La magie des faes - Rina B. Owen - E-Book

La magie des faes E-Book

Rina B Owen

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Beschreibung

Après avoir prouvé son innocence, Héléna a été acquittée par la cour des Shadow Faes. Toutefois, lorsqu’elle pense enfin être sortie d’affaire, un nouveau meurtre sème la terreur au palais. Afin d’avertir les autres peuples Faes du danger qui les guette dans l’ombre, l’Empereur désigne la jeune femme et ses compagnons en tant que messagers des Shadow Faes.

Piégée dans une course contre la montre à travers le continent, Héléna ne pourra compter que sur elle-même pour démêler la vérité une bonne fois pour toutes. Du moins, si sa promesse envers Movia et son attirance pour le mystérieux Govac le lui permettent...


À PROPOS DE L'AUTRICE

Rina B Owen, de son vrai nom Elin Bakker, est une auteure de SFFF et romance.Elle est une veritable star dans le monde du livre. A la fois, mannequin, conseillere litteraire, conseillere en édition, elle excele dans tous les domaines.Elle est suivi par une grande communauté Éditée en maison d'édition depuis l'âge de 16 ans, elle est l'auteure de plus de dix livres publiés à ce jour.

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Couverture par Nicolas Jamonneau

Carte par Marie Monier

Maquette intérieure par Elin Bakker

 

 

© 2022 Imaginary Edge Éditions

© 2022 Elin Bakker, sous le pseudonyme de Rina B. Owen

Tous droits de traduction, de reproduction et d’adaptation réservés.

 

Le code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou production intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

ISBN : 9782494045057

 

 

 

 

Table des matières

Interlude

Chapitre 1

Chapitre 2

Chapitre 3

Chapitre 4

Chapitre 5

Chapitre 6

Chapitre 7

Chapitre 8

Chapitre 9

Chapitre 10

Chapitre 11

Chapitre 12

Chapitre 13

Chapitre 14

Chapitre 15

Chapitre 16

Chapitre 17

Chapitre 18

Chapitre 19

Chapitre 20

Chapitre 21

Chapitre 22

Chapitre 23

Chapitre 24

Chapitre 25

Chapitre 26

Chapitre 27

Chapitre 28

Chapitre 29

Chapitre 30

Chapitre 31

Chapitre 32

Chapitre 33

Chapitre 34

Chapitre 35

Chapitre 36

Chapitre 37

Chapitre 38

Chapitre 39

Chapitre 40

Chapitre 41

Chapitre 42

Chapitre 43

Chapitre 44

Chapitre 45

Chapitre 46

Epilogue

Remerciements

 

 

À tous ceux qui n’ont jamais trouvé leur place dans notre monde et qui rêvent d’en découvrir un autre. Ce périple est fait pour vous.

Interlude

 

Je parcourus les longs couloirs du palais d'acier dont chaque recoin était éclairé par la lumière du soleil. Mes yeux partaient dans tous les sens, alors que je faisais de mon mieux pour graver chaque parcelle de cet endroit magique dans ma mémoire. Je peinais encore à croire que j'avais survécu assez longtemps pour voir l'arrivée de ce nouveau lever de soleil.

Médina avait été emprisonnée et les Shadow Faes l'interrogeraient quotidiennement pour lui extraire des informations. Quelque part, je me sentais coupable de ce qui lui arrivait, mais le sort en avait décidé ainsi. C'était elle ou moi. La Cour n'avait pas la place de nous héberger toutes les deux et devait payer pour son crime.

Parfois, je pensais entendre ses cris et lamentations dans mes rêves, mais je savais que ce n'étaient que des illusions créées par ma propre imagination. Du moins, je l'espérais.

L'épée dorée que j'avais récupérée au cours de mon séjour ici m'accompagnait partout à présent. Elle était suspendue à ma ceinture et je l'exposais fièrement en paradant partout avec jusqu'à ce que je parvienne à la remettre aux Summer Faes.

— Héléna !

La voix de Govac attira aussitôt mon attention. Je me retournai lentement, tout en fronçant les sourcils. Il avait l'air paniqué. Je ne l'avais encore jamais vu dans cet état.

— Govac ?

Je lui indiquai de ralentir, chose qu'il fit de lui-même avant de m'atteindre. Le jeune consul me rejoignit en un rien de temps.

— Ils interrogeaient Médina... elle était sur le point de parler !

Il reprenait son souffle et je restai immobile, interloquée par cette si soudaine apparition.

— Elle a perdu la raison et a commencé à se comporter comme un animal enragé. Elle s'est frappé la tête contre le mur de sa geôle jusqu'à en perdre connaissance... me murmura-t-il en me prenant par les mains.

Cette annonce me retourna l'estomac et je retins un haut-le-cœur. Comment la jeune femme distinguée que je connaissais avait-elle pu faire ça ? Ce n'était pas son genre !

— Tu crois que...

Ma voix était faible et tremblante. L'idée qu'elle pourrait être décédée me terrifiait. Contrairement aux Shadow Faes qui étaient habitués à côtoyer la mort, je n'en étais pas une adepte.

— Kayla la soigne, elle devrait récupérer bientôt.

Je soupirai en laissant mes muscles se détendre. Peut-être qu'elle irait mieux en se réveillant.

— Mais elle a dit quelque chose avant d'être prise dans son élan de folie.

Il inspira profondément et je ne pouvais pas m'empêcher d'être suspendue à ses lèvres.

— Elle a parlé de ta mère et de la Mer des Reflets.

 

***

 

Je venais de quitter Héléna après l'avoir raccompagnée à sa chambre. Elle était plus résistante que je l'avais anticipé et n'avait pas versé la moindre larme lors de l'annonce de l'état psychologique de Médina. La nouvelle concernant sa mère l'avait surprise, mais elle avait caché ses émotions.

Pas mal pour une humaine, pensai-je avec un sourire en coin.

Une ombre fit son apparition à côté de moi et prit peu à peu la forme d'un Fae que je connaissais mieux que tout.

— Bonjour, père.

Un sourire amusé naquit sur le visage pâle de mon géniteur.

— Bonjour, Gladolius.

Sa longue chevelure dorée tomba sur ses épaules larges et son regard d'un bleu cristallin scintillait sous la lumière des bougies qui brûlaient dans ma chambre.

— L'affaire Médina a été réglée. Elle ne représente plus aucun danger pour la suite des opérations, lui assurai-je en croisant les bras.

Il paraissait être satisfait de ma réponse.

— Bien, elle devenait trop imprévisible. Avec l'humaine dans notre poche, le plan pourra enfin prendre forme. C'était une bonne idée de fouiller dans son esprit pour brouiller les pistes.

Même si Héléna avait refusé de me laisser entrer dans sa tête, j'y étais tout de même parvenu. Ce n'était pas quelque chose dont j'étais fier, mais ç'avait été nécessaire.

Mes yeux scrutèrent la porte du passage secret qui menait au jardin des lotus. L'Empereur n'en connaissait pas l'existence, seule l'alliance du cercle pouvait la fréquenter.

— Je lui ai sauvé la vie, elle ne doutera pas de moi de sitôt, rassurai-je mon interlocuteur.

— Fais attention, elle est plus maligne qu'elle en a l'air. Et puis, nous avons de la concurrence.

C'était vrai. Nous n'étions pas les seuls à convoiter le potentiel de cette vulgaire humaine. Des adversaires nous attendaient au tournant.

Je m'étais rendu compte de son utilité seulement lorsqu'elle avait entendu des voix se manifester dans son esprit, lors de la soirée organisée en son honneur. Elles lui avaient chuchoté des mots dans le langage des Summer Faes et j'avais aussitôt compris qu'elle était liée à ce peuple.

— Ne t'inquiète pas, père. Movia ne peut rien contre nous.

Il hocha la tête, avant de disparaître dans le vide. Nous avions besoin de Héléna pour accomplir notre mission et je devais la garder auprès de moi pour mettre toutes les chances de notre côté.

Chapitre 1

 

Appuyée contre le rebord de la fenêtre, je contemplais la forêt des Shadow Faes en inspirant de grandes goulées d'air frais. Il y avait peu de ça, j'avais cru ne plus jamais pouvoir m'imprégner de cette ambiance paisible. Heureusement, mon sort n'avait pas été celui que beaucoup escomptaient.

Depuis le palais, je parvenais à voir le lever du soleil qui jetait ses rayons partout autour de moi. Les teintes de rose, d'orange et de rouge m'apaisaient, même si elles me faisaient penser à la palette de couleurs de la chambre de Médina. Je peinais encore à croire que cette dernière ait été capable de tuer Tovan. J'aurais tant aimé l'interroger, mais on me l’avait interdit jusque-là sous prétexte qu'elle était encore trop faible d'esprit. J'étais déjà heureuse qu'elle soit sortie saine et sauve de sa crise de folie.

Ainsi, je pourrais l'interroger à mon tour dans le but d'apprendre la vérité concernant ses actions et son crime. Rien que de penser au fait qu'elle se soit infligé des blessures en se tapant la tête contre un mur me donnait des frissons. Elle était la dernière personne que j'avais cru capable d'une chose pareille ! Elle était si délicate et stratège !

J'étais consciente que la Cour des Shadow Faes abritait encore des traîtres et des ennemis, notamment un second individu portant une cape noire, mais étais préoccupée par d'autres affaires. Médina avait évoqué la mer des reflets et ma mère, mais Govac n'avait pas su m'en dire plus. Movia, quant à elle, m'avait demandé de lui ramener ce qui était sien.

Je posai ma main sur le pommeau de l'épée dorée attachée à ma ceinture et fus certaine que c'était cet objet-là qu'elle avait désigné avec ses paroles. La lui faire parvenir ne serait pas chose aisée, mais me permettrait de me rendre sur les îles de la mer des reflets au milieu desquelles ma mère avait disparu. Depuis le temps que je rêvais de lui rendre hommage là-bas !

Cependant, pour même pouvoir mettre les pieds sur leurs plages de sable blanc, j'allais devoir affronter des dangers auxquels je ne pourrais pas survivre seule.

J'observai les quelques employés qui s'affairaient dehors à cette heure matinale. Ils se bousculaient avec une étrange euphorie, habillés de tissus colorés, et se dirigeaient vers la cuisine avec des vivres plein les bras. Quelques-uns d'entre eux éclataient de rire en se racontant les derniers ragots.

Ils étaient de si bonne humeur que je ne pus m'empêcher de sourire. J'avais toujours été trop occupée avec mon enquête au sujet de l'assassinat de Tovan pour pouvoir remarquer l'atmosphère agréable et légère qui régnait au palais des Shadow Faes.

L'espace d'un instant, j'eus l'impression de retrouver les matins à Paché. Même si mon village natal me manquait, je savais que je n'y retournerais jamais. J'y avais grandi, mais n'y avais jamais été à ma place. Ma mère m'avait toujours dit que tout arrivait pour une bonne raison, peut-être bien que c'était vrai.

J'expirai longuement, avant de me détourner des employés pour partir retrouver mon lit. Puisque ma chambre ne possédait pas de fenêtres, j'étais obligée de m'aventurer dans les couloirs afin de pouvoir observer le paysage. Ce n'était pas l'idéal, mais je m'y habituerais.

En arrivant à l'entrée de mon espace personnel, mes yeux gris scrutèrent sa porte en métal. Je n’avais aucune envie d'entrer dans cette pièce coupée de la lumière du soleil, mais c'était la seule dans laquelle je serais seule, à l'abri des regards curieux des Faes.

On m'avait affirmé que ceci était ma maison maintenant, que j'y serais traitée comme les autres Shadow Faes. J'avais le droit de me balader librement dans les couloirs, dans les écuries, dans la forêt, mais ça ne me rassurait pas pour autant.

Libre. On m'avait assuré que j'étais libre ! Pourtant, je n'avais pas pour autant l'impression de l'être. Bien que l'Empereur ait décidé de m'acquitter du crime dont j'avais été accusée, je savais qu'il tenait toujours mon destin entre ses mains.

Je décidai de poursuivre mon chemin à travers les corridors du palais faits de pierre et d'acier blanc. Les oiseaux chantaient au-dehors et les rires des employés disparurent au fur et à mesure que je m'éloignais d'eux.

De temps à autre, je voyais des ombres se mouvoir dans le couloir, mais découvris aussitôt qu'elles furent créées par les feuillages des arbres de la forêt. Je n'avais plus revu les formes humanoïdes depuis l'arrestation de Médina, mais ne parvenais pas à oublier la silhouette de l'homme que j'avais aperçu dans la grotte. Avec sa carrure large et ses mouvements brusques, j'étais certaine qu'il ne pouvait pas être un Shadow Fae. Ces derniers étaient plus élégants et souples. Ça ne collait pas.

Le visage de Médina me revint en tête. Je n'avais aucune idée de la raison pour laquelle elle avait décidé de tuer le premier consul de son propre peuple, mais j'espérais qu'elle m'en dise plus lorsque je lui rendrais visite. Encore fallait-il que je réussisse à l'en convaincre. L'image d'elle qui se tapait la tête contre la pierre de sa prison avait hanté mes rêves tout au long de la semaine passée et je priais pour qu'elle ne recommence pas, pour qu'on ne la fasse pas taire.

Il était évident que certains partis ne voulaient pas qu'elle divulgue leurs secrets.

— Héléna ! m'interpella soudain une voix masculine familière.

Je me retournai sur-le-champ en adressant un grand sourire au nouveau venu. Govac me rattrapa en courant et je ne pouvais pas m'empêcher d'être émerveillée par sa beauté. Il avait attaché ses cheveux noirs en un chignon haut, ce qui dévoila ses traits bien définis et attrayants.

— Où comptes-tu aller si tôt ? m'interrogea-t-il en se penchant en ma direction.

— C'est un secret, le taquinai-je.

Il plissa les yeux avec un sourire en coin aux lèvres.

— Tu n'as plus besoin de ma protection, maintenant ?

Je lui mis un coup dans l'épaule en secouant la tête.

— C'est mignon, tu as beaucoup grandi depuis ton arrivée, poursuivit-il.

Il fit semblant d'être ému et je ne pouvais pas m'empêcher de grincer des dents en l'entendant se moquer de moi de la sorte. Il était attirant, mais qu'est-ce qu'il pouvait être agaçant !

— Je vais visiter Médina, lui avouai-je pour changer de sujet.

Son expression faciale passa aussitôt de joueuse à sérieuse. Mon annonce ne paraissait pas le ravir plus que ça.

— Ils laissent entrer des visiteurs dans sa cellule ? me questionna-t-il, alors qu'il connaissait déjà la réponse.

Il paraissait être étonné par mon ambition d'aller voir celle qui avait failli me faire emprisonner. J'aurais dû la détester, mais j'avais des choses bien plus importantes en tête : je devais découvrir les identités de ses acolytes pour pouvoir éviter d'autres meurtres et pour pouvoir me protéger au passage. C'était une question de survie !

— Avec toi à mes côtés, les gardes n'oseront pas nous refuser l'accès à la prison.

J'avais prévu de lui demander de m'y accompagner, mais il était apparu au bon moment, pile avant que j'aie à le chercher moi-même.

— Tu as tout prévu, n'est-ce pas ? me taquina-t-il avec le regard brillant.

Je haussai les épaules en souriant à pleines dents.

— Peut-être bien.

Chapitre 2

 

— On souhaite voir la détenue, articula Govac en croisant les bras.

Les gardes le contemplèrent avec attention, mesurant silencieusement le pour et le contre. Théoriquement, ils ne pouvaient pas refuser l'accès des geôles à leur consul, mais, à en voir leurs mines pensives, je me préparais déjà à être recalée.

Ils étaient habillés d'un uniforme blanc recouvert de losanges noirs et du blason des Shadow Faes. Ce n'était pas la même tenue que celle des hommes qui étaient venus me chercher pour m'escorter à la salle du trône où avait eu lieu mon jugement. Je me demandais en combien d'unités la garde était divisée et à quoi chacune servait. Adeline pourrait à coup sûr m'aider à le comprendre.

Les deux inconnus n'avaient rien d'effrayant, au contraire. Leur politesse leur donnait un air plus civilisé.

— Nous vous accompagnerons, monsieur le consul, répondit l'un d'entre eux après un long silence.

Il était petit et ses bras musclés tassaient encore plus sa silhouette. Lorsqu'il nous fit signe de le précéder, je n'hésitai pas une seule seconde, avant de m'engouffrer dans les escaliers obscurs qui menaient à la prison du palais. Comme c'était le cas pour le jardin des lotus, ces derniers paraissaient s'enfoncer loin sous la surface du continent.

Les bras croisés, je me forçai à graver le moindre recoin de l'endroit qu'on traversa dans ma mémoire. C'était un lieu sombre qui sentait l'humidité et qui m’évoquait le passage secret que j'avais découvert dans le palais. Heureusement, la présence de mes escortes me rappelait qu'il était très peu probable que je sois attaquée ici. Du quatre contre un serait trop inéquitable.

Les murs rugueux, entièrement constitués de pierre, avaient quelque chose de fascinant. Avec ses pores béants, sa matière avait l’air presque être vivante. C'était loin de ce à quoi Médina était habituée et, malgré ce qu'elle avait fait, j'avais de la peine pour elle.

Certains morceaux des parois semblaient être pointus, comme pour avertir les passants de faire attention à ne pas les toucher. Le bruit de pas réguliers des gardes fut amplifié par des échos et leur silence me donna la chair de poule. Personne n'avait prononcé le moindre mot depuis qu'on s'était engagé dans les escaliers qui paraissaient descendre bien trop loin sous la terre.

Après avoir franchi un grand nombre de marches, on arriva enfin à une porte en acier. Un frisson parcourut mon échine, alors que j'inspirai pour me calmer. Ce que j'étais sur le point de voir n'allait pas me plaire et je le savais. Rien d'agréable ne pouvait se dérouler à l'intérieur d'une prison.

— Vous avez une dizaine de minutes, nous annonça un des gardes, avant de nous ouvrir le passage menant aux cellules des détenus.

La première chose qui me marqua en entrant était l'odeur de sang et d'urine. Une grimace se dessina sur mon visage, mais je poursuivis mon chemin sans faire remarquer mon inconfort à Govac.

Soudain, mon cœur fit un bond dans ma poitrine lorsque j'entendis quelqu'un l'interpeller.

— Qui va là? articula soigneusement une voix féminine.

J'accélérai le pas pour atteindre au plus vite les barreaux qui tenaient Médina prisonnière. Cette dernière écarquilla les yeux, surprise de me voir ici. Ses lèvres asséchées peinaient à s'ouvrir et son regard était totalement éteint. Elle paraissait halluciner, étendant son bras en direction du vide qui s'étendait devant elle.

— Médina, chuchotai-je dans l'espoir de ne pas lui faire peur.

— Ça arrive, ils arrivent. Les ombres cherchent le trésor de la clé. Ombres.

Les mots restèrent suspendus dans l'air, créant des sueurs froides dans mon organisme. L'odeur de pourriture commença à infester mes poumons et je tentais au mieux de me retenir de vomir.

«Ombres». Ce n'était pas la première fois que quelqu'un prononçait ces paroles tel mauvais présage en ma présence.

— Médina. C'est Héléna, je suis là pour te parler, répétai-je un peu plus fort.

La concernée sortit de sa transe l'espace de quelques secondes. Elle sursauta, inspira et rampa jusqu'aux barreaux en me contemplant d'un regard suppliant.

— Fais attention, Héléna, ne te fais pas avoir comme moi, murmura-t-elle en tremblant.

Elle était visiblement vidée de toutes ses forces et je sentais mon cœur se serrer de plus en plus. Je n'avais jamais souhaité que ceci lui arrive. Les conditions de son emprisonnement étaient affreuses!

Elle tendit son bras en ma direction et me sourit légèrement. Toutefois, lorsque nos mains entrèrent en contact, elle émit un cri à glacer le sang.

— Non! Pas toi!

Elle gesticula dans tous les sens et la panique se lisait sur son visage.

— Non! Non!

Sa voix ressemblait au cri d'un corbeau, tant il était haut perché et douloureux à entendre. La détenue recula brusquement, avant de se mettre à pleurer. Elle était envahie de spasmes et je tentais de la calmer en lui chuchotant des mots rassurants.

— Médina, c'est moi. Tu ne cours aucun danger.

— Sors de ma tête! continua-t-elle en éclatant en sanglots.

Ses ongles se plantèrent dans son crâne, avant de tracer des blessures rougeâtres le long de ses joues. Son beau visage était déformé par la terreur et j'avais à plusieurs reprises l'impression qu'elle était sur le point de s'étouffer. Horrifiée, je reconnus aussitôt cette situation et me rappelai des illusions qui m'avaient tourmentée dans la grotte et le passage secret. J'étais presque certaine qu'elle vivait le même supplice que moi à l'époque.

— Médina, arrête!

Je me collai contre les barreaux métalliques, tout en tendant mes bras en direction de la Fae paniquée. Je ne pouvais pas la laisser dans cet état!

— Je me tiens réellement devant toi, la rassurai-je doucement.

— C'est ce qu'ils disent à chaque fois.

Elle me jeta un regard désespéré et je vis qu'elle retrouva son état normal l'espace de quelques secondes.

— Ils viennent, ils nous dupent et ils disparaissent. Ils sont partout, ils nous observent.

— Qui? l'interrogeai-je.

— Les ombres.

Une larme coula sur sa joue, alors que les yeux de la courtisane firent transparaître sa douleur et sa fatigue. Elle n'allait plus tenir très longtemps. J'éprouvais tant de peine pour elle...

Je savais de quelles ombres elle voulait me parler. Elles s'étaient introduites dans mon esprit pour effacer des morceaux de ma mémoire. Était-elle en train de vivre la même chose? Était-ce pour ça qu'elle voyait des fantômes et qu'elle criait de désespoir? Elle me rappelait tant moi lorsque j'avais vu les formes humanoïdes se balader dans les couloirs et dans ma chambre.

— Je m'excuse, Héléna. Ce n'était pas contre toi, m'avoua-t-elle en me sortant de mes pensées.

Son corps épuisé se détendit, la faisant ressembler à un chiffon. Un instant de lucidité la ramena à la réalité.

— Être seule me rend folle.

Ses paroles étaient douces et agrémentées d'un petit rire amer. Son état pitoyable me brisa le cœur. Encore jamais n’avais-je ressenti autant de peine pour quelqu'un.

— Ne t'inquiète pas, tout va bien se passer, lui assurai-je.

Elle savait aussi bien que moi que c'était un mensonge, mais me laissa tout de même attraper sa main.

— Si seulement ça pouvait être vrai.

La détenue m'adressa un sourire faible en prononçant ces mots si défaitistes. J'approchai mon visage des barreaux qui me faisaient face jusqu'à ce que mon front s'y trouve collé.

— Ce n'est qu'un mensonge. Les ombres ne sont pas ce que tu les crois être, murmurai-je pour éviter que quiconque ne m'entende.

J'espérais que même Govac ne comprenne pas ce que je venais de dire. Les yeux de Médina se mirent à briller, alors qu'elle lâcha peu à peu ma main. Mes mots ne la choquèrent pas, elle paraissait même être plutôt satisfaite que je les lui récite, comme si c'était un mot de passe quelconque.

«Ne te fais pas avoir comme moi». Est-ce que quelqu'un lui avait tendu un piège ou n'était-ce que du bluff?

— Courage, Héléna.

La Fae laissa échapper un petit rire, avant de détourner le regard. Elle n'avait plus rien à me dire, la discussion était close, mais le fait qu'elle me souhaite du courage me mit mal à l'aise. Ça sonnait comme une mise en garde.

— Merci. À toi aussi.

Je me levai, avant de me retourner vers Govac et de lui faire signe que j'avais terminé. Il se mit aussitôt en route pour la sortie des geôles et je le suivis en réfléchissant.

Quelqu'un s'introduisait sûrement dans l'esprit de Médina pour faire croire qu'elle avait perdu la tête. Était-ce la même personne que celle qui avait déformé mon esprit à moi? Si oui, ça voulait dire que Médina n'était pas coupable et qu'une menace se baladait encore librement dans le palais. Je soupirai en me rendant compte que tout ne faisait que commencer.

Chapitre 3

 

Encadrée par les deux gardes, je pressai le pas. Ce que je venais de voir tourmentait toujours mon esprit. Médina souffrait, elle perdait peu à peu son bon sens et ce qu'on lui faisait subir était inhumain. J'avais ressenti sa peur, sa douleur, tout transparaissait dans ses paroles et son regard. Je me sentais coupable de son sort, même s'il n'y avait pas lieu de l'être, puisqu'elle payait pour le crime qu'elle avait commis.

Toutefois, l’idée que quelqu'un s'introduise dans son esprit me donnait des frissons. Personne n'avait le droit de fouiller dans les souvenirs de quiconque. J'avais vécu l'expérience en question et j’avais eu un mal fou à tout remettre dans le bon ordre. Si seulement je pouvais faire arrêter le coupable qui possédait cette magie destructrice!

Govac, lui, vaquait à ses occupations de consul impérial et n'avait pas prononcé le moindre mot en sortant des geôles. Qu'est-ce qu'il pouvait bien penser de la scène à laquelle nous venions assister? L'avait-elle choqué au point de le rendre muet?

— Madame Héléna, m'interpella soudain un homme qui arrivait vers moi en courant.

Il s'immobilisa devant les gardes qui m'accompagnaient en faisant de son mieux pour cacher son épuisement. Je lui souris et il s'empressa de poursuivre.

— La reine des nymphes demande à vous voir dans ses chambres.

— Ophelia? lui demandai-je en me réjouissant de la nouvelle.

Il hocha la tête et je souris en le rejoignant. Les deux gardes qui m'escortaient depuis la prison paraissaient être soulagés de pouvoir enfin retourner à leurs postes. Je ne comprenais pas pourquoi ils avaient tenu à me reconduire, mais fus heureuse de pouvoir me débarrasser d'eux.

— Je vous suis, affirmai-je au Shadow Fae qui était venu m'avertir de l’existence de mon rendez-vous impromptu.

Qu'est-ce que j'avais hâte qu'Ophelia me donne enfin des réponses!

 

***

 

Une grande porte en acier se présentait à moi. De l'autre côté de cette dernière, je découvris une chambre impressionnante qui aurait facilement pu être comparée à une petite salle de bal. Le plafond était presque aussi haut que celui de la salle du trône et un chandelier en cristal, gigantesque, était suspendu à sa voûte. Le sol en pierre grise était recouvert de tapis verts et d'immenses baies vitrées donnaient sur la forêt avoisinant le palais.

C'était si lumineux et majestueux que j'avais du mal à croire qu'on se trouvait encore dans le palais monotone des Shadow Faes. Ophelia était une reine et elle était traitée comme telle. Même les consuls impériaux n'avaient pas le droit à des fenêtres dans leur espace personnel!

— Bonjour, ma chère Héléna.

La souveraine des nymphes s'adressa à moi comme si on était proches, les bras grands ouverts et prêts à m'accueillir. Je ne savais pas comment réagir et lui rendis son enthousiasme.

— Bonjour, altesse, répondis-je en inclinant légèrement la tête en signe de respect.

Je n'avais aucune idée pour laquelle elle m'avait convoquée ici, mais je tentais de ne pas laisser transparaître ma nervosité.

— Tu dois te demander pourquoi je t'ai fait appeler.

Je hochai la tête en espérant qu'elle ne parvienne pas à lire dans mes pensées comme le pouvaient les Carver Faes. D'après Govac, seul le peuple de son père en était capable, mais je me méfiais de tout le monde. J'y étais obligée.

Encore plus après avoir entendu ce qu'Ophelia elle-même m'ait confié dans la dimension cachée de son peuple. N'importe qui pouvait être l'ennemi, que ce soit un Fae, un humain ou une nymphe. Ce raisonnement l'incluait.

— Tu voulais des réponses, tu en auras, poursuivit la reine sans attendre.

J'étais soudain très intéressée par ce qu'elle avait à me dire. Je m'étais attendue à avoir à me battre un peu plus avant qu'elle me confie quoi que ce soit.

Tu l'as déjà assez fait depuis ton arrivée ici, songeai-je en me souvenant que j'avais failli être condamnée à mort pour un crime que je n'avais pas commis.

La tendresse qui transparaissait dans le regard de la nymphe me faisait chaud au cœur. Par instants, elle me rappelait ma mère. Parfois même un peu trop, ça en devenait inconfortable.

— Avant de passer aux choses sérieuses, je voulais te remercier de l'excellent travail que tu as fait concernant la résolution du meurtre de Tovan. Je savais dès le début que tu en étais capable.

Les yeux de la reine brillaient de fierté et elle souriait tant que je me demandais si ses joues ne lui faisaient pas mal. Elle y ajouta un clin d'œil complice, mais je faisais de mon mieux pour ne pas me réjouir trop tôt. Après tout, elle ne m'avait pas encore offert ce qu'elle venait de me promettre et j'avais peur d'être déçue par ses révélations. Ce ne serait pas la première fois.

— Je n'ai fait que mon devoir, rétorquai-je chaleureusement.

Ophelia s'approcha de moi et sa longue robe verte vaguait autour de ses jambes courtes. Elle avait repris sa forme humaine pour pouvoir mieux se fondre dans la masse de Shadow Faes du palais.

— Tu dois sûrement avoir compris que tout ne fait que commencer.

Malheureusement, pensai-je.

— Combien sais-tu de l’ennemi? l'interrogeai-je aussitôt.

La souveraine expira longuement, avant de secouer la tête. J'espérais qu'elle m'éclaire au sujet de ma rencontre avec Movia, ainsi que de l'histoire de clé dont cette dernière m'avait parlé.

— Pas tant que ça, mais j'espère que l'information que j'ai su récolter au cours de mon séjour ici te sera utile.

J'étais déçue. Toutefois, je cachai mes émotions en lui souriant à pleines dents. La dernière chose que je souhaitais était de la voir se braquer.

— Assieds-toi, ma chère. Ça risque d'être long.

J'obéis et m'installai sur l’une des trois chaises disposées autour d'une table en marbre que je devinai provenir de la dimension des nymphes. La matière blanche traversée de veines noires était trop lumineuse, trop pure.

Des petits gâteaux de toutes formes et de tous parfums avaient été posés sur un récipient en acier et des tasses de thé fumantes nous attendaient. J'avais hâte de pouvoir m'en délecter, mais n'osai pas en prendre la moindre gorgée par peur de me brûler ou d'être impolie.

 Ou d’être empoisonnée, songeai-je en sentant mon estomac se nouer.

Je me contentai donc de contempler les dessins élégants qui avaient été peints sur les tasses à l'aide d'encre bleue, avant de me concentrer de nouveau sur Ophelia. Allais-je enfin avoir des réponses? Un minimum serait le bienvenu.

La reine des nymphes ne tarda pas à se racler la gorge, avant de commencer son récit.

— Tu n'es pas la première humaine à être recueillie par les Shadow Faes.

Elle observa le paysage à travers les baies vitrées et croisa les bras.

— Comment ça?

Mon interlocutrice inspira et sa voix douce devint tout à coup froide.

— Elles arrivent un beau matin, mais s'éclipsent peu de temps après. J'ignore si elles s'enfuient ou s'il y a une autre raison derrière leurs disparitions. Souvent, elles marmonnent des mots inquiétants le soir, le regard hanté, avant qu'elles ne s'évaporent sans laisser la moindre trace derrière elles.

Elle se gratta le menton et secoua la tête. L'incompréhension et le dégoût brillaient au plus profond de son regard cristallin.

— En venant ici, j'ai été étonnée par la capacité des courtisans et des consuls à faire abstraction de ce phénomène étrange. J'aurais aimé pouvoir aider ces pauvres filles humaines.

Sa voix était amère, cinglante et remplie de regrets. Elle se sentait coupable.

— Vous pensez qu'il leur est arrivé quelque chose de malencontreux?

Je sentis mon cœur se serrer. Je connaissais déjà la réponse à ma question absurde.

— Je ne le pense pas, j'en suis certaine. Personne ne quitte ce lieu sans en payer le prix. Si seulement elles avaient eu la chance de s’éclipser des terres des Shadow Faes, conclut-elle en se retournant vers moi.

Sa nature douce la poussait à se soucier même de ceux qui n'étaient pas à sa charge et je l'admirais pour ça.

— Est-ce que Médina a un rôle dans cette histoire