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Odilon un apprenti chevalier, fils du Comte Hugues de Beaufort, apprend qu'un complot est ourdi contre sa famille par Garin, le fils d'un de leur ami. Poursuivit par les hommes de Garin partis à sa recherche, Odilon est contraint de se cacher dans la forêt, endroit très dangereux, car peuplée de brigands qui l'ont truffé de pièges. Toujours aidé par le vieux sage et d'autres créatures magiques, Odilon va faire, dans cette forêt, des rencontres bouleversantes. Celles-ci vont changer sa vie et l'aider à préparer sa vengeance pour sauver sa famille, retenue prisonnière par Garin dans leur château.
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Seitenzahl: 259
Veröffentlichungsjahr: 2024
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Ouvrages de Sophie Richard-Lanneyrie
Aux Éditions BOD :
Romans et Nouvelles
Les Contes de Sophie
Un Monde de Femme
Les aventures d’Odilon
Les aventure d’Odilon Tome 1, Tome 2 et Tome 3 (Versions illustrées)
Le trésor du Pirate
La fille du Vent
Les apprentis anges gardiens
Essais
Les grandes histoires de la mythologie.
Une histoire de la communication au travers de la création et de la transformation de l’espace public.
La vie et l’histoire des Salons des XVIIème et XVIIIème siècles.
Aux éditions Le Génie :
Livres de cours et exercices
Histoire et Théorie de la communication : bagage culturel et pratique pour l’analyse critique
Les Clés du Marketing
Exercices de Marketing
Dictionnaire du Marketing
Les Clés du marketing International
Exercices de marketing international
Annales d’Étude de Cas BTS Communication Pochette F1, F2 et Étude de cas
BTS Communication (Directrice de Collection)
12 cas de communication d’entreprise (théorie, méthodologie et pratique)
Essai (Collection Les mini-génies)
L’E-marketing
Le mobile-marketing
La délocalisation
La PNL
Le Coaching
Sous le pseudonyme de Sophie Chalandry
Contes féériques et extraordinaires.
Nouvelles policières et mystérieuses.
Contes maritimes et bucoliques (Edités aussi en Livre Audio)
Contact auteur : [email protected]
Site Internet : http://sophie-richardlanneyrie.fr
Blog : http://sophierichardlanneyrie.overblog.com/
Chaine YouTube : http://@SophieRichardLanneyrie
Chap XXIV : Panta Rei
Chap XXV : Saurus, le tyran de la forêt
Chap XXVI : Une surprenante confidence
Chap XXVII : Une sévère remontrance
Chap XXVIII : Bertille prend un risque
Chap XXIX : La cachette secrète
Chap XXX : La sorcière
Chap XXXI : L’anneau magique
Chap XXXII : Une agréable surprise
Chap XXXIII : Une information importante
Chap XXXIV : Une attente inutile
Chap XXXV : Une affaire rondement menée
Chap XXXVI : Une visite précipitée
Chap XXXVII : Une entreprise audacieuse
Chap XXXVIII : L’anneau magique remplit ses promesses
Chap XXXIX : La fête
Chap XXXX : Un visiteur inattendu
Chap XXXXI : Où l’on prépare un plan d’attaque
Chap XXXXII : Carpe Diem
Chap XXXXIII : Un étrange voyageur
Chap XXXXIV : La fée
Chap XXXXV : L’entraînement
Chap XXXXVI : Une invitation imprévue
Chap XXXXVII : Ou Garin se méfie et où l’on découvre les cachots du château
O dilon continuait sa progression dans la forêt. À mesure qu’il avançait, il se sentait de plus en plus paralysé par la peur. Il ne conduisait même plus son cheval qui allait tout seul. Il aurait voulu être plus vieux de plusieurs heures, être déjà arrivé à sa cabane.
Il sursautait au moindre hululement d’un hibou, au moindre froissement d’herbes. Il s’arrêtait, dès qu’il entendait des branches d’arbres craquer, à terre, tout près de lui.
Il se disait que c’était au-dessus de ses forces de continuer son chemin lorsqu’il sentit une présence tout près de lui. Il distinguait mal avec l’obscurité et il n’osait pas parler, de peur qu’on lui réponde. Il se sentit soulagé lorsqu’il reconnut la voix de Maître Hann.
- Alors mon garçon, lui dit le vieux sage, tout va bien ?
- Ah ! C’est vous Maître Hann, répondit Odilon en poussant un soupir de soulagement. Vous m’avez fait une telle peur !
- À ce que je vois, je ne suis pas le seul ? dit le vieil homme en constatant l’état d’excitation dans lequel Odilon se trouvait.
- Peut-être pourriez-vous m’aider ? Je suis mort de peur. Je ne peux plus avancer. Je crois que je vais rester là, à attendre que le temps passe !
- Et si nous avancions ensemble ? suggéra Maître Hann. Te sentirais-tu plus en sécurité ?
- Oui… je crois ! s’exclama Odilon. Je me sens déjà soulagé depuis que vous êtes arrivé !
- Ah ? Alors… Allons-y !
Ils avancèrent ainsi, côte à côte, pendant quelques minutes, puis le vieux sage questionna Odilon.
- De quoi as-tu peur ?
- Je ne sais pas, reconnut Odilon. De tout !
- Mais ne connais-tu pas cette forêt ?
- Pour sûr que si ! Je venais souvent ici, il y a encore quelques mois. Je la connais comme ma poche cette forêt. J’en connais même tous les recoins !
- Et bien alors, de quoi as-tu peur ? insista doucement le vieux sage.
- Mais vous n’entendez pas ? répondit Odilon en faisant allusion aux bruissements de feuilles, aux frottements d’ailes et autres hululements qui résonnaient autour d’eux.
- Si, j’entends. Mais tous ces bruits ne te sont-ils pas familiers ? Ne les entendais-tu pas quand tu venais dans la forêt auparavant ?
- Si, mais je n’y faisais pas attention. Ce n’était pas le même contexte. Aujourd’hui, cela me semble terrifiant !
- De quel contexte parles-tu ? demanda le vieux sage
- Mais des soldats qui sont à mes trousses ! Et puis de ces hommes qui rôdent dans la forêt…
- Les connais-tu ?
- Non ! admit Odilon.
- Alors de quoi as-tu peur ? De quelqu’un que tu ne connais pas ?
- J’ai peur de ce que l’on m’en a dit, répondit sèchement Odilon
- Donc, ce n’est pas de ces hommes dont tu as peur, mais tu as peur de l’idée que tu t’en fais.
- Comment cela ?
- Tu te trompes sur ta peur. Tu as peur de l’idée que tu te fais des choses que l’on t’a dites et ton imagination fait le reste.
- Mon imagination ? interrogea Odilon perplexe.
- Tu crains de ne pas être à la hauteur, de ne pas savoir comment faire face, comment réagir. En somme, tu as peur de toi ! conclut Maître Hann.
- Mais, ce sont des monstres ces hommes ! s’insurgea Odilon.
- Qu’en sais-tu ?
Odilon fit part au vieux sage de ce que Robert, le maréchal-ferrant, lui avait dit.
- C’est bien ce que je disais, insista Maître Hann. Ce ne sont que des rumeurs. As-tu la preuve de la véracité de ces propos ?
Odilon ne répondit pas tout de suite.
- Non, finit-il par dire. Bien sûr, je n’ai pas eu le temps de vérifier ce que m’a dit Robert, mais il me semble évident que je peux lui faire confiance.
- Robert a juste voulu te mettre en garde, expliqua Maître Hann. Que tu sois sur la défensive : c’est bien. Mais ce qu’il faut, c’est te préparer intérieurement à affronter les obstacles que tu es susceptible de trouver sur ta route. Si tu n’y es pas préparé, alors la peur te paralysera tandis que si tu as su cultiver tes qualités profondes, tu seras invulnérable et parfaitement serein devant les évènements. C’est ainsi que tu sortiras victorieux de tes épreuves et que tu te rendras maître de ton destin.
- Mais vous rendez-vous compte que je n’ai pas vraiment le temps de me préparer comme vous dîtes ! s’insurgea Odilon. Je suis susceptible de rencontrer d’un moment à l’autre des coupe-jarrets ou de tomber dans des trappes si profondes que je risque d’y être enterré vivant ! Comment voulez-vous que je n’y pense pas ?
- Chaque chose en son temps reprit calmement Maître Hann. Tu vis actuellement une succession d’évènements qui te barrent la route et contre lesquels tu ne peux rien. La crainte te paralyse. La seule chose à faire est d’attendre le bon moment pour agir. Les flots ne resteront pas déchaînés éternellement. Attends donc que la tempête se calme.
- Alors que dois-je faire ? demanda Odilon dépité.
- Te dire par exemple que toutes les épreuves que tu rencontres ne sont jamais insurmontables : elles ne dépassent jamais tes possibilités. Et si tu fais preuve de courage, de persévérance, de volonté, tu en viendras à bout et tu en sortiras grandi.
- Je crois pourtant que je suis courageux.
- C’est très bien ! s’enthousiasma le vieux sage. Le courage est une vertu, car c’est le juste milieu entre la témérité et la lâcheté. Il faut être modéré en tout, ne pas être trop excessif.
- Alors, vous pensez que je dois pouvoir mieux me contrôler ?
- Oui. Ressaisis-toi ! Pour le moment, il faut te mettre en sécurité.
- C’est ce que je suis en train d’essayer de faire, il me semble ? ironisa Odilon agacé. J’aimerais tellement que tout cela ne soit qu’un mauvais rêve, que je me réveille et que tout soit rentré dans l’ordre.
- Cela viendra ne t’inquiète pas, rassura Maître Hann
- Je me demande bien quand ? interrogea Odilon songeur
- Dans la vie, tout change perpétuellement. Regarde ton corps, il vieillit. « Panta Rei » : tout s’écoule, tout fuit !
- Comment ?
- Les cycles de vie sont ainsi faits, que nous connaissons tous des périodes de profit et des moments de perte. C’est la raison pour laquelle pour éviter de se retrouver dans le dénuement dans les moments de pertes, il faut savoir économiser, engranger, dans les périodes de profit. Et cela est valable dans tous les domaines de l’existence.
- Tout est tellement embrouillé dans ma tête, pesta Odilon. Et, il fait si noir dans cette forêt ! Si seulement on y voyait un peu plus clair.
- Je peux faire quelque chose pour toi, dit Maître Hann. Fofu ? Tu es là ?
Une lumière scintilla soudain devant Odilon.
- Oui Fofu est là ! répondit celui-ci. On m’a appelé ? Mon maître ?
- Fofu, je te présente Odilon, tu voulais tellement le connaître. Maître Hann présenta Odilon d’un signe de la main. Tu vas pouvoir l’aider.
- Odilon ?! s’exclama Fofu. Fofu est très honoré, mon maître, de faire votre connaissance.
Fofu fit une profonde révérence. Se courbant à outrance, il manqua de perdre l’équilibre et se redressa extrémiste.
Odilon souriait. Il regardait d’un air songeur ce petit être, comique, s’ébattre au-dessus de la crinière de son cheval.
- Mais, s’écria soudain Odilon, c’est un lutin ?
- Oui, Fofu est un lutin et mon fidèle compagnon acquiesça Maître Hann. Pourrais-tu nous donner un peu de lumière, Fofu. Il fait très noir dans cette forêt et Odilon te serait très reconnaissant si tu éclairais son chemin.
- Lumière ? Chouette ! Je redeviens un feu follet. Yourra ! Yourra ! Vos désirs sont des ordres, Môsieur !
- Mais ne joue pas à l’Egarou, je te prie !
- Egarou ? Egarou ? Comment se fier à un lutin ?...Hi hi hi...
Soudain, une petite boule de lumière se balança devant les yeux d’Odilon éclairant faiblement le chemin devant lui.
- Qu’est-ce qu’un Egarou ? demanda Odilon perplexe
- L’Egarou, expliqua Maître Hann, t’attire avec sa petite lumière qui brille dans le noir et te fait t’enfoncer, si profond, dans la forêt que tu te perds et que tu risques de n’en plus jamais sortir !
- Euh… Fofu est bien là pour m’aider, ne m’avez-vous pas dit ? demanda Odilon avec inquiétude
- Oui, ne t’inquiète pas ! Tant que je suis là, il m’obéira.
- Vous me rassurez ! ironisa Odilon.
Ils firent quelques pas, puis Odilon demanda.
- Je ne sais pas comment faisaient nos ancêtres pour se diriger dans la nuit ? Mais je crois que je ne suis pas aussi doué qu’eux ! J’ai peur de me perdre !
- Fais comme les marins d’antan : ils se guidaient le jour, en suivant la position du soleil et la nuit, celle des étoiles.
- Comment s’y prenaient-ils ?
- Prenons l’exemple des Grecs. Comme les Phéniciens, ils étaient capables d’identifier certains vents d’après leur direction, leur puissance, leur température ou leur degré d’humidité. Ils ne leur restaient plus qu’à tracer approximativement sur une tablette circulaire les « chemins » empruntés par ces vents. Et les navigateurs n’avaient plus qu’à se reporter à ces tablettes pour se diriger : ces tablettes furent appelées « Roses des Vents ».
Te rends-tu comptes que, les Phéniciens, qui étaient de grands navigateurs, savaient déjà que la constellation de la Petite Ourse leur indiquait le Nord !
- Et ces hommes arrivaient à se diriger même la nuit ? s’exclama Odilon admiratif.
- Absolument ! Certains se servaient des étoiles. Les anciens Polynésiens, par exemple, repéraient la position de certaines îles en fonction de la position des étoiles. Et, lorsque l’étoile qui les guidait disparaissait à l’horizon, ils en choisissaient une autre qui suivait sensiblement la même course et ainsi de suite.
- Mais si la nuit était sans étoiles ? questionna Odilon malicieusement
- Ce n’était pas un problème. Les Polynésiens savaient déchiffrer l’océan. Leur connaissance de la mer et du ciel se transmettait de père en fils et s’enrichissait, ainsi, au fil des siècles.
Les plus expérimentés connaissaient l’aspect de la houle et des moindres courants. Ils savaient pressentir si les courants risquaient ou non de les faire dévier de leur route.
De la même façon, le rythme régulier ou agité de la houle leur permettait de déterminer s’ils se dirigeaient loin de la terre ou s’ils allaient rencontrer une zone d’îles ou de récifs.
- Et si la mer était calme ? insista Odilon cherchant à déstabiliser le vieux sage.
- Alors, ils se servaient des nuages pour savoir si la terre était proche ou lointaine. Même par nuit noire, la proximité d’une île leur était signalée par des « éclairs sous-marins »
- Qu’est-ce que c’est ?
- Ce sont des sortes de traînées phosphorescentes qui sont émises, sur les hauts-fonds qui bordent la côte, par des animaux planctoniques.
- Cela veut dire que les cartes géographiques existent depuis bien longtemps ?
- Pythéas, au IVème siècle avant notre ère fut le premier à utiliser le soleil pour établir la latitude.
- La latitude, reprit Odilon, c’est-à-dire la distance au Nord et au sud par rapport à l’Équateur ?
- C’est exact. Puis, Ptolémée, au IIème siècle, se servit des résultats de Pythéas pour établir ses cartes du monde.
- Je crois que Pythéas imaginait la Terre fixe au centre de l’Univers, précisa Odilon.
- Tout à fait. Aristote, lui, supposait la terre sphérique et pensait aussi qu’elle se trouvait au centre du cosmos.
- Puisque vous parlez d’Aristote, les premiers philosophes n’avaient-ils pas leur propre conception de l’astronomie ? interrogea Odilon passionné.
- Comme je te l’ai dit lors de notre dernière rencontre, ces penseurs avaient écouté le discours des Chaldéens. Tu te rappelles Anaximandre, dont nous parlions l’autre fois ?
- Oui.
- Au VIème siècle avant notre ère, Anaximandre apprit aux Grecs la rotation des astres et la courbure du méridien !
- Et qu’en est-il des autres philosophes ?
- Anaxagore découvrit le mécanisme des éclipses de la lune et du soleil et perçut les astres en tant que corps solides. Et Héraclite, vers 350 avant notre ère, émit déjà l’hypothèse d’une rotation de la terre, sans que personne ne l’écoute !
- Et bien ! fit Odilon admiratif. Je maintiens que je ne suis pas aussi calé qu’eux. Moi, je marche sur la terre ferme et pourtant je ne suis pas sûr d’atteindre mon but.
- Où sommes-nous ? interrogea malicieusement le vieux sage.
Odilon leva les yeux et vit le Rocher de la vache noire à quelques mètres devant lui.
- On y est arrivé ! s’exclama-t-il joyeusement. Regardez ! On est arrivé au croisement ! Et sans encombre ! Je ne m’en suis même pas rendu compte ! Ça alors ! Comment est-ce possible ? C’est grâce à vous !
- Non mon enfant, c’est grâce à toi ! Uniquement grâce à toi ! Moi, je n’ai absolument rien fait d’autre que t’accompagner. Fofu se retourna et se posa sur la crinière du cheval d’Odilon.
- Môsieur, mon maître, a-t-il encore besoin de mes services ? Je commence à m’échauffer sous cette apparence !
- Non merci, Fofu, tu nous as été d’une grande utilité ! répondit Odilon en souriant.
Maître Hann intervint.
- Fofu est à ta disposition, Odilon. Si tu as besoin de quoi que ce soit, remets-toi à lui. Il est de très bons conseils… quand il le veut bien ! Et… il lui arrive, parfois, d’obéir !
- Je suis comme Aladin, j’ai mon génie à moi ! s’écria Odilon.
- Un génie ? sursauta Fofu. Où ça ? Ah, oui ! Un génie ! Il est vraiment gentil mon nouveau maître ! Un génie, je suis un génie ! La…la..la… lalère…
- Fofu ! ordonna Maître Hann. Du calme !
Fofu s’arrêta net.
- Je suis un génie, Môsieur ! Un génie !
Fofu faisait des pirouettes, des saltos et des doubles-saltos, riant de joie et chantant en même temps. Puis, il fit une profonde révérence en prenant soin, cette fois, de ne pas perdre l’équilibre. Mais, comme il se trouvait sur l’extrémité d’une branche d’arbre et qu’il gesticulait dans tous les sens, celle-ci cassa laissant choir, le pauvre Fofu qui, une fois à terre, lança à la cantonade :
- Et jusqu’à vous revoir !
Avant de disparaître dans la nuit.
- Ah ! ah ! ah ! Il est toujours comme ça ? demanda Odilon en riant aux éclats
- Hélas oui ! soupira le vieux sage.
La lune qui venait de se dégager complètement des nuages au travers desquels elle avait brillé jusqu’alors répandait maintenant généreusement, une magnifique lumière qui éclairait le chemin d’Odilon sans qu’il eût besoin de recourir à l’assistance de Fofu.
Sans s’en rendre compte, Odilon s’engagea avec assurance sur le chemin qui lui faisait face et qui devait le mener à sa cabane. Il reconnaissait mieux sa route, maintenant. Il se sentait mieux également. Ce vieil homme était merveilleux vraiment. Comment faisait-il ? C’était un mystère pour Odilon, mais ce qui comptait pour le moment c’est que ses forces reprenaient, qu’il avait plus confiance en lui et qu’il se sentait plus vigoureux, rasséréné par la visite du vieux sage.
Il poursuivit sa route, avec prudence, sans vraiment se soucier de ce qui pouvait lui arriver. Il se sentait maintenant capable d’affronter des montagnes. Du moins se le figurait-il ? Mais n’était-ce pas un peu présomptueux au fond ?
Il repensa à tous les évènements qui s’étaient produits depuis la veille et commença à mettre de l’ordre dans ses idées. Il voulut interroger le vieux sage sur son devenir, mais, en se retournant, il s’aperçut que le vieil homme avait disparu.
- Maître Hann ? Où êtes-vous ? cria Odilon. Maître Hann ? Ne me laissez pas seul ! Je vous en prie !
Mais, seul le silence lui répondit. La peur, brusquement, l’envahit de nouveau. Il fut même pris de panique lorsqu’une voix surgissant de l’obscurité lui dit :
- Ne t’ai-je pas dit que je serai toujours là et que je ne t’abandonnerai jamais ? Aie confiance en toi !
D’avoir entendu cette voix rassura un peu Odilon, mais il était beaucoup moins assuré, ses forces lui échappaient et il se laissait, de nouveau, guider par son cheval.
Soudain, il sentit comme une présence.
- Il y a quelqu’un ? demanda-t-il inquiet.
Mais personne ne répondit.
- C’est vous Maître Hann ? répéta-t-il.
Là encore, il n’obtint aucune réponse. Il entendit du bruit. Il prit peur, il ne savait que faire.
Il tenta de suivre les conseils du vieux sage et tâcha de se ressaisir.
- Garder mon sang-froid ! se dit-il. Quoi qu’il arrive, rester maître de moi, sinon je perdrais mes moyens. Facile à dire !
Odilon respira profondément tout en continuant d’avancer.
Soudain, avant qu’il n’ait pu prendre conscience de ce qui lui arrivait, son cheval se cabra brutalement en poussant un énorme hennissement. Odilon se rattrapa à sa crinière. Il essaya sans succès de calmer son cheval, mais celui-ci devenait de plus en plus fougueux : il parvint même à désarçonner Odilon avant qu’il ne puisse réagir !
Une fois à terre, Odilon rappela son cheval, sans résultat, celui-ci étant parti au galop.
- Qu’a-t-il pu voir de si terrifiant ? se demanda Odilon.
Il se mit à courir pour tenter de le rattraper, puis se rendit compte que le cheval avait pris beaucoup trop d’avance.
Cependant, Odilon avançait sans prendre garde aux pièges qui jalonnaient les sentiers de la forêt et contre lesquels Robert l’avait mis en garde.
Il n’eut pas longtemps à attendre : à peine eut-il fait encore quelques pas qu’il se sentit soudain happer dans les airs. Il eut beau se débattre, il lui fallut bien se rendre à l’évidence : il était, bel et bien, prisonnier des mailles d’un filet qui le saucissonnait et qui se resserrait plus il se débattait en le balançant dans les airs.
E mberlificoté dans les mailles de son filet, Odilon tenta, en vain, de se libérer. Il donnait de petites secousses, remuait dans tous les sens et se fatiguait en s’évertuant à faire tomber sur le sol le filet qui le soutenait. Seulement, plus il se débattait, plus les mailles de ce filet se resserraient réduisant, dans le même temps, l’espace de liberté qui lui était octroyé.
Après plusieurs longues minutes dans cette inconfortable posture, Odilon se résolut à cesser de gesticuler de la sorte. Il tenta alors d’attraper sa dague coincée dans sa ceinture, mais la position dans laquelle il était ne lui rendit pas la chose facile. La tête repliée contre les genoux, les jambes et les bras en l’air le long de ses oreilles, il parvint, malgré tout, en se contorsionnant, à glisser son bras droit vers sa ceinture où se trouvait son couteau. De longues minutes lui furent nécessaires pour y parvenir.
Une fois la dague attrapée, Odilon entreprit de couper la corde du filet. Mais, celle-ci était solide, fabriquée dans une fibre résistante et il comprit très vite que ce travail serait long et fastidieux. D’ailleurs, au bout d’une heure, il n’avait pas beaucoup avancé.
C’est alors qu’il entendit craquer des branches mortes qui jonchaient le sol au-dessous de lui, comme si quelqu’un approchait prudemment. Il retint sa respiration, cherchant du regard l’endroit d’où pouvait parvenir ce bruit. Il distingua une lueur qui avançait vers lui.
Odilon s’immobilisa, pensant naïvement qu’on ne le verrait pas. Mais, il fut bientôt encerclé par une vingtaine de manants à la mine patibulaire qui portaient des habits délabrés et sales.
- Oh non ! fit-il en soupirant.
Puis, il ajouta tout bas.
- C’est bien ma veine ! Me voilà aux mains des brigands de la forêt.
Il lui fallut faire appel à toutes les réserves de courage qui lui restaient pour ne pas se laisser dominer par la peur. Il se remémora ce que le vieux sage lui avait dit.
- « Ressaisis-toi et apprends à te contrôler ! ».
- C’est plus facile à dire qu’à faire ! se dit Odilon.
Cependant, il ne put s’empêcher de se demander qu’elle aurait été l’attitude de Maître Hann dans des circonstances pareilles.
Il n’eut pas le temps de s’interroger longtemps que déjà il sentit une pointe acérée s’appuyer sur son visage.
- Aïe ! lança-t-il dans un cri aigu. Aïe !
Quelques instants plus tard, un homme de haute taille qui avait plus de prestance que les autres et semblait être le chef, traversa l’assistance et s’avança vers Odilon.
- Faîtes-le descendre ! ordonna-t-il d’une voix grave
- Je… je suis un… ami ! réussit à dire Odilon alors que deux hommes s’approchaient et coupaient les liens qui le retenaient en suspension au-dessus du sol, ce qui eut pour conséquence de faire tomber le filet et son contenu, lourdement, sur le sol
- Aïe ! cria à nouveau Odilon.
À l’endroit où il tomba, la terre était molle, plutôt boueuse, Odilon s’y enfonça, se retrouvant bientôt recouvert d’un terreau gluant qui imbiba tous ses habits.
Il se débattait dans ce bain de boue, lorsque l’inconnu qui était intervenu tout à l’heure se dirigea vers lui, et le dévisagea à la lueur de sa torche.
- Alors étranger ! lui dit-il. Ne sais-tu pas que l’on ne s’aventure pas ainsi sur mon territoire ? Tu es bien jeune, me semble-t-il ?
Il se retourna, et ajouta à l’attention de ses amis regroupés en masse autour de lui.
- Nous allons pouvoir nous amuser un peu, les gars !
Un murmure d’acquiescement s’éleva de la foule rassemblée, suivi de rires et de cliquetis d’armes que les brigands frottaient, les unes contre les autres, en signe de joie.
Odilon était terrorisé. Néanmoins, il préféra ne pas y accorder d’importance pour le moment, tout occupé qu’il fût à s’efforcer de s’extirper de la mélasse dans laquelle, lui et les mailles du filet qui l’emprisonnaient toujours, commençaient à s’engluer.
Trois hommes vinrent lui prêter main-forte sur un signe de l’homme à haute stature.
Tout juste libéré, la déception d’Odilon fut grande lorsqu’il se sentit soulever dans les airs et qu’on lui attacha solidement les jambes et les bras dans le dos afin d’entraver ses mouvements.
Il tenta bien de se débattre pour se dégager de l’emprise de ces deux bourreaux, mais sa tentative fut vaine et il fut rapidement maîtrisé par les gaillards qui l’entouraient.
Une fois cette opération terminée, Odilon fut déposé aux pieds du mystérieux inconnu.
- Hum ! reprit l’homme. Sais-tu quel sort l’on réserve aux petits futés comme toi qui s’aventurent ainsi dans les endroits interdits ?
Odilon n’eut pas le temps de répondre, d’ailleurs même s’il l’avait voulu, il ne l’aurait pas pu, sa gorge était bien trop sèche pour qu’un son puisse en sortir.
- On leur chauffe la plante des pieds et on s’amuse un peu avec eux, avant de les faire griller comme des moutons ! À moins qu’on ne les fasse tirer par quatre chevaux pour les écarteler ! Ah ah ah… continua l’homme accentuant la détresse d’Odilon par son rire grave et sombre qui reçut un large écho dans l’assemblée qui se délectait des paroles de son chef. Hein les gars ! reprit celui-ci. Y’a bien longtemps que vous n’avez pas pu vous entraîner sur une cible vivante. ! Ah ah ah ! C’est plus excitant, non ?
L’homme avait sorti son épée, et taquinait le cou d’Odilon dont le courage et la présence d’esprit vinrent à son secours.
- Monsieur ?! lança Odilon en rassemblant tout son courage.
- Ah ah ah ! Vous avez entendu, vous autres ? Il m’a appelé… Monsieur ! Ici mon gars, je suis Saurus, le tyran de la forêt ! N’as-tu jamais entendu parler de moi ?
- Euh… si Monsieur, mais on m’a dit aussi que vous n’étiez pas aussi méchant que vous vouliez bien le paraître.
Odilon avait prononcé ces dernières paroles sans reprendre son souffle. Il jouait quitte ou double et tentait le tout pour le tout. Il ne se rendait pas bien compte de ce qui lui arrivait, mais ce qu’il savait, c’était qu’il n’avait plus rien à perdre.
- Ah oui ? Alors comme ça, on t’a dit que j’étais gentil ? Et bien tu vas voir si je suis aussi gentil que ça !
Il s’approcha d’Odilon, leva son épée et lança à ses hommes :
- Alors les gars, je lui coupe quoi ? Une oreille ? Un pied ? Une main ? Choisissez.
Un brouhaha incompréhensible se fit entendre. Des mots parvenaient aux oreilles d’Odilon.
- L’oreille ! criaient les uns.
- La main ! criaient les autres.
Saurus fit un signe de la main et les clameurs s’arrêtèrent net.
- Je vais commencer par le scalper !
Des cris s’élevèrent de la foule.
- Oui ! Oui ! Les cheveux ! Les cheveux !
Saurus saisit d’une poigne forte la chevelure d’Odilon et s’apprêtait à lui couper ses longues mèches blondes lorsqu’il s’arrêta brusquement.
- Mais, au fait, que fais-tu, tout seul, à cette heure, dans la forêt ? demanda-t-il à Odilon. On a retrouvé ton cheval à quelques lieues d’ici
- C’est que… je… je me suis perdu, Monsieur répondit Odilon en tremblant
- Perdu ? Hum… Et où te rendais-tu ?
Odilon ne savait que répondre. Dire la vérité lui effleura bien l’esprit un instant. Après tout, en tant que proscrit lui-même, peut-être trouverait-il auprès de ces gens une âme secourable.
- Quel meilleur abri pensa-t-il que me fondre au milieu de gens pareils !
Comme il le put, dans la position inconfortable dans laquelle il se trouvait, tremblant à la fois de peur et de froid dans ses habits mouillés, Odilon observa l’assemblée. Les mines réjouies qu’il put y voir ne l’encourageaient pas à prendre trop de risques. Malgré tout, il lui semblait que son courage revenait peu à peu.
- Je suis toujours en vie, songea-t-il. Ils ne m’ont pas décapité. Le vieux sage a raison : tout est une question de contrôle de soi-même.
Aussi, décida-t-il de répondre franchement à la question qui lui était posée.
- Je cherchais un endroit sûr pour me cacher
- Te cacher ? Et les gars, le petit veut se cacher et il vient tout droit dans la gueule du loup ! À ton âge, tu veux te cacher ? Et de qui, diable, te caches-tu, sacre bleu ?
- Des hommes de Garin, ils me recherchent.
- Garin ?! Hum… Tout cela est bien nébuleux et mérite qu’on s’y arrête un instant. Rentrons au campement, on sera mieux pour discuter.
Il ajouta en direction des quatre hommes qui l’entourait.
- Vous quatre, réparez le piège, on pourrait en avoir besoin à nouveau et puis il ne faut pas laisser de traces, et rejoignez-nous ensuite. Vous autres, occupez-vous de ce garçon !
Ce qui fut dit fut fait ! Avant qu’il n’ait pu réagir, Odilon fut saisi rudement par des bras vigoureux qui le soulevèrent de terre. Il se retrouva à plat ventre dans la terre boueuse, deux hommes lui attrapèrent les mollets, replièrent ses jambes en arrière, afin de les réunir en les liant solidement à ses mains par une épaisse corde.
La promptitude et la dextérité avec lesquelles ces hommes s’acquittèrent de cette tâche fit comprendre à Odilon qu’ils avaient l’habitude de ce genre de travail. En moins de temps qu’il n’en faut pour le dire, Odilon se retrouva sur le ventre. Il sentit une forte douleur dans ses bras et ses jambes, en raison de l’étirement forcé, et sa tête se mit à résonner fortement, le sang battant violemment dans ses tempes.
Instinctivement, il suréleva la tête pour voir où ces hommes l’emmenaient. Mais les deux hommes prirent soin de lui bâillonner la bouche et les yeux. Vu de profil, il ressemblait un peu à un arc tendu.
Ensuite, deux hommes passèrent un bâton dans l’espace libre entre les liens et le dos, montèrent le bâton sur leur épaule et prirent la direction du campement.
La route sembla bien longue à Odilon dont les douleurs se faisaient plus intenses à chaque pas au point que des larmes perlèrent dans ses yeux.
- Pourquoi diable m’ont-ils attaché ainsi ? se demanda-t-il perplexe
Dans sa tête, tout se bousculait. Qu’allaient-ils faire de lui ? Qu’adviendrait-il si cet homme mettait à exécution ses menaces ? Il souffrait déjà terriblement qu’il ne se sentait pas capable de supporter une autre quelconque torture. Il se prenait à regretter l’abbaye et la vie douce qu’il y menait.
Pourtant, il ne voulait pas se laisser aller. À ses yeux, tout espoir n’était pas perdu. Son histoire avait semblé intéresser Saurus, il fallait faire en sorte qu’il l’écoutât jusqu’au bout.
L orsqu'ils arrivèrent au campement, Odilon, toujours en équilibre entre ces deux porteurs, perçut le crépitement d’un feu de bois.
Les deux hommes posèrent le bâton qu’ils portaient sur leurs épaules et qui soutenait Odilon sur deux fourches posées à égale distance d’un cercle de cendres qui ressemblait, à s’y méprendre, aux traces laissées par un feu récemment éteint.
Odilon ne sentait plus ses membres ankylosés : la douleur avait laissé place à des fourmillements désagréables. Il entendit des murmures, puis des éclats de voix et des rires. Odilon se demandait ce que ces brigands préparaient. Comme il ne pouvait voir ce qui se passait, son bandeau lui cachant la vue, il utilisait, au maximum de ses possibilités, ses autres sens.
Il voulut dégourdir un peu ses membres, mais cela lui fut impossible.
Quelqu’un lui ôta son bandeau des yeux.
Compte tenu de sa position, la première chose qu’il vit fut le cercle de cendres au-dessus duquel il était suspendu ce qui n’augurait rien de réjouissant.
- Alors, mon gars, questionna Saurus, la promenade a été bonne ?
Odilon ne répondit pas, il n’avait d’yeux que pour la torche qu’un homme approchait bien trop près de lui à son goût.
- Dans cette position, reprit Saurus, les pieds brûlent plus facilement, car ils peuvent moins bouger ! Ah ah ah !...
Odilon effectivement resta immobile.
- Bon allez, ça suffit, détachez-le !
Deux hommes s’exécutèrent et détachèrent Odilon.
- Viens t’asseoir avec nous près du feu, on aura plus chaud. J’aimerais que tu continues de nous raconter l’histoire que tu as commencée.