L’évolution scientifique : illusion didactique ou malaise épistémologique ? - Abdelhafid Daoudi - E-Book

L’évolution scientifique : illusion didactique ou malaise épistémologique ? E-Book

Abdelhafid Daoudi

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Beschreibung

« Plus de 26 années se sont écoulées et l’intuition est une question parmi d’autres qui m’interpellent toujours autant… Cela me rappelle lorsque j’étais étudiant en maîtrise de physique à Paris, j’ai dit à mon professeur… que je n’avais pas compris une théorie, il m’a répondu : “Moi non plus !”. L’enseignant enseigne ce qu’il n’a pas compris et l’étudiant apprend ce qu'il n’a pas compris... »


À PROPOS DES AUTEURS


Chef de service stérilisation hospitalière en Suisse, ancien praticien-chercheur en pédagogie et professeur en enseignement secondaire et supérieur au Canada ainsi que cadre au sein du groupe Ramsay Santé en France, Abdelhafid Daoudi a publié divers articles en France, au Québec et en Suisse ainsi que le livre Le « Hirak » du RIF en questionnement : Gouvernance de la crise et crise de la gouvernance


Médecin gastroentérologue, ancien médecin des hôpitaux de Paris et chercheur en épistémologie, Iliass Charif a publié plusieurs articles dans des revues scientifiques internationales. Par ailleurs, il est auteur du livre L’intérêt du fibroscan chez les porteurs inactifs de l’Ag Hbs.

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Abdelhafid Daoudi

&

Iliass Charif

 

 

 

 

 

 

 

 

 

L’évolution scientifique :

illusion didactique ou malaise épistémologique ?

Essai

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

© Lys Bleu Éditions – Abdelhafid Daoudi & Iliass Charif

ISBN : 979-10-377-8143-7

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

À mes parents,

qui ont tout fait pour me plonger dans un univers de savoir

et de questionnement.

 

À mes enfants Omnia et Ayoub,

mes sources d’ambition et d’espoir.

 

À toute personne

qui souhaite exercer une pensée réflexive.

 

Abdelhafid Daoudi

 

*

 

À mes parents,

qui m’ont appris le sens de la vie

à travers l’amour de la connaissance.

 

À Loubab, Ranim et Raed,

source d’amour et de joie.

 

À ma famille,

qui n’a cessé de m’encourager et de m’accompagner dans mon parcours.

 

À vous, chercheurs de la vérité,

qui lisez ce livre et pensez différemment

 

Iliass Charif

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Les découvertes scientifiques servent entre autresà nous rendre conscientsdel’étendue de notre ignorance.

Félicité Robert de Lamennais

 

 

 

 

 

 

Avant-propos

 

 

 

Les contes aident les enfants à s’endormir et les adultes à s’éveiller.

Jorge Bucay

 

Je ne me déclare pas comme un auteur, mais plutôt comme un penseur. Je me vois comme une personne transparente qui aime parler tant à lui-même qu’aux autres et qui aime le partage. D’après moi, le partage est une valeur et une compétence que nous ne sommes pas tous à même de partager. J’exprime de vive voix mes inquiétudes et mes occupations. L’écriture à un effet miroir ; j’écris pour me voir. Elle demeure une trace dynamique que je pourrais remettre en question dans lefutur ou même développer plusieurs fois. Ainsi, elle est une façon de recevoir des critiques, des commentaires, des appuis et des expériences similaires par les lecteurs. Bref, l’écriture estun outil intelligent pour se développer et faire développer ou simplement pour réfléchir mutuellement et s’autoquestionner. Àmon sens, il n’y a pas mieux que d’apprendre d’un inconnu qui annote mon texte parpassion et plaisir.De plus, l’écriture est à la fois une attitude, une responsabilité et un engagement. Il faut également faire la différence entre parler et écrire… En outre, on parle beaucoup et on écrit moins. Si la traduction permet de parler à la place de l’autre et le trahir, l’écriture m’offre l’opportunité de communiquer avec moi-même, avec mes expériences professionnelles en tant qu’enseignant secondaire et supérieur au Canada ou cadre responsable dans le secteur de la santé en France et en Suisse, avec mes activités sociales en qualité de chroniqueur et consultant en pédagogie au Québec et avec mes vécus au Maroc, en France, au Canada et en Suisse, et avec les autres en toute authenticité. C’est la transition cognitive du monologue au dialogue. Voilà, pourquoi j’écris ?

À l’âge de 14 ans, j’aide mon père à vendre des chaussures dans sa boutique pendant les vacances scolaires au Maroc. Il y avait un client qui m’a demandé le prix d’une paire de chaussure, je lui ai répondu et il continue à parler en chuchotant. Je fais un effort pour essayer de l’entendre en disant : « Quoi ? Quoi ? ». Le monsieur m’a répondu : « je ne vous parle pas, je parle à moi-même. » Je lui ai dit : « c’est bien ; c’est votre droit. C’est juste, j’aimerais bien que vous le précisiez pour que je ne me concentre pas sur vous ! »

Je vous raconte cette anecdote, car plusieurs éléments consacrés, dans le présent ouvrage, m’interpellent depuis mon enfance, entre autres : pourquoi je pose moins de questions au fil du temps ? Qui pourra devenir un savant et un innovateur ? Pourquoi certaines branches universitaires exigent de sélectionner les élèves ? Arrivons-nous à comprendre la planète ou avons-nous un grand retard ? Sommes-nous avancés en sciences ou en recul ? Les sciences sont-elles exactes ou inexactes ? La réalité est-elle réellement réelle ou pas forcément ?

D’ailleurs, je fais appel à l’expertise du Dr Iliass Charif, ami d’enfance, car nous avons vécu ensemble certaines de ces questions durant notre longue période d’amitié. Le profil du Dr Charif tout comme le mien témoigne des ancres de la multidisciplinarité et de l’interdisciplinarité. Il est à la fois, un médecin, un chercheur-praticien, un épistémologue et un gestionnaire. Je suis à la fois, un pédagogue, un physicien, un mathématicien, un ingénieur biomédical, un expert en stérilisation et un gestionnaire. Celles-ci sont parmi nos approches et sujets dans la présente étude. D’ailleurs, nous ne pouvons pas trancher en profondeur les questions didactiques liées en sciences, sans outiller et appuyer par un regard profond d’épistémologie, d’où la valeur ajoutée certaine du Dr Charif.

Bref, une série de questions qui ont grandi et continué à grandir dans mon esprit, citons l’exemple de l’intuition que j’aborde à maintes reprises dans ce livre et à qui j’alloue un chapitre entier. À l’âge de 17 ans, mon père m’a confié la responsabilité de prendre en charge sa boutique pour vendre des chaussures durant mes vacances scolaires au Maroc. Un jour, mon oncle entre dans la boutique, il me pose une question : « Comment sais-tu les tarifs des articles sachant qu’il y en a beaucoup et les prix ne sont pas affichés ? » Je lui ai expliqué la méthode de mon père pour identifier les prix en disant : « mon père écrit dans un coin de la chaussure des chiffres codifiés avec une virgule ; le prix de l’achat correspond au chiffre paru après la virgule. Par exemple : s’il note : 999,6 : le prix de l’achat est 60 dirhams. Puis, j’ajoute à 60 un bénéfice raisonnable pour le vendre avec une marge de négociation ».

Soudainement, mon oncle prend une chaussure et me teste en m’annonçant : « Tiens, tiens, tiens… Il n’est pas marqué un chiffre codifié dans cette chaussure, comment sais-tu alors son prix ? » Je lui ai répondu : « je développe le prix par intuition. » Il m’a dit : « bravo ! ». Un jour, mon oncle vient me voir, il m’a dit : « tu te souviens que la dernière fois tu m’as dit que tu connaissais les prix de certaines marchandises de ton père par intuition ». Je lui ai répondu : « oui. » Puis, il m’a souligné : « j’ai fait une recherche sur le sens de l’intuition, je n’arrive pas comprendre le sens de ce mot, explique-moi : qu’est-ce que l’intuition pour toi ? ». Je lui ai expliqué ma compréhension de ce terme qui se résume dans le fait qu’à travers de la pratique et de l’expérience1, avec mon père, dans la vente, je fais systématiquement des liens et des comparaisons avec d’autres articles qui se ressemblent au niveau de certains critères, entre autres : la marque, la matière première : chaussure en cuir ou non, le lieu de fabrication : la chaussure provient de l’Espagne ou il s’agit d’un produit fabriqué au Maroc, etc. pour développer un prix qui correspond à l’article en question. À ce moment, je n’étais pas trop sûr que mes explications aient convaincu mon oncle…

Plus de 26 années se sont écoulées et l’intuition est une question parmi d’autres qui m’interpellent toujours autant, raison pour laquelle j’aborde le concept de l’intuition dans un chapitre entier. Cela me rappelle lorsque j’étais étudiant en maitrise de physique à Paris, j’ai dit à mon professeur de Physique quantique, qui était chef de département et vice-président de l’université, que je n’avais pas compris une théorie, il m’a répondu : « Moi non plus ! » L’enseignant enseigne ce qui n’a pas compris et l’étudiant apprend ce qui n’a pas compris.

Parallèlement, la contribution du Dr Charif m’a aidé à saisir plusieurs questionnements qui traversent mon esprit depuis longtemps. Par exemple, elle m’a servi à comprendre la culture des critères de sélection des meilleurs élèves à partir de leurs notes pour l’accès aux grandes écoles ou à la faculté de la médecine, alors qu’en principe acquérir des savoirs est un droit de base sans aucune condition. De surcroît, cette orientation a permis, à plusieurs personnes, de faire un mauvais choix de carrière, d’abandonner leurs études, de ne pas suivre de longues études, de renforcer la culture de la technicité au lieu de la culture de l’innovation, de la recherche, de la ténacité et de plaisir au savoir… Dans ma dernière classe secondaire en sciences mathématiques - A, nous étions onze élèves. Aucun des dix camarades de la classe n’a fait un troisième cycle. Deux camarades ont travaillé après deux ans d’études et d’autres après quatre ans ou cinq ans d’études. Alors qu’ils possédaient les meilleures notes et certains étaient sélectionnés dans les grandes écoles d’ingénieurs. En réalité, de nombreux chercheurs n’étaient pas acceptés dans ces grandes écoles, car ils n’avaient pas des notes exigées.

Plusieurs fois, j’ai rencontré des enseignants qui ne se sentent pas heureux dans leur travail, car ils sont obligés d’enseigner des méthodes et des sujets avec lesquels ils ne sont pas d’accord. À maintes reprises, j’ai croisé des gens qui exercent des métiers ou prennent des décisions qui ne s’accordent pas avec leurs valeurs. Lorsque j’étais un jeune étudiant en licence de physique à l’Université de Paris 12, j’ai travaillé chez McDonald’s les fins de semaine. Un jour, un client ivre tape la porte après la fermeture du restaurant, j’ouvre la porte et il me dit : « Je ne veux pas vous solliciter, mais j’aimerais bien vous dire que je suis un anti-fast-food ; je suis obligé de consommer maintenant, si vous voulez bien, car tous les restaurants sont fermés ». Je lui ai répondu : « Je suis également un anti-fast-food, mais je suis obligé de travailler actuellement chez McDonald’s pour pouvoir financer mes études. Car, toutes les entreprises ne veulent pas m’embaucher ». Ensuite, il m’a dit : « Nous sommes alors des amis viens discuter ensemble ». À un moment, le client s’est présenté comme étant un enseignant chercheur à la faculté des sciences à l’Université Pierre-et-Marie-Curie à Paris. Puis, nous avons abordé des sujets qui touchent les sciences…

En somme, cet essai est un lieu de partage et de remise en cause de mes pratiques en enseignement et de mes réflexions dans la vie courante et professionnelle, notamment dans le secteur de la santé. Toutefois, il est documenté sérieusement et profondément par des références académiques diversifiées, solides et riches. Pour moi, ce passage du vécu vers les bagages académiques, puis vers vous, ainsi que cette interaction entre ceux-ci représentent une valeur ajoutée qui mérite votre attention et questionnement. Dit autrement, la direction de la pratique vers la théorie et non le contraire est la raison d’être et la force de cet ouvrage que je vous propose. Par ailleurs, je constate qu’on ne parle pas d’une vérité absolue, mais plutôt de la représentation d’une vérité temporaire qui pourra être changée à travers l’instauration d’une culture du questionnement dans des situations d’enseignement-apprentissage, entre autres : la présente contribution.

Les sciences, la didactique et l’épistémologie sont-elles un chemin partagé ou un carrefour d’avenues divergées ? Creuser davantage sur l’histoire des sciences, est-ce une tentative pour redécouvrir notre soi et joindre le passé au présent en vue de tracer les meilleurs itinéraires qui amènent au futur ? Le passé est-il vraiment passé ou bien laisse-t-il sa place dans l’histoire pour joindre le présent et faire le pont au futur ? Exercer un regard critique basé sur une approche transversale, est-ce une nécessité pour saisir la complexité des enjeux et ouvrir les canaux de communication entre les disciplines ?

Toutes ces questions et bien d’autres nous passionnent et nous amènent à réfléchir à voix haute pour proposer cet ouvrage à tous les francophones qui s’intéressent à l’histoire des sciences, la didactique et l’épistémologie, notamment les chercheurs, les enseignants, les étudiants, les scientifiques, les professionnels médicaux, les parents et toute personne qui n’a pas eu l’occasion pour avancer dans ses études et ne veut pas que ses enfants rencontrent les mêmes difficultés. Tout cela dans l’espoir d’avoir vos retours, commentaires, réactions et questionnement. Lorsque j’étais un jeune étudiant à Paris, je travaillais en tant qu’enquêteur dans une société de sondage, j’allais dans les gares et dans les trains, je questionnais les voyageurs quant à la propreté, la satisfaction, les retards… Un jour, j’ai demandé à un voyageur si je pouvais lui poser quelques questions. Il a fait trois pas derrière et a pris un moment de réflexion, puis il m’a répondu à haute voix et de façon soucieuse et nerveuse : « Et moi, qui va répondre à mes questions qui dérangent mon cerveau depuis longtemps ? » Et ça m’a fait à rire…

 

Abdelhafid Daoudi

 

 

 

 

 

Introduction

 

 

 

Penser savoir ce qu’on ne sait pas, c’est une sottise expresse ; vouloir faire le savant de ce qu’on connaît bien que l’on ne sait pas, c’est une vanité insupportable.

Saint-François De Sales

 

Notre réflexion est une expression et mise encommundenos préoccupations à l’égard de nos inquiétudes concernant le lien entre les êtres humains et les savoirs au fil du temps et de l’espace. Elle s’inspire fortement de nos expériences personnelles et professionnelles dans le secteur de l’enseignement et de la santé. Elle tente d’ancrer le sens de faire du questionnement une éducation et de l’éducation un questionnement. Une telle réflexion place l’être humain dans un environnement propice au savoir-vivre avec les sciences. Cette posture interdisciplinaire, notamment épistémologique et didactique des praticiens réflexifs de délibération, met en avant la culture du questionnement. Elle est face à la conception traditionnelle de la normalisation et de la transmission des connaissances neutres, qu’on pourrait qualifier de cruciale.

Dans cet ouvrage, notre réflexion est didactique, elle est fortement liée à la pensée épistémologique qui s’intéresse à l’épistémologie en tant qu’étude critique des sciences,des activités scientifiques et des savoirs. Elle traite le rapport et la mise en relation avec ces derniers, tout en introduisant une diversité de pensées, plus particulièrement la pensée psychologique, la pensée pédagogique, la pensée axiologique (des valeurs sociologiques) et la pensée historique. Rappelons que la didactique est un concept francophone qui est officiellement apparu vers les années 1970. Sa finalité, en quelques mots, est de valider et de transposer les savoirs afin qu’ils deviennent consommables pour les apprentis. Une fois de plus, elle s’intéresse au rapport entre les savoirs et l’être humain. D’ailleurs, le didacticien pose souvent la question : quoi enseigner ? Alors que la pédagogie renforce la didactique afin d’ajuster les pratiques ; c’est la question : pourquoi ? Elle se focalise sur les liens entre le formateur et l’apprenti. Le pédagogue s’intéresse à comment enseigner ? Outre ces pertinentes questions, nous nous interrogeons dans cet essai : quoi apprendre ? Pourquoi apprendre ? Comment apprendre ? Et comment apprendre à apprendre ? Parallèlement, l’épistémologie, qui est l’objet de réflexion du Dr Iliass Charif, est la branche qui s’intéresse surtout à la question : comment l’être humain construit-il les savoirs ?

Tous ces questionnements nous mènent à nous confronter à la normalité. D’ailleurs, s’attarder au questionnement : qu’est-ce que le normal ? mérite notre réflexion. En effet, normal, conforme ou standard sont des notions équivoques qui portent un sens selon le contexte. Dans un spectre plus large, on parle d’un statut statique ou répétitif ; c’est normal car elle se présente de manière identique pour la grande majorité d’une population. Par exemple, une taille ou un poids normal correspond à la taille ou au poids moyenne d’une population : ni plus petit et ni plus grand. Dans un cadre plus disciplinaire, on parle d’une référence normative selon une décision commune des experts dans une spécialité donnée ; c’est normal, car selon les normes canadiennes de la stérilisation Z314, il faut nettoyer manuellement les instruments médicaux avant de les mettre dans un laveur-désinfecteur. Alors que selon les bonnes pratiques en stérilisation en Suisse, il n’est pas obligé de nettoyer manuellement les dispositifs médicaux avant de les mettre dans un laveur-désinfecteur. Le normal est donc une présentation quasi-identique comparée à un modèle qui doit être toujours au plus près de ce dernier. Or, ce modèle est-il vraiment normal ? Ou bien, il est un obstacle devant tout ce qui est différent, en mouvement et en dynamisme ?

Dans une vision multi et inter-disciplinaire, qui utilise une boîte à outils diversifiés : historique, mathématique, physique, chimique, biologique, informatique, électronique, pédagogique, philosophique, sociologique et biomédical, nous agissons à la fois sur une diversité de fronts, entre autres :

Durant une expérience culturelle collective au Canada, nous avons abordé mensuellement un sujet culturel d’actualité avec des physiciens, des mathématiciens, des biologistes, des historiens, des économistes, des juristes, etc., nous avons rencontré de réelles difficultés dans la compréhension et dans la communication. À certains moments, nous avons réalisé que nous ne sommes pas assez formés et encore prêts pour ce genre de rencontres. L’accroissement considérable des savoirs et la spécialisation ainsi que la parution d’un nombre incroyable de disciplines sont des grands défis qui rendent le dialogue de plus en plus vicieux et visqueux. Alors qu’il est évident que les enjeux actuels sont de plus en plus complexes et nécessitent, en conséquence, un regard croisé et multidimensionnel. De nos jours, l’être humain a besoin d’emprunter de nombreux chemins en en utilisant une diversité d’outils et en se servant de plusieurs clés pour saisir les enjeux. Théoriquement, tous les spécialistes croient à l’importance de travailler ensemble et à la complémentarité des spécialités pour surmonter les défis communs. Pratiquement, de nombreux parmi eux se comportent comme s’ils sont mieux que les autres et s’ils détenaient une dose de vérité plus que les autres. Je raconte souvent aux élèves et aux étudiants l’histoire du Vent qui dit au Soleil : « Je suis plus fort que toi ! » Le Soleil lui a répondu : « Comment ça, tu es plus fort que moi ? Chacun possède ses forces et ses faiblesses, a ses fonctions et complète l’autre. Il n’est pas possible de faire une comparaison entre moi et toi ; on ne peut pas comparer une pomme et une banane quand même ! » Après une longue discussion, le Vent accuse le Soleil de donner des arguments de faiblesse pour fuir la vérité. Un jour, il voit un homme marcher et porter un manteau.« Faisons une compétition pour voir qui d’entre nous peut enlever le manteau de cet homme », dit le Vent avec fierté et affirmation. Il confirmait avec vantardise : « Ce concours est très facile pour moi ». Il souffla tellement fort que la poussière et les feuilles remplirent l’air.Les arbres commencèrent à se balancer.

Mais plus le Vent soufflait, plus l’homme tenait fortement son manteau. Face au vent devenu tempête, le Monsieur continuait à serrer son manteau pour avoir chaud. Ensuite, le Vent abandonna la course, furieux et épuisé d’user sa grande force.Puis, le Soleil commença à sourire avec empathie.Lorsqu’il brillait de plus en plus, l’homme sentait la chaleur et déboutonna volontairement son manteau.Par l’intelligence du Soleil, il décida d’enlever son manteau et de se reposer sous l’ombre d’un arbre.

En outre, emprunter une approche transdisciplinaire basée sur la culture du questionnement, évite les pièges de simplicité, de généralisation et de pseudoscience ; ceci pourra apporter un espoir à cet égard. L’objectif est d’étendre la réflexion, dans un esprit large, complexe, multidimensionnel, interrelié, comme un jeu de dominos, et relatif. J’adore lorsque mon responsable en stérilisation hospitalière, médecin-chef et membre de la direction médicale d’un hôpital suisse, apprécie un collaborateur, il dit souvent : « tel collaborateur possède une vision large et profonde… ». Bien entendu, nous dépassons la logique de défendre une idée, mais de poser des questions pour vivre ensemble une démarche d’investigation rigoureuse. Pardon, je voulais dire une démarche connue et reconnue par la communauté scientifique actuelle.

Globalement, cet ouvrage corrobore l’analyse qui donne à voir que l’esprit critique et la culture du questionnement sont des leviers de créativité et d’avancement scientifique et humain. Bien que cet esprit et cette culture soient souvent dérangeants, ils sont quand même indispensables pour voir et faire mieux. Nous montrons dans cet essai que l’histoire est jalonnée de situations qui montrent que, de temps à autre, certaines questions qualifiées troublantes et inacceptables sont vraiment des leviers pour des grandes transformations, rénovations et avancements. Elle témoigne ainsi que la fibre de la curiosité et du questionnement a un rôle incontournable dans l’innovation. Elle est comme une boussole invisible qui permet de guider nos réflexions, jugements et décisions sans faire d’une prise de conscience rationnelle et logique de notre part.

Dans ce cadre, quatre parties seront développées. Chaque section contient deux chapitres. De ma part, j’exerce un regard didactique, dans la première partie, sur l’esprit critique à travers deux chapitres : (1) La critique, un concept en évolution et (2) Curiosité des enfants et l’esprit critique, dans la seconde, sur l’évolution scientifique à travers deux chapitres : (1) L’esprit de questionnement et l’évolution scientifique et (2) La démarche scientifique et la culture du questionnement, et dans la troisième, sur le scientifique imaginaire à travers deux chapitres : (1) Le questionnement et l’intuition et (2) L’Univers est encore inconnu : les scientifiques ne sont pas des magiciens. Alors que M. Iliass Charif porte un regard épistémologique très intéressant sur la révolution scientifique dans la dernière section via deux chapitres : (1) La théorie darwinienne : Révolution scientifique ou rupture épistémologique et (2) Darwinisme social : rupture ou régression épistémologique.

Premièrement, nous emploierons la critique dans un sens quasi synonyme au questionnement qui se développe, se pratique et se dégrade (notion biodégradable) en fonction de nombreux facteurs que nous allons traiter soigneusement. Plus précisément, le mot « critique » est lié à l’analyse, au questionnement et au processus réflexif. Dans cette optique, il n’y a pas de réponse simple et définitive, il n’y a pas non plus d’algorithme binaire – bonne réponse (0) ou mauvaise réponse (1) – aux questionnements ou encore de vraie ou fausse affirmation. Rien n’est ni totalement blanc, ni complètement noir. Aucun individu ne possède la « vérité absolue » ; chacun exprime ses perceptions selon des données fiables et parlantes et s’enrichit de celles des autres selon certaines règles de l’art afin de les rendre peut-être assez structurées et agréables.

Ensuite, nous allons étudier l’effet extraordinaire de la curiosité des enfants qui posent entre 300 et 400 questions par jour pour s’auto-développer. Nous examinerons les raisons qui permettent aux enfants d’être très curieux, alors que cette curiosité se diminue avec l’âge, plus particulièrement, lorsqu’ils se confrontent à la rigidité et la conformité du système scolaire.

Puis, nous attirons l’attention sur l’importance de la culture du questionnement pour surmonter des obstacles et des défis cognitifs, ainsi que dans l’avancement scientifique et humain. À vrai dire, il n’y a pas de bonne ou de mauvaise question. Le questionnement comme tel est une valeur et une avenue qui pourra nous amener à se débarrasser de nos chaînes cognitives.

Après, nous percerons davantage la place de la méthode scientifique dans l’apprentissage scolaire et humain. Rationnellement parlant, elle permet de nourrir la culture scientifique chez les apprentis qui est considérée comme un atout important aux débats et aux situations complexes de l’espace public. En revanche, il est illusoire de réduire la démarche scientifique dans une procédure qui se veut universelle et neutre. Ceci peut inciter les apprenants à tomber dans le piège de la conformité qui met des barrières à l’autonomie et à la créativité. Il faut plutôt inciter les élèves à retravailler leurs connaissances antérieures, leurs intuitions et leurs présentations initiales en se basant sur les faits observés pour se familiariser avec la culture du questionnement.