La barbe-bleue ou l’histoire de Louis XIV - Lara Helou - E-Book

La barbe-bleue ou l’histoire de Louis XIV E-Book

Lara Helou

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Beschreibung

L’essai sur la Barbe-Bleue dénonce l’une des histoires les plus noires de l’époque de Louis XIV. Actualisée, cette même histoire s’inscrit dans les romans policiers les plus énigmatiques que l’on puisse trouver en termes de conte. Ce conte, le plus intrigant de Charles Perrault, met en scène un magicien-sorcier à la barbe bleue. Dans l’une de ses fastueuses maisons, sa jeune épouse suivra les couloirs redoutables de la mort. Cet ouvrage intense est une source pour les réalisateurs et les scénaristes à venir.

À PROPOS DE L'AUTRICE

Lara Helou est docteur en lettres de la Sorbonne. Sa thèse a été publiée par les presses du Septentrion et est largement référencée par WorldCat à l’Université de New York, de Princeton, d’Indiana, de Berkeley, de Stanford, de Californie et de Berlin. Depuis 2003, elle a écrit et produit 53 contes pour l’écran et des livres audiovisuels pour des compagnies aériennes internationales telles qu’Air France, Corsair, Air Austral, Air Calin. Ses histoires sont également sur Kidspads et Royal Caribbean Cruises Line et elles sont lues par plus de 2 millions de lecteurs dans le monde.

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Lara Helou

La Barbe-Bleue ou l’histoire de Louis XIV

Essai

© Lys Bleu Éditions – Lara Helou

ISBN : 979-10-422-1398-5

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122 – 5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122 – 4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335 – 2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

Avertissement

Enfin, c’en est fait, la Brinvilliers est en l’air : son pauvre petit corps a été jeté, après l’exécution, dans un fort grand feu, et les cendres au vent ; de sorte que nous la respirerons, et par la communication des petits esprits, il nous prendra quelque humeur empoisonnante, dont nous serons tous étonnés.

Lettre de Madame de Sévigné

17 juillet 1676, lettre 558

Introduction

Très peu destiné aux jeunes enfants, La Barbe-Bleue est l’un des contes les plus terrifiants du recueil.

La Barbe-Bleue aurait pu être confondu avec Gilles de Rais, criminel du Moyen Âge et pourtant la Barbe-Bleue n’est pas Gilles de Rais, car Charles Perrault s’intéresse davantage aux problèmes de son époque.

La Barbe-Bleue aurait pu être alors confondu avec le marquis de Barbezieux propulsé à la place de Perrault par Louvois qui l’a définitivement écarté du pouvoir et qui après Colbert est devenu le ministre de Louis XIV.

Et pourtant la Barbe-Bleue n’est pas le marquis de Barbezieux, car Charles Perrault ne se venge pas de ceux qui l’ont maltraité. Il se retire discrètement de la cour qui l’a trahi, « je (…) me retirai sans éclat et sans bruit ».

Charles Perrault, dans Mémoires de ma vie, Éditions Macula, Livre quatrième, p.232.

Qui donc est la Barbe-Bleue ?

La Barbe-Bleue est celui qui permet à Charles Perrault de tout dénoncer.

En 1682, le roi paré de richesses a interdit la divulgation des crimes et des infanticides qui se produisaient au milieu de sa cour sans même chercher à les arrêter.

Alors Perrault pour qui reste l’écriture, défenseur de vérité et de justice, dénonce.

Dans le personnage de la Barbe-Bleue, l’auteur parvient à dénoncer l’histoire des messes noires sous Louis XIV, les empoisonnements, les infanticides, les sorcelleries et ses superstitions.

Dans le personnage de la Barbe-Bleue, l’auteur dénonce aussi l’affaire historique et assassine des poisons.

Dans le personnage de la Barbe-Bleue, l’auteur dénonce enfin les actes de Louis XIV, ce Roi-Soleil qui sert davantage son intérêt personnel que celui de sa nation et qui devient lui-même la Barbe-Bleue.

Malgré le caractère merveilleux inspiré dans un style de conte d’autrefois, ce conte est celui qui déplore le plus le monde de la cour, ses faux sorciers, ses assassins impunis et aussi son roi. Dans Mémoires de ma vie, Charles Perrault précise, «il arriva une chose qui m’ouvrit les yeux là-dessus et qui me fit voir quel pays c’est que la cour ».

Charles Perrault, dans Mémoires de ma vie, Éditions Macula, Livre quatrième, p.163.

Le conte de La Barbe-Bleue est en finalité pour son auteur le conte réaliste du désenchantement.

I

Le conte de La Barbe-Bleue ou l’histoire

des messes noires sous Louis XIV

En 1675, plusieurs rumeurs parvinrent aux oreilles du roi, rumeurs selon lesquelles on célébrait à Paris même au cœur des plus nobles cercles aristocratiques des cultes sataniques nommés « messes noires ».

Le roi chargea Gabriel de La Reynie de découvrir les origines de ces cultes et ses commanditaires.

Il apparut alors que c’étaient des hommes et des femmes se disant sorciers et faiseurs de poisons qui organisaient ces rituels macabres.

Georges Mongrédien dans Madame de Montespan et l’affaire des Poisons écrit bien, « plus d’un lecteur s’étonnera de constater que pendant les années 1660-1680, les plus brillantes du règne, celles des grandes victoires, de grandes fêtes de cour, cette étincelante façade ait pu cacher le spectacle lamentable de ces officines louches où des devineresses (…) pratiquaient (…) la magie, la sorcellerie, l’empoisonnement, les messes noires avec sacrifices d’enfants, où des sorciers doublés d’escrocs se livraient aux pires besognes, d’entremetteurs, de maîtres chanteurs, de faux-monnayeurs, de fabricants de poisons ».1

Dans un climat troublé par ces méfaits, Charles Perrault est depuis 1660 le conseiller de Colbert, ministre du roi. Il est par conséquent tenu au courant des pires secrets et complots concernant les empoisonnements à la cour.

Trente-sept ans plus tard, en 1697, alors qu’il est disgracié de la cour de France, il écrit Les Contes deMa mère l’Oye. Colbert est mort, mais le roi vit encore et l’affaire des poisons n’est pas terminée. Dans une écriture silencieuse et très cachée, il enfouit entre les lettres, les secrets les plus horribles que le roi lui-même a interdit de divulguer.

Il enfouit donc dans des mots souterrains les vérités du siècle qu’il a très bien connu pour avoir servi le roi pendant vingt-trois ans.

Désormais exilé de la cour, Charles Perrault n’a plus rien à perdre sauf sa vie, mais il est déjà vieux. Six ans avant sa mort, il décide de ne pas mourir dans le silence éternel. Il dénonce donc. Et même s’il dénonce avec la plus grande précaution pour ne pas provoquer la colère du roi et perdre les quelques temps qui lui reste à vivre, il dévoile dans une écriture qui reste à décrypter, les crimes les plus atroces qui ont eu lieu sous Louis XIV : les empoisonnements, les infanticides et toutes les profanations du culte chrétien lors des messes noires régies par ceux qui se disaient être des sorciers, des magiciens et des empoisonneurs.

Au sein de ces messes noires menées par ces sorciers, ces magiciens et ces empoisonneurs, les participants donnaient leur âme au diable pour trois raisons :

La première est l’argent.

La deuxième est une longue vie prospère pour jouir des richesses de la vie.

La troisième est la sexualité.

Ces trois objectifs sont présents dans le conte de La Barbe-Bleue qui n’apparaît pas comme le conte onirique du rêve des fées et de l’amour des princesses, mais comme celui de la terrible réalité du siècle qui révèle toute l’histoire des messes noires qui a eu lieu sous Louis XIV.

La férocité de ces cultes est sous-jacente dans le texte de Charles Perrault à travers le personnage terrifiant de la Barbe-Bleue qui est décrit comme le prototype de tous ceux qui pratiquaient les messes noires.

Sorcier et empoisonneur, la Barbe-Bleue est celui qui fascine par l’appât de l’argent et de la prospérité matérielle.

Assassin et criminel, la Barbe-Bleue est aussi, comme tous les sorciers qui pratiquent les rites sexuels au cours des messes noires, celui qui associe la sexualité à la mort.

Par conséquent, la première étape consiste à déceler dans les mots du texte en quoi la Barbe-Bleue est un sorcier empoisonneur. La seconde étape vise à comprendre comment le personnage manie l’argent et la jouissance de la vie. Enfin, la troisième étape décortiquera l’analogie du criminel qu’est la Barbe-Bleue avec les pratiques réalisées lors des messes noires.

I.1

Sorciers et empoisonneurs

I.1.1

La poudre de Cantharide : « Les mouches bleues »

Au XVIIe siècle, les empoisonnements étaient fréquents et ce procédé criminel était très employé à cette époque.

Plusieurs hauts personnages passèrent pour avoir été empoisonnés, « Henriette d’Angleterre, décédée subitement en 1670, est l’exemple le plus fameux ».2

Cette floraison de crimes affreux à l’époque la plus brillante du siècle provient de la multiplication des officines spécialisées. Les sorciers abritaient souvent des alchimistes qui par le biais de la pierre philosophale et de la transmutation du mercure en or, « se livraient clandestinement à des activités coupables, telles que la fabrication de fausses monnaies et de poison ».3

Ces alchimistes concoctaient alors de mystérieuses distillations de plantes vénéneuses fournissant ainsi aux

sorciers et aux devineresses diverses poudres, les unes dénommées « poudres pour l’amour » étaient dites comme étant aphrodisiaques, généralement à base de poudres de cantharide, les autres nommées « poudres de succession » et qui n’étaient autre que du poison mortel.

En ce qui concerne le conte de LaBarbe-Bleue, celui-ci s’inscrit pleinement dans cette ambiance des poisons.

À la manière dont il fut décrit par Charles Perrault, le personnage de la Barbe-Bleue apparaît comme un sorcier qui fait appel à ces distillateurs de plantes vénéneuses.

Tel que le souligne le texte, le poison qu’il utilise pour séduire les femmes qu’il finit par égorger est bien le poison végétal nommé « poudre de cantharide », qui à l’époque de Louis XIV passait pour aphrodisiaque et qui constituait la base des « philtres d’amour ».

Ce « philtre d’amour » utilisé par la Barbe-Bleue n’opère pas de manière immédiate sur les femmes qu’il veut séduire. À la première rencontre, l’aspect physique que sa personnalité dégage à cause de la couleur de sa barbe, effraye les femmes car comme le souligne l’auteur, « mais, par malheur, cet homme avait la barbe bleue : cela le rendait si laid et si terrible, qu’il n’était ni femme ni fille qui ne s’enfuît de devant lui ».

Mais dans une seconde étape, cette même barbe qui au départ terrorise finit par envoûter les femmes, « (…) enfin tout alla si bien que la cadette commença à trouver que le maître du logis n’avait plus la barbe si bleue (…) ».

La question se pose donc au lecteur : comment d’un sentiment de répulsion, la jeune femme a-t-elle pu être si séduite ?

Si Perrault a choisi une barbe à la couleur bleue, c’est parce que le choix de cette couleur n’est pas innocent lorsque l’on apprend que la poudre de cantharide qui a un effet aphrodisiaque est extraite des « mouches bleues ».