Strange Lovers - Rina B Owen - E-Book

Strange Lovers E-Book

Rina B Owen

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Beschreibung

« Une romance douce et touchante. » - Sophie Tremblay, auteure de « Un Noël presque noir » « Un roman doux et profond qui remue le coeur. » - Misskokosreadings, chroniqueuse « Une romance toute douce qui donne envie de tomber amoureux. » - JeVousLis, professionnelle de l édition Parfois, un simple stylo suffit pour écrire une histoire d amour. Alice est étudiante en deuxième année de médecine. Piégée entre son cursus universitaire et une famille qui ne la calcule pas, seule sa colocataire optimiste la pousse à garder le sourire. Du moins, jusqu à ce que Jonah lui crie dessus en plein milieu du campus pour une maudite histoire de stylo. Leur rencontre est tout sauf idéale, mais pourrait être exactement ce dont Alice a besoin. Surtout lorsqu elle comprend que le jeune homme n est pas aussi insensible qu elle le pensait. Ce roman est fait pour les personnes qui ont besoin de douceur dans leur vie. Et pour celles qui ne savent pas encore qu elles en ont besoin.

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LOUANGES POUR STRANGE LOVERS :

« Une romance toute douce entre les bouquins et les étoiles »

- thereadingsession, chroniqueuse

« Tel le battement d'aile d'un papillon, un simple stylo peut tout changer. Strange Lovers nous emporte dans l'histoire d'une rencontre, d'un regard, d'une évidence. J'ai été sous le charme tout au long de ma lecture. »

- mel_lit_56, chroniqueuse

« Parfois les plus belles histoires trouvent leur origine dans un événement du quotidien. Un roman doux et profond qui remue le cœur. »

- Misskokoreading, chroniqueuse

-

« Laissez-vous emporter par ce roman feel good à l’écriture envoûtante. Chaque instant passé avec Alice et Jonah était un véritable bonheur, scotchant un immense sourire sur mes lèvres tout du long de leur aventure. »

- Orlane Phenix, lectrice

« Strange Lovers est une romance toute douce qui fait du bien au moral. Elle se lit d'une traite et nous plonge dans un petit cocon d'amour. C'est simple, c'est le roman qui donne envie de tomber amoureux ! »

- JeVousLis, professionnelle du travail éditorial

« Laissez-vous captiver par ce roman feel-good et sa romance unique. »

— books_of_kthy, chroniqueuse

Pour Agathe et Jorid,

merci de m’avoir appris que l’amour inconditionnel existe.

Et pour tous ceux qui, comme moi,

rêvent de vivre une belle romance remplie de douceur.

Sommaire

Prologue

Septembre

Chapitre 1

Chapitre 2

Chapitre 3

Chapitre 4

Chapitre 5

Chapitre 6

Chapitre 7

Chapitre 8

Chapitre 9

Chapitre 10

Chapitre 11

Chapitre 12

Chapitre 13

Octobre

Chapitre 14

Chapitre 15

Chapitre 16

Chapitre 17

Chapitre 18

Chapitre 19

Chapitre 20

Chapitre 21

Chapitre 22

Chapitre 23

Novembre

Chapitre 24

Chapitre 25

Chapitre 26

Chapitre 27

Chapitre 28

Chapitre 29

Chapitre 30

Chapitre 31

Chapitre 32

Decembre

Chapitre 33

Chapitre 34

Chapitre 35

Chapitre 36

Chapitre 37

Chapitre 38

Chapitre 39

Chapitre 40

Chapitre 41

Chapitre 42

Chapitre 43

Chapitre 44

Chapitre 45

Janvier

Chapitre 46

Chapitre 47

Chapitre 48

Epilogue

La première fois que j’ai rencontré Jonah, c’était à cause d’un stylo.

Assise sur ma chaise, je fixais l’enseignant qui nous faisait face. J’avais horreur des réunions de rentrée et, puisque j’étais en deuxième année de médecine à présent, je savais déjà tout ce que j’avais besoin de savoir. Personne ne commençait cette formation sans avoir fait un bon paquet de recherches. Du moins, personne ne tenait le coup sans avoir révisé pendant tout l’été avant de l’intégrer.

Toute la magie de la première année et de la découverte s’était envolée, laissant derrière elle la dure réalité des formations de médecine : étudier jusqu’à en tomber par terre. Travailler, dormir et occasionnellement manger étaient les trois seules choses qui traversaient mon esprit au quotidien. Ça, et des discussions animées avec ma colocataire.

Nos numéros étudiants étaient collés sur nos tables afin qu’on sache exactement où s’asseoir. Grâce aux examens de l’année précédente, je le connaissais par cœur : 50621.

Numéro 50621. C’était moi. Pas Alice Leester.

Les professeurs corrigeaient mes copies avec seulement ce numéro inscrit dessus afin de conserver l’anonymat. Au début, cette déshumanisation m’avait dérangée, mais j’avais rapidement appris ses avantages.

L’intervenant qui nous présentait l’année d’études à venir travaillait, si je ne me trompais pas, à l’administration du campus et se chargeait de régler les problèmes des étudiants de médecine. La seule fois où j’avais été confrontée à lui c’était lorsqu’on avait volé mon sac entre les différents créneaux de cours. À vingt heures qui plus est !

Bien sûr, mes affaires n’avaient jamais été retrouvées, mais l’employé, d’environ quarante ans, avait été tellement désolé qu’il avait imprimé tous les chapitres du cursus qu’il avait pu dégoter sur le serveur commun des professeurs afin que je ne perde pas toute ma prise de notes à seulement quelques semaines des partiels. Inutile de mentionner que ç’avait été le stress absolu.

Il avait fini par me donner des pages remplies de matières qui ne faisaient même pas partie de mon programme, mais je ne lui en avais rien dit. C’était le geste qui comptait.

Je jouais avec mon stylo tout en regardant la feuille qui se trouvait devant moi sur ma table. Ce formulaire m’était familier, mais je ne l’avais pas complété l’année précédente.

« Cours Particuliers et Séminaires » était marqué dessus en grandes lettres noires. On nous proposait des cours particuliers divers et variés qui nous permettaient de nous familiariser avec les spécialités qu’on pourrait choisir par la suite. De toute évidence, c’était un service payant qui nous donnait des exercices supplémentaires à faire.

Ce qui m’intéressait davantage était la colonne des séminaires. Chacun se déroulait le temps d’un week-end et le coût pouvait varier en fonction du lieu. Comme tout étudiant, j’économisais au quotidien pour survivre jusqu’à la fin du mois, mais j’avais mis assez d’argent de côté pour pouvoir assister à l’un d’entre eux.

Je cochai la case du séminaire sur l’avancée technologique de la chirurgie nommée « Chirurgie et IA ». Déjà un an qu’il me faisait de l’œil et j’étais enfin prête à poser les quatre cents euros nécessaires sur la table.

SÉMINAIRE 3 : LA CHIRURGIE & L’IA

DURÉE : 2 jours (17 et 18 septembre)

PRESTATION : rencontre avec l’équipe du programme « La chirurgie & l’IA » + conférence « Le futur de la chirurgie médicale » (trajet en bus, logement et repas compris)

PRIX : 400 €

Je sentis de la fierté m’envahir en contemplant la petite croix noire que j’avais tracée juste à côté du nom du séminaire. Cet évènement allait à coup sûr être la meilleure chose qui m’arriverait de toute l’année !

J’avais pour but ultime de devenir une des meilleures chirurgiennes du pays et de sauver autant de vies que possible. C’était une pensée si idéaliste que je ne pouvais pas m’empêcher de sourire. Bien sûr, le chemin serait long, laborieux et parsemé d’échecs, mais l’espoir de voir mon rêve se réaliser me permettait d’avancer sans craindre les contrecoups. Bien que mon objectif soit la seule chose qui me garde sur pied, c’était dangereux et enfantin de rêver de la sorte.

Satisfaite de mon choix, je posai mon stylo bleu clair avec marqué dessus « smile, sparkle, shine » sur la table et attendis avec impatience la fin de cette réunion interminable.

— N’oubliez pas de déposer vos formulaires complétés dans le bac à côté de la sortie ! termina finalement l’administrateur avec un grand sourire aux lèvres.

Je soupirai, m’étirai, pris mon stylo et ma feuille et sortis rapidement de l’amphithéâtre comme si ma vie en dépendait. Je n’avais aucune envie de me retrouver compressée par la foule et fis de mon mieux pour la devancer.

Une fois le couloir atteint, je rangeai mon stylo dans mon sac et commençai ma recherche de toilettes. Ensuite, je rentrerais chez moi en bus et m’endormirais devant un film avec ma colocataire. Avant que je n’en aie plus l’occasion à cause de la charge de travail liée aux cours.

Jessy et moi étions amies depuis notre dernière année de lycée. Au début, on se détestait et je l’évitais comme la peste. Puis, un jour, je l’avais vue pleurer seule dans le couloir et, dans un élan de sympathie, j’étais allée lui chercher un Snickers à la cafette de l’école pour lui remonter le moral. Depuis, nous étions devenues inséparables et je ne me souvenais même plus de la raison pour laquelle je l’avais tant détestée autrefois. Peut-être qu’il n’y en avait tout simplement pas.

Malheureusement, elle étudiait le droit, mais être en colocation avec elle me permettait au moins de la voir lors de nos rituels cinématiques étranges dès que notre emploi du temps nous le permettait. On choisissait un film à regarder en fonction de sa première lettre. L’année dernière, nous avions déjà fait le tour de l’alphabet, ce qui nous avait forcées à recommencer de zéro cet été.

La première année de médecine avait été déchirante et affreuse en termes de charge de travail, mais la perspective des soirées film avec Jessy m’avait permis de tenir bon. C’était un peu mon arc-en-ciel après l’orage.

— 50621 ! cria soudain une voix masculine.

Les autres étudiants parcourant les couloirs avaient cessé leur course et fixaient quelque chose se situant derrière moi. Je fronçai les sourcils et me retournai lentement pour voir ce qu’il se passait, tombant nez à nez avec un jeune homme que je n’avais encore jamais vu de ma vie.

Est-ce que c’était moi ou se tenait-il beaucoup trop près de moi ?

Il m’observait avec ses yeux noisette dont les iris paraissaient former deux effrayants abysses sans fond. Ses cheveux châtains désordonnés me montraient qu’il avait couru jusqu’à s’arrêter à ma hauteur. Sa peau était hâlée, sûrement les vestiges d’un été passé au soleil, et il mesurait une tête de plus que moi. Son pull noir à capuche était un peu trop grand, engloutissant le haut de son corps dont je ne pouvais rien déterminer si ce n’étaient ses larges épaules.

Tout comme moi, il avait abandonné toute sophistication vestimentaire pour cette rentrée universitaire.

Je fronçai les sourcils et ouvris la bouche, mais il me devança.

— Tu as mon stylo, 50621.

Sa voix était sèche et j’écarquillai les yeux en remarquant qu’il m’appelait par mon numéro étudiant.

— Excuse-moi ? répondis-je, perplexe.

Je ne savais pas comment agir dans cette situation étrange et croisai les bras dans un mouvement défensif. Il avait déboulé si vite, sans même un bonjour, que mon cerveau avait du mal à suivre.

— Tu as mon stylo, répéta-t-il sans donner plus d’informations.

Son visage était si impassible et son expression si froide que je me demandais s’il n’était pas un robot. J’ouvris mon sac à main en secouant la tête, déboussolée.

— Je n’ai pas…

Ma phrase resta suspendue dans l’air lorsque mon regard tomba sur un objet argenté que je ne reconnus pas. Je le saisis et compris que c’était, en effet, son stylo. Ce dernier n’avait rien de spécial et aucune marque ne figurait sur sa matière métallique.

Pourtant, lorsque je le tendis à l’inconnu, il se hâta de l’attraper et de le fourrer dans la poche de son pantalon noir.

Puis, il me donna à son tour mon stylo bleu clair, avant de me dépasser sans m’adresser le moindre mot de plus. Surprise et confuse, je le regardai s’éloigner dans le couloir jusqu’à ce qu’il ait disparu parmi la masse d’étudiants qui se pressait dans tous les sens.

Qu’est-ce que c’était, ça ? pensai-je avec la bouche à moitié ouverte.

La rencontre avec l’homme robot, c’était ainsi que je le surnommais puisque je ne connaissais pas son nom, m’avait poussée à me demander si j’étais la seule à avoir trouvé la situation étrange. Je tentai de ne pas trop y réfléchir, d’oublier son impolitesse et son expression glaciale.

Pourtant, je ne parvenais pas à mettre ma colère et mon désarroi de côté. Qui traitait les gens d’une telle façon ? Je m’étais sentie misérable devant lui en constatant qu’il avait raison pour son stylo.

Une seule possibilité expliquait ce malheureux échange : il avait été mon voisin de table. Et cela signifiait que son numéro étudiant était 50620 ou 50622. Au moins, j’avais déjà obtenu une once d’informations à son sujet.

J’aurais dû l’oublier dès que nos chemins s’étaient séparés, mais notre rencontre avait été pour le moins… inattendue. Et pas dans le bon sens du terme. Elle serait difficile à effacer de ma mémoire.

Je secouai la tête et m’énervai intérieurement d’être restée muette plus tôt dans le couloir. J’aurais dû lui dire à quel point il était malpoli et à quel point je trouvais sa façon d’agir grossière ! Au lieu de ça, je me frustrais toute seule à mon arrêt de bus.

Les bons mots ne me venaient jamais à l’esprit lorsque j’avais besoin d’eux, mais inondaient mes pensées dès que la situation n’était plus d’actualité.

À cause de l’intervention de l’homme robot, j’avais raté mon bus et me retrouvais à devoir attendre le prochain. Vingt minutes. C’était le temps que j’aurais à passer dehors, dans le froid, à me ressasser les évènements de la matinée.

Dans mon désespoir, je sortis mon téléphone de ma poche et envoyai un message à Jessy afin de la prévenir de mon retard.

En train d’attendre le bus qui s’obstine à être beaucoup trop lent.

Le symbole « … » apparut aussitôt en bas de mon écran et j’attendis avec impatience de voir sa réponse s’afficher. Elle parvenait toujours à me faire sourire, même lorsque j’étais complètement désespérée et au fond du trou. C’était pourquoi elle était la meilleure colocataire du monde.

Tu ne vas pas avoir beaucoup de temps pour te préparer, alors !

Je fronçai les sourcils. Me préparer ?

???

Après un bref silence qui fit bouillir la tension dans mes veines, j’eus enfin une explication à son message précédent.

Soirée d’intégration de médecine. Ce soir. Toi et moi. Qu’en dis-tu, ma colocataire sexy ?

La première partie me donnait envie de pleurer et la seconde de rire. Bientôt, je finirais par pleurer de rire.

Je ne suis pas trop d’humeur

Tapai-je dans le but qu’elle me laisse tranquille, sachant pertinemment que ce ne serait pas le cas. Elle ne lâchait jamais l’affaire jusqu’à ce qu’elle ait obtenu ce qu’elle voulait.

C’était pratique lorsqu’elle me défendait, mais moins amusant lorsqu’elle tentait de me convaincre de quelque chose.

Mauvaise période ?

Mauvaise journée

Alors que les cours n’ont même pas encore commencé ?

Je m’apprêtai à lui répondre lorsque le bus se stoppa net devant l’arrêt. Surprise de le voir arriver aussi tôt, je me levai, glissai mon téléphone dans ma poche et montai dans le véhicule.

Comme à mon habitude, je saluai le chauffeur avec un sourire aux lèvres, avant de m’installer sur un des nombreux sièges vides. Il fallait que je profite de ce silence, car une fois les cours commencés, ç’allait être le chaos chaque fois que je devrais rentrer chez moi ou venir sur le campus. Pourquoi prévoyaient-ils toujours si peu de créneaux de transports en commun pour les étudiants ? On est peut-être jeunes, mais on déteste tout autant être serrés les uns contre les autres que les « vrais adultes ». Sauf en soirée.

La soirée d’intégration, songeai-je avec désespoir.

Je posai ma tête contre la vitre et observai le paysage urbain qui défilait sous mes yeux. Dans un peu plus de dix minutes, je serais chez moi. Je savais pertinemment que Jessy insisterait pour aller à la fête, que je céderais et que je le regretterais immédiatement.

Je n’avais jamais été aussi déçue que notre séance de film soit repoussée.

En rentrant, Jessy avait déjà préparé une longue liste d’arguments pour me convaincre de venir avec elle à la soirée d’intégration. Comme à mon habitude, je l’écoutai inventer des excuses complètement absurdes qui nous faisaient toutes les deux éclater de rire. Puis, je fis semblant de réfléchir en prenant ma douche, avant de revenir dans le salon et de céder à sa requête.

Elle avait su dès le début que je dirais oui, mais avait tout de même tout mis en œuvre pour éviter que j’aie la moindre raison de refuser de participer à sa petite sortie nocturne.

Je n’étais jamais allée aux week-ends d’intégration déjantés organisés par les étudiants de médecine. Je n’en avais jamais ressenti le besoin, contrairement à ma colocataire qui aurait tout fait pour pouvoir y assister.

Une fois prêtes, elle habillée de sa robe noire courte aux manches bouffantes et moi de mon crop top bleu et de mon jean, on s’assit sur le canapé comme si on venait tout juste de revenir de la soirée. On était déjà épuisées. Surtout moi.

— Pourquoi est-ce que tu as passé une mauvaise journée ? me demanda-t-elle en fronçant les sourcils.

J’aurais dû voir cette conversation venir, je n’aurais jamais dû lui envoyer ce message à l’arrêt de bus. Pourtant, ça me fit du bien d’avoir l’opportunité de parler de ma rencontre de la matinée à quelqu’un. Peut-être que j’exagérais ? Peut-être que la réaction de l’homme robot était tout à fait ordinaire ? Peut-être que c’était normal d’interagir de la sorte avec des inconnus ? Je n’en saurais rien puisque je n’avais jamais aspiré à agrandir mon groupe d’amis qui se résumait à… eh bien… Jessy.

— Un type a crié mon numéro étudiant dans les couloirs parce qu’il me cherchait.

Elle était sur le point de rigoler avant d’apercevoir mon air sérieux.

— Il était trop bizarre, il m’a confrontée au milieu du couloir, alors que j’avais juste pris son stylo. De façon très désagréable en plus. C’était comme si sa vie en dépendait, poursuivis-je en recouvrant mes bras de mes mains.

Plus les secondes avançaient, plus les mots sortaient de ma bouche, plus j’avais l’impression d’être ridicule. J’en faisais toute une histoire pour rien du tout !

— Il était super froid. Pas de bonjour, de merci ou d’au revoir. Il me fixait avec son regard glacial et est parti dès que je lui ai redonné son stylo. Ce n’était pas comme si je l’avais fait exprès !

Ces paroles sortirent de ma bouche d’une façon plus agressive que je l’avais souhaitée. Je me laissai tomber contre l’épaule de Jessy qui posa aussitôt sa main sur mes cheveux.

— Tu sais, il y a des cons partout. Il n’est ni le premier ni le dernier que tu croiseras dans ta vie, Alice. Il n’y a qu’un seul moyen d’oublier cet instant déprimant…

Je levai mon regard vers le sien et elle m’adressa un sourire en coin.

— Faire semblant que tu t’en fiches jusqu’à ce que tu t’en moques réellement, complétai-je la phrase qui était sa philosophie de vie.

Elle avait raison. L’homme robot ne valait pas mon temps.

Bien que ce soit une soirée organisée par et pour les élèves de médecine, le bar était rempli d’étudiants du campus entier. Jessy salua brièvement ses collègues, et rivaux, de sa formation de droit, avant de me traîner jusqu’au bar. Elle aimait beaucoup trop se faire offrir des verres et y parvenait toujours à merveille. Dommage qu’elle ne pouvait pas mettre une telle chose sur son CV. J’imaginai déjà les têtes des recruteurs et me retins de rire. Même si elle le faisait, elle n’aurait qu’à battre des cils pour qu’ils oublient tout ce qu’ils venaient de lire. Aucun être sur cette planète n’était immunisé contre le charme destructeur de ma colocataire.

À peine entrée, elle était déjà en train de discuter avec un jeune homme accoudé au comptoir en bois qui se penchait un peu trop dans sa direction à mon goût. Je savais qu’elle se débrouillait comme une cheffe, mais gardais tout de même un œil sur elle. On ne savait jamais. Mieux vaut prévenir que guérir.

La musique était si forte qu’il fallait crier pour pouvoir se comprendre. Je ne tardai donc pas à me perdre entre les notes tout en faisant de mon mieux pour ne pas repenser à ma rencontre de la matinée.

Je n’avais pas la force nécessaire pour sociabiliser avec quiconque et mon regard gris s’égara au loin, alors que la scène avec l’homme robot me revint en mémoire. Je soupirai et secouai la tête dans le but de chasser les images désagréables de ma mémoire. Ce n’était ni le moment ni le lieu pour déprimer !

Afin de me distraire, j’observai les personnes assises au peu de tables hautes disposées dans l’espace du bar. La plupart des étudiants se trouvaient sur la piste de danse improvisée, signifiant que ceux assis n’étaient pas d’humeur à faire la fête. Tout comme moi.

À vrai dire, je n’étais jamais assez motivée pour me laisser aller et n’étais pas intéressée par la drague ou les rencontres furtives qui ne dureraient pas. C’était pourtant exactement ce pour quoi tous les autres venaient à cette soirée.

Soudain, sans crier gare, mon regard vagabond s’arrêta sur un visage familier et mon souffle se coupa. Je clignai des yeux, me demandant si l’odeur de l’alcool flottant dans l’air me donnait des hallucinations. Ça n’y faisait rien, l’image devant moi ne changea pas. Il était toujours là, comme par magie. Ou plutôt par ironie du sort.

L’homme robot jouait avec son verre, faisant tourbillonner le liquide de son cocktail dans tous les sens. Son expression était si dure que j’avais l’impression qu’il en voulait à mort à sa boisson.

Face à cette scène, mon cœur resta parfaitement calme, comme si le temps venait de ralentir. Mes jambes me guidèrent d’elles-mêmes en direction de l’individu que je reconnaissais. J’ignorais si je le faisais par curiosité ou à cause de l’incompréhension qui bouillonnait encore au plus profond de moi, mais ne tardai pas à atteindre sa table et à m’asseoir en face de lui sans lui en demander l’autorisation.

C’était la chose la plus badass que j’avais faite de toute ma courte vie.

Il leva la tête en m’adressant le même regard glacial que précédemment sans pour autant paraître surpris par ce que je venais de faire. Sans montrer de quelconques émotions tout court. J’ignorais ce que je souhaitais lui dire et restai silencieuse avec la bouche à moitié ouverte.

Indifférent, il baissa de nouveau la tête pour se concentrer sur sa boisson. Je le maudis intérieurement et rassemblai tout mon courage pour lui poser la question qui me hantait depuis notre rencontre plus tôt dans la journée : quel est ton problème ?

À mon grand malheur, quelque chose de différent franchit mes lèvres.

— Je m’appelle Alice.

Un sourire s’empara de mon visage et je sentis le rouge me monter aux joues alors qu’il m’interrogeait du regard. Ceci n’était pas du tout la tournure que je voulais donner à cette conversation ! Ce monologue pour être plus précise.

— Tu as crié mon numéro étudiant dans les couloirs donc je présume qu’il est mieux que tu m’appelles par mon nom la prochaine fois qu’on se trompera de stylos, poursuivis-je, m’enfonçant encore plus dans le ridicule.

Il hocha lentement la tête, mais son expression figée ne changea pas.

— Je surveillerai mieux mon stylo à l’avenir.

Sa voix était grave et ses paroles auraient pu être sarcastiques et légères si sa mine n’avait pas été aussi sérieuse.

Un nouveau silence nous enveloppa et je regrettai aussitôt d’être venue le voir. Qu’est-ce que j’avais souhaité obtenir avec cette discussion vide de sens ? Comment avais-je espéré qu’il réagisse ? Je n’en avais aucune idée.

Ceci expliquait pourquoi je planifiais tout, avant de passer à l’action ! Sauf ce soir, apparemment.

J’observai Jessy du coin de l’œil et la vis danser avec un jeune homme au sourire radieux. J’aurais aimé être aussi insouciante qu’elle, aussi sûre de moi. Jessy n’hésitait jamais. Elle disait toujours qu’il valait mieux regretter d’avoir fait quelque chose plutôt que de regretter de ne pas l’avoir fait. Je ne croyais pas beaucoup à sa philosophie, mais espérais pouvoir me lâcher un peu à mon tour avant la fin des études. J’avais encore bien des années à passer sur le campus puisque le chemin que je souhaitais emprunter était littéralement le plus long cursus qui existait.

Une part de moi était terrifiée à l’idée que je ne puisse pas vivre d’instants insouciants avant d’être projetée dans le monde du travail. Je n’avais jamais eu de relation sérieuse, je ne sortais en soirée que parce que Jessy y allait et ne faisais rien d’autre qu’étudier et regarder des films. Ce n’était pas vraiment une de ces vies qu’on voyait dans les nombreux films romantiques que je méprisais tant, tout en les aimant en secret.

Parfois, je souhaitais être la protagoniste d’un de ces scénarios, mais je ne restais que le personnage secondaire. Que ce soit dans ma famille, dans mes amitiés ou même en cours, je n’étais jamais la meilleure. Jamais le premier choix de quiconque.

Je soupirai en me tournant de nouveau vers l’homme robot dont je ne connaissais toujours pas le nom et remarquai aussitôt qu’il avait disparu.

Une fois de plus, je me retrouvais seule.

J’avais fini par rejoindre Jessy qui rayonnait comme à son habitude. Elle me racontait ce que les hommes, avec lesquels elle avait dansé, lui avaient dit à propos de leur vie et j’éclatai de rire en me rendant compte que la moitié d’entre eux avaient à coup sûr menti dans le but de l’impressionner. Aucun étudiant de notre âge ne pouvait déjà avoir gagné un prix littéraire !

Jessy était impressionnante. En plus d’avoir un sens incorruptible de la justice, elle était belle, intelligente, adorable et sans oublier, une vraie briseuse de cœurs charismatique.

Ses longs cheveux noirs ondulés, sortant tout droit d’une publicité pour des soins à la kératine, brillaient sous les lumières colorées du bar. Ses cils courbés encadraient à merveille son grand regard vert et ses lèvres pulpeuses étaient mises en avant grâce à son habituel rouge à lèvres d’un rouge foncé. Elle mesurait 1,66 mètre, la taille parfaite pour une femme, et ses jambes fines étaient mises en valeur par sa robe courte. Son père était brésilien, ce qui donnait un éclat hâlé à sa peau lisse. À côté d’elle, je ressemblais à un cadavre châtain au regard gris fade. Mes cheveux, coupés au carré, tombaient sur mes épaules comme le ferait une serpillière. C’était encore pire lorsqu’ils étaient longs.

Je n’avais jamais jalousé Jessy, j’étais heureuse pour elle et l’admirais de tout mon cœur. Ses origines paternelles ne lui avaient pas rendu la vie facile au sein du système scolaire, mais elle était restée optimiste en toutes circonstances et était allée bien plus loin que la plupart de ses anciens camarades de classe. Grâce à elle, je parvenais toujours à surmonter les épreuves de la vie et je ne savais pas ce que je ferais sans elle. Elle était sans le moindre doute la personne la plus forte que je connaissais.

— Quand je lui ai parlé des différents articles, il m’a inventé une excuse comme quoi il ne se souvenait pas de tout. Alors je lui ai demandé s’il était d’accord avec un article qui n’existe pas et il a acquiescé. J’étais morte de rire et le pauvre type n’a rien compris, m’expliquait-elle en se remémorant l’un des danseurs qui avait tenté de la séduire dans le bar.

J’éclatai de rire en m’imaginant le pauvre étudiant s’enfoncer encore et encore dans sa spirale de désespoir. Je tentais de ne pas trop réfléchir au fait que j’en avais fait de même en compagnie de l’homme robot.

— Mais du coup, qu’est-ce qu’il étudie ?

— Certainement pas le droit ! Du moins, je l’espère pour ses relevés de notes !

Elle attrapa les deux verres que le barman lui tendit. Il la dévorait du regard et aurait immédiatement quitté son poste si elle le lui avait demandé. Heureusement pour son portefeuille et son cœur, elle s’éloigna du bar pour s’installer à une des tables hautes libres que comptait l’espace.

Il était à peine minuit et tout le monde se déhanchait déjà sur la piste de danse comme si l’apocalypse était sur le point de se produire.

Ils avaient l’air ridicules, mais n’auraient pas pu moins s’en soucier.

— Rah ! J’ai fait semblant assez longtemps, Alice ! s’exclama Jessy.

Je sursautai face à son intervention inattendue et écarquillai les yeux en l’interrogeant du regard.

— Qui est le type auquel tu es allée parler tout à l’heure ? Tu ne discutes jamais avec des hommes pendant des soirées et tu vas encore moins t’asseoir à leur table de ton plein gré !

Ses yeux verts brillaient avec malice et je cachai au mieux mon embarras derrière un sourire innocent tout en hochant les épaules. Ma tentative de feindre l’indifférence était ridiculement mauvaise.

— Je pensais le reconnaître.

Sceptique, elle me jeta un regard accusateur en prenant une gorgée de son Bloody Mary. Depuis notre rencontre, je ne lui avais jamais parlé d’un quelconque crush et encore moins d’un homme dont j’étais assez proche pour m’inviter à sa table.

Mais tu viens de le faire à la table d’un parfait inconnu, songeai-je en me maudissant intérieurement.

— Et était-il celui que tu le pensais être ?

Silence.

Nerveuse, je me mordis l’intérieur de la joue.

— Est-ce que c’est un coup d’un soir dont je ne sais rien ? Ou un ex que tu as oublié de mentionner ? insista mon interlocutrice en bougeant ses sourcils de façon ridicule.

Je pouffai de rire en secouant la tête.

— Non ! Tu sais que je te raconte tout, Jessy.

— Alors, qui est ce mystérieux inconnu ?

J’inspirai dramatiquement comme si j’étais sur le point de révéler un secret d’une importance capitale.

— L’homme robot.

De l’incompréhension déforma ses traits alors qu’elle tentait de se souvenir si c’était une référence à un des films que nous avions vu ensemble l’année passée.

— Celui qui m’a cherchée dans le couloir pour que je lui rende son stylo, complétai-je en la sortant de sa misère.

— C’était lui ?

Elle fit signe à la table à laquelle je m’étais assise une heure plus tôt et je hochai la tête.

— Tu sais que je suis de ton côté, hein ? Mais… bordel, Alice ! Un type comme lui, je le laisserai me crier dessus au milieu d’un couloir avec très grand plaisir !

— Et c’est exactement pour cette raison-là que tu n’as jamais été dans une relation saine, répondis-je en levant les yeux au ciel avec exagération.

Elle éclata de rire et se gratta le menton en me scrutant.

— Pas faux.

Elle n’était tombée que sur des ordures qui la trompaient ou lui mentaient lorsqu’elle commençait enfin à leur faire confiance. Je savais qu’elle aimait en rire, mais j’étais toujours curieuse de savoir si, au fond d’elle, elle ne se sentait pas misérable en y repensant. Après tout, elle avait pleuré à cause d’un d’entre eux le jour où on avait soudainement décidé de devenir meilleures amies pour la vie.

— Et tu lui as dit quoi ? me questionna-t-elle avec curiosité.

Son ton insinuait tant de choses différentes que j’aurais dû lui dire « tu as trop d’imagination » pour faire taire les sous-entendus, mais je décidai de simplement lui répondre avec honnêteté.

— J’ai voulu lui demander quel était son problème, mais j’ai fini par me ridiculiser en lui donnant mon nom sous prétexte que, comme ça, il n’a plus besoin de m’appeler par mon numéro étudiant pour me retrouver.

Ma paume entra aussitôt en collision avec mon front. J’avais tellement honte et prononcer ce que j’avais fait à voix haute ne faisait qu’empirer les choses. C’était si ridicule ! Pas étonnant que l’homme robot se soit enfui !

— Au moins, tu ne lui as pas demandé de t’embrasser sur-le-champ, s’amusa Jessy en pouffant.

Je devins toute rouge et recouvris mon visage de mes deux mains.

— Il s’appelle comment ?

Elle sortit son téléphone, prête à taper son nom dans la barre de recherche Instagram.

— Je n’en ai aucune idée.

Le premier jour de mon année académique commençait extrêmement mal. Le bus avait été bloqué dans des bouchons, ce qui m’avait poussée à courir aussi vite que possible jusqu’à mon local de cours au milieu duquel j’étais arrivée hors d’haleine et recouverte de sueur. Comme si ce n’était pas encore assez, j’avais remarqué que je ne connaissais personne dans mon groupe de TD. Si ce n’était l’homme robot qui faisait comme si je n’existais pas. La veille, mon ego avait pris un bon coup et était reparti se cacher dans sa cave.

À la fin du premier cours, le contenu de ma trousse s’était écrasé par terre. Je m’étais juré de ne plus jamais la sortir de mon sac et de ne poser qu’un seul stylo bleu sur ma table dans le futur. Au moins, si je laissais ce dernier tomber, je pourrais facilement le ramasser sans trop me faire remarquer.

Après avoir rangé ma horde de feutres, de surligneurs et de stylos, j’avais découvert que monsieur l’homme robot me fixait avec le regard le plus désagréable qui soit. Il me donnait l’impression que je venais de l’interrompre au beau milieu de son discours pour le prix Nobel, récompense qu’il visait à coup sûr vu l’air sérieux et hautain qu’il arborait au quotidien.

À chaque fois que nos regards se croisaient, je me sentais misérable et questionnai toute mon existence. J’étais comme une petite fille qui n’avait aucune idée de ce qu’elle faisait au milieu du campus.

En arrivant à la cafétéria, j’avais l’impression que je venais de survivre à une bataille navale au cours de laquelle j’avais perdu tous mes bateaux. Je m’installai seule à une table, loin des regards curieux, et commençai à avaler ma nourriture sans pour autant sentir la moindre saveur envahir mon palais. J’ignorais si c’était à cause de la qualité du plat ou à cause de mon humeur maussade.

Mon attention fut attirée par le son de mon téléphone. Ma mère venait de m’envoyer un message.

Ce soir, réunion de famille. Esther a quelque chose d’important à nous annoncer.

Je levai les yeux au ciel en soupirant. Bien sûr qu’Esther avait quelque chose d’important à annoncer ! Le contraire m’aurait étonnée.

Elle était la perle de la famille, la fille parfaite que tous les parents rêvaient d’avoir. Elle était moi, mais en dix fois plus jolie, intelligente et passionnante. Depuis mon plus jeune âge, j’avais vécu dans son ombre puisqu’elle accomplissait toujours des choses extraordinaires bien avant que quiconque puisse y parvenir. Elle était un petit génie qui, en plus, était sociable et adoré de tous. Ça n’avait donc pas été une surprise pour personne de la voir devenir populaire, contrairement à moi. Ma réputation avait stagné à « fille invisible ».