9,99 €
Extrait : "L'OMBRE DE THYESTE – J'échappe aux noirs cachots de l'infernale rive ; L'épouvante me suit sur la terre où j'arrive, Comme elle m'assiégeait aux enfers d'où je sors ; C'est fais fuir les vivants comme je fuis les morts. Tremble, Thyeste : c'est la maison de ton père ! Tremble, Thyeste : c'est la maison de ton frère ! C'est bien le vieux palais de Pélops ; c'est ici Qu'on couronnait les rois ; leur trône, le voici ; Là se tenait leur cour ; là se dressait..."
À PROPOS DES ÉDITIONS LIGARAN :
Les éditions LIGARAN proposent des versions numériques de grands classiques de la littérature ainsi que des livres rares, dans les domaines suivants :
• Fiction : roman, poésie, théâtre, jeunesse, policier, libertin.
• Non fiction : histoire, essais, biographies, pratiques.
Das E-Book können Sie in Legimi-Apps oder einer beliebigen App lesen, die das folgende Format unterstützen:
Seitenzahl: 37
Veröffentlichungsjahr: 2015
À M. Édouard Thierry
Administrateur général du Théâtre-Français
Hommage d’affection, et de reconnaissance.
HENRI DE BORNIER
Je serais ingrat si je publiais cette pièce sans remercier les maîtres de la critique qui lui ont fait un si bon accueil ; ils ont relevé, comme ils le devaient, les défauts de l’ensemble et les fautes de détail, mais, avec autant de bienveillance que d’équité, ils ont encouragé l’auteur d’un travail plus délicat et plus qu’il ne semble.
On me permettra seulement de répondre à un reproche, ou plutôt à un étonnement qui s’est manifesté : « Pourquoi n’avoir pas traduit l’Agamemnon d’Eschyle, qui est un chef-d’œuvre, au lieu de l’Agamemnon de Sénèque, qui est une tragédie de troisième ordre ? » – C’est précisément parce que le drame équipé et hiératique d’Eschyle est consacré par l’administration de tous les temps que je n’aurais pas eu l’audace de m’attaquer à une œuvre si grandiose ; la traduire littéralement eût été une profanation : on m’aurait justement blâmé de prendre avec Eschyle les libertés qu’on m’a loué d’avoir prises, et que Quintilien déjà conseillait de prendre avec Sénèque.
Dans le monde d’Eschyle, en supposant que le public puisse y entrer, nous nous trouverions dépaysés. Sénèque est plus près de nous, nous lui ressemblons davantage, et dans cet art troublé, déclamatoire, je le sais bien, quelque chose de nous se retrouve encore.
D’ailleurs, plusieurs imitations et traductions du théâtre grec ont obtenu en France un succès que je n’aurais pas eu l’espoir de renouveler ; mon espoir, beaucoup plus modeste, a été de donner au public une idée de cette tragédie latine qui est l’aïeule de la nôtre. De même que l’on cherche comment Racine a exprimé, sous des noms antiques, les sentiments et les passions de son temps, de même j’ai voulu montrer comment Sénèque a prêté à des personnages grecs les idées qui agitaient les Romains de son époque ; dans son Agamemnon ne cherchez pas Thyeste, Égysthe, Clytemnestre, Cassandre, mais Caligula, Néron, Germanicus, Agrippine, les bourreaux et les victimes que Sénèque avait sous les yeux. C’est pour cela que la tragédie romaine, à l’inverse de la tragédie grecque, prend parti pour le vaincu contre le vainqueur ; Agamemnon, c’est la revanche de Troie, et c’est surtout la revanche de Rome contre Néron.
Cette tristesse profonde, cette sorte de désespoir farouche, qui remplissent l’Agamemnon, ont été comprises, et je n’ai plus la crainte d’avoir fait jouer à Sénèque le rôle de collaborateur malgré lui, que l’on me passe l’expression.
On s’est demandé souvent, et hier encore, si Sénèque le Tragique est le même homme que Sénèque le Philosophe. Les personnes curieuses d’examiner ce point d’histoire littéraire peuvent consulter une thèse latine soutenue en ce moment à la Faculté des lettres ; l’auteur, M. H. Tivier, se prononce pour l’affirmative. Après le long travail que je viens de faire, je suis complètement de cet avis.
Remercier les excellents artistes – il faudrait les nommer tous – auxquels ma pièce doit la meilleure part du succès, est le plus naturel des devoirs. Les rôles d’Agamemnon, les rôles d’hommes surtout, ne sont que des silhouettes ; l’ampleur, le plein qui leur manquent, leur ont été donnés par les acteurs et les actrices du Théâtre-Français ; de cette soirée datera, je l’espère, l’avenir de plusieurs d’entre eux. Grâce à leur bonne volonté ; grâce à la sollicitude de l’administrateur général, la pièce a été reçue, apprise, jouée en un mois…
Puisse-t-on ne pas ajouter : et oubliée !
H. de B.
Paris, 30 juin 1868.
L’OMBRE DE THYESTES.
EGYSTHE.
AGAMEMNON.
EURYBATE.
STROPHIUS.
CLYTEMNESTRE.
CASSANDRE.
ÉLECTRE.
LA NOURRICE DE CLYTEMNESTRE.
LE CHŒUR DES FEMMES D’ARGOS.
LE CHŒUR DES TROYENNES.
ORESTE et PYLADE, personnage muets.
Le théâtre représente une place devant le palais de Pélops, à Argos. À droite le palais, à gauche le temple d’Apollon ; au fond la ville d’Argos et la mer.
Il est nuit.