Le Doctorat impromptu - Andréa de Nerciat - E-Book

Le Doctorat impromptu E-Book

Andréa de Nerciat

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Beschreibung

Un abbé décide de faire chanter une jeune fille qui, en attendant son amant dans une auberge, parfait son éducation sexuelle avec un autre...

POUR UN PUBLIC AVERTI. Ce roman érotique tient en deux missives envoyées par Érosie à son amie restée au couvent : l’héroïne y raconte comment, au lieu de son futur époux, elle trouve dans l’auberge où ce dernier devait l’attendre un petit vicomte qui la guérit de sa haine des hommes, et quels obstacles à sa découverte du plaisir va dresser un abbé jaloux devenu maître chanteur.
Le Doctorat impromptu est une leçon de sagesse amoureuse qui, dans le même mouvement, devient une invitation à l’appliquer – autrement dit c’est un livre de philosophie où le gai savoir de l’amour se réalise dans la simple description du plaisir de le faire.

Un court roman épistolaire et initiatique par un des maîtres de la littérature érotique du XVIIIe siècle.

EXTRAIT

Quand nous nous sommes séparées, ma chère Juliette, je t’ai promis, et de bien bonne foi, de ne te cacher ni mes faiblesses, ni la moindre de leurs circonstances, si par malheur je venais à me pervertir. C’est ainsi que je nommais très sérieusement le parti d’abjurer, peut-être, certain système anti-masculin que tu m’as connu, dont j’étais orgueilleuse et dont tu ne cessais de me railler. La haine active que j’avais conçue contre un sexe... selon moi si perfide, puisque trois de ses individus m’avaient offensée, cette haine, que je croyais immortelle dans mon cœur, contrastant avec les délices dont me faisaient jouir nos tendresses féminines, je me persuadais que jamais animal au menton barbu ne viendrait à bout de m’arracher la moindre faveur... Que j’étais folle !
Trompe-t-on ainsi la nature ! Hélas ! Juliette, j’ai violé mon serment. J’ai cessé de brûler de cette flamme que je nommais pure, parce qu’aucun homme ne l’alimentait. J’ai cessé d’être, comme nous disions, une vestale mitigée ; et non seulement l’homme, enfin, a profané mes vierges appas, mais du même saut dont je franchissais la barrière qu’il m’avait plu d’opposer à mes mâles désirs, j’ai fait une culbute effrayante dans le gouffre du plus blâmable dérèglement...

À PROPOS DE L'AUTEUR

Andréa de Nerciat (1739-1800) est un romancier français connu pour ses œuvres libertines simples et joyeuses : Félicia ou Mes Fredaines (1775), Le Doctorat impromptu (1788), Les Aphrodites (1793) ou encore apparu à titre posthume, Le Diable au corps (1803). Parallèlement à l'écriture, il embrasse une carrière militaire et diplomatique, qui l'emmène jusqu'à être colonel dans l'armée prussienne, agent secret et puis chambellan de la reine de Naples, Marie-Caroline. L'homme des lettres aurait même fréquenté des sociétés secrètes de libertinage, où il a puisé la matière de son œuvre.

À PROPOS DE LA COLLECTION

Retrouvez les plus grands noms de la littérature érotique dans notre collection Grands classiques érotiques.
Autrefois poussés à la clandestinité et relégués dans « l'Enfer des bibliothèques », les auteurs de ces œuvres incontournables du genre sont aujourd'hui reconnus mondialement.
Du Marquis de Sade à Alphonse Momas et ses multiples pseudonymes, en passant par le lyrique Alfred de Musset ou la féministe Renée Dunan, les Grands classiques érotiques proposent un catalogue complet et varié qui contentera tant les novices que les connaisseurs.

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AVIS DES EDITEURS

Un valet d’auberge, chargé de jeter dans la boîte la première de ces lettres, et supposant, d’après le volume, qu’elle pouvait contenir quelque chose de mystérieux, la porta chez un jeune homme attaché, en sous-ordre, à l’un des bureaux ministériels, et qui logeait dans l’hôtel. Ce commis, abusant de la circonstance, ouvrit le paquet ; mais au lieu de secrets d’État, il n’y trouva que des folies, qu’il transcrivit pour son amusement. Cette copie, qui a circulé, nous est parvenue, et c’est d’après elle que nous avons imprimé.

Le lecteur nous pardonnera la liberté que nous avons prise de jeter par-ci par-là quelques notes. Celles qui tendent à l’instruire étaient du moins nécessaires, et ce n’est pas sans quelque peine que nous nous en sommes procuré les sujets. Quant à nos réflexions, si elles préviennent celles du public, c’est que, premiers lecteurs, nous avons dû avoir, avant lui, les idées qui lui viendront, sans doute, en lisant cette étrange anecdote.

Lettre d’Erosie à Juliette1

« Quand nous nous sommes séparées, ma chère Juliette, je t’ai promis, et de bien bonne foi, de ne te cacher ni mes faiblesses, ni la moindre de leurs circonstances, si par malheur je venais à me pervertir. C’est ainsi que je nommais très sérieusement le parti d’abjurer, peut-être, certain système anti-masculin que tu m’as connu, dont j’étais orgueilleuse et dont tu ne cessais de me railler. La haine active que j’avais conçue contre un sexe… selon moi si perfide, puisque trois de ses individus m’avaient offensée, cette haine, que je croyais immortelle dans mon cœur, contrastant avec les délices dont me faisaient jouir nos tendresses féminines, je me persuadais que jamais animal au menton barbu ne viendrait à bout de m’arracher la moindre faveur… Que j’étais folle ! Trompe-t-on ainsi la nature ! Hélas ! Juliette, j’ai violé mon serment. J’ai cessé de brûler de cette flamme que je nommais pure, parce qu’aucun homme ne l’alimentait. J’ai cessé d’être, comme nous disions, une vestalemitigée2 ; et non seulement l’homme, enfin, a profané mes vierges appas, mais du même saut dont je franchissais la barrière qu’il m’avait plu d’opposer à mes mâles désirs, j’ai fait une culbute effrayante dans le gouffre du plus blâmable dérèglement…

« Je crois te voir sourire avec malice et de mon cas fâcheux et du ton d’élégie sur lequel je t’en parle ? Ris, mon enfant, tu fais bien : moi-même, quand j’y pense, je suis tentée de rire aussi de ma déconvenue ; du moins, je ne saurais m’en affliger.

« Tu conviendras que si quelque femme est excusable de penser faux, à vingt ans, en matière de galanterie et de volupté, c’est sans contredit celle qui, née, comme moi, avec le germe des passions lascives, et douée d’organes assez perfectionnés, qui, brûlant dès les plus tendres ans d’un feu secret, dont notre menteuse éducation prévient et détourne même la connaissance, qui, en un mot, malheureuse trois fois de suite, par trois amants mal choisis, attribuait au genre masculin tout entier le mal que quelques espèces lui avaient occasionné seules. Le sémillant chevalier de Bruyancour (me disais-je), à qui j’avais voué les prémices de ma sensibilité morale, m’a trahie lâchement ; je le surpris un jour dans les bras de ma mère, et l’entendis plaisanter avec elle du goût trop vif qu’il avait su m’inspirer. Cette affreuse découverte m’avait guérie ; le besoin d’être amoureusement occupée me pressait de distinguer un jeune suppôt de Thémis qui se désolait, et dont je craignais de faire le malheur… C’est lui qui m’a tyrannisée. Hérissé de fausses vertus ; imbu de la tristesse de Young, des sophismes de Jean-Jacques ; embrumé des sombres productions de d’Arnaud ; admirateur studieux de tous les romans et drames déclamateurs, larmoyants ou sanguinaires ; jaloux, moins en amant passionné qu’en mentor despotique, M. de Mélambert m’a fait bientôt regretter de n’avoir pas plutôt été la dupe de son éventé prédécesseur que sa propre victime.

Assiégée enfin par l’adroit et diabolique abbé Des Ecarts, j’ai eu le courage de rompre avec le magistrat ; et, dès lors, adoptant une morale tout à fait opposée, j’ai mis sous les pieds tous les préjugés, même ceux de rigueur. Dûment dégoûtée pour lors, et des agréables qui se partagent et se font des trophées à nos dépens, et des docteurs en sentiments, dont l’aride galanterie tend à coaguler le sang de la bouillante adolescence, me voici toute à mon petit-maître calotin… Mais le plus imprévu, le plus sanglant des outrages m’attend où je crois trouver enfin le parfait bonheur ! Quand tout obstacle est aplani ; quand je suis résignée ; quand je brûle de perdre toute espèce de droits au respect de mon amant…

M. l’abbé se trouve en défaut ! Apparemment frappé de quelque coup d’un sort ennemi, cet intrépide fileur d’intrigues manque d’haleine au plus beau moment de son rôle ! J’en suis, moi, pour mes frais de scène, et la toile est tombée sans qu’il y ait eu de dénouement3. Dans quelle âme, chère Juliette, trois aventures consécutives aussi malheureuses n’eussent-elles pas jeté le trouble, la défiance et le dégoût !

« Par une suite bien naturelle de tant de disgrâces, je prends pour le monde une sainte aversion ; à cor et à cri je demande le cloître ; à force d’importunités, j’obtiens enfin d’y être confinée. Là, d’abord dévote presque extatique, mais peu à peu moins sublime ; bientôt désabusée du ciel, et me rabaissant vers la terre, assez près pour observer que, même dans la solitude des couvents, le plaisir a des autels, je me hâte de figurer avec ces mondaines guimpées qui savent, en dépit de la règle et des vœux, se procurer à peu près l’équivalent des jouissances du siècle…

« Mais à quoi bon, ma Juliette, te rappeler tous ces faits ! Ne t’ai-je pas mille et mille fois raconté ce que tu n’avais point vu de mon roman bizarre ? Et tout le reste, n’en as-tu pas été la principale héroïne, jusqu’au triste moment de notre séparation ? Quel plaisir n’ai-je pas à me rappeler que, pendant les trois ans qui nous ont cachées sous le même dôme, nous n’avons eu qu’une âme, qu’un secret, qu’un bonheur ! Tendrement aimée, ardemment désirée de ton Erosie, toi seule as rempli complètement le vide que mes infortunes galantes avaient ouvert dans mon cœur. Tu étais mon bon génie ; tu me consolais ; tu m’enchantais… Tu le pourras encore, lorsque, à ton tour dégagée de tes fers momentanés4, tu reparaîtras sur le théâtre du monde, où tes charmes et tes admirables qualités te présagent la plus belle carrière… Mais alors, seras-tu la même pour moi ? Ton cœur ne sera-t-il pas de glace pour l’infidèle Erosie ? Ne me mépriseras-tu pas d’avoir pu si brusquement devenir inconséquente à mes plans et parjure aux serments qui nous avaient liées ? Non ; tu seras indulgente. Ton âme est douce ; tes sentiments, modérés en tout, ne te rendent pas, comme moi, susceptible de passer inopinément d’un point extrême à l’extrême opposé. Je me souviens avec plaisir que lorsqu’il était question entre nous de l’excellence d’un système, dont tu suivais assez volontiers la pratique, sans être fort engouée de sa théorie, tu me disais avec une touchante ingénuité : « Je crois, ma chère, que, dans notre position, ce que nous nous permettons est pour le mieux ; mais dans toute autre, pour mon compte du moins, je ne répondrais de rien. Les simulacres sont assez agréables où manque la réalité ; mais où l’on peut la trouver, peut-être ce qui la représente le mieux n’a-t-il que bien peu de mérite. »

« Quant à moi, chère amie, je n’ose prononcer. Il me convient de flotter quelque temps encore entre mon ancienne erreur (si mon système en fut une) et la nouvelle (si c’en est une encore que de m’être réconciliée avec l’homme). Eh ! que sais-je, violente comme je suis dans toutes mes affections, si, bientôt, je ne me jetterai pas à corps perdu dans le travers d’aimer, autant que je le haïssais, un sexe dangereux, aux atteintes duquel je me croyais à jamais inaccessible !… Lis mon récit, et juge-moi.

« Puisqu’il ne suffit pas ici-bas d’être jolie, grande, faite à peindre ; d’avoir de la naissance, de l’éducation, des talents ; d’être de plus douée de ce caractère harmonique qui peut contribuer au bonheur de ce qui nous entoure ; et puisque avec tous ces attributs, sans richesse, on peut fort bien se trouver en butte à toutes sortes de disgrâces, il était raisonnable que je me décidasse à prendre un mari, quand un homme honnête et riche se présentait avec le désir de m’avoir pour épouse. Tu sais, parfaite amie, quels profonds et sages raisonnements je fis, lorsque mon tuteur me proposa le plus que quadragénaire baron de Roqueval. Tu me vis docile aux volontés supérieures5, en dépit d’un portrait qui, bien que flatté, comme le sont toutes ces effigies, ne m’annonçait qu’un homme laid et passablement dépourvu de tournure… — Eh bien ! te dis-je, il est du moins estimable et riche ; son état d’homme de mer