Cartes sur table - Renee Rose - E-Book

Cartes sur table E-Book

Rose Renee

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Beschreibung

« Tu m’appartiens, maintenant. »
Elle a commis une grosse erreur. On ne fait pas de chantage à un Tacone.
Venir me voir pour me menacer ? Inacceptable.
Si elle a besoin d’argent, elle va devoir le demander gentiment.
Mais une fois que je le lui aurai donné, nous savons tous les deux ce que cela signifie : Elle m’appartient.
Je fais de mon mieux pour me contenir, pour lui témoigner du respect.
L’ennui, c’est que je ne peux pas me retenir de la toucher.
Et maintenant qu’elle est à ma disposition, je n’ai aucune intention de la laisser partir...

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Cartes sur Table

Renee Rose

Traduction parMyriam Abbas

Traduction parValentin Translation

Renee Rose Romance

Table des matières

Livre gratuit de Renee Rose

Remerciements

Chapitre premier

Chapitre deux

Chapitre trois

Chapitre quatre

Chapitre cinq

Chapitre Six

Chapitre sept

Chapitre huit

Chapitre neuf

Chapitre Dix

Chapitre onze

Chapitre douze

Chapitre treize

Chapitre quatorze

Chapitre quinze

Chapitre seize

Épilogue

Vouloir plus? Bonne pioche

Livre gratuit de Renee Rose

Ouvrages de Renee Rose parus en français

À propos de Renee Rose

Mentions légales

Copyright © 2019-2021 Cartes sur Table de Renee Rose

Tous droits réservés. Cet exemplaire est destiné EXCLUSIVEMENT à l’acheteur d’origine de ce livre électronique. Aucune partie de ce livre électronique ne peut être reproduite, scannée ou distribuée sous quelque forme imprimée ou électronique que ce soit sans l’autorisation écrite préalable des auteures. Veuillez ne pas participer ni encourager le piratage de documents protégés par droits d’auteur en violation des droits des auteures. N’achetez que des éditions autorisées.

Publié aux États-Unis d’Amérique

Renee Rose Romance

Ce livre électronique est une œuvre de fiction. Bien que certaines références puissent être faites à des évènements historiques réels ou à des lieux existants, les noms, personnages, lieux et évènements sont le fruit de l’imagination des auteures ou sont utilisés de manière fictive, et toute ressemblance avec des personnes réelles, vivantes ou décédées, des établissements commerciaux, des évènements ou des lieux est purement fortuite.

Ce livre contient des descriptions de nombreuses pratiques sexuelles et BDSM, mais il s’agit d’une œuvre de fiction et elle ne devrait en aucun cas être utilisée comme un guide. Les auteures et l’éditeur ne sauraient être tenus pour responsables en cas de perte, dommage, blessure ou décès résultant de l’utilisation des informations contenues dans ce livre. En d’autres termes, ne faites pas ça chez vous, les amis !

Réalisé avec Vellum

Livre gratuit de Renee Rose

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Remerciements

Merci à Rhonda Butterbaugh d’avoir trouvé le titre de ce livre. Dead Man’s Hand correspond parfaitement à Gio et au « garçon qui a survécu » (oui, je suis une Potterhead. Qui ne l’est pas ?)

Playlist au piano :

Solfeggietto par C.P.E. Bach ;

Get Lucky par Daft Punk ;

Birthday par les Beatles ;

The Scientist par Coldplay ;

Always a Woman par Billy Joel ;

Piano Man par Billy Joel ;

Hallelujah par Leonard Cohen ;

Paint it Black par les Rolling Stones ;

Marry Me par Train ;

Marry You par Bruno Mars ;

Marry Me par Dean Martin.

Chapitre premier

Gio

D’abord la brûlure. Puis le sang qui suintait entre mes doigts. Et toujours la voix de Paolo qui prononçait mon prénom d’un ton rauque par-dessus les coups de feu.

« Gio, non ! »

« Gio est touché ! »

C’était l’horreur de perdre quelqu’un qui résonnait dans sa voix, faisant tambouriner mon cœur. Pas la douleur. Pas ma propre peur de la mort. Je ne pensais pas à mon décès en cet instant. Je n’y avais pas pensé quand ça s’était passé, et je n’y pensais pas durant les cauchemars qui m’assaillaient chaque nuit.

Et toujours cette fille.

Elle se trouvait dans chaque rediffusion nocturne. Parfois, elle se faisait tirer dessus aussi. C’étaient les pires. Mon incapacité à la sauver, à la protéger de la violence me donnait envie de mourir sur place. D’autres fois, elle courait vers moi, après que je m’étais fait tirer dessus. Elle passait ses bras autour de moi et nous tombions tous les deux.

Ses grands yeux bleu turquoise se soudaient toujours aux miens à l’instant où le premier flingue tirait. Je voyais la terreur les emplir alors que la balle me transperçait le ventre.

C’était cet instant précis qui la retenait dans mes rêves. Durant cette fraction de seconde, dans ce créneau où j’étais sûr que j’allais mourir, c’était son visage que je voyais. Mes peurs concernaient sa sécurité, et mon supplice à l’idée de m’être fait descendre venait de ce que je ne pouvais pas la protéger.

Dans son regard, j’aurais juré voir toutes mes émotions se refléter. Elle aussi pensait que j’allais mourir, et son supplice venait de ce qu’elle ne m’avait pas averti à temps.

Parce qu’elle avait essayé. Je me souvenais de chaque milliseconde de cette partie-là. Les cinq respirations avant que je ne fasse trouer la peau. Je me souvenais de la manière dont elle avait essayé de me faire signe avec les yeux. La manière dont elle avait refusé de partir et de se mettre en sécurité, même si elle devait savoir que son café était sur le point d’exploser en morceaux de verre et de bois sous les balles et le sang.

Elle était comme un ange dans ces rêves… son visage pâle était le phare qui me guidait pour comprendre ma propre mort.

Seulement, je ne mourais pas.

Je n’étais pas mort.

Et on aurait pu croire que tout serait devenu clair comme de l’eau de roche, après cette expérience de mort imminente. C’était censé vous aider à vous rendre compte de ce que vous regrettiez, de ce que vous désiriez. Puis, vous aviez une seconde chance de faire honneur à cette vie.

Mais à la place, j’étais piégé dans un brouillard provoqué par les cauchemars, essayant d’en comprendre la signification pendant que je faisais semblant de vivre.

La fille du Caffè Milano n’avait pas les réponses… Je ne savais pas pourquoi ni comment mon inconscient lui avait attribué autant d’importance. Elle s’était simplement retrouvée au milieu d’une situation qui avait mal tourné entre la bratva russe et notre équipe.

Et pourtant, je ne pouvais pas me la sortir de la tête.

Mon ange de la mort.

Enfin, de la mort imminente.

Marissa. Une fille innocente que je n’avais aucun droit de salir.

Une fille qui en avait déjà trop vu.

Un point faible.

Marissa

Il y a des choses qu’on ne peut pas oublier. On ne peut pas ne pas les voir, ne pas les entendre.

Du sang partout sur le sol. Le bruit des coups de feu. La manière dont mon cœur s’était arrêté quand Junior Tacone avait pointé ce flingue sur moi, décidant s’il allait me laisser vivre ou me tuer.

Je détestais ce moment de la journée quand les clients se faisaient plus rares, que les affaires ralentissaient, et que j’avais du temps pour me souvenir.

Cela faisait six mois que l’affrontement entre les mafias russe et sicilienne avait eu lieu au Caffè Milano, et j’étais encore sérieusement nerveuse. Examinant encore chaque client qui entrait, priant pour qu’il ne soit pas un type de la mafia russe, venu pour se venger. Ou me secouer pour obtenir des informations afin de trouver les Tacone.

Mais ils n’étaient pas revenus. Personne n’était jamais revenu, sauf les Tacone avec leurs vitriers et une somme d’argent suffisamment importante pour moderniser toute notre cuisine. Ce qui tombait bien parce que notre chambre froide était sur le point de tomber en rade, et ce commerce n’avait pas été rénové depuis que mes grands-parents l’avaient ouvert dans les années 1960.

Je sortis une salade de pâtes de la vitrine réfrigérée pour la mettre dans la chambre froide pour la nuit. Quand je revins, je me figeai, un hoquet s’échappant du fond de ma gorge.

Au début, je crus que c’était Junior Tacone qui se tenait à mon comptoir.

Le mec qui avait viré gangster chez moi et descendu six gars. Celui qui était soi-disant le protecteur de ce quartier.

Mais ce n’était pas Junior. C’était son frère, Gio Tacone, celui qui avait pris une balle sur le trottoir. L’homme que je croyais mort.

— Monsieur Tacone !

Je me maudis d’avoir l’air essoufflée.

— Gio, corrigea-t-il. Marissa, comment vas-tu ?

Il sait comment je m’appelle !

C’était plus que je ne pouvais en dire de Junior, le chef actuel de la famille. Et j’aurais aimé que ça ne fasse pas papillonner mes entrailles, mais tel était bien le cas. Gio posa son avant-bras sur le comptoir et me cloua sur place d’un regard noisette aux cils sombres.

Il était un vrai régal pour les yeux. Avec ses beaux traits ciselés, il aurait facilement pu être un acteur ou un mannequin, et il avait le charme correspondant.

— Vous êtes vivant, lâchai-je.

Je n’avais pas entendu dire qu’il avait survécu. J’avais vérifié les journaux et cherché son nom sur Google après la fusillade. Il n’y avait eu aucun signalement sur sa mort, mais je l’avais vu prendre une balle de mes propres yeux.

— Enfin, vous vous en êtes sorti. Je suis si contente !

Puis je rougis, parce que… oui. Je n’étais probablement pas censée parler de ce qui s’était passé, même s’il n’y avait que nous ici.

Gio m’attrapa le poignet, immobilisant ma main. Son pouce caressa mon pouls, tandis que mes doigts tremblaient entre nous.

— Pourquoi trembles-tu, poupée ? Tu as peur de moi ?

Peur de lui ? Oui. Absolument. Mais j’étais également excitée. C’était le seul des frères Tacone que j’avais hâte de voir. Ça avait toujours été le cas, même quand je n’avais que dix ans, essuyant les tables alors que les hommes de la mafia se retrouvaient ici.

— Non ! répondis-je en retirant ma main. Je suis simplement nerveuse. Vous savez… depuis… ce qui s’est passé. Et vous m’avez surprise.

Son regard me pénétra, comme s’il savait que ce n’était pas tout, et qu’il voulait tout apprendre. Un mouvement étrange se produisit dans ma poitrine.

Je replaçai une mèche rebelle derrière mon oreille pour dissimuler mon malaise grandissant.

— Tu fais des cauchemars ? devina-t-il, comme s’il avait lu dans mes pensées.

Je hochai la tête. Puis la manière dont il le savait me traversa l’esprit.

— Et vous ?

Je ne m’attendais pas à ce qu’il l’avoue si c’était le cas. Je venais d’une famille italienne. Je savais que les hommes n’admettaient pas de faiblesse.

Je fus donc surprise quand il répondit :

— Tout le temps, putain.

Il toucha l’endroit où la balle avait dû le pénétrer.

— Waouh.

Les coins de ses lèvres se relevèrent en un sourire dévastateur. Cet homme aurait vraiment dû faire du cinéma.

— Quoi ? Tu crois que les hommes, les vrais, ne font pas de cauchemars ?

— Peut-être pas les hommes dans votre secteur d’activité.

Son sourire disparut et il arqua un sourcil. Oups. J’avais franchi une ligne rouge. Je supposai qu’on ne mentionnait pas le secteur d’activité d’un mafieux.

J’ignorai le martèlement plus rapide de mon cœur.

— Désolée. Est-ce quelque chose dont nous ne devons pas parler ?

Il me fit transpirer pendant deux secondes, puis haussa à demi les épaules, comme s’il avait décidé de laisser passer.

— Je ne suis pas venu ici pour être sur ton dos. Je suis venu voir comment tu allais. M’assurer que tu allais bien.

Il battit de ses cils bruns recourbés qui auraient pu appartenir à un visage féminin s’il n’avait pas eu la mâchoire carrée et un nez aquilin.

— On dirait que ça ne va pas fort, ajouta-t-il.

La cloche du danger commença à tinter dans ma tête.

N’accepte jamais un service des Tacone. Tu le paieras toute ta vie.

C’était ce que mon grand-père avait toujours regretté. Il avait emprunté de l’argent à Arturo Tacone pour démarrer son commerce, et cela lui avait pris quarante ans pour rembourser. Mais il avait remboursé, et il en était très fier.

— Je vais bien. Nous allons bien, dis-je en me redressant et en levant le menton. Mais nous apprécierions si vous organisiez vos réunions professionnelles ailleurs à l’avenir.

Je ne savais pas ce qui m’avait poussée à dire ça. On n’énervait pas un patron de la mafia en l’insultant ou en posant des exigences. J’aurais assurément pu trouver un moyen plus sympa de présenter ma requête.

Encore une fois, il m’étudia pendant un instant avant de répondre. Mes paumes devinrent moites, mais je gardais la tête haute et croisai son regard.

— D’accord, concéda-t-il. Nous ne nous attendions pas à des problèmes. Junior a regretté ce qui s’est passé ici.

— Junior a pointé un flingue sur ma tête.

Les mots étaient venus tout seuls et jetèrent un froid entre nous. Trop tard pour les reprendre.

— Junior ne te ferait jamais de mal.

Il l’affirma si vite que je sus qu’il croyait à la vérité de ses paroles. Mais il n’avait pas vu ce que j’avais vu. Cet instant d’hésitation. Et son homme près de lui, lui murmurant que j’étais un témoin.

Junior avait pensé à me tuer.

Puis avait décidé de ne pas le faire.

Gio m’attrapa de nouveau la main et la tint, en en caressant le dos cette fois. Ses doigts étaient larges et puissants, donnant l’impression que les miens étaient petits et délicats en comparaison.

— C’est pour ça que tu es agitée, hein ? Je suis désolé que tu aies eu peur, mais je te le promets, tu es en sécurité. Cet endroit est sous notre protection.

Je déglutis, essayant d’ignorer à quel point son contact était agréable. À quel point il était agréable d’être apaisée par cet homme beau et dangereux. J’en rajoutai dans l’esbroufe.

— Peut-être que ce serait mieux s’il ne l’était pas.

Ma voix manquait d’assurance. Elle tremblait, trahissant ma nervosité. Je me raclai la gorge.

— Vous savez, si vous nous laissiez simplement tranquilles.

Je retins ma respiration, craignant sa réaction.

Mais… ?

Si je n’avais pas été plus maligne, j’aurais dit que mes paroles avaient blessé Gio au lieu de l’énerver. Mais il haussa simplement les épaules.

— Désolé, poupée. Tu ne peux pas te débarrasser de nous. Et je t’ai à l’œil, maintenant. Ce qui signifie que tu es parfaitement en sécurité.

J’aurais aimé lui dire que je n’étais pas sa poupée, qu’il pouvait se la garder, sa protection, et ficher le camp avec, mais je n’étais pas folle. De plus, une partie traîtresse de moi voulait qu’il continue à me caresser la main, qu’il continue à m’étudier comme si j’étais la personne la plus intéressante qu’il ait vue de la journée.

Mais je savais que tout ça était un mensonge.

Gio était un coureur de jupons. Et la réponse de mon corps à sa présence était dangereuse.

Il abandonna ma main et prit mon menton.

— Tu es en colère. Je comprends. Je vais te laisser sortir un peu tes griffes aujourd’hui. Mais nous avons donné une compensation à ta famille et nous honorerons nos engagements envers ce quartier et le Caffè Milano.

Son contact était autoritaire et ferme, mais malgré tout, doux. Les papillonnements de mon ventre n’en devinrent que plus déchaînés.

— Gio, murmurai-je.

Je détournai le visage, rompant le contact.

Mes mamelons avaient durci, se tendant sous mon soutien-gorge.

Il sortit un billet de cent dollars de sa poche et le déposa sur le comptoir.

— Donne-moi deux de ces cannolis, ordonna-t-il en les pointant du doigt.

J’obéis sans un mot et rangeai le billet de cent dans la poche de mon tablier, sans me donner la peine de lui proposer la monnaie. Il me semblait que s’il avait utilisé un billet de cent, c’était parce qu’il voulait dépenser sans compter, et j’allais le laisser faire.

Il sourit en coin alors qu’il prenait l’assiette de cannolis et s’asseyait à une table dans le café pour les manger.

Mince. J’étais fichue.

Gio Tacone venait de décider de faire de moi son projet de prédilection. Ce qui signifiait que les probabilités qu’il finisse par me posséder venaient de grimper en flèche.

Gio

Je n’arrivais pas à croire que je venais de dire à la fille du Milano que je faisais des cauchemars.

Je n’avais jamais dit tout haut ce genre de choses auparavant. Bon sang, à qui je l’aurais dit, de toute façon ? Junior m’aurait enjoint de me conduire en homme et de m’en remettre. Paolo m’aurait probablement flanqué un coup de poing là où la balle était entrée puis aurait conclu :

— Tu vois ? Tu vas bien.

Et ma mère ? Elle ne savait même pas que je m’étais fait tirer dessus. Nous gardions les femmes en dehors de nos galères.

Mais non, je n’étais plus le même depuis. Et ce n’était pas que je n’avais pas guéri… même si c’était resté incertain pendant un moment. Mais je ne pouvais pas m’empêcher de penser à la mort, maintenant.

Partout où je regardais, je voyais des gens qui pouvaient mourir le jour même sans être prêts. Un gars traverse la rue sans regarder, et boum ! Il est heurté par un taxi. Ou un pauvre poivrot fait un anévrisme et claque en allant chercher le courrier.

Aucune chance de dire au revoir. De régler les détails.

Ça aurait pu être moi.

Et partout où j’allais, je voyais également des tireurs potentiels. Je regardais par-dessus mon épaule à la recherche de bâtards de la bratva, même si je savais que la saga était terminée. Ils avaient kidnappé ma sœur, mais elle avait épousé l’enfoiré, et nous avions conclu une trêve facile.

Cela ne m’empêchait pas de croire que chaque main dans une poche cherchait un flingue, et de voir les ombres bondir des murs vers moi.

J’étais venu ici aujourd’hui pour voir comment la fille allait. Ça, c’était vrai. Mais je voulais de toute façon revenir dans cet endroit. Faire face à mes démons. M’assurer que je ne me mettrais pas à avoir des sueurs froides quand je serais devant la porte du lieu où je m’étais fait tirer dessus. Que je n’agirais pas comme un fichu pied tendre juste parce que j’avais pris du plomb pour ma famille.

Bonne nouvelle : ça n’avait pas été le cas.

Mauvaise nouvelle : je ne savais pas pourquoi je vivais.

Enfin, j’avais cette seconde chance.

Je n’étais pas mort. J’étais un mort-vivant. Alors pourquoi est-ce que ma vie me semblait soudain tellement vide ?

Je m’assis et regardai Marissa s’activer, fermant le commerce. Elle était jeune… avec toute la vie devant elle. Elle vivait encore pour quelque chose.

Avec pas mal de ferveur, en plus.

Soudain, je voulus savoir ce qui l’habitait. Je voulais connaître tous ses secrets les plus profondément cachés. Ses désirs. Elle me lança quelques coups d’œil. Je la rendais nerveuse. Un peu mal à l’aise. Mais je la faisais également rougir, si bien que ma verge tressaillit.

Elle était magnifique mais ne l’avait pas encore compris. Ou elle minimisait parce qu’elle ne voulait pas de l’attention des hommes. Elle était jeune, intelligente, et extrêmement capable. Elle ne pouvait pas avoir plus de vingt-cinq ans, et elle dirigeait ce commerce depuis plusieurs années. Il me semblait me souvenir que sa grand-mère se vantait des études de Marissa à l’école hôtelière.

Pour le bien que ça lui faisait… Elle restait coincée dans le business de sa famille, à faire ce qu’on attendait d’elle.

Tout comme moi.

Je me levai et laissai mon assiette pour qu’elle vienne la ramasser. Si elle avait été plus gentille, je l’aurais ramenée au comptoir, surtout étant donné qu’elle essayait de fermer, et que j’étais le seul lourdaud encore ici. Mais elle avait gardé mon billet de cent et avait joué la garce.

Donc elle pouvait ramasser derrière moi.

J’allais tranquillement à la porte, perdant ma démarche assurée en un éclair quand la scène sur le trottoir se rejoua devant moi. L’odeur de mon propre sang m’envahit les narines. Je vis le visage d’Ivan, le bâtard de la bratva qui nous avait piégés. Le regard meurtrier dans les yeux de Junior quand il avait sorti son flingue. J’entendis la panique de Paolo quand il m’attrapa.

Un contact sur mon bras me ramena au présent. Je baissai le regard vers des yeux bleu océan écarquillés.

Tout comme dans mes cauchemars, seulement, cette fois, son visage était doux.

Pendant un instant, elle ne dit rien. Il y avait de la compassion dans son regard. Elle me comprenait.

— J’ai essayé de vous avertir.

Des larmes lui montèrent aux yeux. Je me demandai si ses cauchemars ressemblaient aux miens, seulement inversés. Me voyait-elle me faire tirer dessus encore et encore, nuit après nuit ?

Je passai un bras autour de sa taille et l’éteignis.

— Je sais.

Putain, elle était envoûtante.

— Merci, Marissa.

Je souhaitai ardemment qu’elle perçoive ma sincérité.

Elle hésita, puis releva les bras autour de mon cou, comme dans un de mes rêves. Elle sentait le café crème sucré. Je voulais lécher sa peau pour voir si son goût était aussi bon que son odeur.

— Je suis contente que vous vous en soyez sorti, Gio. Je croyais que vous étiez mort.

Sa voix était basse et rauque. Je me disais qu’elle était trop jeune pour moi, et elle l’était, mais tout en elle évoquait une femme qui savait ce qu’elle voulait.

— Oui. Moi aussi, poupée.

Je déposai un baiser sur le dessus de sa tête et essayai d’ignorer la douceur de ses seins pressés contre mes côtes.

À quel point je voulais l’embrasser… cela ne me ressemblait pas du tout. J’étais plutôt à fond pour coucher avec les femmes sans douceur et leur taper sur le derrière quand elles sortaient.

Embrasser n’était pas vraiment mon truc.

Mais elle avait vu ma mort. Ma mort imminente. L’instant qui avait tout changé. Elle en avait fait partie. Je m’imaginais donc une sorte de lien.

Mais c’était stupide.

Je n’aurais pas dû attribuer trop de signification à de telles choses juste pour essayer de les comprendre.

Je m’étais fait tirer dessus.

Point.

C’était fini.

Il était temps de recommencer à vivre.

Marissa

— Fais gaffe, Henry se déchaîne, avertis-je l’autre cheffe de partie, Lilah, alors que je mélangeais la sauce marinara.

Le chef caractériel passait des soufflantes à tout le monde.

Elle roula des yeux couleur caramel.

— Et ça a quoi de nouveau ?

— Eh bien, je suppose que si j’étais chef cuisinier, je pourrais être une garce caractérielle aussi, murmurai-je alors que je retirai deux blancs de poulet farci du four pour les dresser. Au moins, nous savons à quoi nous attendre. Mais tu sais ce que je ne peux plus supporter ?

Lilah coupait les asperges en diagonale, toutes exactement de la même longueur.

— Arnie ? répondit-elle en chuchotant.

— Oui.

Arnie, le figlio di puttana de sous-chef, était un mufle pervers et tripoteur, qui étrangement croyait que toutes les femmes de la cuisine mouraient d’envie de le sucer.

— Il m’a tapoté les fesses dans la chambre froide ce soir. Tapoté. C’était dégueu en plus d’être inapproprié.

— Oui, si tu veux mettre la main aux fesses, au moins sois ferme, n’est-ce pas ? affirma Lilah avec un large sourire, ses fossettes marquant sa peau brune.

Je poussai un reniflement moqueur. Lilah me faisait toujours rire. Elle était la seule autre jeune à travailler dans la cuisine. Elle avait débuté ici en tant que plongeuse quand elle avait seize ans et avait monté les échelons au cours des cinq dernières années. Elle était assurément une de mes personnes préférées au Michelangelo.

— Bah oui. Est-ce une agression sexuelle flippante ou du harcèlement sexuel pur et simple ? Je ne sais pas… tout ce que je sais c’est que je me sens vraiment violentée en ce moment.

— Qu’est-ce que tu as fait quand c’est arrivé ?

— Je lui ai dit de retirer ses mains de mon postérieur.

— Et, laisse-moi deviner, il a ri comme si tu avais dit quelque chose de mignon…

— Oui. C’était génial.

— Tu devrais le dire à Henry.

— C’est ça. Parce que ça finira bien. C’est Henry qui n’arrive pas à croire que les femmes peuvent faire ce boulot. Arnie m’a engagée. J’ai le sentiment que la solution du chef sera de me dire de démissionner.

Je dressai un steak et utilisai la cuillère pour déposer une demi-boule de glace au poivre sur le dessus.

— C’est illégal. Le Michelangelo pourrait se retrouver avec un procès sur les bras si nous le signalons et qu’ils ne font rien.

— Oui…

Et mes patrons sauraient également qu’aucune de nous n’avait l’argent pour les poursuivre.

— Peut-être que je devrais simplement garder une fourchette dans ma poche et, la prochaine fois qu’il s’approchera de moi, je lui enfoncerai dans la cuisse, continuai-je.

Lilah étouffa un rire.

— Ça lui apprendra.

Arnie passa en trombe, Lilah ramassa une fourchette et jeta vers lui un regard entendu.

Je baissai la tête pour cacher mon rire.

Malheureusement, je n’eus pas l’occasion d’utiliser de fourchette pour le reste de la soirée. Le temps que nous ayons terminé de nettoyer et de tout ranger, mes pieds me faisaient souffrir le martyre et j’étais sur le point de tomber raide, mais j’étais heureuse.

J’adorais ce boulot, même avec toutes ses galères. J’aimais bien plaisanter avec Lilah, j’aimais bien l’excitation que je trouvais à préparer une assiette après l’autre avec la pression de la perfection. J’aimais bien travailler les ingrédients fins et onéreux, préparer les œuvres d’art qu’Henry imaginait. J’avais toujours une montée d’adrénaline qui me permettait de continuer bien après la fermeture.

Je souhaitais presque que la fusillade ait mis le Caffè Milano en faillite pour que mon seul travail soit ici. Peut-être que c’était snob de ma part, mais j’avais l’impression d’être à ma place en créant de la cuisine raffinée dans un restaurant haut de gamme.

Mais c’était égoïste. Mes grands-parents m’avaient élevée et je leur devais tout. Le Caffè Milano était leur monde et ils se faisaient vieux. C’était ma tante et moi qui faisions tourner la boutique. Même avec tante Lori qui y travaillait à plein temps, je devais les remplacer de plus en plus au fur et à mesure que mes grands-parents vieillissaient. Ce qui signifiait que, jusqu’à ce qu’ils meurent ou que ma petite cousine Mia soit suffisamment grande pour aider, à condition qu’elle le puisse avec sa hanche, ce devait être mon monde aussi.

Je ne m’attendais pas à trouver quelqu’un debout chez mes grands-parents quand je rentrai, mais toutes les lumières étaient allumées.

— Hé, vous tous, dis-je quand je poussai la porte.

Mes grands-parents et tante Lori étaient réveillés, assis autour de la table de la salle à manger, avec une mine d’enterrement. Ma tante avait les yeux rougis et ma grand-mère la bouche pincée, la perte inscrite sur son visage défait.

— Que se passe-t-il ? demandai-je alors qu’ils se contentaient de me regarder. Que s’est-il passé ?

— L’hôpital a appelé cet après-midi, dit ma tante en reniflant. Comme nous n’avons pas d’assurance, ils ont refusé l’opération pour Mia. Ils ont dit que le seul moyen pour qu’ils l’opèrent comme prévu, ce serait que nous leur apportions avant la fermeture des bureaux demain un chèque de trente mille dollars.

— Quoi ?

Trente mille dollars. Voilà le tarif en vigueur pour une opération de la hanche de nos jours. C’était dingue.

— Eh bien, ce sont des conn… âneries.

Tante Lori fondit de nouveau en larmes. Sa fille, ma cousine de huit ans, était tombée sur le terrain de jeu quelques mois auparavant et, on ne sait comment, s’était fracturé la hanche. Ils l’avaient opérée à ce moment-là, mais la pauvre gamine avait tout le temps mal et son nouveau chirurgien disait que les vis étaient ressorties, que c’était comme si elle recevait des coups d’aiguille en permanence et que toute l’articulation devait être reconstruite. Encore une fois. C’était carrément tragique qu’une enfant de huit ans doive subir ces âneries.

— Je sais. Et je ne sais même pas ce que je vais dire à Mia. Nous essayons de combattre sa douleur depuis si longtemps !

Maintenant c’était à mon tour de fondre en larmes. Il était injuste qu’une gamine souffre constammen, ne puisse pas jouer avec ses amis, ni même marcher jusqu’à l’école. Tout ça parce que le système de santé dans ce pays était si détraqué.

En travaillant au Caffè Milano, ma tante et moi gagnions trop pour être éligibles au Medicaid1, mais nous ne pouvions pas nous permettre une assurance maladie. Au moins, mes grands-parents avaient droit au Medicare2.

Je me laissai tomber sur une chaise et retirai mes chaussures.

— Nous trouverons une solution, promis-je.

Je ne savais pas comment ni à quel moment j’étais devenue la personne vers qui cette famille pouvait se tourner pour avoir des réponses, mais c’était bel et bien mon rôle désormais. Ma mère m’avait abandonnée enfant, alors ma famille proche s’était retrouvée celle-ci : mes grands-parents âgés, ma tante – qui, comme ma mère, s’était retrouvée enceinte jeune et sans être mariée –, sa fille Mia et moi. Nous nous serrions les coudes et nous prenions soin les uns des autres. Nous étions une famille, et nous trouvions des solutions.

— Comment ? gémit tante Lori. Comment allons-nous trouver trente mille dollars d’ici à demain ?

Parfois il suffit de bien formuler une question pour trouver la réponse.

Cela devint soudain clair comme le jour. Inévitable, même.

Les Tacone avaient du liquide. Des tonnes. Il n’y avait qu’à demander.

Tout ce que j’avais à faire, c’était vendre mon âme.

Oh mon Dieu.

Je ne dis rien devant mes grands-parents parce que je savais que ça les tuerait.

— Demain, je verrai si je peux avoir un prêt. Je suis sûre que la banque acceptera, avec le café comme caution.

Tante Lori était trop désemparée pour remarquer mon mensonge, avait trop désespérément besoin de s’accrocher à une réponse.

— Tu crois ?

— Absolument. Je vais trouver une solution demain. Promis.

Mia avait besoin d’aide. Il était temps d’agir en adulte et de faire ce qui devait être fait.

Gio

Je me réveillai au son de mon propre cri, le « Non ! » résonnant sur les murs de ma chambre, le visage frappé d’horreur de Marissa imprimé sur mes rétines et ses yeux bleu turquoise brillants de larmes.

Putain.

Je repoussai le drap de mon corps trempé de sueur et me levai, une légère douleur me tiraillant le flanc. Le tissu cicatriciel durcissait de jour en jour.

Desiree – la récente épouse de Junior, l’infirmière qui m’avait sauvé la vie – disait que je devais faire travailler le fascia. Elle voulait que je voie un kinésithérapeute ou une fadaise du genre, mais cet impact de balle était une preuve du crime que Junior avait commis en tuant ces enfoirés de la bratva qui m’avait tiré dessus. Alors non, il n’en était pas question. Je m’en tenais à mon jogging matinal et au lever de poids dans ma salle de sport à domicile.

Je me tenais torse nu à la fenêtre de mon appartement et regardais le lac Michigan. Des voiliers fendaient les eaux, pittoresques comme une fichue aquarelle. Peut-être que je devrais apprendre à naviguer.

Cette pensée coula comme une pierre, comme toutes les pensées sur ma vie. Sur mon avenir.

Bof.

Je menais une existence de rêve. Un appartement penthouse pile sur Lake Shore Drive3, des meubles somptueux, une Mercedes G-Wagen noire dans le garage.

J’en profitais déjà bien avant que la vie m’offre une seconde chance. Alors, pourquoi étais-je le bâtard le moins reconnaissant de Chicago ? J’aurais dû me réveiller chaque jour en remerciant ma bonne étoile pour toutes les raisons que j’avais de vivre.

Sauf que c’était exactement le problème.

Je n’avais aucune raison de vivre.

Pas même la gloire du business, désormais.

Je ne dis pas que ça me manquait. La violence, le danger. Le complot. Mais chaque action déclenchait une certaine poussée d’adrénaline. Le frisson de gérer les affaires. Regarder l’argent se multiplier. Le prêter. Le récupérer.