Coup de sang à la Marina - Hugues Poujade - E-Book

Coup de sang à la Marina E-Book

Hugues Poujade

0,0

Beschreibung

Découvrez des personnages hauts en couleurs et prêts à tout, dans une intrigue au coeur de la Marina Baie des Anges de Villeneuve-Loubet.

Avec Coup de sang à la Marina, l’auteur met en scène une intrigue policière, un genre dans lequel il ne s’était pas jusque-là aventuré, peu désireux de sacrifier à la veine régionaliste d’un trop grand nombre de polars, considérant aussi que la réussite des grands maîtres français des années 50, Manchette, Malet, Helena, Le Breton… vous me pardonnerez de ne pas les citer tous, rendait difficile de faire mieux. Il s’agit donc de relever un défi. Le point de départ de ce roman est un fait divers survenu à la Marina Baie des Anges de Villeneuve-Loubet, un quartier que l’auteur connaît bien et qui lui sert à planter le décor. Il y croque des personnages détonants, des flics bien sûr, un ancien légionnaire, un champion d’haltérophilie à la retraite, des plaisanciers, des patrons de bars et de restaurants, des notables locaux, des gays, des SDF, des excentriques et des petits délinquants, toute une faune qui anime cette immense ruche d’avant-garde conçue par le promoteur Jean Marchand. Parmi ces individus, certains se reconnaîtront peut-être, toutes ressemblances avec des personnages existants ou ayant existé n’étant pas tout à fait une coïncidence. D’autres feront des choix définitifs, n’hésiteront pas à bafouer la loi, à faire le coup de feu et s’associer avec des bandits de la pire espèce.
Dans quel but, et pour cacher quoi, il vous suffira de lire ces pages pour le découvrir et vous faire une idée du vrai coupable.

Aucun ange dans ce roman policier, le coupable se cache parmi une floppée de personnages qui se moquent de la loi et s'associent aux plus grands bandits de la région !

EXTRAIT

Mon sang ne fit qu’un tour. Je rattrapais mon verre de justesse.
— Tu me charries, Popeye ? Tu étais sûr à 100 % d’avoir identifié les Manango, et maintenant tu m’accuses carrément, ça ne tient pas debout !
— T’inquiète, les poulets n’en sauront rien… Le reste ne dépend pas de moi. Quand ils feront le rapprochement avec ta présence à la Marina, il faudra leur servir une soupe plus convaincante que celle que tu tentes de me vendre. D’autant qu’ils t’ont photographié et qu’il y aura de nombreux clients au Santa Lucia qui jureront que vous aviez l’air louche. Et pour couronner le tout, tu t’es pointé exactement là où José s’est fait descendre. C’est ballot, mais les flics sont trop cartésiens pour aimer tes coïncidences. À ta place, je me chercherais un bon avocat !
Réfrénant mon envie de lui en coller une, j’appuyais l’index sur sa veste.
— Je ne te le dirai qu’une fois, mais si j’apprends que tu nous as caftés, je t’envoie le capitaine. Quand il t’aura charcuté, je te promets que tu envieras le sort de Frankenstein. Tu piges ? Dans l’immédiat, bouge ton cul de là, qu’on ne voit plus ta sale gueule !
Il essaya de m’attendrir.
— Cela n’a rien de personnel, je sais tenir ma langue quand il le faut, et en plus j’adore ton chien…
— Je ne vois pas le rapport, m’irritais-je en surveillant Hermès qui donnait des signes de nervosité et n’attendait plus que le signal du départ.
Cette conversation m’ennuyait et je rhabillais le clodo pour l’hiver.
— Je dois partir, mon vieux ! Au lieu d’un avocat, c’est chez un notaire que je me rends. Je te donnerai l’adresse quand tu auras besoin de placer tes sous dans l’immobilier !

À PROPOS DE L'AUTEUR

Né à Rennes sur les quais de la Vilaine, Hugues Poujade après des études en Droit à Nantes a été pigiste pour des journaux et s’est intéressé aux écrivains voyageurs. Installé à Paris, il termine des études de Sciences politiques. Il se définit comme Grand voyageur, et est Intervenant à la Faculté de Droit et de Sciences économiques de Nice, spécialiste de l’Égypte moderne, entre politique et aventure.

Sie lesen das E-Book in den Legimi-Apps auf:

Android
iOS
von Legimi
zertifizierten E-Readern
Kindle™-E-Readern
(für ausgewählte Pakete)

Seitenzahl: 255

Das E-Book (TTS) können Sie hören im Abo „Legimi Premium” in Legimi-Apps auf:

Android
iOS
Bewertungen
0,0
0
0
0
0
0
Mehr Informationen
Mehr Informationen
Legimi prüft nicht, ob Rezensionen von Nutzern stammen, die den betreffenden Titel tatsächlich gekauft oder gelesen/gehört haben. Wir entfernen aber gefälschte Rezensionen.


Ähnliche


Hugues Poujade

Coup de sang à la Marina

Roman

© Lys Bleu Éditions – Hugues Poujade

ISBN : 978-2-85113-755-5

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

Du même auteur

Samir (roman, éd.Arha, 2012)

Le vendeur de pho(roman, éd.Ovadia, 2014)

La révolution du Nil(roman, éd.Ovadia, 2015)

Étreintes parisiennes(collectif « Cher désir », éd.Riqueti, 2016)

Le cimetière des Ravageurs(roman, éd.Ovadia, 2017)

Jean-Edern Hallier, cet écrivain qui a raté l’Académie française(essai, éd.Edilivre, 2018)

La prière des mécréants(roman, éd.Riqueti, 2019)

1

« Qui touche la mer, touche le politique. Qui aime la mer, aime le risque et Marina ! »

Jean Marchand

Un meurtre à Villeneuve-Loubet ? L’absurdité de cet acte odieux écornait les certitudes d’une population prospère, composée à près d’un quart de retraités. Pas étonnant dans ces conditions que certains refusent d’y croire.

Pourquoi Aurélie, pourquoi pas une autre ? Travaillant dans un bar à Cagnes, violentée par son compagnon, un ouvrier électricien jaloux de ses fréquentations, elle était morte d’un simple coup de poing. Une nuit de garde à vue avait suffi aux gendarmes de la brigade autonome, installés dans les locaux flambant neufs du Pôle Escoffier, pour recueillir les aveux du jeune homme.

Bien qu’à proprement parler la serveuse n’ait pas été tuée sur Villeneuve, son petit ami l’avait enterrée sur la commune dans un fossé bordant l’exploitation agricole de ses grands-parents. D’un côté la Rivière-du-Loup, de l’autre l’avenue Antony Fabre, il y mena tout droit les enquêteurs. Le rapport d’autopsie conclut à un enfoncement de la boîte crânienne ayant entraîné une hémorragie interne.

L’affaire tombait au plus mal ! Impossible désormais aux élus de revendiquer la stabilité des chiffres de la délinquance, comme parfois on se félicite de la baisse du chômage. Il serait aussi plus délicat de convaincre les habitants qu’il s’agissait d’un havre de paix inaltérable.

Hasard ou pas, on venait de déjouer un plasticage contre le Marquis, monté par un groupuscule d’extrême gauche lui reprochant ses sympathies Front National. Célébrer l’anniversaire de Jean-Marie Le Pen dans l’enceinte du château avait été vécu comme une provocation. Quoi qu’il en soit, l’attentat n’avait qu’endommagé le pont-levis, et les acteurs de ce fiasco s’étaient retrouvés sous les verrous.

Pour résumer à Villeneuve, il ne fallait pas exagérer les agressions physiques, les cambriolages en recrudescence pendant la période estivale, les vols de scooters, ou les détériorations du mobilier urbain. Des mesures avaient été prises par la nouvelle gendarmerie. On avait intensifié les contrôles d’alcoolémie le samedi soir, multiplié les rondes dans les lotissements, s’en remettant aux CRS pour la sécurité des plages.

Après cette brave fille qui ne méritait décidément pas ce qu’elle avait enduré, on aurait pu imaginer que le pire était derrière nous. La suite prouva que les statistiques réservent parfois des surprises.

Combattant la fatalité, les Villeneuvois commémoraient en grande pompe le séjour en 1538 de François 1er dans leur village. Une reconstitution qui se voulait exemplaire, fidèle autant que possible à la vérité historique. D’habiles couturières et d’ingénieux accessoiristes se chargeaient des retouches, rapiéçaient les étoffes Renaissance, sans ménager leur peine. Sachant cela, les figurants en prenaient grand soin, conscients du privilège qui leur était accordé. Ils paradaient deux jours d’affilée, le temps des ripailles, pendant lequel la circulation automobile était déviée par l’avenue de la Libération.

Gueux et gens de haut lignage, une armée de bénévoles vêtus de capes, de pourpoints en velours, de broderies, de fines dentelles, de fraises et de haut-de-chausses, participait à la manifestation. Juché sur un destrier qu’il avait parfois du mal à maîtriser, bénissant ses sujets aux côtés de sa cousine la comtesse de Tende, le roi progressait sous les vivats populaires le long des rues pentues.

Élixirs à la bave de crapaud, danses à trois temps cadencées au millimètre, lancers de drapeaux, initiation à l’arbalète, démonstration d’un soufflet de forge et du marteau à deux têtes, la foule se pressait autour des grands personnages de la cour.

Le casting était sévère. Sa Majesté se devait de ressembler au portrait dessiné par Jean Clouet en l’an 1530. Un professeur des écoles incarnait cette silhouette imposante, cette barbe et ce long nez hautain affublé d’un béret et d’une plume d’autruche. Sélection tout aussi rigoureuse, plusieurs figurantes avaient été recalées pour interpréter Diane de Poitiers.

À l’époque des grandes favorites, le meurtre se pratiquait comme un art. On s’étripait à qui mieux mieux, on s’empoisonnait, on s’écharpait dans des joutes stupides. La Chambre ardente se réunissait sur ordre du roi pour instruire les procès. Très peu se terminaient par un acquittement.

Le spectacle faillit s’arrêter lorsqu’un violent orage s’abattit sur les festivités, ruinant les décors, anéantissant les tavernes et les échoppes dressées sur le parking qui jouxtait la rivière.

Il y eut aussi ces fameuses épidémies qui décimèrent les autochtones, puis sous la municipalité d’Augustin Bernard la disparition du ver à soie. Préparant cette catastrophe, les cocons avaient dépéri, de plus en plus rares sur les branches des mûriers, avant qu’à leur tour les filatures ne disparaissent. Le blason de Villeneuve récupéra les cocons, pas les ouvriers.

Ces drames estompés s’imposèrent d’autres combats.

On se souvient des chamailleries à propos de la Marina, un marécage infesté par les moustiques. Les réfractaires dénoncèrent la folie des ingénieurs.

« Au niveau du développement des marinas, ce qui compte c’est de savoir si on construit sur le domaine public maritime, si on construit en bord de mer ou à l’intérieur des terres. Quoi qu’on fasse, ça s’appelle toujours une marina.Une vraie marina, c’est un ensemble immobilier construit sur le domaine maritime au bénéfice de quelques privilégiés. On nous confisque notre mer, notre vue, nos plages ».

Les partisans du projet saluaient le génie de bâtisseurs, pionniers d’un urbanisme en pleine mutation. Pour bien marquer leur différence, ils se firent appeler « les Mariniens ».

Baptisés Amiral, Baronnet, Commodore, et Ducal, les bâtiments s’inscrivaient dans une continuité alphabétique qui leur donnait un sens.

Nous étions le 18 décembre. Le Ducal allumait les néons rouges de la nouvelle année à la verticale de ses cages d’escaliers. Un spectacle que les automobilistes revenant par la RD6098 découvraient depuis la Chapelle du Cros-de-Cagnes.

À rebours de l’image élitiste d’un quartier à part, la Marina avait vaincu les préjugés et fidélisé sa clientèle.

Celui qu’on avait surnommé le capitaine comptait parmi les plus anciens. Une incurable tête de nœud, gardant toujours un mot tendre ou une gâterie dans la poche pour mon chien. Sans doute cela nous avait-il rapprochés !

Ses yeux clairs, son pif dilaté et ses guibolles décharnées me l’avaient rendu sympathique. Sous sa gampette délavée, l’ancien légionnaire à la tignasse blanche ressassait sa jeunesse enfuie, Slotervaart dans la banlieue d’Amsterdam, et les échauffourées avec la police.

Un brin chauvin, des trémolos dans la voix, il n’en éprouvait pas moins pour le propriétaire de la Supérette une admiration sans bornes, tous deux ressortissants de cette monarchie constitutionnelle qu’on appelait les Pays-Bas. Tétant sa cigarette, il parlait de l’épicier comme d’un frère.

— Tu te rends compte, ce mec parti de rien qui dirige un empire ! Remarque, si j’avais mieux calculé, j’aurais peut-être fini conseiller technique d’un tyran africain. Je vivrais dans un palais, à me la couler douce sous les cocotiers, entouré de mes négresses et de leurs nombreux bâtards.

Le collègue frison, avec sa mine de protestant à la Wouter Otto Levenbach (nom du chanteur Dave à l’état-civil), possédait en réalité un sens aigu du commerce qui n’était que l’apanage des grands travailleurs. Il avait agrandi son magasin, racheté la Maison de presse, viré le gérant du Just Before, et récupéré les murs.

Le capitaine était intarissable. Il est vrai que son compatriote, au-delà de la crèche en coton polystyrène qui enlaidissait sa vitrine à Noël, d’un accent à couper au couteau et de fautes de syntaxe épouvantables, se dépensait sans compter pour les clients. À chaque problème sa solution. Depuis la vandalisation du DAB, l’automate qui distribuait les billets sur le port, il s’était même improvisé bureau de change.

— Il a le cœur sur la main, complétait mon ami, une périphrase pour avouer que l’autre lui avait prêté de l’argent.

Seule ombre au tableau, quelques pochetronnes qui squattaient les cafés, des mastodontes de plusieurs quintaux, exhibant leurs varices, promenant des clebs ridicules et s’épanchant entre deux verres sur des secrets connus d’elles seules. Le 3ème jeudi d’octobre, elles ne manquaient jamais la cérémonie du Beaujolais servi gratis à l’entrée de Super Marina par le proprio.

En cas de mauvais temps, elles traînaient leurs gros derches de bar en bar, goûtaient toutes sortes de breuvages, s’avachissaient les yeux vitreux, indécollables de leurs banquettes. Estimant n’appartenir qu’à la commune du Loubet, un habitat côtier fortifié du 11ème siècle, avant que les deux bourgs ne fusionnent, elles se sentaient assez peu villeneuvoises et ne manquaient pas de le souligner.

En ce qui me concerne, je venais d’autres rivages, une région à l’ouest de l’hexagone, riche en côtes rocheuses et en tempêtes, où se révélaient à marée basse des merveilles de crustacés. M’était resté le goût de l’air iodé, des bigorneaux, des bombardes et des binious.

2

Bernard Tich c’est mon nom, je n’en changerais pas pour tout l’or du monde. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, je ne suis pas né au pays des quetsches et des mirabelles. Rien à voir non plus avec les écureuils de Disney ou les pastilles à la menthe vendues aux caisses de Géant Casino.

Comme le baron Bich, l’inventeur des stylos, un génie précurseur qui vivait en Suisse mais possédait des terres dans les Alpes-Maritimes, le h ne se prononce pas.

Mes amis m’appellent par mon diminutif Titi, parfois simplement Nanard. Je déteste cette habitude qu’ont les gens d’écourter votre nom, par paresse ou par crainte d’avouer leurs lacunes en orthographe.

Lundi 19 vers 8 h 30, assis devant une noisette et un croissant beurre au cybercafé Le Lavoir, j’épluchais l’édition cagnoise de Nice-Matin. Je reluquais les corbeilles à linge qu’on enfournait dans les tambours des machines à laver au fond du restaurant. Beaucoup d’étrangers, des marins de passage qui relâchaient, des minima sociaux qui croyaient qu’on vivait plus heureux en ne travaillant pas, quelques retraités venus s’inventer une vie au long cours.

Parfois, le patron haussait la voix, puis le calme revenait.

Je m’attardais ce jour-là sur un fait divers que beaucoup autour de moi commentaient.

S’il ne s’était agi de Villeneuve, je n’y aurais pas prêté attention. Kim la serveuse venait de m’apporter mon ticket dans une soucoupe. À son âge, l’insouciance est de mise, et elle me laissa à ma lecture.

Repoussant le morceau de sucre sur le bord de ma tasse, je lus qu’un accident s’était produit au 10ème étage du Commodore dans la nuit de samedi à dimanche. Le corps sans vie d’Etienne Issautier, un jeune homme de 25 ans, avait été découvert au petit jour par un insomniaque qui promenait son chien dans les jardins de l’immeuble. La victime n’avait pas eu la chance de cette femme, tombée du 5ème après une dispute conjugale, qui avait atterri sur une toile de store et s’en était sortie avec quelques ecchymoses et deux côtes cassées.

Mes bras tremblaient, floutant les caractères du journal.

J’avais croisé Étienne à plusieurs reprises. Parce qu’il fréquentait le Purple à l’époque, il s’était attiré toutes sortes d’ennuis. Trop d’altercations et d’histoires de drogue. La boîte avait fermé et seuls les cabots qui pissaient sur la porte close s’en étaient aperçus.

Si on en jugeait par l’état du cadavre, la chute n’était peut-être pas l’unique responsable des multiples contusions et fractures constatées. Comme les grenouilles aplaties sous les pneus des camions-bennes de Veolia, il ne ressusciterait pas.

Flics et pigistes du boulevard du Mercantour1 se renvoyaient la balle. Dans l’aube silencieuse qui commençait à poindre, difficile en effet de concevoir qu’un type se soit balancé des étages supérieurs, heurtant les balcons, sans que personne ne l’ait entendu. Pourquoi les voisins s’étaient-ils inventé des alibis, si ce n’est pour que la police ne vienne pas fouiller leur vie privée ?

La PJ de Nice était chargée de l’enquête. Restait à déterminer, en fonction de l’heure du crime, estimée entre 5 h et 5 h 30, si les voisins pouvaient témoigner d’appels au secours ou d’une bagarre.

Le plongeon n’avait duré qu’une fraction de seconde et les spéculations allaient bon train.

Un SDF terminant de cuver sous un massif de cycas avait été arrêté. Popeye répétait qu’il dormait, qu’à son réveil il ne se souvenait que de fourmis géantes gambadant sur la pelouse. Comment croire de telles conneries ! Sa tête scalpée d’Iroquois, ses tatouages grossiers, cela faisait un peu court pour convaincre les flics qu’ils tenaient une piste.

Charlotte sur la tronche, les techniciens de la police scientifique avaient perquisitionné l’appartement, collectant les empreintes, les traces ADN, prélevant des résidus de cannabis. Les auditions des proches se poursuivaient, ne livrant aux policiers que de vagues indices. Ils précisèrent dans leur rapport que le défunt occupait un logement appartenant à son grand-père.

Je réfléchissais, écartant les miettes du croissant sur la table, quand je vis débarquer le capitaine. Il n’hésita pas et prit une chaise. Son café avalé, il écrasa son mégot avant de m’inviter à lui emboîter le pas.

En m’asseyant dans la cabine de La Mignonne, je zappais la pin-up sur le calendrier qui égayait la couchette, le pull remonté et la poitrine opulente, le réchaud et la toilette sommaire. Je fis également abstraction de la télé allumée dans le poste d’équipage. Sous une carte marine souillée par les canettes de bière et la graisse de pâté, je craignis que ce foutoir ne cache Dieu sait quelle turpitude.

Remplissant les verres à moutarde qu’il utilisait pour le whisky, le capitaine évoqua son incorporation dans la Légion étrangère après une grosse bêtise. À ce que je compris, un braquage avait mal tourné à la Nederlandsche Bank et on lui avait mis le couteau sous la gorge.

Un seul choix puisqu’on l’avait dénoncé, quitter son pays. Pourquoi pas la France ? Pourquoi pas, en échange d’une amnistie, s’engager dans le 1er Régiment Étranger, le corps expéditionnaire des légionnaires d’Aubagne ?

— J’ai pas mal d’amis à la Marina. Je parle avec les balayeurs, les livreurs, les jardiniers, les résidents, les Allemands, les Italiens, et même les Anglais, se flatta le vétéran. Je dors mal et je me lève tôt, alors j’en profite. Beaucoup roupillent encore à l’heure où j’enquille par le boulevard Tabarly et la plage de la Batterie. Il n’y a pas foule dans les rues, les rideaux sont baissés et les terrasses de bistrots fermées. Ce matin, je me suis pointé à 8 h chez les Corses de la Fighière. Ceux-là m’ont l’air d’en savoir plus long qu’il n’y paraît sur les potins qui circulent au Commodore. Ils ont essayé de m’embobiner en m’offrant un café, mais ce sont de vraies teignes ! J’ai cru qu’ils allaient me facturer le verre d’eau !

Je me sentis obligé de l’interrompre, juste pour le taquiner.

— Il faut bien qu’ils amortissent la redevance qu’ils versent à la Mairie ! Entre le parking saturé l’été, les latrines, et les roulottes à churros, j’avoue qu’au départ je ne donnais pas cher de leur peau. Enfin, sans vouloir t’offenser, tu n’es pas la publicité idéale pour attirer la clientèle…

Ne payant pas ses PV, ni les rappels et les majorations, le capitaine garait le plus impunément du monde son affreuse Taunus aux abords de la Fighière, un moteur V6 affichant 250 000 kilomètres. Quand il mettait le contact, un épais nuage qui mettait des plombes à se dissiper sortait du pot d’échappement. Il opina, forcé de souscrire à ma démonstration.

Je revins à la charge, d’autant que le Batave déployait un certain talent pour noyer le poisson.

— Et ils t’ont raconté quoi les Corses, à part qu’il s’agissait probablement d’un règlement de comptes entre camés ?

— Ils sont persuadés que leur voisine Mado, leur concurrente la plus proche, a magouillé une saloperie et qu’elle cracherait sa valda si on s’en donnait la peine. De leur plus bel accent insulaire, ces enfoirés ne se sont pas privés d’insinuer que son emplacement sur la plage n’était pas le fruit du hasard !

— Mado, tu penses que c’est plausible et qu’on pourrait l’interroger ?

— Tout doux, moussaillon, si on la brusque, je la connais, elle risque de se fermer comme une huître !

— Ça lui rapporte toujours autant sa guitoune ?

— Si tu ne crains pas les tinettes bouchées et les odeurs de pastis, tu n’as qu’à m’accompagner, on ne sera pas trop de deux pour lui tirer les vers du nez.

— Gonflée, la vieille ! Après la fermeture de son boui-boui l’été dernier, je pensais qu’elle s’était mise aux normes.

— La saison approche, et si t’arroses qui il faut, tu obtiens toutes les autorisations que tu veux pour rouvrir, ricana le légionnaire amusé par ma candeur.

S’il était un chapitre sur lequel il ne fallait pas chatouiller Mado, c’était la propreté. Elle s’énervait vite. Les agents de la Poste annexe du Quartier des Rives en avaient fait les frais. Un jour où je passais pour un recommandé, elle s’en était prise à l’une des guichetières, l’accusant de saboter le service public. Prenant les clients à témoin, elle jura contre la machine à affranchir, secoua les présentoirs de toutes ses forces, menaça d’une pétition au Ministre. Heureusement, elle ne me reconnut pas.

Réfugié contre la porte du conseiller financier de l’établissement, mon chien se fit aussi discret que possible. Entre elle et lui, plus question de complicité, finies les caresses, plus de spéculos ni de gamelle d’eau fraîche.

— Fonctionnaires, éructait la mégère de sa voix de crécelle ! Vous le faites exprès ? Même pas foutus d’expédier un colis sans vous tromper d’adresse. Ah, elle est belle la France avec des abrutis comme vous !

Au niveau langage, je constatais qu’entre le capitaine et sa copine il n’y avait que l’épaisseur d’une feuille de cigarette. Ces deux zèbres étaient sur la même longueur d’onde.

Le capitaine sortit une clope, content d’avoir échappé au cancer de la gorge que lui prédisaient les médecins. Quant au packaging morbide de ses Camel, il n’avait pas freiné sa consommation. Non seulement il achetait toujours ses paquets à la frontière italienne, pourvu qu’un copain l’emmène à Vintimille, sa Taunus ayant tendance à chauffer sur l’autoroute, mais les photos censées effrayer les fumeurs lui semblaient de la gnognotte comparée aux atrocités dont il avait été témoin au cours de ses campagnes. Au Tchad, en Côte d’Ivoire, ou quand il emballait les cadavres dépecés par les hyènes dans la savane de Centre-Afrique, il avait vu bien pire.

Cette phrase magnifique résumait sa carrière :

— Je suis un guerrier, pas une fiote. Celui qui me fera chier n’est pas né ! À ma mort, c’est décidé, je me réincarnerai en lion. Demande aux mouquères du bled si mon braquemart ne les impressionnait pas davantage que les galons de nos officiers !

Je rigolais de bon cœur, peu désireux d’engager un débat. Il était capable de m’en retourner une, de me vanner sur ma gueule qui lui rappelait un collègue de régiment. Au retour d’une expédition dans le fech-fech, harcelé pour ses mœurs homosexuelles, le bidasse s’était pendu à une branche de ficus.

Je décidais de le suivre. Advienne que pourra et merde à Jean Marchand, l’inventeur de la Marina !

Mado servait une pêche Melba délicieuse, ce fruit charnu et sucré, poché dans un sirop vanillé, ébouillanté, puis adouci d’une glace vanille et d’un coulis de framboise. Le Villeneuvois Auguste Escoffier l’aurait sans doute décorée pour bons et loyaux services rendus à l’art culinaire.

Cela ne me consolait pas des ralentissements sur cette route si fréquentée l’été, que nous continuions par commodité d’appeler la Nationale 7. J’avais beau avoir assisté à la démolition des garages et des stations-service remplacés par de coûteux ronds-points, j’aimais Villeneuve, personne ne me l’enlèverait.

Il y avait moins de cent mètres pour franchir les barrières menant au Quai des grands yachts de la Marina. Sur les murets, de nombreux chats dansaient au soleil, ravitaillés en croquettes par des vieillards qui prenaient soin d’eux.

3

Clopinant entre les vélos et les joggers, poursuivant sur les galets, nous coupâmes vers une cabane en bord de plage. Entre tables et parasols, nous n’eûmes que l’embarras du choix pour nous installer à une place ombragée. L’ESAT embauché comme serveur prit notre commande. De loin, nous saluâmes la patronne.

À peine la mousse de nos Leffe nous effleura-t-elle les lèvres, que le capitaine se redressa et poussa un cri de ralliement qui fit sursauter les consommateurs. Cela rappelait le fameux « À moi la légion ! » et un couple de touristes moscovites s’en émut, cherchant à comprendre la raison de ce raffut.

Chez eux, le provocateur aurait été évacué par la police, et on ne l’aurait pas relâché tout de suite. Sur le marché de Birioulovo, les rafles de migrants du Caucase et d’Asie centrale étaient monnaie courante et les défenseurs des droits de l’homme avaient cessé de s’en émouvoir. Gare sinon aux milices de Poutine !

Tué sur un trottoir ou croupissant dans un goulag, qu’il s’agisse de Litvinenko, Nemtsov, Navalny, ou Estemirova, mieux valait ne pas contredire le dictateur.

Un habitué rangea ses lorgnons, ajusta son chapeau, et se carapata, contrarié que cet énergumène se soit exprimé sur un ton que personne ici n’avait l’habitude d’entendre.

Mado s’avança et nous serra la main. Sa trogne colorée par la brise de mer, les cheveux jaune paille, les poches du tablier agrandies par la manie d’y glisser les paluches, elle nous adressa un « Bonjour, messieurs » tonitruant.

Le capitaine n’y alla pas par quatre chemins.

— Dis-moi, il paraît que le jeune du Commodore bossait chez toi ?

— Qui t’a fourré cette drôle d’idée dans la tête, s’insurgea la commère ?

Helmut lorgna les environs. Un bruit de ponceuse nous parvenait du chantier naval.

— Je ne trahis jamais mes sources, minauda le capitaine, mais l’info est sûre. Nanard et moi, nous n’avons pas l’habitude de raconter des bobards pour nous la péter, tu me connais !

D’un geste du menton, j’acquiesçais, espérant que mon copain n’en rajouterait pas.

Mado s’énerva et secoua son torchon pour chasser les mouches.

— Vous charriez, les gars ! J’ai embauché ce gamin l’été dernier pour rendre service. Croyez bien que je le regrette. Avec ses dents noircies par la nicotine et sa tronche de blaireau, je me suis aperçue qu’il piochait dans le tiroir-caisse. Non seulement il a abusé de ma confiance, mais je n’ai pas porté plainte. Sa famille est villeneuvoise depuis des générations, alors je l’ai renvoyé chez Pôle Emploi avant qu’il ne me pompe la recette.

— C’est le plus gros employeur de France, fis-je observer, ressortant cette vanne qui n’amusait plus personne sur l’organisme en charge d’indemniser les chômeurs.

Le capitaine sourit, s’imaginant qu’un magot dormait quelque part dans la cabane. Chloroforme ou matraque, il suffirait de neutraliser la vieille.

Même saoule pourtant, il doutait qu’elle se laisse dépouiller sans réagir.

Certains sous-entendaient qu’elle possédait un révolver et savait s’en servir. Elle vivait pour son pognon, pour sa buvette, certainement pas pour faire crédit. Ses clients savaient qu’elle ne rigolait pas. Pareil pour les fournisseurs.

— Ce ne sont pas des philanthropes, moi non plus d’ailleurs, et la charité a ses limites, reconnaissait-elle. Mes dettes, je les règle comptant, sinon la banque me retient des agios, et je ne peux pas me permettre une rupture de stock, ça boufferait mon bénéfice !

Le légionnaire resta impassible. Il se voyait riche, remplaçant sa Taunus par un modèle plus récent, payant la tournée sur le port, alourdissant ses ardoises, oubliant même de rembourser ceux qui lui avaient avancé de l’argent, le pizzaïolo ou le vendeur de scooters. Cela n’entrait pas dans ses priorités.

Sachant cela, ses camarades de ponton, une institutrice qui logeait avec ses enfants sur un vieux gréement en bois, et un entrepreneur monégasque du BTP en instance de divorce, gardaient leurs distances. Une salière, quelques œufs en dépannage, ou le prêt d’un tire-bouchon, on s’en tenait au strict minimum. Pour éviter que le marin ne s’incruste, on lui faisait comprendre que ce n’était pas la peine d’en exiger plus.

— Au revoir Helmut, lui disait-on, comme on bannit un condamné !

Il m’expliqua qu’il n’aimait pas son prénom, qu’il avait rompu avec ses parents, mais qu’il n’avait pas changé de nom comme la légion le permettait. Il entendait donc en rester à capitaine.

Voyant notre perplexité, la patronne revint à la charge sur le grand-père d’Étienne.

— André Cerutti est un ancien champion d’haltères. De temps en temps, il vient jouer aux cartes et boire un coup. Le bonhomme a ouvert trois salles de sport qui marchent du feu de dieu. Il pensait les léguer à son petit-fils, il va devoir actualiser son testament !

Je pris note, sans grande conviction. Le couplet sur le souleveur de fonte étant clos, j’essayais de creuser.

— Votre ex employé, vous le qualifieriez comment, un gentil gars, un voleur ou un propre à rien ?

Les naseaux frémissants, le capitaine s’empourpra.

— Puisqu’on t’explique que la famille est nickel !

— Capitaine, je suis comme toi, je veux simplement comprendre. Ce n’est pas tous les jours qu’on dégringole du 10ème étage. Il n’y a pas à tortiller, le gosse s’est suicidé ou bien il s’est cru plus malin que les types qui lui fourguaient sa came. D’instinct, je pencherais plutôt pour la thèse de l’accident, la picole, un instant d’égarement, et hop il bascule, à moins qu’il ne soit devenu gênant pour quelqu’un.

Mado souligna le paradoxe, snobant le capitaine.

— Étienne fumait comme tous les jeunes, mais il ne dealait pas. Je vois mal des trafiquants le zigouiller pour quelques grammes de shit. Dans le coin, il ne dérangeait personne. Draguer les gonzesses de la Marina, boire des canons avec ses collègues du RSA, maquiller des mobylettes, je veux bien, de là à s’écraser quelques mètres en dessous de son balcon !

— Vous ne voyez rien d’autre ?

— Je me contente de gérer mon business, pas la rumeur. N’écoutez pas le capitaine, il vendrait sa mère contre une plaquette de beurre.

Douché, le légionnaire se renfrogna.

— Espèce de toquée, tes divagations n’ont d’égal que ta mauvaise haleine ! Il est vrai qu’en matière de salades, si j’en juge par le nombre de vieux chnoques comme cet André que tu rinces dans ton bar merdique, t’en connais un rayon…

Une mouette se posa sur le plancher, donnant à la tenancière l’occasion de souffler.

— À mon âge, on ne me bourre plus le mou ! Des mecs, j’en vois à longueur de journée, et je n’entretiens avec eux que des relations commerciales. Admettons que le bel André m’intéresse, il aurait de toute façon refusé de tromper sa Thérèse.

— Je croyais qu’il était veuf, bondit le capitaine ?

— Cela ne fait aucune différence. Et puis, qu’est-ce que tu en sais de la fidélité dans un couple, sale ivrogne ?

— Il est passé chez toi alors, finassa le capitaine ?

— Pas de danger ! Les poulets l’ont cuisiné toute la nuit. L’un de ses employés m’a raconté l’interrogatoire avant que vous n’arriviez ! Après ces émotions, vous avouerez qu’il a bien mérité une grasse matinée…

— Range ton mouchoir, on n’est pas flics, se moqua le soudard !

Mado leva les bras au ciel et fit s’envoler la mouette. Au passage, la bestiole lâcha une fiente qui rata de peu mes baskets.

Elle suivit les eaux profondes, caracolant vers l’aéroport, avalée par la fureur des réacteurs d’un A350 en plein décollage pour Zurich.

Avec les crêtes enneigées sur les Alpes du Sud, l’Italie en fond d’écran, je me rabattis sur le panorama en fer à cheval de la Baie des Anges.

Le capitaine retint l’effaroucheuse par le bras, prêt à négocier.

— On aimerait goûter tes encornets à l’ail, ce midi.

— Je n’ai pas été livrée, mais j’ai des ravioles à la crème de truffe en plat du jour, une spécialité de tata Mado, tu m’en diras des nouvelles.

— OK pour les ravioles !

Un grand sourire illumina les dents en or de l’hôtesse, soulagée que nous renoncions aux encornets.

— Vous ferez moins les marioles quand je vous présenterai la douloureuse.

— Qu’on t’en veuille ou pas, tout dépendra de ton pinard, tonitrua l’enflure, se fendant d’un claquement de la langue. Sors-nous du bon, la dernière fois tu m’as ruiné l’estomac !

— Ma cuvée Josselin, suggéra notre copine ?

Elle n’obtint pas de réponse. Là-bas, près des immeubles, le soleil obliquait, abandonnant le Commodore et se rapprochant de la barre en mille-feuille du Ducal. Nous n’allions pas nous laisser couper l’appétit pour si peu.

Nos limoncellos digérés, rebroussant chemin, nous partîmes affronter l’architecture tentaculaire de la Marina. Nous avions appris qu’André logeait quatre étages plus bas que la victime. Il ne nous restait plus qu’à investir ces halls carrelés, ces plaques de marbre réfléchies par des miroirs pompeux, pour apprécier la splendeur du site.

Munis de la recommandation de Mado, nous sonnâmes à l’interphone, et comprîmes que nous étions attendus.

Content que nous ne soyons pas membres des Témoins de Jéhovah, même si je surpris une moue contrariée quand il me vit en compagnie du capitaine, André Cerutti nous précéda.

Nous laissant découvrir la terrasse de son appartement à 180 degrés, à mi-chemin entre Nice et Antibes, la mer et la plage en arrière-plan, un établissement de thalasso qui végétait sur la gauche, il nous installa dans un salon cossu qui sentait l’amateur de brocante.

Passé le secrétaire en acajou et la vitre coulissante sur laquelle ricochaient les bruits extérieurs, notamment ceux des camions de livraison, les Airbus de la Lufthansa dominaient l’azur de leurs rugissements. Train sorti, les avions amorçaient leur descente toutes les cinq minutes, se posaient, roulaient jusqu’à l’aérogare n 1, pendant que d’autres décollaient.

Cette fois, le vol régulier de Lot Airlines rasa les vagues et arracha une langue d’écume en bout de piste.