Tu vas où ? Vers en vrac - Jennifer Desserteau - E-Book

Tu vas où ? Vers en vrac E-Book

Jennifer Desserteau

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Beschreibung

Porté par le tumulte des émotions humaines, ce recueil rassemble des vers libres, vivants, parfois bruts, toujours sincères. Entre introspection et engagement, chaque texte dévoile une part d’intime tout en tendant vers l’universel. L’écriture y devient exutoire, remède aux douleurs et mémoire des instants. Un voyage poétique où les mots allègent les maux, pour dire ce qui a été, ce qui est, et ce qui demeure.

À PROPOS DE L'AUTRICE 

Jennifer Desserteau écrit depuis le lycée, entre poèmes et chansons. Animatrice puis directrice d’accueil de loisirs, elle crée des pièces de théâtre et un atelier d’écriture pour les jeunes qu’elle accompagne. Aujourd’hui directrice d’une association organisant des séjours adaptés, elle continue d’écrire, portée par le quotidien, les rencontres et l’intensité simple de la vie.

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Seitenzahl: 195

Veröffentlichungsjahr: 2025

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Couverture

Titre

Jennifer Desserteau

Tu vas où ?

Vers en vrac

Recueil

© Lys Bleu Éditions – Jennifer Desserteau

ISBN : 979-10-422-7479-5

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

Ils m’ont dit tes poèmes

C’est comme un texte de slam

Les mots que tu sèmes

Ils viennent nous toucher l’âme

Ils m’ont dit fais un livre

On ira même l’acheter

Je leur ai dit que pour vivre

C’est bien beau de rêver

Et puis j’ai réfléchi,

Et puis, j’ai osé.

Et je leur ai dit,

Ça y est, je l’ai fait !

Qu’importe ce que deviendront

Mes centaines de vers,

Je sais qu’ils trouveront

Quelques lecteurs hors pair.

#essayer

Si j’aime poser les mots

Sur les joies ou sur les maux

C’est pour jongler avec les mots

Et que je vais t’en toucher deux mots.

Si tu mets le nez dans un dico

Tu y découvriras des mots

Y en a des plus ou moins beaux

Je sais, je ne mâche pas mes mots !

Y a pas que des émoticônes

Planqués dans ton téléphone

Sûrement quelques homophones

Les mots ne sont pas tous monotones.

Il suffit de te motiver,

Prends ta feuille de papier,

Ton stylo risque de kiffer

Les mots ne sont pas tous à mâcher.

Et si tu ne sais pas quoi écrire

Y a plein de sujets qui inspirent

Quelques jeux de mots ne seront pas pires

Que les snaps de ton avenir !

#desmotspourmesados

J’ai feuilleté bien des livres

J’ai appris bien des mots

Et certains me poursuivent

Et pas à demi-mot.

J’ai ressenti alors

Le besoin d’écrire,

Mon encre s’étend encore

Et ne cesse de courir.

Ce ne sont pas des arabesques,

Tout au plus quelques vers

Parfois un peu burlesques

Ou d’autres, plus sincères.

Les mots s’envolent parfois

De ma tête au papier

En passant par mes doigts

Qui doivent les rédiger.

Seuls les amoureux des mots

Peuvent alors comprendre

Le merveilleux cadeau

Que les mots sous-entendent.

C’est une grande liberté,

C’est un acte exutoire.

Écrire, c’est s’écarter

Des sentiers les plus noirs.

Et si quelques-uns de mes mots

Touchent certains profondément,

Je continuerai ce credo

Tant qu’il est encore temps.

#tantqu’ilestencoretemps

Je me suis réveillée, j’ai dû faire un cauchemar,

Je crois que j’ai rêvé d’un monde sans espoir,

D’une planète en danger criant au désespoir,

D’humains sans pitié pour des voisins trop noirs.

J’ai vu des religions être motif de haine,

Des familles rejetées d’un pays qu’elles aiment

Pour avoir défendu des idées qui leur appartiennent,

Des enfants porteurs de bombes, les yeux remplis de peine.

J’ai vu des actes inhumains et sans explications,

Des tout-puissants pratiquer la déforestation,

Des races d’animaux en pleine extinction,

Des gens morts de faim au pied de nos maisons.

J’ai vu l’univers, un jour, se révolter :

Réchauffement climatique, océans pollués,

J’ai vu les éléments, tous se déchaîner

Prouvant simplement un respect au rabais.

J’ai vu des hommes prôner les valeurs de l’égoïsme

Dans un monde bercé par l’individualisme

Où une certaine politique fondée sur le racisme

Compte de plus en plus d’adeptes du fascisme.

Je me suis réveillée, j’ai dû faire un cauchemar,

J’ai allumé la télé, tout le monde criait « Neymar ».

S’il ne faut qu’un ballon pour dresser un étendard,

Je veux bien investir et quitter mon plumard.

C’est quand même bien la preuve qu’on peut tous s’élever,

Qu’on ne peut faire qu’un et ensemble s’allier.

Notre belle énergie il faudrait juste l’utiliser

À déplacer les montagnes sans aucun préjugé.

Quand je m’endormirai, je rêverai du meilleur,

Au mot solidarité, au sens des valeurs,

Je sécherai les larmes de citoyens en pleurs,

Il nous restera ça, une main sur le cœur.

#unemainsurlecoeur

Le voilà qui arrive avec sa bande de copains,

Il est grand, il est fort, il fait le malin.

Moi je suis petit, je ne parle pas trop,

Je suis une cible facile pour ce genre d’ados.

Je ne sais même plus comment ça a commencé,

Une bousculade, quelques mots dans la cour de récré,

Et ça a continué presque tous les jours

J’en ai mal au bide de venir en cours.

J’ai envie de pleurer dès que je l’aperçois

Quand je le vois arriver en riant jusqu’à moi.

Ils vont m’attraper et sûrement me faire tomber

Et me dire tout ce qui pourrait m’humilier.

Y a aussi un plus petit que moi qui souffre de ça

Depuis l’école primaire. Il ne se demande plus pourquoi

Pour lui c’est rentré dans une routine quotidienne

Il vit en boucle toujours les mêmes scènes.

J’ai envie de crier et de lui mettre un coup de poing,

De le mettre au sol devant tous ses copains

Mais je me sens nul et faible à la fois

Je n’ai juste pas leur courage, je crois.

Un copain m’a dit qu’ils ne sont pas courageux,

Plutôt lâches de s’en prendre à plus petit qu’eux

Mais tout le monde regarde et personne ne fait rien

Ils ont sans doute peur d’être les prochains.

Un jour j’en ai parlé, mais ça a été pire

C’était plusieurs fois par jour au milieu de tous leurs rires.

Il y a toute une propagande autour du harcèlement

Malgré tout ça je subis et je ne suis pas le seul enfant.

On apprend tout petit qu’il y a des faibles et des forts

Que les costauds gagnent quand d’autres supportent encore

Quelle vie nous attend quand on se sent si nul ?

Je ne veux pas y penser et rester dans ma bulle.

#violencesscolaires

J’ai mal maman,

Ça brûle tellement dedans.

J’ai mal maman,

Je voudrais mourir maintenant.

Tu ne comprendrais pas maman

Si je devais t’expliquer,

Tu ne sais pas vraiment maman

Ce que c’est que d’aimer.

Je l’avais dans la peau maman,

Dans ma tête et dans mon cœur.

J’ai même plus les mots maman

Tellement j’ai mal, tellement je pleure.

Il m’a quitté maman

J’imagine pas ma vie sans lui,

Il m’a laissée maman

Il ne m’aime plus, c’est ce qu’il a dit.

J’ai quinze ans maman

Comment je dois continuer ?

Je ne suis qu’une ado maman

Et j’ai l’impression de crever.

C’est ça l’amour maman,

Cette douleur à l’intérieur ?

Je ne veux plus aimer maman

De toute façon je n’ai plus de cœur.

Je sais bien maman

Que je ne suis pas toujours sympa

Mais tu sais maman

Là je veux juste être dans tes bras.

Serre-moi maman,

Comme pour prendre ma douleur

J’ai mal maman,

Les maux d’amour, ça brise les cœurs.

#mauxdamour

S’il vous plaît, pardonnez-moi

Maman, Papa, vous tous autour de moi.

J’ai fait une bêtise, juste une fois

Je vais le payer toute ma vie, je crois.

Avec les copains, on voulait taper le ballon

Aller sur le terrain et se gaver de bonbons

Ça devait durer juste une petite heure

En passant la porte, j’avais un peu peur

Mais la surveillante n’y a vu que du feu,

On était quarante à passer au milieu.

J’ai montré mon carnet, j’étais autorisé

Elle n’a pas remarqué, je m’étais bien appliqué.

La signature c’était pas celle de mes parents,

Pas une rature, c’était falsifié pourtant !

J’ai passé la porte, je jubilais au fond,

Et avec mes potes c’était comme sortir de prison

La grille du collège est bien derrière moi,

Une heure sur une chaise, c’était trop déjà !

C’est un peu l’aventure, le cœur qui s’emballe,

Alors là, je carbure, vite je me fais la malle,

J’avais peur surtout de me faire attraper,

Je regardais partout pour pas me faire chopper,

J’ai pas vu arriver le camion de livraison

Il m’a percuté, mais cette fois, c’est bon !

J’ai bien compris qu’imiter une signature

C’est pas bien joli, loin d’être une aventure,

J’ai bien compris papa et maman,

Je suis bien puni dans mon fauteuil roulant.

#labêtise

J’en suis à mon troisième établissement

Je crois qu’ils ne comprennent pas vraiment.

Il y en a qui veulent juste m’aider

Et d’autres qui m’ont catalogué.

L’école, c’est pas fait pour moi.

Trop long, trop tout je crois !

Les profs me virent toujours,

Je préfère ça que d’être en cours.

Ce système n’est pas fait pour moi

Et ils s’obstinent tous, je crois,

Comme s’il fallait me sauver

Mais il y a longtemps que j’ai décroché.

Je voudrais être ailleurs

Mais là c’est ma mère qui pleure

Et me demande de me calmer

Comme si j’essayais jamais…

Il y a des trucs que je ne contrôle pas,

Je pars au quart de tour des fois.

Je fais de mon mieux pour me retenir

Et quand je ne peux plus, je préfère partir.

Ils disent que je dois apprendre à gérer

Mes émotions démesurées.

C’est dans ma tête je n’y peux rien,

Je suis né comme ça, disent les médecins.

Ils veulent tous me changer

Comme si je le faisais exprès,

J’ai des troubles du comportement,

Je prends même des médicaments.

Alors je reçois des soins,

Je fais de mon mieux en vain,

Ils ne voient pas tous mes efforts

Et ne pensent qu’à leur confort.

Et s’ils admettaient seulement

Que nous sommes différents

Ils changeraient tous leurs regards

Mais encore faut-il le vouloir…

#changerlesregards

Tu as vu cette vidéo papa

D’un orang-outan fier

De se battre tout là-bas

Contre un gros bulldozer ?

Ils détruisent leurs habitats

Des races entières en extinction

Pour un pot de Nutella

À l’huile de palme dans nos maisons.

Tu as lu cet article maman

San Cristobal et ses rivières asséchées

Une usine qui depuis quinze ans

Ne compte plus les litres d’eau pompés ?

Les habitants n’ont plus que du coca

À consommer à volonté.

S’ils ne meurent pas de soif là-bas,

C’est le diabète qui va les tuer.

As-tu entendu mon ami

L’histoire de cette baleine

Qui un jour a péri

Près des terres malaisiennes ?

Des tas d’animaux marins

Ingurgitent des sacs plastiques

Parce que des certains humains

N’y voient rien de dramatique.

Pendant qu’on massacre des animaux,

Qu’on ravage des forêts,

Qu’on écoule nos stocks d’eau,

Qu’on fait fondre nos glaciers,

Pendant qu’on parle d’écolos,

Qu’on cumule les déchets,

La planète en a plein le dos

Et voudrait juste respirer

Sans peur que ceux

Pour qui elle a tout donné

La détruisent peu à peu

Et finissent par l’assassiner !

#planèteendanger

Les regards braqués sur moi,

Je les entends, ils parlent de moi.

Je voudrais être transparent parfois,

Mais je suis noir et ça se voit.

Dans cette petite école rurale

Il n’y a que des visages pâles,

Le noir, c’est pas celui à qui on parle

Je le sais et ça fait mal.

En cours d’année sont arrivés

Deux camarades, des réfugiés.

Eux non plus ne sont pas intégrés,

Ici, les gens sont trop fermés.

Nous trois, nous sommes devenus copains

Et ensemble, on se sent bien.

On a des loisirs communs,

On joue au foot, des heures sans fin.

Quand on a fait notre exposé,

Il fallait se présenter.

Quand j’ai dit que j’étais français,

Ils se sont presque tous moqués.

Mais alors faut-il vraiment

Que je me peigne tout en blanc

Pour qu’on me voie simplement

Comme les autres enfants ?

Dans mon petit village français

Un jour, Lucien est venu jouer

« Il est daltonien », je me disais

Jusqu’à ce qu’il vienne m’expliquer :

« Quand je fais de la peinture

Je mélange toutes les couleurs

C’est bizarre, ça c’est sûr,

Mais ça fait de jolies fleurs.

Je crois que dans la vie c’est pareil,

Il faut mélanger les couleurs

Dedans on est tous faits pareil

Deux poumons, une tête, un cœur…

Et si je ferme les yeux

Et que je donne la main,

Les couleurs s’éteignent un peu,

Mais on est toujours copains. »

Lucien m’a expliqué

Depuis on ne s’est plus quittés

Et dans la cour de récré,

Maintenant on est tous mélangés.

Il y en a qui écoutent leurs parents

Qui sont racistes apparemment.

Mais pour moi, qu’on soit noir ou blanc,

Nous ne sommes que des enfants.

#quedesenfants

Me voilà dans mon QG,

Dans ma cabine, deux mètres carrés,

Un bureau, une chaise usée

Et des écrans à surveiller.

Si la nuit tous les chats sont gris

De là où je suis, je vous le dis,

Il n’y a pas que les chats qui sont gris ici,

Voilà ce qu’il se passe rue de Paris.

Y a la joggeuse tout haletante

Qui s’arrête toujours pour boire,

Y a la mamie beaucoup plus lente

Qui promène son petit chien noir,

Y a le regroupement des jeunes ados

Qui se cachent pour crapoter,

Y a le grand homme et son chapeau

Un assureur ou un banquier,

Y a cette jeune femme et son landau

Sûrement que le petit ne dort pas,

Elle salue toujours Paulo,

Son voisin qui habite en bas,

Y a le dernier baiser des amants

Qui sortent de l’hôtel d’à côté,

Et ce grand-père à l’air méchant,

Celui qui peine à marcher.

Y a tous ces gens qui passent

Sans vraiment regarder,

Parfois même ils repassent

Mais toujours sans regarder.

Il est assis là près de chez Paulo

À demander trois fois rien,

De quoi boire un café chaud

Ou acheter un morceau de pain.

Il a donné trente ans de sa vie

Pour cette usine qui a fermé,

Il est dans la rue aujourd’hui

Et tout le monde passe sans regarder.

Je le connais bien depuis le temps

Que je le vois dans mes caméras,

Il a essayé pourtant

De s’en sortir plus d’une fois.

Ma femme lui fait des petits plats

Et lui tricote des vêtements chauds

On culpabilise malgré ça

Même s’il dit que c’est déjà trop.

Si la joggeuse ou la mamie

Ou encore le grand homme au chapeau

S’arrêtaient discuter avec lui

Ou lui payer un verre au bistro,

Ils sauraient que cet homme-là

Assis par terre devant chez eux,

Mérite vraiment mieux que ça :

Des gens de passage qui ferment les yeux !

#camérasdesurveillance

Moi, je joue les caïds dans mon quartier dijonnais

Et j’apprends aux kids à se rebeller,

J’insulte tous ceux qui font autorité,

Éducs, parents, à tous je vais leur montrer

Que moi, c’est clair je ne les crains pas

Quand j’ai un coup de colère, je tape, c’est comme ça

Ou alors, je me barre pendant presque deux heures

Et ce sont les gendarmes qui galèrent pour l’heure.

Moi j’ai peur de rien, je fais ma vie c’est tout

Et devant les copains je lâche rien surtout.

Eux ils me prennent pour une petite racaille

Ils rigolent même alors j’montre pas mes failles.

Si je leur dis qu’au collège je me plains des grands

Et qu’en fait ceux que je cogne ils ont moins de huit ans,

Je ternirais ma réputation de sale gosse de quartier

Mes potes n’auraient plus d’attention pour nos codes de cité.

Alors je continue de faire le bonhomme,

Celui qui frappe les petits mômes,

Celui qui ne respecte rien ni personne,

Celui qui se fout qu’on le sermonne.

Il y a une pionne au bahut qui m’a dit un jour

Que pour faire semblant d’être un autre tous les jours

C’est que je dois sacrément souffrir en dedans,

Qu’il y a des émotions laissées en suspens

Et que je changerai quand j’aurai compris

Que je vaux mieux que tout ce flot de soucis.

Elle m’a dit au fond de toi, il y a un gosse en or,

Le problème, c’est que tu ne le sais pas encore.

Moi, je m’en fous ça me va bien d’être celui-là,

Le sale gamin viré de partout pour ça :

Insolent, violent, qui ne connaît pas le respect.

Je leur dis « merde » à tous, qu’ils me foutent la paix.

Je porte des Nike Air et je marche comme une petite frappe

Mais quand je suis chez mon père, c’est souvent lui qui m’attrape.

#petitefrappe

Lorsque l’on est un enfant à qui l’on confie un secret,

L’adulte évidemment sait tout à fait ce qu’il fait,

C’est tellement valorisant pour ce petit être si parfait

Qu’un grand, confident, lui avoue des mots cachés.

On doit se construire avec ce lourd secret,

On ne doit rien dire, si quelqu’un savait

Il pourrait médire ou bien m’accuser

Peut-être de mentir, ou me dénigrer.

On avance dans la vie avec ce lourd secret,

Tellement qu’on oublie qu’il nous obsédait,

Tellement qu’on oublie même qui l’on est,

Une âme sans vie dans un corps blessé.

On ne se rend compte que ce fichu secret

N’était qu’une bombe prête à exploser

Que lorsque remontent les souvenirs écorchés,

Ceux que l’on raconte après de longues années.

Ce jour où l’on comprend que ledit secret

Confié à un enfant trop manipulé

C’est un proche, un parent, en réalité,

Un monstre bienveillant qui nous a tués.

Il tue à petit feu ce lourd secret

Parler aurait été mieux, mais trop tard, c’est fait,

Les larmes aux yeux, mieux vaut tard que jamais.

J’ai osé, je me sens mieux, moi qui m’en voulais.

Je viens de réaliser que ce petit secret

M’avait arraché à mes plus belles années.

Innocence envolée, corps sali à jamais,

Caresses sales et incestes avérés.

Depuis que j’ai parlé de notre secret

Je me sens libérée après trente ans passés

Comme emprisonnée dans ma vie cabossée

Délivrée de ce poids qui me condamnait.

Mais rien ne m’aura jamais autant aidé

Que ce jour-là, ce jour endeuillé

Où sur ta boîte en bois ma main t’a caressé

En te glissant tout bas « je t’ai pardonné ».

Il est mort le secret.

#lesecret

À trente dans une barque de fortune

Je traverse mers et océans

Hâte de retrouver le bitume

Loin de mon Afghanistan.

Après qu’ils ont tué mon père,

Ma mère m’a demandé de partir.

J’ai laissé mes sœurs et mon frère

Pour un plus bel avenir.

Les vagues n’auront pas permis

À tous ceux qui rêvaient d’un ailleurs

D’aller vivre une autre vie

Loin des cris et de la terreur.

Chacun son rêve américain

Ali voulait un sol anglais.

Moi j’ai visé un peu moins loin,

J’ai tant envie d’être français.

La France, pays des droits de l’Homme

Me traitera comme il se doit

Et me fournira stylos et gommes

Pour étudier pas à pas

L’histoire de votre pays,

Sa langue et ses traditions.

Je serais très investi

Pour une meilleure intégration.

J’ai tellement attendu d’entendre résonner

Sans jamais être déçu : liberté, égalité ;

Je n’avais pas connu le sens du mot fraternité

Mais ici je l’ai vécu et je n’ai pas de regrets.

France, je t’ai choisi avec grande fierté

Toi qui m’as accueilli, toi qui m’as élevé

J’ai tellement envie de continuer à t’aimer,

Ouvre ton cœur à mes amis qui ne veulent que la paix.

#demandeursdasiles

J’hésite encore ce matin

Entre la jupe et le pantalon

Plutôt baskets ou escarpins

Avec ou sans talons.

Il y a des gars en bas de chez moi

Qui ne peuvent pas s’empêcher

De dire n’importe quoi

Quand ils me voient passer ;

J’ose à peine me maquiller

Ou mettre un short au-dessus du genou

Si c’est pour être insultée,

Je cache mes jambes et puis c’est tout.

Je n’arrive pas à comprendre

Ce genre de mentalités

Mais je n’ai rien à attendre

D’hommes en perte de virilité

Qui pour se donner un genre

Se permettent de critiquer.

Je pourrais bien sûr leur rendre

En attaquant de préjugés

Mais j’opte pour l’indifférence

Et je ne mets plus de rouge à lèvres

Mais dans le fond quand j’y pense,

Il faut bien dire que ça m’énerve.

On parle de harcèlement de rue

Et ça m’oblige à tirer un trait

Sur mes plus jolies tenues

Et sur ma féminité.

Laissez-moi être moi

Et marcher tranquillement

Sans vos mauvais regards sur moi

Toujours plus insistants.

Je ne devrais pas avoir à choisir

Entre tranquillité et féminité

Je suis une femme pour le meilleur et pour le pire

Et tant pis si ça vous déplaît !

#féminiténestpasvulgarité

Partir. Mais comment ?

Je reste une maman

Sans papiers, sans argent.

Partir. Mais comment ?

Au banc des accusés

Je vois ma vie déballée

Aucun mot n’excusera jamais,

Je suis coupable, c’est un fait.

Porter plainte ? Partir ?

Ils parlent d’une femme martyre

Qui aurait dû s’enfuir

Pour éviter le pire.

Je l’avais dans la peau

Mon tortionnaire alcoolo,

Mon amour de bourreau,

Mais là c’était la goutte d’eau.

Plus de quarante ans

De sévices permanents

Sous les coups d’un tyran

Toujours plus violent.

Je suis épuisée, vidée.

Toute une vie à me faire cogner,

Toute une vie à me faire frapper,

Toute une vie torturée.

Partir ? J’avais trop peur.

Notre monde dans la frayeur.

Mes enfants dans la terreur.

Nous avions tous trop peur.

Qu’ils comprennent ou pas, je m’en fous,

Pour ma famille ça valait le coup

C’est ma vie et c’est tout.

« Accusée, levez-vous ! »

Je l’avais supplié

Tant de fois d’arrêter

Mais j’ai compris ce qu’il leur a fait,

Je n’ai pas pu m’en empêcher.

L’épouvante du calvaire,

L’effroi d’une vie entière.

Je ne suis qu’une mère,

Ne me jetez pas la pierre.

Toute une vie de supplices.

Il avait tous les vices,

Il a même pris mon fils…

Quand la honte s’immisce…

Pardon, je n’aurais pas dû faire ça,

Je suis coupable, je ne nie pas.

Je l’ai tué, c’est bien moi

Mais c’était lui ou moi.

#violencesfamiliales

Six heures, le réveil sonne

J’ai déjà mal à la tête

Des percussions, un saxophone,

Dans ma tête, tout un orchestre.

Elle est là depuis hier soir

À m’attendre dans le salon,

Faut dire que je broyais du noir

Elle est là à chaque occasion.

À vrai dire elle est fidèle,

Ça fait vingt ans qu’elle est dans ma vie.

Jamais déçue avec elle

Je lui raconte tout, c’est mon amie.

Elle m’appelle plusieurs fois par jour

Et parfois même la nuit

Et je lui réponds toujours,

Je lui parle de ma vie.

Elle est là dans tous les bons moments,

Mais surtout dans les mauvais.

Elle me console tout le temps

Et je me sens bien après.

Des fois, elle me manque tellement

Mais je ne sais pas où elle est,

Ça me rend folle et pourtant

C’est moi qui l’ai caché.

Personne ne pourrait comprendre

Ce lien qui nous unit

On ne veut pas se faire surprendre

Par de mauvais esprits.

Je ne peux plus vivre sans elle

Je dirais que c’est fondamental,

Elle est mon amie, ma bouteille

Mon alcool si vital.

#alcoolisme

Pardonne-moi papa

De t’infliger ça

Tu m’as retrouvé là

À cette corde, comme ça.

Tu voudras comprendre,

Tu auras mille questions,

Tu devras apprendre

À vivre sans ton fiston.

Ne t’en veux pas papa,