Incompatibles - Tome 1 - Sandrine Rodrigues - E-Book

Incompatibles - Tome 1 E-Book

Sandrine Rodrigues

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Beschreibung

Ne dit-on pas que l'amour est proche de la haine ?

Lara est une assistante juridique à la vie bien rangée. Ses loisirs sont rares, et elle n'a confiance qu'en sa meilleure amie, Cassie, qui vit un amour fusionnel avec Romain, son petit ami. Alexandre, lui, est le frère de Romain. Expert-comptable et séducteur né, il ne pense qu'à sortir et à s'amuser, au grand désespoir de sa mère qui aimerait le voir marié. Alors qu'ils se détestent depuis le premier jour, Lara et Alexandre vont être forcés de se réconcilier pour faire plaisir à leurs proches. Mais deux ans à se disputer et à se lancer des piques ne s'oublient pas aussi facilement, surtout lorsque l'on a été blessé par les propos de l'autre. Cependant, ne dit-on pas que l'amour est proche de la haine ?

Plongez dans ce premier tome de la saga romantique Incompatibles et découvrez les prémices d'une relation tumultueuse...

EXTRAIT

Cassie et Romain nous font un signe de la main pour nous dire au revoir puis Alexandre démarre. Instinctivement, je m’agrippe plus fort à lui de peur de tomber.
Je suis contente qu’il tienne parole, Alexandre va lentement pour ne pas m’effrayer plus que je ne le suis déjà, le seul souci, c’est que le chemin qu’il prend n’est pas celui qui m’emmène chez moi.
C’est vrai, il ne connaît pas mon adresse ! Mais il m’emmène où ?
Je resserre ma main droite plusieurs fois sur son ventre, en espérant qu’il comprenne que je veux lui parler, mais il continue de rouler sans tourner la tête. Alors j’essaye de crier :
–Tu vas où, là ?
Je vois son casque tourner et j’entends :
–Dans un endroit qui va te détendre.
–Je veux rentrer chez moi, s’il te plaît.
Il ne me répond pas et je recommence à stresser.
Putain, mais où m’emmène-t-il ? Qu’est-ce que ça peut lui faire que je sois tendue ! Normalement, c’est lui qui me met dans cet état et ça ne le dérange pas ! Alors pourquoi ce soir il veut que je me détende ?
Dix minutes plus tard, il s’arrête devant un bar et me demande de descendre. Je le fais sans rien dire, je préfère me taire sinon je risque de me donner en spectacle dans la rue. J’enlève le casque et il fait de même.
–Ne me crie pas dessus. Nous allons seulement boire un verre pour enterrer la hache de guerre.
Je le regarde en plissant les yeux, j’essaye de savoir s’il est sincère ou si c’est une de ses ruses pour m’humilier publiquement.
–Viens, je te promets que tu vas passer un bon moment. Ensuite, je t’emmène chez toi.
Je le suis puis nous entrons dans le bar où la musique est assez forte et nous nous installons à une table. Nous regardons la carte et je me tourne vers la liste de cocktails sans alcool.
–Je vais boire une Tequila Sunrise, tu me suis ?

CE QU'EN PENSE LA CRITIQUE

Ce livre est très addictif, on en redemande et j’en suis vite devenue accro! Impossible de le lâcher ! - Bebeceque, Booknode

A PROPOS DE L'AUTEUR

Passionnée de lecture, Sandrine Rodrigues prend la plume lors d'un week-end en Suisse. S'ensuit l'incroyable histoire de la série Rien n'est acquis, qui comptabilisera plus de 400 000 lectures. Elle revient aujourd'hui avec Incompatibles, une romance teintée d'humour, qui connaît déjà un franc succès avec des milliers de lecture sur Wattpad.

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Sandrine Rodrigues

Incompatibles

Tome 1

1. La trêve

Un rayon de soleil s’infiltre dans la chambre, je me réveille doucement et m’étire. Je suis contente que nous soyons samedi car je vais pouvoir ne rien faire de toute la journée. Malgré ce beau temps, je n’ai pas envie de sortir. Je me lève pour prendre une douche puis je mets un tee-shirt et un bas de jogging afin d’être à l’aise.

Après m’être fait un café je me motive pour trier mes papiers, j’en ai une tonne ! Ce rangement me prend plus d’une heure. Lorsque j’ai fini, mon portable sonne.

–Salut Cassie.

–Salut Lara, alors tu es prête pour ce soir ?

–Mince !

–Ne me dis pas que tu as prévu autre chose.

–Non, j’avais oublié que c’était aujourd’hui, mais je n’ai rien de prévu.

–Donc, tu viens ?

–Oui. Sinon, tu vas m’en vouloir pour le restant de ma vie.

–Mais non, tu sais bien que je ne t’en veux jamais.

–Alors, je peux ne pas venir ?

–Non ! Lara, j’en ai marre de tout ça. Écoute, je ne vais pas te mentir, il sera là, mais fais un effort, je t’en prie.

–Oui, je vais venir. Mais si tu pouvais faire en sorte qu’on se dise juste bonjour et au revoir, ça serait super sympa.

–Tu sais comment il est. D’ailleurs avec Romain, on se demande si ça ne veut pas dire qu’il en pince pour toi au fond.

Ses paroles font monter une bouffée de chaleur en moi.

–Vous avez bu tous les deux ? On se déteste et le mot est faible, c’est pour ça qu’il est tout le temps en train de me faire…

–Ne sois pas vulgaire, s’il te plaît.

Je respire profondément en fermant les yeux.

–Désolée, mais il m’est insupportable.

–Oui, je sais. Mais mets-toi à notre place, c’est le frère de Romain et tu es ma meilleure amie. Je ne veux pas qu’on arrête de se voir à cause de lui.

–Tu as raison. Je vais prendre un Lexomil avant de venir.

–Il t’énerve autant que ça ?

–Je rigole. Je ne pourrai pas le casser si je suis stone.

Nous rions.

–C’est à quelle heure ?

–19 heures.

–Ok. Je viendrai un peu plus tôt pour t’aider.

–Super, merci. Je te dis à tout à l’heure.

–À tout à l’heure.

Je grimace en raccrochant.

Cassie sort avec Romain depuis deux ans, cet homme est adorable et en plus il est riche, beau, enfin bref, il a tout pour plaire. Son seul défaut, c’est qu’il a un frère insupportable, nous nous sommes détestés dès la première fois où nous nous sommes vus. Si on se retrouve dans la même pièce, c’est la guerre assurée. On se lance des piques, bien sûr, les siennes sont la plupart du temps salaces.

Une fois, on en est même venus aux mains. Je lui ai mis une de ces claques et il m’a attrapé les bras avec fermeté. Cassie a crié et Romain nous a séparés, on s’est fait disputer comme des enfants. Je crois avoir eu la honte de ma vie ce jour-là, heureusement qu’il n’y avait que nous quatre dans l’appartement. Depuis, Cassie et Romain ne nous invitent que lorsqu’il y a du monde chez eux, car il est vrai que comme ça on peut s’éviter. Et même si quelques piques sortent, nous nous tenons plus correctement.

J’appuie sur la sonnette et je suis accueillie par deux sourires. J’avance, nous nous prenons dans les bras puis nous entrons dans la maison. J’offre les fleurs à mon amie qui les met dans un vase et la bouteille à Romain qui me remercie.

–Chéri, tu peux faire visiter la maison à Lara pendant que je finis le gâteau, s’il te plaît ?

–Bien sûr, ma puce.

–Qu’est-ce que vous êtes mignons tous les deux.

Ils se regardent et sourient, je suis Romain qui me montre le premier étage. Il y a trois chambres, un bureau, une salle de bain et une suite parentale. Au rez-de-chaussée il y a la cuisine, le double séjour, une buanderie, une salle de bain et également une chambre. Lorsque nous entrons dans cette dernière, je vois Romain se tourner vers moi.

–Lara, j’ai demandé à mon frère de faire des efforts ce soir et je te demande d’en faire autant. Vous n’êtes pas obligés de vous parler.

–Tu me demandes de ne pas répondre à sa méchanceté gratuite ? Tu sais très bien qu’il ne va pas pouvoir s’en empêcher et que ça va m’énerver.

–J’en ai peur, dit-il d’un air désespéré.

–Pourquoi ça vous préoccupe autant Cassie et toi ? Ça fait deux ans que ton frère et moi nous connaissons et qu’on ne se supporte pas.

–Tu ne t’es jamais dit que c’est justement bizarre tout ça. Moi, je n’ai jamais vu deux personnes se détester autant dès le premier regard échangé.

–Non, Romain. Ne me dis pas que tu penses réellement qu’il en pince pour moi.

–Non, c’est pire. Je pense que vous en pincez l’un pour l’autre et que c’est votre manière de communiquer pour ne pas vous avouer vos sentiments.

–Quels sentiments ? À part nous détester, je ne vois rien d’autre.

–Excuse-moi l’expression, mais parler avec vous deux de ce sujet, c’est comme pisser dans un violon.

–Parce que tu lui en as parlé ?

–Oui et ce qui est drôle, c’est que vous m’avez répondu la même chose. Bon, je te demande juste de ne pas le provoquer, il m’a promis de ne rien dire ce soir.

–Attends, je te rappelle que c’est ton frère qui lance toujours les hostilités. Quand il m’a vue la première fois, il a dit : « Oh ! Un séquoia ! »

–Et tu te souviens de ta réponse ?

–Oui, je l’ai appelé girafe atrophiée.

Romain sourit et j’en fais autant en me remémorant ce moment.

–Tu vois, tu souris.

–Parce que c’était drôle, mais quelquefois il va trop loin.

–Je suis d’accord avec toi, mais tu ne te retiens pas non plus.

–C’est vrai, il m’énerve tellement. C’est plus fort que moi, je suis obligée de lui répondre… Bon, je vais faire un effort, promis.

–Merci Lara.

Nous retournons dans la cuisine rejoindre mon amie.

–Vous avez fait les choses en grand pour votre crémaillère.

–Nous serons une trentaine, il faut bien les nourrir, répond Cassie.

Je l’aide à faire son glaçage, nous mettons la table, préparons les apéritifs puis les premiers invités arrivent. À chaque fois que la sonnette retentit, mon estomac se tord, j’appréhende que ce soit Alexandre qui arrive.

À 20 heures tout le monde est là sauf Alexandre, ce que je trouve bizarre.

–J’espère qu’il ne lui est rien arrivé, dit Romain en prenant son téléphone.

La sonnette retentit et sans savoir pourquoi, je me mets à trembler. Cassie, qui a vu ma réaction, me prend la main en fronçant les sourcils. Je lui souris pour la rassurer. Romain ouvre la porte et Alexandre apparaît avec un large sourire aux lèvres.

Il est brun avec une mèche rebelle qui lui tombe sur le front, sa peau est légèrement bronzée, il est grand, plutôt mince, et je dois avouer qu’il a des yeux gris magnifiques. Je suis sûre que s’il n’était pas aussi con, je le trouverais séduisant. Il porte un jean et un blouson de motard, il a un casque de moto à son bras qu’il pose sur le meuble de l’entrée. Lorsqu’il relève la tête, son regard fait le tour de la salle puis il se pose sur moi. Il s’avance en me fixant pour me troubler et me provoquer, j’en suis certaine ! Je soutiens son regard jusqu’à ce qu’il se tourne vers Cassie pour lui faire la bise puis vers moi.

–Bonsoir Lara, c’est un plaisir de te revoir, dit-il avec un beau sourire.

Si je ne le connaissais pas, je penserais qu’il est sincère !

–Bonsoir Alexandre, je réponds en m’efforçant de sourire également.

Il se penche pour me faire la bise et instinctivement je recule. Nos regards se croisent lorsque nous nous rapprochons puis il me fait un baiser sur la joue.

Qu’est-ce qui lui prend ? Il joue à quoi là ?

Je prends mon verre et en bois une gorgée pour reprendre mes esprits, je vois Cassie qui me sourit et je plisse les yeux comme pour lui dire. C’est suspect ! Comme elle me connaît par cœur, elle secoue la tête pour me dire que non puis se lève pour aller dans la cuisine.

–Lara tu peux m’aider, j’ai besoin de toi s’il te plaît ?

Je la suis sans rien dire et lorsque nous entrons dans la cuisine elle se tourne vers moi.

–Il a fait un effort, alors ne sois pas négative.

–Avoue qu’il en fait un peu trop quand même. La seule fois où nous avons eu un contact, c’est quand ma main a atterri sur sa figure.

–On parle de moi ? dit Alexandre en entrant dans la cuisine avec Romain.

–Oui, tu en fais un peu trop.

–Mon baiser t’a choquée ou tu as aimé ?

Une tension envahit mon corps.

–Stop ! dit Romain.

–On fait une trêve pour ce soir, n’est-ce pas Lara ?

–Tout dépend de toi.

Ils me regardent tous les trois.

–D’accord, on fait une trêve.

Il me tend la main comme pour conclure l’accord et je la lui serre. Romain et Cassie sourient.

–Puisque vous êtes là, prenez les gâteaux apéritifs pour les apporter au salon tous les deux, dit Cassie.

Ils les prennent et sortent de la cuisine.

–Je suis sûre que ça cache quelque chose, dis-je à mon amie.

–Tu vois toujours le mal partout lorsque c’est lui. Laisse-lui le bénéfice du doute, s’il te plaît.

–Ok.

Nous retournons dans le salon. Pendant l’apéritif, je surprends plusieurs fois le regard d’Alexandre se poser sur moi.

Putain, mais qu’est-ce qu’il veut ? Pourquoi il me regarde ? Regarde la blonde devant toi avec ses gros seins qui dépassent de son décolleté, c’est ton style ce genre de nana !

À table, nous nous retrouvons face-à-face et je me demande s’il ne l’a pas fait exprès. Ses regards sont toujours aussi insistants et ça me gêne de plus en plus.

–Lara, tu veux des pommes de terre ? me demande Romain en me tendant le plat.

–Oui, s’il te plaît.

Le repas se passe bien, pour éviter de dire quoi que ce soit de déplacé à Alexandre, je ne lui adresse pas la parole, comme ça je suis sûre de ne pas faire de gaffe. Après deux ans à s’envoyer des piques, c’est devenu un automatisme.

Après le dîner, deux couples d’amis de Romain et Cassie vont dans le jardin pour fumer une cigarette. Mon amie me prend par le bras et m’emmène sur la terrasse.

–Viens, je vais te montrer quelque chose qui va te faire plaisir.

Nous sortons par la porte vitrée et nous dirigeons vers le fond du jardin. Il fait plutôt frais et j’ai oublié ma veste, ce qui me fait frissonner.

–On se dépêche, tu as l’air d’avoir froid.

Cassie sort une télécommande de sa poche et appuie sur un bouton. Je vois une piscine s’illuminer au milieu de la pelouse.

–Waouh, ça c’est de la piscine. Je pourrai venir faire des longueurs ?

–Bien sûr, quand tu voudras. D’ailleurs quand nous l’avons installée Romain a dit qu’il était certain que tu l’utiliseras plus que nous.

Nous nous mettons à rire mais je sursaute en sentant que l’on pose quelque chose sur mes épaules. Je me tourne et reste bouche bée en voyant Alexandre, je m’aperçois qu’il m’a apporté ma veste et je le remercie.

C’est lui qui a dû prendre un Lexomil ou il est drogué ! Oui, voilà c’est ça. Il n’y a pas d’autre explication possible !

Romain prend Cassie dans ses bras et automatiquement je dis :

–Tu ne vas pas faire la même chose ?

Alexandre éclate de rire.

C’est la première fois que je le vois rire comme ça ! Il est beau quand il rit ! Mais qu’est-ce que je raconte ? Il joue avec toi Lara. Merde ! Pourquoi ce soir est-il aussi attentionné ? Je suis certaine que ça cache quelque chose, mais quoi ?

–Non, rassure-toi, me répond-il toujours en riant.

Je le dévisage en fronçant les sourcils.

–Tu es toujours méfiante. Tu crois que je te prépare un mauvais coup ?

–Tu es vraiment bizarre. Je me demande à quoi tu joues.

–Je peux être très gentil quand je veux.

–Peut-être, mais tu ne l’as jamais été avec moi alors je ne comprends pas.

–Il n’y a rien à comprendre, mon frère m’a demandé de faire un effort pour ce soir, donc je le fais.

Je le regarde en plissant les yeux.

–Lara, tu as le choix. Ou tu me dis que tu me crois ou je te prends dans mes bras.

–Non, merci. C’est bon.

Cassie et Romain rient, je me tourne pour regarder la piscine puis je sens les bras d’Alexandre m’encercler.

–Tu fais quoi là ? demandé-je en me dégageant de son étreinte.

–Tu ne m’as pas dit que tu me croyais.

–Ok. Je te crois, alors lâche-moi !

Il retire ses bras et je recule pour être sûre qu’il ne me touche plus.

–Tu aimes la piscine Lara ? me demande Romain.

–Oui, je l’adore. Elle est magnifique.

–Tu pourras y faire des longueurs quand tu veux.

–Merci Romain, c’est très gentil.

–Et moi, je peux venir aussi ? demande Alexandre.

Je me tourne pour le regarder.

Ça, c’est pour me provoquer ! Putain, il m’énerve !

–Bien sûr, mais si tu viens pour embêter Lara, c’est non !

Je fais un sourire forcé à Alexandre qui se met à rire.

Il rit un peu trop à mon goût ce soir !

Nous retournons tous les quatre vers la maison sans un mot puis nous nous asseyons sur le canapé. Je discute avec Cassie, les autres femmes viennent se joindre à nous, les hommes sont assis autour de la table buvant un digestif et par moments, je sens qu’on me fixe ce qui me force à relever la tête pour m’assurer que ce n’est pas qu’une impression. Mais à chaque fois je m’aperçois qu’Alexandre a les yeux braqués sur moi.

Qu’est-ce qu’il a ce soir ? Pourquoi j’ai l’impression qu’il a passé la soirée à me regarder ? Il me perturbe, putain !

Je dévie mon regard et me concentre sur la conversation en essayant d’oublier tout ça.

Pendant la soirée, nous avons joué au Pictionary, ce qui nous a fait rire plusieurs fois et j’ai remarqué qu’Alexandre dessine très bien. Mais je m’abstiens de lui en faire le compliment car ça lui ferait trop plaisir.

Vers 2 heures du matin, il ne reste plus que nous quatre. J’aide mon amie à ranger la cuisine et je lui parle d’une pièce de théâtre que j’ai adorée.

–Il faut que tu m’écrives le nom de la pièce sur un papier, me dit Cassie.

–C’est le Clan des divorcés. Je te…

–J’adore cette pièce de théâtre, dit Alexandre en entrant dans la cuisine.

Je le regarde sans rien dire et prends une assiette pour l’essuyer.

–Lara, c’était très agréable ce soir. Tu ne trouves pas ?

–Ouais.

–Tu te rends compte que nous venons de passer six heures dans la même maison sans nous entretuer. Et même comme ça, tu es toujours méfiante envers moi.

–Deux années ne s’oublient pas en une soirée, désolée.

–Tu as raison.

–De toute façon après ce soir la trêve est finie.

–C’est ce que tu veux ?

–Non, j’aurais aimé qu’on se comporte comme des gens civilisés, mais tu es toujours en train de me chercher et comme je ne me laisse pas faire…

–C’est vrai. Alors, on essaye de faire la paix ?

Je le regarde étonnée puis détourne mon attention vers Romain et Cassie qui sourient.

–D’accord, on essaye, dis-je en lui tendant la main.

Il la prend et je sens qu’il caresse le dos de ma main du pouce.

Il n’est pas net ce mec !

Je retire ma main et le vois sourire, ce qui n’est pas mon cas.

Une demi-heure plus tard, Romain et Cassie nous accompagnent jusqu’au portail. Alexandre me fait la bise et met son casque, je m’avance vers ma voiture qui est de l’autre côté de la route puis en m’approchant je vois que mes pneus ont été crevés. Je suis en colère et je me tourne vers Alexandre qui est assis sur sa moto.

–Alors c’est pour ça que tu as été gentil toute la soirée ? Parce que tu m’as crevé les pneus ? dis-je en criant.

Romain vient vers moi, Alexandre enlève son casque et se lève pour venir également.

–Non, je n’aurais jamais fait ça Lara.

–Alors qui l’a fait ?

–Ça peut être n’importe qui, un voyou dans la rue ou…

–Mais bien sûr. Alexandre est adorable avec moi comme par enchantement et ma voiture a les quatre pneus crevés. C’est une coïncidence.

–Quel intérêt avais-je à te faire ça ?

–Pour me faire chier, comme tu sais si bien le faire depuis que je te connais.

Je prends une grande inspiration pour tenter de me calmer.

–Comment je vais faire pour rentrer chez moi ?

–Dors ici, dit Romain.

–Merci, mais non. Je vais prendre un taxi, j’ai envie de rentrer.

–Lara, crois-moi s’il te plaît. Ce n’est pas moi qui ai fait ça.

Je n’ai même plus envie de l’entendre.

–Ok. Laisse tomber.

–Je peux te ramener si tu veux.

–Non, j’ai peur à moto.

–Je te promets d’aller doucement.

–Tu n’as qu’un seul casque de toute façon.

–Je peux te prêter le mien, dit Cassie.

Dis oui, tu es déjà serrée financièrement, payer un taxi ne t’aidera pas et en plus, tu dois acheter des pneus maintenant !

–D’accord, mais tu me jures que tu ne feras pas de roue avant, ni rien de ce genre.

–Je te le jure, me répond-il sérieusement.

C’est la première fois qu’il me donne vraiment l’impression d’être sincère !

–Ok. Allons-y.

Cassie entre dans la maison et me rapporte son casque, je le mets, mais je n’arrive pas à l’attacher. Alexandre, le fait pour moi et je le remercie. Il monte sur la moto et me fait signe de monter également. Je m’installe derrière lui mais je ne sais pas où me tenir. Je vois ses mains gantées prendre les miennes, il les met dans les poches de son blouson puis il me dit de me tenir. Je me mets à trembler de peur et de ce contact trop proche à mon goût, mais à travers les poches, je sens la chaleur de son ventre me réchauffer les mains et cela m’apaise.

Cassie et Romain nous font un signe de la main pour nous dire au revoir puis Alexandre démarre. Instinctivement, je m’agrippe plus fort à lui de peur de tomber.

Je suis contente qu’il tienne parole, Alexandre va lentement pour ne pas m’effrayer plus que je ne le suis déjà, le seul souci, c’est que le chemin qu’il prend n’est pas celui qui m’emmène chez moi.

C’est vrai, il ne connaît pas mon adresse ! Mais il m’emmène où ?

Je resserre ma main droite plusieurs fois sur son ventre, en espérant qu’il comprenne que je veux lui parler, mais il continue de rouler sans tourner la tête. Alors j’essaye de crier :

–Tu vas où, là ?

Je vois son casque tourner et j’entends :

–Dans un endroit qui va te détendre.

–Je veux rentrer chez moi, s’il te plaît.

Il ne me répond pas et je recommence à stresser.

Putain, mais où m’emmène-t-il ? Qu’est-ce que ça peut lui faire que je sois tendue ! Normalement, c’est lui qui me met dans cet état et ça ne le dérange pas ! Alors pourquoi ce soir il veut que je me détende ?

Dix minutes plus tard, il s’arrête devant un bar et me demande de descendre. Je le fais sans rien dire, je préfère me taire sinon je risque de me donner en spectacle dans la rue. J’enlève le casque et il fait de même.

–Ne me crie pas dessus. Nous allons seulement boire un verre pour enterrer la hache de guerre.

Je le regarde en plissant les yeux, j’essaye de savoir s’il est sincère ou si c’est une de ses ruses pour m’humilier publiquement.

–Viens, je te promets que tu vas passer un bon moment. Ensuite, je t’emmène chez toi.

Je le suis puis nous entrons dans le bar où la musique est assez forte et nous nous installons à une table. Nous regardons la carte et je me tourne vers la liste de cocktails sans alcool.

–Je vais boire une Tequila Sunrise, tu me suis ?

–Tu ne devrais pas boire d’alcool, je te rappelle que tu conduis.

–Lara, pour la première fois de ta vie, fais-moi confiance s’il te plaît. Essaye de ne pas être sur la défensive, je sais que ce n’est pas facile et je t’avoue que ça ne l’est pas plus pour moi.

–Pourquoi tu fais tout ça alors ?

–Pour mon frère et Cassie. Il m’a dit qu’ils ne supportaient plus cette situation et je ne veux pas que tu t’éloignes de ton amie.

–Tu peux comprendre que cette compassion soudaine est déroutante. Je ne m’attendais pas à ça de ta part.

–Je comprends tout à fait. Alors, tu veux bien boire une Tequila comme moi ?

–Oui, mais seulement une.

–D’accord.

Alexandre passe la commande au serveur, j’en profite pour regarder autour de nous et je m’aperçois qu’à une autre table un homme me regarde avec insistance. Alexandre règle l’addition lorsque le serveur nous apporte les verres. Il me tend son verre pour que nous trinquions et j’en fais autant.

–À un nouveau départ.

Je répète son toast, mais sans grande conviction. Malgré ça, je décide de faire un effort pour passer un bon moment.

Nous discutons de Romain et Cassie tout en sirotant nos verres. Il me dit qu’il est très content pour eux deux et trouve qu’ils font un très beau couple. Il me raconte que ses parents sont vieux jeu et que malgré le fait que Cassie vienne d’une famille aisée, ils ont eu quelques réticences au début, ce qui me choque.

–Je pense que l’important c’est de voir son fils heureux, l’argent n’a pas de place dans les sentiments.

–Je suis tout à fait d’accord avec toi. C’est exactement pour ça que j’ai pris mon appartement, comme ça je suis libre de faire ce que je veux sans les avoir sur le dos.

Je souris et il en fait autant, nous continuons à boire jusqu’à ce qu’une femme blonde s’arrête devant notre table.

–Salut Alex, alors c’est la nouvelle ?

Je vois le visage d’Alexandre changer d’un coup et je suis mal à l’aise.

–Elle a plus de chances que toi de l’être.

La femme grimace et s’en va sans ajouter un mot. Je pince mes lèvres pour essayer de ne pas montrer ce que je ressens. En fait, je suis partagée entre l’envie de rire par la manière dont il l’a envoyée valser et la gêne que sa réponse a créée chez moi.

–Je suis désolé. Elle t’a manqué de respect et je n’aurais pas dû dire ça.

Je n’arrive plus à me retenir et j’explose de rire en mettant ma main devant ma bouche, ce qui finit par le faire rire aussi.

–Tu as toujours eu de la repartie ?

–Non, que depuis que je te connais… pardon, je…

–C’est pareil pour moi.

–Sérieux ?

–Oui.

Je finis mon verre et prends mon portable que je sens vibrer dans mon sac, je vois que c’est Cassie. Elle doit vouloir s’assurer que je suis bien arrivée, mais je décide de ne pas répondre parce qu’il y a trop de bruit, je lui envoie un message pour la rassurer.

« Je suis dans un bar, je ne peux pas te répondre. Je t’envoie un message dès que je suis à la maison, bisous. »

–C’est Cassie ? Elle veut s’assurer que tu es bien arrivée ?

–Comment tu le sais ?

–Mon frère m’a déjà appelé quatre fois. Ils ont peur que je te laisse dans les bois ou quoi ? demande-t-il irrité.

–Mais non, j’ai toujours envoyé un message lorsque je rentrais de chez eux. Ils doivent s’inquiéter, c’est tout. Pourquoi tu t’énerves comme ça ?

–Parce que j’ai l’impression qu’on ne me fait pas confiance, dit-il en me dévisageant.

–Eh bien, change de comportement et les gens changeront le leur envers toi.

–Et qu’est-ce que tu me conseilles de changer, mademoiselle je-sais-tout ?

–Arrête d’être aussi sûr de toi et de te foutre de tout le monde…

–Je donne cette impression ?

–À moi, oui. Peut-être pas aux autres. Regarde comment tu as répondu à cette fille.

–Ça fait des mois qu’elle me court après et elle ne m’intéresse pas.

–Mais tu n’as pas besoin d’être aussi méchant.

–Je lui ai déjà dit gentiment, mais comme tu as pu le voir, elle n’a pas l’air de comprendre et je n’ai pas aimé ce qu’elle a dit.

–Elle est jalouse, c’est tout. Si elle savait ce qu’on ressent l’un pour l’autre, elle se sentirait ridicule, dis-je en riant.

Il m’observe en souriant et j’arrête de rire.

–Tu ne trouves pas ça drôle ? J’ai dit quelque chose qu’il ne fallait pas ?

–C’est la première fois que tu te préoccupes de ce que je ressens.

Je regarde mon verre et je suis déçue d’avoir déjà tout bu.

–Tu en veux un autre ?

–Non, merci. J’aimerais rentrer s’il te plaît.

–Si tôt ?

–Il est déjà trois heures et demie passées. Je n’ai pas l’habitude de me coucher aussi tard.

–Petite nature.

–Ne te moque pas, nous n’avons pas la même vie. Je n’ai pas le temps de sortir comme toi.

–Qu’est-ce que tu fais de tes week-ends alors ?

–Je vais au restaurant avec des amis, mais souvent je reste à la maison, je suis fatiguée de la semaine.

–Tu deviens une mamie, dit-il en riant.

–Ça y est tu commences.

–Je suis sûr que tu ne serais même pas capable de rester tout un week-end sans dormir, me dit-il en s’adossant à son siège.

–Et qu’est-ce qui te fait dire ça ?

–Tu es trop faible, j’en suis sûr.

–Tu ne me connais pas, je ne te permets pas de me juger sur ce que tu crois être vrai.

–Alors prouve-le-moi.

–Quoi ? Et comment veux-tu que je te le prouve ?

–Le week-end prochain on le passe ensemble et je verrai si tu tiens le coup.

–Sûrement pas. Te voir deux week-ends de suite et en plus passer quarante-huit heures avec toi, non merci.

Il se met à rire et ça m’énerve.

–Il y a quoi de drôle ? Je peux savoir ?

–Tu te caches derrière le fait que tu seras avec moi pour ne pas le faire parce que tu n’en es pas capable, c’est ce qui me fait rire.

Une bouffée de chaleur m’envahit.

–Ok. On commence le vendredi soir et on finit le dimanche, comme ça, je demande mon lundi pour dormir.

–Tape-là, dit-il en tendant la paume de sa main vers moi.

Je lui tape dans la main pour sceller notre accord.

Tu crois me connaître, je vais te prouver le contraire morveux !

Mon regard se tourne vers l’homme qui m’observait tout à l’heure et je remarque qu’il ne cesse de me fixer. Il se penche vers l’un de ses amis pour lui parler et ce dernier me regarde également.

Ils sont bizarres ! Qu’est-ce qu’il a à me fixer comme ça ?

Un cri me fait sursauter et je tourne la tête pour voir une femme qui essaye de séparer deux hommes qui se battent. Je n’aime pas voir ça et j’ai l’impression qu’Alexandre s’en aperçoit puisqu’il se tourne vers moi pour me prendre le bras.

–Viens, on s’en va.

Je prends mon sac et me lève, lorsque je relève les yeux, les deux hommes sont en train de venir vers nous rapidement. Je sens un bras m’entourer la taille pour me tirer vers la sortie du bar. En deux temps trois mouvements, je me retrouve dehors, le visage contre le torse d’Alexandre, sans vraiment comprendre comment.

Il sent bon bordel ! Recule Lara, dépêche-toi !

Je me mets à trembler, je ne suis pas habituée à toute cette violence et ça me perturbe.

–Lara, ça va ?

–Oui, merci, dis-je en m’éloignant de lui.

–Ne restons pas ici, la bagarre peut continuer dehors.

Il me prend la main et me tire pour aller devant sa moto. Il me met le casque, me l’attache puis met le sien. Nous grimpons sur sa moto et je remets mes mains dans ses poches pour ne pas avoir froid.

Arrivés en bas de mon immeuble, je me rends compte que je ne lui ai jamais donné mon adresse. Après être descendue de la moto et avoir enlevé nos casques, je lui demande comment il sait où j’habite. Il se met à rire, me répond que c’est son secret et qu’il ne va pas tout me dévoiler dès le premier soir.

–C’est ce qu’on appelle une réponse tordue pour ne pas dire la vérité.

–Tu le sauras peut-être un jour.

–Ouais. Tu prends le casque ou je le garde ?

–Tu le gardes, je viens te chercher demain pour que tu ailles récupérer ta voiture.

–Mince. Demain, c’est dimanche. Où vais-je pouvoir acheter des pneus ?

–Ah oui. Ça risque d’être un problème.

–J’ai besoin de ma voiture pour aller au travail lundi.

Le téléphone d’Alexandre sonne, il le prend de la poche de son jean et sourit.

–Ouais… On est en bas de chez elle, d’ailleurs est-ce que tu sais s’il y a un magasin ouvert pour acheter les pneus demain ?… C’est bon, arrête, tout va bien… Elle va galérer… C’est oui… Ok, je te rappelle.

–Il t’a dit quoi ?

–Qu’ils sont étonnés de savoir que nous sommes allés boire un verre tous les deux.

–Je te parle pour ma voiture.

–Que rien n’est ouvert demain.

–Comment je vais faire pour lundi ? Je n’aurais pas dû y aller…

–Arrête. Je viendrai te chercher pour aller au boulot et le soir, je t’emmène directement chez mon frère, il m’a dit qu’il va s’en occuper dans la journée.

–Mais ce n’est pas à lui de payer.

–Tu lui rembourseras. Tu es toujours aussi tendue, relaxe il n’y a pas mort d’homme.

–Bon, je vais rentrer. Merci de m’avoir ramenée.

–De rien. Je suppose que tu ne me proposes pas de boire un dernier verre chez toi ?

–Je crois que tu as assez bu et puis je ne vais pas tout te dévoiler dès le premier soir, dis-je pour lui renvoyer sa réplique.

Il se met à rire.

–Ok. Ça veut dire que la prochaine fois tu m’invites à boire un verre chez toi ?

–Je n’ai pas dit ça !

–Mais c’est ce que ça sous-entend.

–Tu comprends ce qui t’arrange plutôt.

–Demain, je viens te chercher.

–Pourquoi ?

–Parce qu’on est invités à manger les restes chez mon frère.

–Mais…

–J’ai dit oui, donc tu es obligée de venir.

–Et si j’avais autre chose de prévu, dis-je énervée qu’il prenne des décisions à ma place.

–Je suis certain que tu n’avais rien à faire.

–Tu m’énerves !

–Je sais. Je serai là à 11 heures.

–Je vais appeler Cassie pour lui dire que je n’y vais pas.

–Fais ce que tu veux, mais à 11 heures je serai ici.

–Je ne t’ouvrirai pas la porte !

–Pourtant, tu sais au fond de toi que ce n’est pas ça qui va m’arrêter.

–Mais pourquoi tu fais tout ça ?

–Comme ça on va leur prouver que tout va bien et qu’on peut se supporter deux jours de suite.

–Je n’ai rien à prouver, à personne.

–Quelle tête de mule. Tu ne peux pas faire un effort pour ton amie ? Et puis tout s’est bien passé ce soir, alors pourquoi tu es toujours sur la défensive ?

–Je… je ne sais pas. J’ai besoin de me reposer, j’ai des semaines chargées en ce moment.

–Je te ramène tôt si tu veux. On va juste déjeuner là-bas, ça t’évitera de faire à manger.

–Ok. Je vais me coucher. Rentre bien.

Je me tourne vers mon immeuble et l’entends dire :

–Tu ne me fais pas la bise pour me dire au revoir ?

–Je te l’ai déjà fait tout à l’heure devant chez ton frère.

Il me regarde sans rien dire et je me sens obligée de revenir sur mes pas. Je m’avance vers lui et lui tends la joue pour lui faire la bise avant d’entrer.

Dans mon appartement, je vais dans ma chambre et prends mon téléphone pour envoyer un message à Cassie, mais je vois que j’en ai déjà un de sa part.

De Cassie à 3h51 :

Tu es dans un bar avec Alex ? Je n’y crois pas, dis-moi que tout va bien s’il te plaît.

Je lui réponds :

« Je suis chez moi, je vais dormir. Oui nous sommes allés boire un verre, il ne m’a pas laissé le choix. Tout s’est bien passé. Il paraît qu’on déjeune chez vous demain midi ? Bisous »

Je mets mon pyjama et m’allonge dans mon lit puis je prends mon portable qui m’annonce un message en vibrant.

De Cassie à 4h11 :

Oui, j’espère que ça ne va pas être trop dur pour toi. Je suis contente que vous fassiez des efforts, merci ma chérie. Bonne nuit et à tout à l’heure.

Je repose mon téléphone sur la table de chevet, j’éteins la lumière et m’endors.

2. Une journée étrangement normale

La sonnette de mon appartement me réveille brutalement. Je me frotte les yeux et m’assieds sur mon lit puis je l’entends retentir une seconde fois plus longuement.

Qui sonne comme un bourrin chez moi ?… Alexandre ! Il n’y a que lui pour être aussi con !

Je regarde mon réveil et vois qu’il n’est que 8 heures 39.

Non, à cette heure ça ne peut pas être lui ! Il connaît peut-être mon adresse, mais il ne sait pas lequel est mon appartement !

Cette maudite sonnette retentit une troisième fois et j’entends que quelqu’un donne des coups dans la porte.

Mais qu’est-ce qu’il se passe ?

Je me lève pour aller ouvrir et j’entends la voix d’un homme qui dit :

–C’est les pompiers, votre immeuble est en feu. Il faut évacuer !

J’ouvre la porte affolée et me retrouve nez à nez avec Alexandre qui sourit. Sans que j’aie le temps de réagir, il s’avance, me porte et referme la porte avec son pied.

–Pose-moi par terre ! Tu es complètement malade comme mec. Il faut te faire soigner.

–Bonjour à toi aussi.

–Qu’est-ce que tu fous ici ? Il n’est pas 11 heures.

–Je n’avais plus de café chez moi, alors je suis venu plus tôt, je suis sûr que tu en as.

–Pas pour toi.

–Mademoiselle est grognon le matin ? demande-t-il en m’asseyant sur le plan de travail de la cuisine.

–Mademoiselle n’aime pas se faire réveiller pour rien. Comment ça se fait que tu es déjà debout ? Tu ne dors jamais ?

–Si. Bon, dis-moi où est ton café et je te remets au lit. Ah au fait, sexy ton pyjama. Je comprends pourquoi tu n’as pas de petit ami.

–Je t’emmerde. Ce que tu penses m’est bien égal. Et de quoi je me mêle, tu es également célibataire à ce que je sache.

–Mais moi, j’ai des nanas qui ne demandent qu’à connaître mon lit et je dors à poil.

–Je t’invite à rejoindre ton fan-club pour boire ton café, dis-je en me remettant debout.

–Lara s’il te plaît. Fais-moi un café, sinon je ne te laisserai pas dormir.

–Ah parce qu’en plus il faut que je te le fasse ! De toute façon c’est foutu. Tu as réussi à m’énerver. Tiens une tasse, du sucre, une cuillère et débrouille-toi, moi je retourne me coucher.

Je le laisse tout seul dans la cuisine et vais dans ma chambre, j’allume la télévision et le lecteur DVD puis je m’allonge sur le côté. Quelques minutes plus tard, je sens mon matelas s’enfoncer derrière moi et je le vois assis sur mon lit, le dos appuyé contre des coussins en train de boire son café.

–Fais comme chez toi.

–Merci, c’est gentil.

–C’était ironique.

–Je sais. Tu ne veux pas un café ? Je te l’apporte si tu veux.

–Non merci.

J’hallucine ! Ce mec est vraiment sans gêne, ce n’est pas croyable !

Je lui tourne le dos et regarde à nouveau la télévision.

–Qu’est-ce que c’est comme film ?

–Qu’est-ce qu’on a fait au bon Dieu.

–Rien ! Pourquoi tu dis ça ?

–Quoi ! Qu’est-ce qu’on a fait au bon Dieu, c’est le titre du film.

–Ah ! Et ça parle de quoi ?

–C’est un film humoristique sur les différentes religions.

–Ça a l’air sympa.

–Oui, ça l’est alors tais-toi maintenant.

J’entends qu’il laisse tomber ses chaussures par terre et repousse la couette pour s’allonger en dessous.

–Je peux savoir ce que tu fais ? demandé-je en tournant mon visage vers lui.

–Rien, je m’installe pour regarder le film. Pourquoi ?

–Pourquoi ! Mais tu te rends compte que tu te permets de venir dans mon lit sans y être invité.

–Lara, laisse-moi regarder la télévision avec toi s’il te plaît. En plus, je risque de m’endormir, je ne te gênerai pas.

–Si tu ronfles, je te fais tomber du lit, dis-je en me tournant à nouveau vers la télévision.

Je l’entends rire et dire « d’accord », ce qui me fait sourire.

Pourquoi je souris ? Et pourquoi, je ne le fous pas dehors ? Depuis hier soir, il réagit comme si nous étions amis depuis longtemps et ça me perturbe ! En plus, si Cassie et Romain apprennent qu’il s’est retrouvé dans mon lit, ils vont recommencer avec leur imagination débordante et ça va m’énerver ! … Bon, concentre-toi sur le film et oublie tout ça !

Pendant les premières minutes, je remarque que nous rions en même temps puis je me rends compte que je ne l’entends plus. Je tourne mon visage pour voir ce qu’il fait et le vois dormir.

J’ouvre les yeux en sentant un poids sur ma taille, je vois un bras qui encercle mon ventre. Je fais un bond, ce qui fait râler Alexandre.

–Qu’est-ce qui t’arrive ? Pourquoi tu sursautes comme ça ?

–Enlève ton bras.

Il le resserre autour de moi, je lui envoie un oreiller en pleine figure de toutes mes forces ne lui laissant pas le temps de se protéger. Il m’attrape par la taille et me balance sur le lit puis il me rend mon coup de coussin, ce qui me fait crier. Je le repousse et le vois se lever, il m’attrape par les chevilles et me tire vers lui. Je me retrouve avec les jambes écartées de part et d’autre de son corps puis il m’attrape les poignets.

Mais qu’est-ce qu’il me fait ? C’est une position embarrassante !

–Lâche-moi.

–Si tu me promets d’être gentille.

–Attends, tu me réveilles pour un café à huit heures et demie du matin un dimanche, je te laisse dormir dans mon lit, tu veux quoi de plus ?

–Que tu arrêtes d’être tout le temps méfiante avec moi.

–Tout ce manège ce matin c’était pour quoi ? Pour voir si j’avais confiance en toi en te laissant dormir dans mon lit ?

–Oui et tu ne m’as pas mis dehors, c’est un bon début.

–Je sais que tu peux être con parfois, mais je n’ai jamais pensé que tu pourrais me faire du mal.

Il me sourit et me fait asseoir sur le lit.

–Venant de toi, c’est gentil.

–Par contre, ta remarque sur mon pyjama tu aurais pu t’abstenir.

–Désolé, je n’ai pas pu m’en empêcher, dit-il en me reluquant.

–Arrête de me regarder comme ça.

Il relâche mes poignets et s’assoit sur le lit.

–Tu devrais aller te préparer, on y va dans quinze minutes.

Je me lève sans rien dire, vais dans mon dressing pour prendre des vêtements puis je m’enferme dans la salle de bain pour prendre une douche rapide et m’habiller.

En sortant, je le vois assis sur le canapé qui attend.

–Tu es prête ?

–Oui.

Il ouvre la porte et je pose ma main sur son bras pour qu’il s’arrête.

–S’il te plaît, évite de dire à ton frère et à Cassie ce qu’il s’est passé ce matin. Je n’ai pas envie qu’ils s’imaginent quoi que ce soit. Ils doivent déjà se poser des questions pour hier soir.

–T’as honte d’être avec moi ?

–Mais non. Ils n’ont pas besoin de savoir qu’on s’est endormis dans mon lit. Tu comprends ?

–Ouais, dit-il sans conviction.

–Alexandre, je ne veux pas qu’ils croient que puisque nous avons fait la paix, il y a autre chose entre nous. Ils ont trouvé bizarre qu’on aille boire un verre, alors imagine s’ils apprennent que nous étions dans le même lit.

–Ok. N’oublie pas tes clés.

Il sort et appuie sur le bouton de l’ascenseur sans me regarder.

Il est bizarre tout d’un coup ! Qu’est-ce qui lui prend ?… Je ne le comprendrai jamais, laisse tomber Lara !

–Oh, j’ai oublié le casque.

–Je suis en voiture, garde-le pour demain.

–D’accord.

Je ferme la porte et m’avance vers lui puis nous entrons dans l’ascenseur. Nous ne disons pas un mot, je le sens tendu et je ne comprends pas pourquoi. Le chemin se fait également dans le silence et ça commence à m’irriter sérieusement. Lorsqu’il se stationne, je me tourne vers lui.

–J’ai dit quelque chose qu’il ne fallait pas ?

–Non.

–Bon, tu m’expliques pourquoi tu fais la tête depuis que nous sommes sortis de chez moi ?

–Pourquoi tu veux cacher ce qu’il s’est passé ce matin ?

–Je ne veux pas qu’ils s’imaginent n’importe quoi, c’est tout.

–Rien à foutre de ce qu’ils peuvent penser, nous n’avons rien fait de mal. Et puis je suis persuadé qu’ils seront contents de voir que même quand ils ne sont pas là, nous arrivons à nous supporter. Allez Lara, laisse-moi leur dire pour voir leur réaction.

–Quel est l’intérêt ?

–On va se marrer en voyant leur tête. S’il te plaît, joue le jeu.

–Tu vas dire quoi ?

–Qu’on a fini par boire un verre chez toi et qu’on ne sait pas ce qu’il s’est passé, mais qu’on s’est réveillés dans le même lit.

–Tu es fou !

–Après on leur dira la vérité. Arrête d’être aussi coincée et amuse-toi un peu.

–Maintenant je suis coincée, dis-je en croisant les bras sous ma poitrine.

–Ne croise pas tes bras, ça augmente le volume de tes seins.

–Tu n’es qu’un obsédé. Arrête de me mater ! dis-je en criant.

–Bon, tu veux bien jouer le jeu. Je te promets que tu vas rire.

–Quand est-ce que tu vas grandir ?

–Quand tu seras moins coincée.

–Je ne suis pas coincée. Pourquoi tu dis ça ?

–Tu ne t’amuses jamais, tu ne ris que rarement et…

–Je ris souvent, mais pas en ta présence.

–Ok. Alors tu avoues que tu ne sais pas t’amuser ?

–Je n’ai jamais eu la possibilité de m’amuser comme toi, désolée.

–Je sais. Justement, je veux te donner cette possibilité.

–Mais qu’est-ce que ça peut te faire ? Et pourquoi…

–Disons que c’est pour me faire pardonner de ces deux années où je t’ai sûrement fait du mal.

–Tu avoues avoir été méchant avec moi.

–Oui, j’avoue. Même si tu n’étais pas tendre non plus.

–C’est vrai.

Un silence se fait entre nous.

–Alors tu acceptes ?

–Tu me promets de dire la vérité après ?

–Oui, promis.

–Et qu’est-ce que je dois dire moi ?

–Rien, tu me laisses parler et s’il te demande, tu confirmes.

–Mais ils vont se douter de quelque chose si je ne te crie pas dessus.

–Donc tu avoues que tu cries souvent sur moi ?

–On ne va pas faire tous nos défauts.

–Justement, ils ne vont pas comprendre ce changement et c’est là où on va rire.

–D’accord. Je vais essayer de ne pas tout faire foirer.

–Donc tu avoues…

–Oh tais-toi, s’il te plaît.

Alexandre éclate de rire et je souris. Nous sortons de sa voiture, je regarde la mienne qui a toujours les pneus crevés puis j’appuie sur la sonnette.

–Ne me laisse pas tomber, tu joues le jeu Lara, me chuchote-t-il.

Cassie et Romain nous ouvrent la porte. Alexandre me fait signe d’entrer devant lui et je le remercie. Je vois Romain froncer les sourcils, ce qui me donne envie de sourire.

Ça commence bien ! On a à peine commencé qu’il nous trouve déjà bizarres !

Lorsque nous entrons dans la maison, je retire ma veste et Alexandre me la prend pour la suspendre au portemanteau, je lui souris pour le remercier. Cassie se tourne vers nous.

–Il se passe quoi là ? Vous nous expliquez ?

–Rien, pourquoi tu dis ça ? demandé-je à mon amie.

–Alexandre ? dit Romain sur un ton d’avertissement.

–Bah rien. Nous sommes allés boire un verre pour enterrer la hache de guerre, on a appris à se connaître et on est devenu des gens normaux. Ce n’est pas ce que vous vouliez ?

–Si, mais c’est un peu trop rapide à notre goût. J’espère que vous ne faites pas semblant, dit Romain.

–Oh, vous n’êtes jamais contents. Viens Lara, on va prendre l’apéritif pendant que monsieur et madame mauvais poil finissent de réchauffer les restes.

–Je vais aider Cassie, bois avec ton frère.

–Ok. Si tu veux.

Cassie et Romain nous observent tous les deux avec les yeux plissés, nous nous regardons et sourions. Dans la cuisine, mon amie ne dit rien et met la viande dans le four.

–Cassie, qu’est-ce qu’il se passe ?

Elle se tourne vers moi, pose le torchon qu’elle a dans la main et me dit :

–J’espère que ce n’est pas de la comédie tout ça, parce que je ne sais pas si je te le pardonnerais.

–Tu crois qu’on est en train de faire semblant de s’entendre et que nous nous détestons toujours ?

–Oui.

–Je t’assure que les choses ont changé, cette nuit nous…

–Vous avez couché ensemble ?

–Quoi ! dit Romain derrière moi.

Cette histoire dégénère, il faut arrêter ça tout de suite !

–Mais non ! Tu es folle. Nous n’avons pas couché ensemble, je te le jure. Nous avons juste été boire un verre…

–Et même si on l’avait fait, ça ne vous regarde pas, dit Alexandre calmement.

–Il n’a pas tort, dit Romain.

–Alexandre, s’il te plaît. Confirme ce que je viens de dire.

–Lara vous a dit la vérité, on est allé boire un verre au bar puis après, elle m’a invité chez elle pour un dernier verre et on s’est endormis en regardant le film euh… Qu’est-ce qu’il a fait, oh mon Dieu !

J’éclate de rire.

–C’est, Qu’est-ce qu’on a fait au bon Dieu. Tu ne te souviendras jamais du titre ?

–Non, d’ailleurs on ne l’a pas fini. Tout à l’heure, je veux voir la suite.

–T’es chiant. Tu t’es endormi dès le début, moi j’ai besoin de me reposer.

–Tu feras la sieste et je pars quand je l’ai fini, d’accord ?

–Ok. Mais si tu t’endors encore, je te fais tomber du lit.

–Vous avez regardé le film tous les deux dans ton lit ? demande Cassie calmement.

–Oui, le lecteur DVD est dans ma chambre.

Je la vois se décomposer devant moi et je me sens mal. Je me tourne vers Alexandre et ferme les yeux pour lui faire comprendre que je ne supporte plus de lui mentir.

–Dis-leur la vérité Lara.

–Nous avons effectivement été boire un verre dans un bar en sortant d’ici. Il y a eu une bagarre, Alexandre m’a protégée en me faisant sortir rapidement, il m’a ramenée chez moi et est rentré chez lui.

–Alors pourquoi… dit Romain.

–Laisse-la finir, dit Alexandre.

–Ce matin, un malade mental s’est fait passer pour un pompier en donnant des coups sur ma porte à 8 heures 39 du matin. Et devinez qui c’était ? Alexandre.

Je vois Romain et Cassie sourire en secouant la tête.

–Soi-disant, monsieur n’avait plus de café donc il est venu chez moi pour en boire, il s’est installé sur mon lit sans que je l’y invite et on s’est endormis en regardant le film. Voilà vous savez tout.

–Alors vous arrivez à vous supporter maintenant ? nous demande Cassie heureuse.

–Ouais, ça va.

–Vous vous supportez à quel point ? demande Romain.

–Comment ça, à quel point ? demandé-je en fronçant les sourcils.

–Vous pensez que vous serez capable d’être ensemble pendant plusieurs jours ?

–Le week-end prochain on le passe ensemble, dit Alexandre.

Je me tourne vers lui en colère.

–T’es obligé de tout raconter ?

–De quoi as-tu peur ?

–Qu’ils s’imaginent n’importe quoi.

–Lara, nous n’allons rien nous imaginer. Vous faites ce que vous voulez, mais sache que nous sommes très contents que vous essayez de vous entendre pour nous. Merci à vous deux.

–De rien, dis-je tout bas.

–De rien, dit Alexandre sur le même ton.

–Vous nous direz si votre week-end s’est bien passé. Juste pour savoir si vous ne vous êtes pas entretués, dit Romain en riant.

–Ok. Je te dirai ça, répond son frère. Nous passerons peut-être ici puisque nous ne pouvons pas dormir. Il faut bien que nous nous occupions.

–Vous n’allez pas dormir de tout le week-end ? demande Cassie.

–Oui, j’ai eu l’intelligence de faire le pari que je tiendrai quarante-huit heures sans dormir, je réponds en grimaçant.

–Et vous pariez quoi ? demande Romain.

–Rien, réponds-je.

–Ce n’est pas drôle s’il n’y a aucun enjeu.

–Il a raison, enchaîne Alexandre.

–J’ai une idée. Puisque vous avez joué avec nous en arrivant, je vous propose une chose.

Je fronce les sourcils, en me disant que ça risque de ne pas me plaire.

–Vous cherchez un gage pour l’autre au cas où un de vous deux perd et si vous perdez tous les deux, c’est nous qui vous imposerons un gage.

–Moi, je suis partant, dit Alexandre.

–Et si nous gagnons tous les deux ? demandé-je.

–C’est nous qui ferons le gage que vous aurez choisi, dit Romain.

–Attends, tu penses à quel style de gage ?

–Par exemple si tu gagnes, mon frère devra faire ce que tu veux pendant une semaine.

Je souris, mais en regardant Alexandre mon sourire s’efface aussitôt.

–Allez Lara, ça va être drôle, me dit Alexandre.

–Je suis partante, dit Cassie.

–Et toi Lara ? me demande Romain.

–Si tout le monde dit oui, je n’ai pas vraiment le choix.

–On va s’occuper de tout ça aujourd’hui, nous écrirons les gages, les mettrons dans une boîte fermée et nous les découvrirons ensemble le lundi, dit Romain.

Alexandre et son frère vont dans la salle à manger pour boire un apéritif tandis que j’aide Cassie pour le repas.