Contes et légendes d'Ethiopie - Jessica & Didier Reuss-Nliba - E-Book

Contes et légendes d'Ethiopie E-Book

Jessica & Didier Reuss-Nliba

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Beschreibung

Une anthologie de contes traditionnels d’Ethiopie.


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Couverture

Page de titre

Merci tout d’abord à Galina Kabakova, notre éditrice, qui nous a fait confiance une fois de plus pour ce nouvel ouvrage ! Merci à Muriel Diallo pour les illustrations, car c’est toujours un plaisir de travailler avec toi. Enfin merci à nos familles, enfants, parents, de France et d’Afrique.

Cet ouvrage est dédié tout particulièrement à Jean-Paul Nliba, qui nous a quittés en 2015.

Didier et Jessica Reuss-Nliba

Avant-propos

L’Éthiopie est un grand pays de la Corne de l’Afrique, d’une certaine façon elle est un peu à l’écart du reste du continent. En effet, de par son histoire et sa culture, l’Éthiopie n’est probablement pas un pays d’Afrique tout à fait comme les autres. Avec une population de plus de quatre-vingt-dix millions d’habitants, c’est aussi l’un des pays les plus peuplés d’Afrique. Il est entouré par l’Érythrée au nord, Djibouti au nord-est, le Kenya au sud, le Soudan à l’ouest et la Somalie à l’est. Environ 80 % des plus grandes montagnes d’Afrique se situent en Éthiopie, ce qui a d’une certaine façon protégé le pays de beaucoup d’influences extérieures. Nombre d’envahisseurs se sont en effet heurtés aux hauts sommets, et de fait l’Éthiopie a pu ainsi préserver une grande partie de ses traditions, même si, bien entendu, elle a néanmoins su évoluer et se transformer en un pays moderne.

Quelques particularités :

– L’Éthiopie a été le seul pays africain à avoir échappé à la colonisation. C’est aussi l’un des tout premiers pays du continent à avoir adopté le christianisme.

– L’Éthiopie est connue pour avoir été le berceau de l’humanité car les fossiles les plus anciens de la planète (certains datant de 5,8 millions d’années) y ont été découverts.

– L’amharique est la langue officielle mais l’anglais, le français, l’italien et l’arabe y sont également largement parlés.

– De nos jours, le pays est le deuxième producteur mondial de maïs, et l’agriculture est la base de toute son économie. On y cultive également le café, la canne à sucre et diverses céréales.

– Ses habitants, souvent grands, avec un visage effilé, n’ont pas le type africain classique. Les coutumes et traditions sont, elles aussi, très différentes de celles du reste du continent.

– Son histoire remonte aux temps très anciens de l’Ancien Testament. Ainsi, nombreux sont les récits où religion et légende se confondent.

Comme dans la plupart des pays d’Afrique, la culture orale est une part importante des ressources culturelles d’Éthiopie : folklore, mythes, légendes et diverses idées sont ainsi véhiculés par le biais de contes, dont l’origine se perd dans la nuit des temps. Malheureusement, les médias modernes tels que la radio, la télévision et l’internet tendent à faire disparaître cette tradition ancestrale, et les histoires sont de moins en moins transmises d’une génération à l’autre.

Contrairement à d’autres ouvrages que nous avons publiés chez Flies France (Contes et légendes du Cameroun, Contes et légendes créoles…), nous ne sommes pas partis de sources orales collectées sur place mais qui ont été récoltées en divers endroits via différentes personnes au fil des mois. Ce fut un long et patient travail, mais il s’est avéré passionnant, un peu comme un puzzle dont on rassemble les pièces peu à peu.

De nombreux contes pourront faire penser aux fables d’Ésope (notamment quelques fables animalières), d’autres, qui font très souvent référence à Dieu, puisent manifestement leurs sources dans la tradition chrétienne ; d’autres encore sont de tradition musulmane, se réfèrent au Coran, ce qui montre l’esprit de tolérance qui règne depuis toujours en Éthiopie.

Les thèmes sont nombreux et variés : histoires autour de la Création, fables animalières, histoires d’héritages, histoires sur l’intelligence de la femme et sa supériorité sur l’homme, histoires de djinns, d’ogres, de fées, histoires de princes et de princesses… Nous avons aussi récolté de nombreux contes moralisateurs et quelques contes étiologiques.

La plupart des contes traditionnels nous ont été rapportés – oralement ou par écrit par Émile Njab, ancien diplomate camerounais qui a passé de nombreuses années à l’ambassade d’Addis-Abeba, et qui a su tout au long de ces années non seulement voyager par tout le pays mais tisser des liens profonds avec les populations locales. Il se souvenait parfois de la ou des personnes auprès de qui il avait recueilli le conte. Dans ce cas-là, nous précisons systématiquement en annexe le nom du conteur d’origine, mais d’autres fois (sans doute parce que le conte avait été recueilli il y a bien plus longtemps) la mémoire lui a fait défaut… Nous avons alors juste rapporté le conte tel quel, sans plus de détail.

Beaucoup de ces sources avaient par ailleurs été retranscrites en langue anglaise et parfois italienne, que nous avons traduites en français. Nous avons dû faire un long travail de réécriture afin de donner autant que possible une harmonie stylistique à l’ensemble de ces textes, mais malgré toutes les difficultés linguistiques inhérentes à chaque traduction, nous nous sommes efforcés de rester aussi fidèles que possible aux textes d’origine.

Si la majeure partie de ces contes est issue de traditions orales ancestrales, quelques-uns sont des créations beaucoup plus actuelles, voire le travail de conteurs contemporains. Quelques contes étiologiques nous ont été fournis par l’éditrice.

De même, à chaque fois que nous étions sûrs de l’origine géographique d’un conte, nous l’avons systématiquement précisée.

Les contes que nous avons réunis dans cet ouvrage sont issus des différentes régions du pays. Lorsque nous étions sûrs de l’origine géographique précise d’un conte, nous l’avons systématiquement indiquée. Dans le cas contraire, c’est que le conte est commun à plusieurs régions, ou bien que son origine nous est inconnue. Pour plus de clarté, la carte ci-dessous représente les aires linguistiques actuelles. Elle permettra à chacun de situer l’origine géographique des contes.

Bonne lecture !

Animaux

Les Quatre Frères et les HyènesConte afar

Il était une fois quatre frères qui avaient toujours vécu ensemble. Leur case avait été bâtie non loin d’une immense forêt, qui était restée jusqu’alors complètement inexploitée.

À vrai dire, aucun des frères n’avait jamais eu envie de s’aventurer dans cette forêt, car elle était connue pour être le domaine exclusif du roi des hyènes. Des dizaines d’hyènes y erraient en effet jour et nuit. Elles surveillaient la forêt en permanence, de façon à dissuader même les plus téméraires d’y pénétrer.

Néanmoins, un beau matin, les quatre frères décidèrent de partir à la découverte de cette fameuse forêt. Ils s’approchèrent prudemment de la lisière du bois, faisant attention au moindre bruit. Mais rien ne se produisit. Les frères, rassurés, se dirent qu’il n’y avait pas de danger, et décidèrent de s’y enfoncer plus profondément. Ils marchèrent plus d’une heure, puis ils firent une pause. Ils regardèrent autour d’eux, mais rien de plus ne se produisit, aucun bruit. Après quelques minutes, les frères se remirent en route d’un pas décidé. Mais, lorsqu’ils arrivèrent au cœur de la forêt, ils se retrouvèrent subitement encerclés par une bande d’hyènes.

Le roi, qui était dressé sur ses pattes, était entouré des autres hyènes. Il interpella sèchement les frères, d’un ton autoritaire :

– De quel droit osez-vous vous aventurer dans ma forêt ? Qui vous a donné la permission de pénétrer à l’intérieur de mon royaume ?

Les quatre frères demeuraient silencieux, ne sachant que répondre. Le roi se tourna vers l’aîné et lui demanda :

– En quoi as-tu foi ?

L’aîné répondit :

– J’ai foi en Dieu, le créateur de ce monde. C’est lui qui m’a créé, qui a planifié ma vie. C’est lui qui a également décidé du jour où je mourrai… Je n’ai donc absolument rien à craindre, car je sais que tout est prédestiné.

Le roi se tourna vers le deuxième frère et lui posa exactement la même question :

– En quoi as-tu foi ?

Le deuxième frère répondit :

– J’ai foi dans le clan de notre village. Tous sont fiers et braves et personne ne laissera jamais l’un de nous mourir. Si une personne me tue, tout le clan viendra pour me venger et pour tuer mon assassin. Je n’ai donc absolument rien à craindre.

Le roi des hyènes se tourna vers le troisième frère et lui posa la même question :

– En quoi as-tu foi ?

Le troisième frère répondit :

– J’ai foi en la terre mère. C’est elle qui m’a donné la vie. C’est en elle que je serai enterré le jour de ma mort. J’ai donc confiance en elle…

Le roi se tourna enfin vers le quatrième frère et lui posa la même question. Ce dernier répondit :

– Oh, en ce qui me concerne, j’ai foi en vous, les hyènes. Tu vois, plusieurs de mes amis sont des hyènes et j’ai foi en leur puissance et en leur bonté, tout comme en toi-même.

Le roi des hyènes interpella ses sujets et dit d’un air solennel :

– Regardez… Cet homme a foi en son Créateur, et nous ne pouvons pas nous battre contre Dieu. Il vaut donc mieux le laisser partir. Celui-ci a foi en son clan, et nous ne pouvons pas courir le risque d’avoir à combattre tout un village, alors nous allons également devoir le laisser partir. Celui-ci a foi en la terre mère, mais qui peut donc vivre sur terre et se battre contre elle ? Nous allons donc lui aussi laisser s’en aller. Mais le quatrième a foi en nous, les hyènes, mais nous n’allons tout de même pas nous battre entre nous… Allons-y : attrapons-le et mangeons-le !

Et c’est ainsi que les hyènes se jetèrent sur lui.

La Mule et l’HyèneConte afar

Saviez-vous qu’il y a bien longtemps l’hyène vivait tout là-haut dans les cieux et la mule ici-bas, sur terre ?

L’hyène avait l’habitude d’hurler à l’entour afin de se faire la voix, qu’elle trouvait particulièrement mélodieuse. La mule, quant à elle, priait, encore et encore, en disant ceci :

– S’il vous plaît, Seigneur, faites que cet animal à la voix si majestueuse puisse descendre sur terre !

Il faut croire que Dieu finit par l’écouter car l’hyène descendit bientôt sur terre. L’hyène observa la mule avec une certaine méfiance, à cause de ses grandes oreilles : elle était persuadée que c’était des cornes… Elle eut donc peur de s’attaquer à elle, même si elle mourait d’envie de la dévorer, tandis que la mule, de son côté, mourait d’envie de se lier d’amitié avec cette hyène dont elle aimait tant la voix… Donc, l’hyène voulait dévorer la mule, alors que la mule voulait être l’amie de l’hyène !

Un beau matin, l’hyène alla trouver la mule et lui proposa la chose suivante :

– Et si nous nous retrouvions toutes les deux pour jouer ensemble au football ?

La mule répondit :

– Oui, avec grand plaisir, c’est une excellente idée !

Les deux animaux se retrouvèrent ainsi sur le terrain de football, mais avant de commencer la partie, l’hyène fixa la mule et lui dit :

– Par contre, il nous est interdit de jouer avec des armes pointues : donc, avant de commencer la partie, je te prie de bien vouloir ôter ton arme…

La mule répondit, surprise :

– Mais de quelle arme pointue me parles-tu donc ? Je ne suis pas armée…

L’hyène renchérit ;

– Eh bien, je te parle de ces cornes-là, celles qui sont juste au-dessus de ta tête !

La mule répondit :

– Mais ce ne sont pas des cornes ! Regarde un peu comme c’est souple ! Ce sont juste mes oreilles !

L’hyène mordilla un peu une oreille, puis l’autre, et serra d’un coup sa mâchoire. Surprise, la mule s’écria :

– Aïe ! Mais qu’est-ce que tu fais ? Ton comportement me semble bien impoli !

L’hyène répondit :

– Si tu t’imagines que nous allons pouvoir devenir amies, c’est que tu es bien naïve et bien stupide !

Le lendemain, l’hyène et la mule se croisèrent de nouveau près de la rivière. La mule était en train de boire en aval, et l’hyène en amont. L’hyène toisa la mule du regard, puis s’exclama :

– Et toi, là-bas, tu es en train de salir mon eau !

Étonnée de cette remarque, la mule répondit :

– C’est absolument impossible puisque je suis en train de boire en aval.

L’hyène insista :

– C’est pourtant ce que tu es en train de faire !

La mule répondit :

– Écoute un peu, Hyène, si tu veux m’attaquer, vas-y, mais arrête un peu de chercher des prétextes !

Brusquement, l’hyène bondit. Elle se jeta sur la mule et la dévora.

La morale de ce conte est que si vous laissez vos ennemis entrevoir vos faiblesses, ils n’hésiteront jamais à s’en servir tôt ou tard contre vous.

L’Hyène, le Renard et le SingeConte tigré

L’hyène, le renard et le singe vivaient tous les trois dans la même case. Un beau matin, ils décidèrent de partir à la chasse. En guise de « chasse », ils se contentèrent de dérober quatre vaches dans le champ d’un fermier du village voisin.

L’hyène s’écria :

– Il y a une vache pour chacun ! Mais à qui reviendra la quatrième ?

Le renard répondit

– À mon avis, il serait logique qu’elle soit pour le plus âgé d’entre nous…

Le singe et l’hyène étaient d’accord. Le renard se tourna vers l’hyène et lui demanda :

– Quand es-tu née ?

– Ce n’était pas l’année dernière, ni même celle d’avant, répondit l’hyène. Je suis née il y a bien des années…

– Et toi ? Quand es-tu né ? demanda le renard au singe.

– Oh ! répondit le singe. Je suis né le premier jour. C’était le jour où Dieu a créé le ciel et la terre.

– Ah oui, tu as raison, répondit le renard. Je m’en souviens très bien. D’ailleurs, le septième jour après ta naissance, on a même célébré l’événement. J’étais l’invité d’honneur.

– Tu es donc le plus âgé d’entre nous ! s’écrièrent l’hyène et le singe.

C’est ainsi que la quatrième vache fut finalement offerte de bon cœur au renard.

Le Renard et l’Hyène Conte afar

Il était une fois une hyène et un renard qui se promenaient tous les deux. En route, l’hyène tomba sur un taureau tandis que le renard croisa une vache. Un peu plus loin, l’hyène tomba sur un couteau, tandis que le renard trouva un fagot de roseaux.

Le renard s’exclama :

– Si je perds quelques tiges de mon fagot, je peux toujours en ramasser une autre, tandis que toi, si tu perds ton couteau, que te restera-t-il ?

– Donne-moi ton fagot, répondit l’hyène, et je te donne mon couteau en échange.

– D’accord, répondit le renard. De même, quand je vais découper ma vache, celle-ci ne va pas crier, tandis que ton taureau va se mettre à hurler.

– Alors donne-moi ta vache et je te donne mon taureau, dit l’hyène.

C’est ainsi qu’ils s’échangèrent toutes leurs affaires.

Ils poursuivirent leur route et découvrirent bientôt chacun une maison : celle de l’hyène ne possédait qu’une seule entrée, tandis que celle du renard, qui était pour ainsi dire en ruine, avait des murs troués de partout. Le renard se tourna une nouvelle fois vers l’hyène et lui dit :

– Si un ennemi vient par ce côté-ci, je peux toujours m’enfuir de ce côté-là en passant à travers un des trous, tandis que ta maison ne possède qu’une seule et unique entrée… Comment feras-tu pour t’enfuir ? Si tu veux, je te propose d’échanger nos maisons… Prends la mienne et je me contenterai de la tienne…