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Extrait : "Un petit salon. Au fond, une porte à deux ballants ouvrant sur le théâtre ; de chaque côté de la porte, un canapé. A droite, dans l'angle, une fenêtre à balcon avec de grands rideaux. Au premier plan, une cheminée ; une table servant à dessiner est près de la fenêtre ; un fauteuil sur le devant de la scène."
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Seitenzahl: 61
Veröffentlichungsjahr: 2015
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EAN : 9782335016918
©Ligaran 2015
ADRIEN, fils de madame des Aubiers
NOËL, vieux domestique
OCTAVE, ami d’Adrien
MADAME DES AUBIERS
BLANCHE, fille de madame des Aubiers
MATHILDE DE PIERREVAL
La scène se passe aux environs du Havre.
Un petit salon. Au fond, une porte à deux ballants ouvrant sur le théâtre ; de chaque côté de la porte, un canapé. À droite, dans l’angle, une fenêtre à balcon avec de grands rideaux. Au premier plan, une cheminée ; une table servant à dessiner est près de la fenêtre ; un fauteuil sur le devant de la scène. À gauche, au premier plan, une table à tiroir adossée au mur ; dans l’angle, une porte. Sur le devant de la scène, une chaise longue faisant face à la cheminée ; un pouff est devant la chaise longue.
Madame des Aubiers, Blanche, Octave, Mathilde.
Madame des Aubiers est assise sur la chaise longue ; Blanche est près d’elle, assise sur le pouff, faisant face au public ; toutes deux travaillent au même morceau de guipure ; Octave, assis sur le canapé du fond, à droite, tient un livre, mais il ne lit pas, il regarde Mathilde avec inquiétude ; celle-ci, assise devant une table, près de la fenêtre, dessine. Les trois femmes sont en deuil. Un silence… Jeu muet. Madame des Aubiers, rêveuse, laisse tomber son ouvrage ; elle reste immobile et des larmes coulent de ses yeux. Blanche la regarde tristement, elle se lève, essuie les larmes de sa mère, l’embrasse, puis elle va près d’Octave qui se lève.
Quel temps affreux cette nuit !… Et tous nos pauvres pêcheurs, partis depuis hier matin !…
Ils sont rentrés dans le port… Je les ai vus, j’étais sur la jetée.
Autrefois, au bruit de la tempête, je frissonnais, je pensais à lui et je tremblais !… Aujourd’hui, que m’importent les dangers et la tempête ?…
Hélas ! plus même d’inquiétude !…
Le vent était si violent, qu’il a brisé le grand mât devant la cabane de la Gervaise, votre voisine.
Chut ! ne parlez pas de la Gervaise devant maman. Elle aussi a perdu son fils ; voilà deux ans qu’elle n’a eu de ses nouvelles.
Ah ! la veuve du maître pilote, elle avait un fils ?
On croit qu’il a péri dans le naufrage de l’Amphitrite. Ne parlez jamais de cela ici… le nom seul de la Gervaise fait pleurer maman… cela lui rappelle…
Je comprends… Cher Adrien !… mon ami d’enfance…
Mourir à vingt-trois ans, après le succès !
Quand déjà nos savants appréciaient l’importance de ses travaux et de ses découvertes !
Il va s’asseoir sur le canapé, à gauche.
Oh ! c’est bien lui ! c’est son doux regard… son air fier !… Prends garde que maman ne le voie, ce portrait ; il est si ressemblant, il lui ferait mal. Mon pauvre frère !… tu l’aimes donc toujours ?
Enfant !…
La regardant fixement.
Quand tu es triste, tu as ses yeux.
Elle l’embrasse.
C’est ce mois-ci que nous devions nous marier.
Comme il la regarde !
Madame des Aubiers, absorbée sur la chaise longue, Octave, sur le canapé à gauche, Noël, entrant du fond, dont il referme la porte, Blanche, Mathilde, dessinant.
Mademoiselle Blanche ?…
Que veux-tu, Noël ?
C’est l’architecte, c’est-à-dire le maître maçon qui vient pour le vieux mur qui est tombé… Il voudrait parler à madame.
Bien.
Elle s’avance vers sa mère, puis revient à Noël.
Apporte-t-il le plan de la grange que je lui ai demandé ?
Oui, il dit que ça ne coûterait presque rien à bâtir, que madame a ici tous les matériaux… Tâchez qu’elle consente… Vous la mènerez voir les ouvriers travailler, ça la forcera à prendre un peu l’air, à marcher… Ce sera toujours ça de gagné.
Elle ne voudra pas… Si je lui demandais de faire faire en même temps une petite serre pour mes fleurs ?
Vos quatre orangers !
J’en aurai d’autres… Mais non, il ne faut pas que je le lui demande, elle verrait bien que c’est une idée pour elle et elle ne voudrait pas. Il faut qu’elle croie que je le désire. Vois-tu, Noël, il n’y a que l’idée de me faire plaisir qui puisse l’entraîner… il faut bien se dire cela.
Oui… Tâchons d’enlever cette affaire-là aujourd’hui, tout de suite.
Si je priais Mathilde…
Elle ? Elle n’est bonne à rien… elle ne sait que pleurer.
Et faire des chefs-d’œuvre…
Bah ! les chefs-d’œuvre, ça ne console pas.
Pourtant…
Qu’est-ce donc ?
Maman, c’est Noël qui veut absolument que vous parliez au maître maçon pour cette nouvelle grange que vous vouliez faire bâtir, il y a trois mois… avant notre malheur. Je lui dis que vous n’êtes plus disposée à vous occuper d’affaires, que vous ne pouvez penser à cela maintenant. Il ne m’écoute pas… Il est fou… il va faire monter cet homme… il dit que ça ne coûtera presque rien.
Rien, madame… rien…
Qu’on pourra même adapter au bâtiment une petite serre pour moi, pour que je m’amuse à soigner des fleurs…
Très bien !
Que cela me distraira. Eh ! mon Dieu, je n’ai pas besoin de me distraire… je ne veux pas m’amuser !… Et d’ailleurs, je n’aime plus les fleurs.
Elle a gagné le milieu du théâtre.
Chère enfant, toujours en larmes !… Cette vie-là est dangereuse à son âge… ses belles couleurs se flétrissent.
Haut.
Tu aimais tant les fleurs autrefois !
Oui, alors…
Alors tu n’étais pas seule à les soigner… Mais au moins il faut garder celles qu’il aimait… c’est un souvenir chéri… Noël a raison, ma fille, je vais parler au maître maçon.
Tu l’entends !
C’est de la bonne malice.
À part.
Elle est le démon du bien.
Noël, va ouvrir la grille du côté de la ferme.
Noël sort. À part.
Allons, du courage.
Haut.
Viens, Blanche, il faut que tu donnes ton avis ; c’est pour toi.
Elle sort avec Blanche.
Octave, Mathilde.
Seuls un moment par hasard…
Il s’approche de Mathilde, qui se lève aussitôt et reste immobile.
De grâce, écoutez-moi, je vous en supplie ! Laissez-moi promettre à votre père que bientôt vous reviendrez chez lui…
Je vous l’ai déjà dit, je veux, je dois rester ici.
Vous devez demeurer chez vos parents, dans votre famille.
Ma famille est celle-ci… celle de l’homme que je devais épouser.