexion…

— Le plaisir est partagé, je peux vous l’assurer, renchérit Syrasiel.

Envoûtée par l’essence de parfum vanillé de Layel, elle l’observe onduler gracieusement devant ses spécimens nus.

— Laissez-moi donc admirer vos marchandises.

Espiègle beauté fascinante au sourire malicieux. Sa bouche plantureuse me captive…

— Elles me plaisent énormément. Je ne suis pas déçue par leur aspect physique. Reste à juger leurs capacités sur le terrain. Pour ce qui est de l’aspect financier, mon I réglera la question avec vous après les festivités. Je vous laisse dès à présent vous préparer et vais personnellement accueillir mes convives. Le D qui vous a reçues vous mènera le moment venu jusqu’à la salle de réception.

— Entendu.

— Oh, j’allais oublier ! se remémore Layel en interrompant son élan, action ayant la finalité de faire vaciller ses longues boucles d’oreille. Avez-vous bien apporté un A spécialement dédié à la torture coquine, comme revendiqué dans mon second courrier ?

— Oui, évidemment. Celui-ci, explique Syrasiel en désignant un modèle d’une cinquantaine d’années au regard fuyant et larmoyant, n’est plus apte sexuellement parlant. Je vous prête en conséquence volontiers son corps, avant de l’offrir en pâture à l’ouverture sanglante des jeux de la ville.

— Voilà qui est parfait.

À ces mots, la propriétaire des lieux s’éclipse lentement. Son action a l’avantage de me présenter le panorama de son appétissant fessier mouvant sous sa robe renversante.

— Ravissante, soupire Syrasiel, égarée dans ses pensées, après le départ de l’aristocrate.

— Impolie, surtout ! rétorque Nylia-Mey, contrariée d’être engloutie par l’ombre de son aînée.

Troublée par la remarque de sa fille, la grande blonde sourcille.

— Ne fais pas l’étonnée, maman ! Elle n’a salué que toi, alors que nous étions à tes côtés, Giel, Kiel et moi. Qu’on ne vienne pas me parler de la courtoisie des gens fortunés !

Syrasiel sourit.

— Je ne vois pas l’aspect comique de la situation.

— Elle fait affaire avec moi, non avec vous. À ses yeux, vous êtes sous mes ordres, ce qui est logiquement le cas : toi, par ta naissance et les jumelles, par leur salaire.

— Pff…

— Quelle susceptible tu fais ! Nous avons d’autres chats à fouetter !

Syrasiel délaisse l’ego froissé de son enfant, afin d'organiser la future prestation.

— Pouvez-vous délier les testicules des étalons, commande-t-elle à ses employées.

***

Nylia-Mey inspire, prête à faire bonne figure. D’une démarche qu’elle souhaite assurée, elle suit sa mère jusqu’au salon de Layel dans lequel ses invitées, installées sur des sofas couleur crème, languissent la présentation de leurs servants de l’amour.

Hypnotisée par le sexe de nos apollons qui s’alignent près de nous, une bourgeoise croque une pâtisserie fourrée dont le coulis, assorti à la couleur de ses lèvres, ruisselle sur son menton arrondi. J’envie sa place, son insouciance, sa situation pécuniaire sans nul doute confortable. Travaille-t-elle seulement ?

— Bien le bonsoir, mes dames ! lance Syrasiel, bras écartés devant l’assemblée admiratrice de ses articles. J’apporte des desserts autrement succulents…

La jeune fille essaie de conserver une allure respectable. Son vêtement argenté l’aide à entretenir une certaine contenance, mais les personnes endimanchées qui lui font face lui rappellent la médiocrité de sa condition sociale et le manque de saveur de son existence.

Le temps, le monde, les aléas semblent ne point impacter ces citoyennes, légataires pour la majorité d’entre elles d’une fortune quelconque. Elles sont assises sur du cuir hors de prix, au sein d’un cadre paradisiaque où l’or décoratif rivalise avec le marbre recouvrant le sol. Injuste société…

— Ce soir, je vous soumets une collection de jouets âgés de vingt à trente ans, expose Syrasiel. Il s’agit, comme vous le savez, d’une tranche d’âge idéale pour les performances érotiques. En revanche, poursuit-elle en se positionnant derrière son ancien A destiné à la torture, celui-ci, n’ayant plus la jeunesse comme alliée, est ici pour satisfaire vos autres fantaisies, y compris les plus sournoises. N’hésitez pas à… à… bafouille-t-elle lorsqu’elle aperçoit le cambré des reins de Layel appuyée contre l’un de ses murs, la jambe légèrement repliée, le pied, à la cambrure magnifiée par le port de sa chaussure au talon vertigineux, tendu et aguicheur. N’hésitez pas à laisser vos fantasmes s’exprimer. Je veillerai à ce que mes bijoux s’en montrent dignes, se reprend-elle. Trêve de bavardage, je vous les confie.

— Merci, ma chère, rajoute la détentrice du pouvoir, heureuse d’avoir la possibilité de réjouir l’appétit de la trentaine d’amies réunies sous son toit. Changeons donc l’atmosphère de notre réunion, rendons la… piquante ! prononce-t-elle en frappant trois fois dans ses mains afin d’appeler ses quatre M, musiciens privés.

Nylia-Mey se retourne à l’arrivée demandée des artistes munis de leurs instruments de musique.

Beaux dans leur costume immaculé, les M s’installent et jouent. Subjuguée par le tableau musical offert par la maîtresse des lieux, j’en tressaille. L’art et ses merveilles… Au même instant, les nobles s’activent et gâchent ma distraction. Tels des rapaces en quête de nourriture, elles se lèvent tour à tour de leur siège dans un balancement de bassin provocateur et, les iris brûlants d’envie, partent à la rencontre de la chair offerte à leur toucher, désir, besoin. Encouragées par le rythme langoureux de la mélodie de fond, elles viennent frôler, caresser, palper les muscles virils mis à disposition. Leurs doigts voyagent des torses robustes aux bras dessinés, pour finalement conquérir les fessiers généreux, les testicules rebondis et les pénis frémissants, sensibles aux premiers contacts. Je connais la chanson.

Légèrement en retrait de la scène, elle croise les bras derrière son dos. Garder l’équilibre lui est difficile. Imposés par sa mère, ses talons hauts ne lui facilitent pas la tâche et la naissance inévitable d’ampoules au niveau de ses orteils, aux ongles vernis pour l’occasion, n’arrange pas l’inconfort de sa position debout. Silencieuse poupée obéissante, elle endosse le rôle d’une demoiselle distinguée dans le but de remplir les devoirs imposés. Ses barrettes cisaillent son cuir chevelu. Ses pendants d’oreille étirent ses lobes. La matière de sa robe étriquée agresse ses formes. Son fard à paupières irrite ses yeux. Son fond de teint asphyxie sa peau. Armée de patience, elle observe l’attroupement créé autour des séduisants A sélectionnés par Syrasiel en essayant d’oublier son déguisement inconfortable.

Les chairs se rencontrent, se découvrent progressivement, sagement. Les subordonnés demeurent alignés, prêts à agir et se donner dans les moindres recoins du salon, selon les consignes données. Loin d’être commencée, la partie embrasse le chemin du régal charnel. Le potentiel de B5, dont l’aura enflamme particulièrement les ardeurs féminines, m’impressionne toujours autant lors de ce genre d’évènement.

Grand, fort, énigmatique, charismatique, ce B5, surnommé Impulsif par ma mère, arbore des traits faciaux rudes paradoxalement curvilignes. Il possède un front et un nez imposants, des lèvres charnues équilibrées par le tracé arqué de ses sourcils clairs, une crinière cuivrée et épaisse relevée dans les airs grâce aux effets de la cire, un regard bleu et profond possédant un mystère délicieusement taquin, une fraîche barbe dorée aguicheuse, des airs suffisants, mesquins et autoritaires saupoudrés par une douceur refoulée, une tendresse endormie prête à s’exprimer.

Comme à l’accoutumée, ses particularités physiques, qui le différencient de ses confrères, attirent les femmes et doivent lui procurer une immense fierté. Elles lui flattent la verge, parcourent sa peau de leurs doigtés délicats et fermes. Il est le jeune homme de la situation, celui pouvant les conduire dans le pays des rêves éveillés au sein duquel, selon les dires entendus à ce sujet, le plaisir domine, commande à la logique. Un seul mot de leur part et il sait leur donner des ailes…

Promptement entraîné par cinq paires de mains vers un coin privatif que des rideaux blancs, presque transparents, délimitent, il marche fièrement sous l’impulsion directrice de doigts agrippés à ses parties intimes qui le guident dans la bonne direction. Ce scénario est devenu routinier.

— Puis-je vous suggérer un lancer de fléchettes ? conseille Layel aux quelques dames intéressées par le cobaye relégué à la torture. Cet ancien jeu subtil est classique, je vous l’accorde, mais la grâce dans la mutilation correspond parfaitement à l’élégance que j’essaie de conférer à ma demeure.

Nylia-Mey peste intérieurement.

La soirée ne se déroulera inévitablement pas juste sous le signe de l’érotisme. Le sadisme veut toujours avoir une place dans le quotidien, même celui des personnes aisées.

Voir l’excitation animer les consommatrices impatientes l’exaspère immanquablement. Déceler les conséquences de l’effroi agir sur le corps crispé du serf quinquagénaire, conscient de sa destinée sanguinolente, l’émeut. Disposer de l’influence nécessaire lui permettrait de le sauver de l’impasse morbide qui le guette.

Mon avenir au sein de l’entreprise familiale ne me réjouit pas, mais mon éthique professionnelle et personnelle sera à même de restaurer l’honneur terni de ma maison. Jamais plus je ne la laisserai tomber entre les griffes de l’ignominie d’actions primaires repoussantes que se plaît à perpétuer ma génitrice.

— Veuillez me suivre, nous allons placer la bête dans une pièce attenante, propice à ce genre d’amusement. Cette précaution permettra de limiter les éclaboussures malencontreuses de sang sur le carrelage ou le mobilier, précise Layel en se déhanchant vers l’endroit suggéré.

Fortement attirée par la barbare activité, banale mais efficace, proposée par notre cliente, ma mère se laisse emporter dans son sillage sans se soucier de mes états d’âme ni se préoccuper de la supervision de Giel et Kiel. Quelle cadre !

***

— Viens par ici, ordonne Layel au futur subalterne torturé, l’invitant à la rejoindre d’un mouvement autoritaire de l’index. Tu vas positionner ton buste sur cette table et tendre tes jambes. Ainsi, nous aurons une vue imprenable sur ton fessier et tes testicules.

Envahi par une peur incontrôlable, l’homme demeure statique.

— Maudit vermisseau, qu’attends-tu pour t’exécuter ? lui demande Syrasiel, surprise par son hésitation insolente.

Je ne veux pas… Je ne souhaite pas finir ma carrière maintenant, ainsi. Je n’accepte pas de mourir en tant que misérable résidu uniquement bon à satisfaire des pulsions sanguinaires signant mon arrêt de mort. Je manque cruellement de bravoure, de dignité, de morale, toutefois, je ne parviens pas à accepter mon déclin, ma chute, les blessures imminentes imposées à mon corps, certes vieillissant, mais toujours valide, capable. Le souffle de la vie navigue encore dans mes veines, mon cœur, mon âme inaltérée par la malice de la dégénérescence. Je peux encore servir les intérêts de ma chef, malgré ma perte désastreuse de vigueur sexuelle. Je le sais.

Guidé par sa détresse, le pion apeuré s’agenouille aux pieds de Syrasiel courroucée par sa conduite immature, indigne de la réputation de sa société. Au lieu de percevoir sa colère, il lui agrippe les chevilles, larmoie, renifle.

— Maîtresse… Oh, ma maîtresse ! Je vous en conjure, je saurai regagner votre confiance, je saurai…

— Tais-toi donc ! Tu me mets dans un embarras indescriptible, rage la grande propriétaire en secouant la jambe, dans le dessein de la libérer de l’emprise masculine jugée pitoyable, indécente, inconcevable.

Silencieuse, le cou tendu par le courroux, ma responsable me dévisage comme si elle pouvait me déchiqueter, me dévorer, m’ingurgiter en un battement de cil. Mes espoirs de retraite paisible, méritée auprès d’elle, agonisent dans le reflet sévère de ses yeux déçus par ma couardise. Si certains compatriotes parviennent à gagner ce privilège, après s’être voués entièrement et admirablement à leur corps de fonction, j’en serai exempt.

Le retraité résigné se recroqueville sur lui-même, le dos voûté, l’air pathétique et met à rude épreuve la patience de sa supérieure qui, bridée par la présence des femmes de la haute société à proximité du spectacle, évite de le sanctionner physiquement.

Je scrute ma peau flétrie, me rends à l’évidence. La vieillesse a manifestement pris possession de mon être. Le déni est incontestablement mon pire ennemi depuis trop longtemps. Produit de consommation périmé, je dois accepter mon destin, ne pas outrager davantage ma dominante et son libre arbitre. Je ne mérite certainement pas l’opportunité de vivre mes derniers jours en sa compagnie, sous son toit. Je n’ai sans doute rien fait de transcendant lors de mon service pour avoir le privilège de profiter de son hospitalité, sa générosité. Je me fourvoie. Mes divagations m’aveuglent. J’ai en fait la certitude cuisante de mon échec. Je n’ai accompli aucune action pouvant me distinguer de mes camarades. Je ne vaux pas la peine d’un entretien infructueux, de dépenses inutiles. Je ne suis que le néant.

***

Contrariée à l’idée de transmettre une mauvaise image de sa maison au groupe d’amatrices de supplice, Syrasiel domine de toute sa hauteur son A en décrépitude. Les veines de son cou dégonflent légèrement, à l’instant où ce dernier se met docilement dans la position exigée.

— Ma chère Syrasiel, un seul regard de vous sur vos sujets et ils reviennent à la raison, la flatte Layel dans l’espoir de désamorcer le malaise ambiant.

— Je suis vraiment confuse.

La spécialiste s’efforce de reprendre une contenance décontractée.

— Il arrive parfois à mes subordonnés en fin de parcours de perdre tout discernement, regrette-t-elle.

— Il n’y a aucun problème. Ce phénomène est répandu. Anticiper l’arrivée de leur propre mort a tendance à rendre perplexe n’importe quel esclave. Ce fléau est d’autant plus répandu chez les mâles lâchés trop tôt dans le monde, bien avant le nombre d’études suffisant et indispensable à un comportement adapté en société.

Ce sous-entendu me déplaît. Mon professionnalisme exemplaire ne peut pas être remis en cause.

— Exactement… Il y a toujours des maillons faibles. C’est la raison pour laquelle je n’achète qu’en sortie d’école ou aux entreprises perfectionnistes, se défend Syrasiel. Le travail effectué postérieurement dans leurs locaux tend réellement à renforcer les qualités, les compétences et les atouts physiques des serfs.

Décontenancée par le regard pénétrant, bienveillant, paradoxalement inquisiteur et chargé de scepticisme de Layel, elle frémit.

— En ce qui concerne celui-ci, ajoute-t-elle, le menton pointé en direction de son déchu, il était peut-être urgent de l’ôter définitivement du marché.

— Une purge ponctuelle des hommes leur rend indéniablement service, renchérit l’hôtesse, un sourire taquin au coin des lèvres. Elle leur évite de tomber dans la honte. Le vôtre semble néanmoins avoir compris son erreur. Il offre dorénavant son anatomie en guise de cible. Tout est parfait.

Syrasiel observe sa troublante interlocutrice se déplacer jusqu’à sa marchandise et lui caresser les fesses dont la peau, légèrement relâchée, trahit un âge incompatible avec l’univers de la sexualité.

— Mesdames, mettez-vous en position devant ce résidu masculin, je vous en prie, minaude Layel en déambulant vers un débarras fermé. Je vais quérir les projectiles appropriés à ce genre d’activité.

L’élément verrouillé attise la curiosité de Syrasiel, au moment où sa cliente sort une petite clé nichée dans son décolleté.

Cette délicieuse femme disposerait-elle d’un antre dédié aux appareils de torture ? Elle n’en serait que plus attirante…

Le mystère tombe rapidement et sa déception est palpable.

Le simple placard muni d’étagères dévoilé par Layel renferme seulement quelques ustensiles basiques de jeux : cordages, laisses, colliers, bandeaux, cravaches, rien de spécialement excitant pour une passionnée.

— Il vous faut ce qu’il y a de meilleur, annonce la belle héritière à ses convives, avant d’attraper un coffret ouvragé et refermer le réduit. Directement taillées dans les mines de feu, les fléchettes en or que voici sont divines. Vous m’en direz des nouvelles. Servez-vous, sourit-elle en les présentant.

Soucieuse de conserver chez son parasite des manières adéquates, Syrasiel profite du temps consacré à la distribution des objets raffinés pour venir se placer devant son visage. Lentement, elle se penche vers la table supportant son buste nu.

— Tu sais ce qu’il te reste à faire, misérable, n’estce pas ? lui murmure-t-elle en le fixant sévèrement.

Le hochement de tête fébrile de sa marionnette de chair, levant brièvement les yeux vers elle, s’avère insuffisant.

— Au marché de Falasiel, j’ai vu des garnements subir des châtiments beaucoup plus atroces que celui t’étant destiné ce soir et… devine quoi ! Pas un ne se débattait ou ne suppliait pour sa vie, pas un.

Elle caresse les cheveux grisonnants de son serviteur apeuré dont les larmes discrètes l’aident à croire en ses remords, effleure tendrement son front, lui attrape violemment la lèvre inférieure.

— N’oblige surtout pas madame Layel à avoir besoin de cordes pour te maintenir en place. M’entendstu ? Crois-moi… Il y a des morts pires que celle que j’ai initialement prévue pour toi…

Satisfaite de l’effet perceptible produit par ses sous-entendus, elle se redresse légèrement pour regarder les dames fortunées se mettre en position de tir.

— Fixe-moi à chaque lancée de flèches, exige-telle de son esclave en le dévisageant à nouveau. Je veux voir la souffrance envahir tes pupilles en guise d’excuse pour ta mauvaise, très mauvaise attitude.

Le jeu débute et le premier projectile pénètre dans la chair de mon rebut, peinant à retenir un cri. Les autres tirs s’enchaînent rondement et je me délecte de sa douleur, hantée par le souvenir de mes premiers essais en matière de supplice avec Miceley.

— Connaissez-vous le dernier club de déchets à la mode de Falasiel ? questionne une connaissance extrêmement maigre de la maîtresse des lieux, avant d’opérer un superbe lancer.

Intéressée par la conversation engagée entre les joueuses, Syrasiel se relève élégamment, pendant que du sang ruisselle sur les cuisses de son vaurien à la mâchoire serrée.

— J’en ai entendu parler, mais je ne m’y suis pas encore rendue, répond Layel en mirant son impeccable manucure. Je me demande par ailleurs si je n’ai pas passé l’âge de fréquenter ce genre d’établissement.

— Voyons Layel… Tu ne le penses pas ! Puis tout à fait entre nous, il n’y a pas d’âge pour se laisser aller au dévergondage. J’y suis allée il y a quelques jours dans ce fameux club. Leur enseigne propose vraiment une diversité d’individus aguichante, ajoute la mince citadine en suçant la pointe de sa prochaine fléchette. Les physiques ingrats ne manquent pas.

À l’écoute du récit, l’imagination de Syrasiel s’enflamme autour des associations spécialisées dans l’utilisation ludique des détritus.

Ces endroits ont l’art d’illuminer la noirceur des nuits, notamment lors des saisons froides. Dans ce cadre, les soirées ont souvent une perspective réjouissante. L’aspect festif et utilitaire attire. En quête de défoulement, les noctambules dansent et peuvent avoir le loisir de torturer physiquement ou mentalement des garçons usagés, rejetés et inutiles, rendant par la même occasion service à la société grâce à l’élimination inconsciente de la vermine. Ah ! Falasiel ! Tu pourvois décidément à tout !