L'alpiniste errant tome 2 - Fernando Ferreira - E-Book

L'alpiniste errant tome 2 E-Book

Fernando Ferreira

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Beschreibung

Le tome 2 des aventures littéraires de l'Alpiniste Errant, avec ce manuscrit inédit retrouvé depuis la disparition de son auteur dans les montagnes corses. Un ouvrage de soixante-neuf dialogues déjantés, spirituels à plus d'un titre, qui racontent une rocambolesque histoire d'amitié entre deux héros hors sol, un écrivain à temps partiel alpiniste intérimaire et un philosophe souffrant du Vide et du trop Plein.

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L’alpiniste errant

 

 

Fernando Ferreira

 

------

 

L’alpiniste errant

Qui sommes-nous pour pleurer

 

Tome 2

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Collection Montesinho

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Textes, dessins, mise en page, photo de couverture,

et éditions © Fernando Ferreira / Collection Montesinho

www.fernandoferreira.fr

 

Couverture :

« Capu d’Ortu, Corse »

 

Tous droits réservés pour tous pays

 

Imprimé par BoD – Books on Demand, Norderstedt

ISBN : 978-2-9571223-0-1

Dépôt légal : novembre 2020

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Collection Montesinho

 

 

 

 

 

PREFACE DE L’EDITEUR

 

 

 

 

Depuis la publication des carnets retrouvés dans un refuge du « Journal aux pages manquantes » de l’Alpiniste Errant disparu dans les montagnes corses, la famille de l’écrivain a mis à jour un ensemble de textes. Pour la plupart, ces écrits se présentent sous forme de carnets contenant des nouvelles, des poèmes, des idées de scénarios, des ébauches d’écriture... Et, dans son ordinateur, deux textes complets, achevés : un scénario pour un film d’espionnage, et un roman. D’après les dates des fichiers, ils sont les derniers manuscrits qu’il ait fini d’écrire, et corrigé en grande partie, un peu avant de prendre le bateau.

 

Dans la présente édition nous vous présentons le roman « Qui sommes-nous pour pleurer ». Le manuscrit est structuré autour d’une série de dialogues, qui sont non sans rappeler certains passages des carnets trouvés dans le refuge et dans lesquels était éparpillée une série de dialogues imaginaires entre Lao Tseu et Bouddha. Il semble que, dans son errance et sa lutte contre la maladie qui effaçait sa mémoire, l’alpiniste écrivain ait complètement oublié l’existence de ce manuscrit. Et les notes dans les carnets retrouvés apparaissent à cet égard comme des réminiscences de souvenirs fantômes flottant dans sa mémoire défaillante. Les héros du roman se nomment d’ailleurs Lahaut et Bouddy, et non Lao Tseu et Bouddha. Ils forment une cordée d’alpinistes au long cours, loufoque, bancale, qui navigue de par le monde entre deux ascensions. Un road movie en forme de tribulations d’où se dégage un sentiment d’éphémère, une forme d’immédiateté dans l’écriture qui laisse supposer de la part de l’auteur une conscience de sa maladie. Un état physique qui vient percuter la construction narrative en la déstructurant autour d’une trame qui s’efface, et où seules flottent tels des îlots solitaires des moments de vie ramenés à la plus simple expression de la parole immédiate… comme des reflets prémonitoires du futur de l’Alpiniste Errant ! Une narration qui échappe ainsi à la course linéaire de l’Espace et du Temps pour en jouer, dans un ballet délirant, abstrait, où les deux héros essaient de scruter, de questionner le monde, sans aucun filtre, pour le meilleur et pour le délire, avec humour, dérision, et une poésie tout en pudeur cachée derrière une vulgarité de façade. Une errance « déjantée » de soixante-neuf chapitres aux refrains humanistes, fêtant la beauté infinie du Réel et les difficultés d’être réellement qui nous sommes. Un voyage inclassable avec deux héros… hors sol !

 

Ce manuscrit ainsi que les nouvelles et le scénario retrouvés, qui feront bientôt chacun l’objet d’une édition individuelle, sont donc certainement les derniers ouvrages sur lesquels l’auteur ait travaillé. Mais… peut-être quelque part, tel un Petit Poucet des hautes altitudes, nous a-t-il encore laissé d’autres carnets qui nous attendent… ?

 

Pour cette édition, nous avons reproduit dans leur intégralité les textes corrigés, dédicaces et citations, tels que dans le manuscrit original, sans aucune correction ultérieure. Nous ne présentons pas les dialogues non corrigés par l’auteur (8 sur 69) afin de ne pas trahir son texte mais, pour garder le rythme de la lecture, nous avons laissé leur place originale dans le déroulé, ainsi que la calligraphie qui pouvait y être associée. Ces chapitres laissent place à la mention « non corrigé ». Nous avons également gardé la présentation avec le titre original1 : « Qui sommes-nous pour pleurer », et le sous-titre « 69 dialogues et confidences sur la route du Matterhorn ». Concernant les calligraphies numérotées qui illustrent quelques chapitres, l’auteur les attribue au personnage de Bouddy. A première vue elles auraient été dessinées par lui-même. Il n’y a aucune référence à un dessinateur complice dans les fichiers trouvés.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Collection Montesinho

 

 

 

 

 

 

 

Qui sommes-nous pour pleurer

 

 

« 69 dialogues et confidences

sur la route du Matterhorn »

 

 

 

 

 

 

 

 

A mon Fils et à sa Maman, ma compagne. « Un alpiniste est un adulte qui refuse de laisser mourir son enfance », Mauriac a écrit un truc dans ce genre ! Mon Fils, sois pour toujours un alpiniste même si tu ne vas jamais en montagne.

 

 

 

A Lao Tseu et Bouddha avec tout mon respect, en toute humilité, ces quelques mots qui tentent de raconter la forme… que la forme !

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

« Seules les étoiles nous enseignent la lumière. Nous empoignons Leurs faiblesses éparpillées avec des pensées errantes »

 

Fernando Pessoa, Sonnet XIV

Dialogue I

 

 

— Bouddy : Première à gauche !
— Lahaut : QUOI ?
— PREMIERE A GAUCHE !
— OK !
— Je ne voudrais pas dire, mais j’aurais préféré qu’on loue une voiture, mon ami… Pas très confortable ni commode ce bricolage d’une moto avec une poussette sur le côté…
— Un side-car ton altesse ! Et pas une moto, mais une Enfield…
— … QUOI ?
— UNE ENFIELD !
— COMMENT ?
— Laisse tomber ! Bon, ensuite on va où ? Il dit quoi le plan ?
— …
— IL DIT QUOI LE PLAN ?

 

Bouddy, accroché à son « Atlas des villes de France, Spirale, 1/25 000 », tente vainement de lire la carte entre deux secousses, les rafales de vent qui affolent les pages, et sa peur panique de sentir ses grosses fesses glisser à toute vitesse vingt petits centimètres au-dessus du bitume râpeux.

— Deuxième à droite et tout droit…
— DEUXIEME A DROITE ET TOUT DROIT ?
— AFFIR-MA-TIF !
— O-KAY !

 

Deux minutes plus tard, au feu rouge.

— Au rond-point la première à droite !
— Y’a pas de rond-point copilote ! C’est un gros croisement…
— Ah ? C’est pareil ! Première à droite et tout droit jusqu’à la sous-préfecture.
— Ok ! C’est parti !

VROOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOMMM… !

— QUOI ?
— OK ! C’EST PARTI !

 

Cinq minutes plus loin… Lahaut est à fond sur la manette des gaz. Le side-car grince comme les ressorts d’un vieux lit la nuit de noce d’un couple d’amoureux… champagne et poppers ! Bouddy hurle les informations sans lever les yeux du plan, un bon moyen d’éviter de voir le paysage urbain défiler dans son champ de vision à la vitesse de la lumière. Il serre ses muscles fessiers et pense aux cerisiers en fleurs au printemps. Il déteste la moto. Il a toujours détesté la moto.

— Toujours tout droit jusqu’à la bretelle d’autoroute !
— HEIN ?
— TOUT DROIT ! BRETELLE D’AUTOROUTE !
— OK MA POULE !

 

Gros coup de frein ! Le tricycle motorisé de 500 cm3 part en travers dans un dérapage contrôlé de main de maître par un Lahaut au firmament de son art ! L’équipage s’immobilise au milieu d’une odeur de caoutchouc brûlé. Dans le panier, Bouddy garde les yeux fermés, les mains crispées sur son guide Michelin, tel un moine s’accrochant en désespoir de cause à sa bible, face aux hordes du Diable… ou face à une stripteaseuse glissant sur la barre de pole dance la tête en bas et les jambes à 10 heures 10 ! Ce qui revient au même pour le moine.

— Tu m’as dit quoi là ?
— Tout droit ! Bretelle d’autoroute !
— Tu peux ouvrir les yeux s’il te plaît mon grand ?
— Oui !
— Et tu vois quoi là devant ?
— Hummm… On dirait ? Un port ! La mer et un port…
— Ok ! Jusque-là on est d’accord ! Et dans ton plan, t’as un port et la mer ?
— Non ! J’ai une bretelle d’autoroute !
— Fais voir !

Dix secondes d’un flottement silencieux… Passe en rase-motte une mouette en vol de reconnaissance : beaucoup de plats du jour au poisson sur les terrasses des restaurants. 

— J’ai compris !
— Tant mieux ! Alors ?
— Tu t’es gouré de page… C’est le plan de Mâcon !
— Ah oui !... Je comprends mieux aussi…
— Eh oui ! Pas facile de se diriger dans Marseille avec le plan de Mâcon !
— Ce n’est pas faux ! Mais jusqu’ici ça fonctionnait relativement bien, s’il n’y avait pas eu la mer… !
— T’as raison grand sage… tout est relatif, même la géographie ! Bon alors, qu’est-ce qu’il dit le plan de Mâcon pour rejoindre la bretelle d’autoroute d’Aix-en-Provence en partant du Vieux Port de Marseille ?

 

 

 

 

Dialogue II

 

 

Janvier. Plage de Goa. Inde. Lahaut revient d’un voyage à New York.

— J’ai fait une rencontre, ta majesté !
— Humm… encore une ?
— Oui mais là, c’est pas pareil… et je lui ai même écrit un poème…
— Un poème… ?
— Un poème !
— Je vous écoute…
— « Il a neigé sur hier et

Nos pas dans la neige de Central Park

Ni adieu, ni au revoir

Ni à bientôt

Ni attente, ni douleur

Juste nous deux et

Nos pas dans Central Park

Il neige sur hier et

Dans la nuit douce

Chaude

S’effacent nos « ne pas »

A la lumière blanche de ta peau nue

Il ne neige plus

Donne-moi ta main et

Sur nos pas

Allons cueillir les flocons

Sur les arbres de Central Park »

— Pas mal ! Et vous avez un titre ?
— Pas d’idée encore…
— Je vous proposerais bien : « La neige dilue “ no “ pensées » ?
— Compliqué ! J’avais une idée : « Amitiés sensuelles »
— Un peu ennuyeux… Et pourquoi « amitiés » ? Vous n’avez pas couché avec elle ?
— Si !
— Bon ! Jusque-là rien que de très normal…
— C’est tout ? Tu ne veux pas savoir ? Pourquoi « amitiés », pourquoi « sensuelles » … ?
— Non… ! « No » pensées !
— Tu penses que je peux récupérer ce poème pour mon bouquin ?
— Faites mon ami, faites !
— Ça me fera ça de moins à écrire.

 

 

 

 

Dialogue III

 

 

— Putain, heureusement que c'est toi qui conduis… j’suis défonce !
— C'est vous qui conduisez !
— T'es sûr ton altesse ?
— Oui !... Moi je n’ai pas fumé…
— C'est supposé être un argument objectif ça ?
— Non !
— T'as autre chose ? 
— C'est vous qui tenez le volant…
— Ok ! Ça c'est un argument... mais...
— Mais... ?
— ... Mais incomplet !
— Incomplet ? 
— Oui, incomplet ! En l'occurrence, c'est un manche…
— Un manche ? 
— Oui, dans un avion, on appelle cela un manche cher monsieur !
— On est dans un avion ?
— T'es sûr que t'as rien fumé ?
— J'ai trop bu de caipirinhas pour m'en souvenir... Vous êtes vraiment sûr que c'est un avion ?
— P't-être un hélico ?
— Hummm… et la bande de gens assise à l‘arrière, qui c’est ?
— Je ne me rappelle plus…
— Et, par hasard, vous savez où l’on va ? 
— Non ?... Si, ça y est, je me rappelle…
— Où on va ?
— Non pas ça… la bande de gus derrière, c’est moi qui les ai invités...
— Vous ? Pourquoi faire ? 
— J'aimais beaucoup leurs costumes, je trouvais joli qu'ils meublent notre paysage visuel et musical pour le reste de la soirée !
— On dirait les Village People ! Ce sont les vrais ? 
— Les vrais j’sais pas ! Ils m'ont l'air trop frais pour des crooners des années 80… et y’a pas de fille à forte poitrine dans les Village People… ou alors elle s’appelait Carlos de Rio de Janeiro !
— Et dites-moi pourquoi vous avez un fusil à pompe sur les genoux ? 
— Ils voulaient me reprendre les clés des menottes... de force !
— Vous n‘êtes plus pacifiste ?
— Si, justement ! Comme ça avec le flingue ils nous foutent la paix ! Ça calme les ardeurs guerrières un calibre 20 à pompe. Très dissuasif !
— Dissuasif de quoi ? Ils roupillent vos Village People !
— Oui, mais ça c’est après… avant ils ont abusé du mélange WC…
— WC ? Vous ne leur avez pas fait boire du Canard WC ?
— Non, pas de canard ma poule ! Whisky et caipirinhas !
— Hummmm… des petites natures !
— … et de la weed, de la spécial Butterscotch Hawaiian… et... quelques petits somnifères... légers !
— Ah bravo ! Je ne vous félicite pas.  
— Je sais, c’est mal tout ça, les menottes, les somnifères… ! Mais ils se sont énervés… Y’a eu embrouille rapport au prix excessif qu’ils demandaient… Soi-disant qu’ils gagnaient plus à faire les guignols en playback sur la scène du bar de l’hôtel !
— Je me disais bien que je les avais déjà vus quelque part….
— Ils voulaient une rallonge pour les heures supplémentaires... j’ai trouvé ça mesquin vue la caisse de champagne qu’ils venaient de siffler à nos frais… et pas en playback ! En live ! Bref, j’ai un peu chargé leur cocktail pour la sérénité de tous…
— Sérénité de tous ?
— Ben ouais ! Ils étaient en furie, surtout la nana, elle voulait le fric ou elle me coupait ma queue de cheval… elle m’a volé mon string… complètement défoncés les gonzes… et j’allais pas les virer ?
— Non ?
— Non ! Une grosse bonne soirée sans groupe musical en live c’est comme… un Cornetto sans le petit morceau de chocolat au fond du cône.
— Bien… bien ! Et le lézard qui dort là ?
— Qué lézard ? L’Iguane là ?
— Oui le Conolophus subcristatus qui ronfle…
— Ce mec est un descendant direct des dinosaures. Tu as devant toi une légende préhistorique vivante... comme les Stones…Tu sais ce que disait Joe, le chanteur des Clash, à propos des légendes ?
— Non !
— « Je ne suis pas célèbre, je suis une légende. Célèbre, c’est lorsque tout le monde connaît ce que tu fais et que tu es riche. Légende, c’est quand tout le monde connaît ce que tu as fait mais que tu es fini ! ». Pas mal non ?
— Pas mal… je rajouterais même « … que tu es fini ou surtout mort ! ».
— Tu chipotes là ! Quand t’es mort t’es fini d’office !
— C’est vrai… Et à propos des Stones, j’ai croisé Keith dans l’ascenseur. Il m’a demandé si vous pouviez lui rendre son peigne ?
— J'l'ai plus… Je l'ai prêté à trois espèces de beatniks chevelus qui écrivent une comédie musicale…
— Chouette ! Ça s'appelle comment ?
— « Hair » je crois !...
— Mais je crois me souvenir qu’il existe déjà une comédie musicale qui s’appelle ainsi ?
— Possible ! En tout cas ils avaient des têtes de garçons coiffeurs…
— Ceci explique cela… Vous avez du feu ? 
— Oui !
— Je crois que ma cigarette est éteinte !
— C'est un pétard ton altesse ! Tu vois que tu fumes !... Et je te signale au passage que tu as un volant entre les mains…
— Ah tiens, c’est exact !
— Donc j'avais raison : c'est bien toi qui conduis !
— Comme quoi tout n'est qu'illusion mon Ami !
— C'est Village People « Just an illusion » ? Ils pourraient peut-être nous la chanter au réveil, nos rock stars à paillettes ?
— Kool and the Gang, pas Village People!
— Ben alors on pourrait faire un karaoké sur « In the Navy » ?
— On n'est pas sur un bateau !... Si ?
— Va savoir… Tu sais bien qu‘on ne sait jamais, ta sérénissime sagesse !
— « Je sais que je ne sais rien » !
— Jean Gabin ?
— Socrate ! La chanson de Gabin c’est « Je sais qu’on ne sait jamais ».
— C’est tout pareil… Bon en attendant, moi je sais que je descends faire pisser l’iguane !
— Il sait nager votre iguane ?
— Pourquoi ?
— Rapport au bateau !

4h66, Suite 5400, dernier étage du Caesar Palace, Vegas, "The burning Gonzo party", troisième jour… Plus que deux !

 

Dialogue IV

 

 

Une plage de nudistes un jour de tempête de Mistral. Un jour sans nudistes, ou presque…

— Bon ! On fait quoi ?
— Humm… là pour tout vous dire… je ne sais pas ?
— De toutes les façons, il est canné, ça c’est sûr !
— Je confirme mon ami ! Tant il est vrai qu’avec un parasol planté dans le cœur, le pronostic vital est fortement engagé…
— Ouais ! Quelle mort con quand même ! Tué à la plage par un pied de parasol volant par une belle journée ensoleillée…
— … Et de vent, beaucoup de vent…
— Je te l’avais dit, ton altesse, de ne pas ouvrir ce putain de parasol ! C’était gagné d’avance qu’il allait s’envoler…
— Oui, mais on ne va pas vivre tout le temps dans le passé, non ? Il faut faire fi des filtres de nos mémoires invasives et anxiogènes qui nous empêchent de vivre le présent…
— Ok grand sage ! Bon, on fait quoi alors ?
— Remarquez, là au moins il a la tête à l’ombre… !
— On laisse le parasol alors ?

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Dialogue V

 

 

— Qu’est-ce que le Tao ?
— Le Tao est l’Esprit Divin.
— Où trouver le Tao ta majesté ?
— Partout autour de vous.
— Partout ?
— Dans vous et partout… Dans tout ce que vous voyez, dans tout ce que vous entendez. « Tout ce que tu entends, tu le vois, et tout ce que tu vois, tu l’entends ».
— Dans le rif de Richards de l’intro de « Beast of burden » ?
— Valide !
— Dans le E=mc2 d'Alfred ?
— Valide !
— Dans un « instant décisif » d’Henri ?
— Valide !
— Et dans « L’instant d’éternité » d’Umberto ?
— C’est pareil… Valide !
— Dans un take-off aérien à Pipe-Line ?
— Valide !

Les deux chevaux broutent côte à côte. Leurs cavaliers, assis en position du Lotus sur leur dos, maintiennent un équilibre précaire défiant les lois de l’apesanteur.

— Dans une complainte déchirante de Janis ?
— Valide !
— Dans l’Image du chat amoureux d’un haïku de Soseki ?
— Valide !
— Dans les cris des hirondelles au printemps ?
— Valide !
— Dans un « je t'aime » ?
— Valide !
— Dans une paire de seins… ?
— Stop ! C’était trop beau, vous ne pouviez pas résister…
— Attends ! Attends ! J’ai pas fini…
— Humm… ?
— Dans une jolie paire de seins…
— Hummm… ?
— T’as raison, j’ai fini ! ….
— …
— WAAAAAAAHHHHH !

Le bruit sec d’un sac de patates s’écrasant sur le sol vient ponctuer la chute du « disciple » indiscipliné.

Toujours perché en équilibre sur son cheval, un soupir désespéré s’échappe entre les mains aplaties sur le visage joufflu du cavalier aux formes arrondies… très arrondies, trop arrondies ! L’équidé accuse le poids dans une grimace tordant ses mords… Et « crac ! », la plus belle conquête de l’homme s’effondre les quatre fers en étoile de mer.

— Bon, rentrons ?
— Pas mieux ta sagesse !

Irlande. Un pré face à la mer. L’automne est là, mais déjà à bout de souffle. Un parfum d’hiver flotte sur l’herbe humide et salée… Quelques gros nuages débonnaires s’entrechoquent en douceur dans le ciel rose et or du couchant.

Les deux complices repartent à pied.

— Et dans la boîte qui contiendra mes cendres, il est où ton Tao ?
— Dans ton cul !... Mon ami !
— Là, t’es fâché ! Non ? Si ?
— « Écoute le vent

Dans les feuilles du peuplier

Il te parle, il te dit le monde »

— Putain, là t’es vraiment fâché…

 

Dialogue VI