3,99 €
Carillon qui sinues longtemps/ Dans les venelles terraquées/De l'atome/ Rappelle à soi ma vie formelle/ Avec sa mémoire de rien/ Plein la matière !/ La nuit la palpitation/ Des poitrines vieilles bassine/ Un enfant triste./ Ventres traversés de lueurs/ Rendez-lui sa ponctuation/ D'encens noir et de galaxie! Le recueil de Tugny, divisé en tableaux que rehaussent de leur obscurité clairvoyante les photographies inachevées d'Anna Katharina Scheidegger, fait sonate, fait quatuor. La musique ne se passe-t-elle pas de compréhension immédiate ? Elle se ressent, elle touche, elle emporte, elle pénètre cette âme qui, au bout du compte, est seule dépositaire du mystère de son sens. Reine Mimran
Das E-Book können Sie in Legimi-Apps oder einer beliebigen App lesen, die das folgende Format unterstützen:
Seitenzahl: 32
Veröffentlichungsjahr: 2022
…Et l’étoile lui souffle un verset de retape / Et puis un mètre / A retenir. / C’est ce que le poète
ne saura jamais/ Manquerait plus qu’il sût / C’est aussi le secret que l’on garde en secret ; / Le
grand secret pas su dont se fiche le monde.
Emmanuel Tugny. Un Terme, III, 6
Voici donc avec Un Terme, un ouvrage insolite, un ouvrage qui ouvre une voie originale. Langue, style, versification, thèmes, tout nous plonge dans un monde poétique sinon totalement nouveau, du moins différent. Le texte liminaire nous donnera une idée de cette nouveauté.
Nul désert qui ne prête corps / Au vivant / Pour qu’un livre nouveau des Heures / Assigne la matière au temps / Je dis je vais dedans / Je vais sans / Et je vais mon « va » cependant/ Passée la portée de mon pas.
À première vue, on pourrait penser que nous avons là de la prose et non de la poésie, puisque dans ce bloc compact de phrases, toutes les marques de la poésie semblent avoir disparu (strophe, rimes, vers…) Or, à y regarder de plus près, on découvre que l’auteur nous a quelque peu mystifiés pour notre plus grand plaisir !
Nous n’avons pas des vers, certes, nous avons des segments de phrases séparés par des barres obliques qui scandent visuellement ces segments, mais ceux-ci sont rythmés. Octosyllabes pour la plupart, interrompus par des tercets ou un sizain, ils nous proposent de découvrir d’autres procédés poétiques : assonances (temps, dedans, sans cependant), allitérations : passée la portée de mon pas, enjambement (le premier « vers » doit se prolonger au-delà de la barre oblique, « qui ne prête corps au vivant ») Et tout le recueil va se développer selon ce schéma, à travers quatre parties, quatre tableaux, de 16 poèmes chacun, qui s’achèvent sur un épilogue de 4 poèmes. Les poèmes comptent trois à dix lignes, construits comme le poème liminaire et font alterner octosyllabes, tercets, quatrains, sizains, à l’exception de la dernière partie, le quatrième tableau, où nous avons un élargissement de la forme, puisque à travers des épilogue de 4 poèmes. Les poèmes comptent trois à dix lignes, construits comme le poème liminaire et font alterner octosyllabes, tercets, quatrains, sizains, à l’exception de la dernière partie, le quatrième tableau, où nous avons un élargissement de la forme, puisque à travers des poèmes plus longs, nous trouverons des alexandrins, dans une sorte de crescendo final.
Un Terme, le titre d’emblée nous interroge. Riche d’ambiguïtés sémantiques, il nous propose des sens et des directions multiples.
Dans le recueil ce mot apparaît cinq fois.
En I, 9 « Le terme remonte de terre / Et c’est un feu… »
En II, 6 « Ce sont des sillages de fous…/ Qui précisent le terme au cœur.
En III, 3 « J’ai votre peau sous le saccage/Au terme vraiment de la gorge/
En III, 14 « les premiers termes du temps »
En IV, 16 « Puis le terme inventé répond /Sous la semelle/
Mais de quel « terme » s’agit-il ? « Terme » compris comme une fin, une borne dans le temps, dans l’espace ? Ou bien « terme » renvoie-t-il à « mot » « expression » ?
Les exemples du texte semblent suggérer ces deux sens, et nous invitent peut-être à les superposer pour en tirer l’idée d’une borne de l’expression, d’une expression arrêtée, et on ne peut s’empêcher de rapprocher ces poèmes qui sont achevés en eux-mêmes, qui se suffisent à eux-mêmes, des poèmes de Stèles de Victor Segalen. La stèle est une pierre levée qui marque une limite, une borne mais qui porte aussi une inscription. Et comme le passant s’arrête pour décrypter les signes mystérieux que révèle la stèle, le lecteur s’arrêtera pour déchiffrer le sens de ce recueil. Mais quel sens ? Et c’est là aussi que ces textes sont nouveaux, inédits et originaux.