Les fleurs renaissent toujours au printemps - Tome 1 - Gabrielle Delestre - E-Book

Les fleurs renaissent toujours au printemps - Tome 1 E-Book

Gabrielle Delestre

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Beschreibung

Un drame bouleverse la vie de Florence... Il ne tient qu’à elle de le transformer en opportunité pour un nouveau départ.

Un SMS et tout s’écroule. Son mari la quitte et demande le divorce après vingt ans de mariage. C’est la descente aux enfers pour Florence, qui était persuadée que son couple était solide. Entourée par ses amis fidèles et sa fille, elle commence alors un travail d’introspection et de reconstruction. Commence alors un travail d’introspection et de reconstruction, entourée par ses amis fidèles et sa fille. Florence se reconnectera à elle-même et découvrira ses véritables passions...

Gabrielle Delestre remporte la deuxième place du concours Feel So Good avec sa saga Les fleurs renaissent toujours au printemps, un véritable hymne à la vie, à la nature et à la solidarité.

CE QU'EN PENSE LA CRITIQUE

"J'ai trouvé l'histoire de Florence touchante, car pleine de réalisme." Marine Bookine sur Instagram

"C'est une belle histoire qui se lit rapidement. Ce tome présage une belle suite." La bibliothèque de Bichette sur Instagram

EXTRAIT

Aujourd'hui, laissant l'eau glisser sur sa peau, esseulée dans cette maison qui avait été un des projets de leur vie de couple, elle se demandait si tout ce qu'elle avait vécu n'avait pas été qu'une illusion, une gigantesque illusion. Comment pouvait-il, si vraiment il l'avait aimée véritablement, l'abandonner ainsi et s'affranchir de vingt ans de vie commune faite de moments complices, de petits et grands bonheurs, mais aussi de difficultés et parfois de souffrance ?

À PROPOS DE L'AUTEURE

Passionnée par l’écriture depuis son plus jeune âge, Gabrielle Delestre a été journaliste durant quinze ans. Aujourd’hui, elle est conseillère conjugale et familiale, jonglant entre sa nouvelle vie professionnelle et sa passion pour l’écriture. Elle remporte la deuxième place du concours Feel So Good avec sa saga Les fleurs renaissent toujours au printemps.

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Chapitre 1

Florence relut pour la vingtième fois le SMS :

Tout est terminé entre nous. J’ai essayé, mais n’ai plus de sentiments. Désolé. Je veux divorcer. Je ne rentrerai pas à la maison ce week-end. Ai besoin d’être seul.

Vingt ans de vie commune balayés par un SMS, comme ça, d’un coup. Elle ne pouvait y croire. Qu’est-ce qui s’était passé dans leur vie, dans leur couple pour qu’ils en arrivent là ? Florence s’était assise incapable de contenir plus longtemps ses larmes. Elle avait l’impression d’avoir reçu un coup de poing dans l’estomac et d’être totalement sonnée et à bout de souffle. Elle haletait, prise de vertiges. Tout se brouillait dans sa tête et des pans de sa vie revenaient par saccades. Sa rencontre avec Romain alors qu’elle n’avait pas vingt ans lors d’une soirée étudiante, elle en licence de lettres modernes, lui fraîchement diplômé d’une école d’ingénieur. Leurs fous-rires et les nuits blanches passées à discuter ou à faire l’amour dans cette petite chambre de cité universitaire qu’elle avait décorée avec soin. Leurs galères lorsqu’ils avaient décidé de vivre ensemble alors que Romain cherchait son premier travail et que ses parents n’appréciaient pas forcément leur relation. Leur mariage en plein été sous le soleil de Bretagne, entourés de leurs amis et son bain de minuit en robe immaculée sous les applaudissements des invités. L’arrivée d’Anaïs et la joie fulgurante de Romain lorsqu’il l’avait prise dans ses bras. Le regard de fierté et d’amour qu’il lui avait lancé dans cette clinique de l’est de la France où elle avait accouché. Tout leur souriait et leurs amis ne cessaient de les prendre en exemple. À leurs yeux, Florence et Romain étaient le couple parfait et avaient tout réussi !

Pourtant, leur vie n’avait pas été exempte de difficultés et ils avaient connu de sombres années lorsque Romain avait été licencié alors qu’il travaillait comme ingénieur informaticien dans une petite PME. Un sentiment de forte dévalorisation de soi l’avait entraîné peu à peu dans une longue dépression l’empêchant d’aller de l’avant et de se battre pour trouver un nouveau poste. Florence, enseignante en collège, avait alors porté à bout de bras la maison et l’éducation d’Anaïs. C’est elle qui avait déniché un bon psychiatre à son mari, qui avait pris soin de lui, ne le jugeant pas, mais accueillant plutôt cette dépression comme un signe avant-coureur d’un grave burnout. Patiemment, durant plus de deux ans, elle l’avait soutenu, lui octroyant cette pause et ce travail d’introspection qui lui avaient permis de rebondir. Il lui semblait qu’ils étaient sortis plus forts de cette épreuve et que leur amour en avait été renforcé. Lorsque Romain avait décidé de créer son entreprise avec un ami, elle l’avait encore encouragé, acceptant de nombreux sacrifices financiers. Elle admettait son emploi du temps surchargé et gérait le quotidien sans se plaindre. La réussite avait été au rendez-vous. Romain était créatif et avait su anticiper les besoins des entreprises en cybersécurité. Il proposait des systèmes haut de gamme et travaillait pour des entreprises renommées sur l’ensemble du territoire.

Les belles années étaient arrivées avec une aisance financière et le projet de construction d’une maison écologique dont il avait dessiné les plans. Ultra contemporaine, elle s’habillait de grandes baies vitrées pour accueillir le soleil en toute liberté et possédait un patio central où s’épanouissait une végétation luxuriante. Ce dernier s’ouvrait sur une immense terrasse en bois prolongée par un bassin de natation. Construite à partir de matériaux écoresponsables comme le bois et la pierre, elle affichait un sans-faute du point de vue écologique et faisait la fierté de Romain qui acceptait régulièrement de la faire visiter aux personnes intéressées par l’écohabitat. Passionné par le sujet, il aimait à rappeler qu’une maison dite écologique doit respecter l’environnement à un triple niveau : sur le plan de la conception et de la conceptualisation, au niveau de la construction proprement dite, et enfin par rapport au fonctionnement de la résidence. Peu bavard, il devenait prolixe lorsqu’il s’agissait d’évoquer ses recherches en la matière et la façon dont il avait commencé à se passionner pour ces maisons dites passives qui doivent tirer profit au mieux de leur environnement et de leur lieu d’implantation afin par exemple de bénéficier de façon optimale de l’ensoleillement, en hiver notamment. Comme il aimait à le souligner en riant, cette maison était son deuxième bébé.

Florence, heureuse de cet enthousiasme, s’était amusée dans les premiers temps de cette comparaison ne doutant pas qu’un deuxième enfant viendrait rapidement agrandir la famille. Mais au fil du temps, elle avait perçu les réticences de Romain lorsqu’elle abordait le sujet. Il lui avait tout d’abord demandé d’être patiente puis voyant qu’elle n’abandonnerait pas le terrain, il avait osé être plus explicite et lui avouer ses craintes face à l’avenir. Les années de galère et de chômage l’avaient fragilisé disait-il, le rendant moins aventureux et plus circonspect. Et puis, à quoi bon faire un enfant dans un monde pollué, belliqueux ? Ce serait totalement égoïste. Devant ses nombreuses hésitations, elle avait accepté la situation se promettant de relancer le sujet plus tard. Elle n’avait jamais eu gain de cause et avait fait contre mauvaise fortune bon cœur. Un enfant non désiré par l’un des conjoints ne serait pas heureux et Romain avait peut-être raison quant à sa description du monde actuel. Elle avait tu sa souffrance lorsque des bébés étaient nés dans leur fratrie respective.

En repensant à cette période douloureuse, elle se demanda si la première fêlure dans leur couple n’était pas apparue à ce moment-là. Y en avait-il eu d’autres ? Certainement, puisqu’aujourd’hui il demandait le divorce sans leur laisser la moindre chance. De nouveau, elle se mit à pleurer, assise en tailleur à même le sol. Qu’allait-elle devenir sans l’homme qu’elle aimait ? Et comment l’annoncer à Anaïs ? Elle eut envie tout à coup d’appeler sa fille et de se confier, de se décharger de ce poids qui l’empêchait de respirer et de reprendre le cours de son existence. Sa fille unique qu’elle aimait tant et qu’elle avait choyée durant toute son enfance. Elle avait aujourd’hui dix-neuf ans et avait quitté la maison deux ans plus tôt pour s’inscrire à la faculté de médecine de Strasbourg. Son départ avait été compliqué pour Florence et elle avait ressenti une grande solitude qu’elle avait comblée en intensifiant ses activités sportives comme à son habitude.

Passionnée par le sport dès son plus jeune âge, elle avait toujours utilisé cette activité pour décompresser et prendre du recul lorsque les événements de sa vie le requéraient. Elle s’adonnait sans réserve à la course à pied et à la randonnée et adorait le ski alpin, la montagne étant son milieu de prédilection été comme hiver. Anaïs quant à elle, n’avait pas attrapé le virus maternel et préférait de loin jouer du piano ou lire plutôt que de suer en plein été sur des chemins de randonnée rocailleux ou se geler sur un télésiège durant la saison de ski. Son père, originaire de Bretagne et peu habitué aux sports d’hiver dans son enfance, approuvait d’ailleurs sa fille en tous points se moquant régulièrement de l’enthousiasme de sa femme pour la montagne et la neige. Florence, bonne pâte, avait abandonné la partie, soulignant qu’elle n’avait pas à imposer à son mari et à sa fille ses hobbies. Continuant de skier seule ou avec des amis durant ses premières années de vie commune, elle avait ensuite opté, notamment l’été, pour les vacances à la mer qui convenaient mieux à ses deux amours. Elle décida qu’appeler sa fille ne serait pas une bonne idée. Elle devait la laisser en dehors de leurs problèmes conjugaux. Sa deuxième année de médecine, même si elle était moins difficile que la première qui équivalait à une année de classe préparatoire, n’était pas évidente et elle ne pouvait pas se permettre de la bouleverser en lui annonçant que son père voulait la quitter. Mais à qui en parler ?

Elle ne se sentait pas capable de garder tout ça pour elle. Elle avait besoin d’entendre une voix amie, rassurante, une voix qui la réconforterait et qui lui dirait que tout cela n’était sûrement qu’une mauvaise passe. La lecture de ce SMS avait anéanti ses certitudes, la confiance qu’elle avait en elle et dans la vie, ses projets, son bonheur de vivre, le sens même qu’elle donnait à son existence. Elle se sentait sombrer, glisser, emportée au fond d’un abîme de désespérance. Après quelques instants, elle essuya ses larmes et composa le numéro de son amie Bénédicte qui saurait sûrement l’aider et la réconforter. Tout n’était peut-être pas perdu. Romain avait écrit ce SMS sur un coup de tête parce qu’il avait des soucis au travail, parce que l’un et l’autre s’étaient un peu perdus de vue à cause de la routine, mais tout allait rentrer dans l’ordre. Ils allaient essayer de communiquer, de comprendre ce qui leur arrivait. Tout ne pouvait pas se terminer ainsi. Au bout de quelques sonneries, la voix de son amie retentit à l’autre bout du fil.

— Bénédicte, c’est bien toi ?

— Oui, qui est à l’appareil ?

— C’est moi Florence. Je t’appelle parce que… parce que… Je ne sais pas comment te le dire…

— Flo, qu’est-ce qui se passe ? Ça ne va pas ? Ta voix… Dis-moi...

— C’est Romain… Il veut divorcer.

— Qu’est-ce que tu racontes ? Romain veut te quitter, mais comment ça ?

— Je… C’est terrible Béné. Je… Je suis perdue…

Florence envahie de nouveau par son chagrin et terrassée par la violence de cette réalité fondit en larmes. Entre deux sanglots, elle murmura :

— J’ai besoin de toi, Béné, je t’en supplie…

— Tu es chez toi ?

— Oui, je ne sais plus quoi faire…

— Ne bouge surtout pas. J’arrive tout de suite.

Bénédicte et Florence s’étaient connues par le biais des enfants. Lorsque Florence et Romain étaient arrivés dans ce petit village de Franche-Comté, il avait fallu trouver un mode de garde pour Anaïs. Les crèches étant surchargées, le couple avait cherché une assistante maternelle pour s’occuper de leur fille et leur choix s’était porté sur Bénédicte qui adorait les enfants et exerçait son métier avec beaucoup de rigueur et de passion. Très vite, Anaïs s’était liée d’amitié avec Zélie, la fille de Bénédicte, ce qui avait amené les deux femmes à se rencontrer hors contexte professionnel et à tisser des liens plus forts. Au fil des rencontres et des invitations, les maris avaient eux aussi sympathisé et Bénédicte et Antoine faisaient maintenant partie du cercle des intimes du couple. Florence n’avait donc pas hésité à joindre son amie en qui elle avait toute confiance.

Bénédicte arriva quelques instants plus tard et s’installa près de Florence qui avait cessé de pleurer et préparait du thé.

— Qu’est-ce qui s’est passé exactement, Flo ?

— Oh ! C’est très simple, j’ai reçu un SMS de Romain me signalant qu’il ne m’aimait plus et voulait divorcer.

— Il n’a dit que ça ? Il te dit pourquoi.

— Non. Il dit simplement que c’est fini entre nous et qu’il ne rentrera pas ce week-end car il a besoin d’être seul. Et je ne comprends pas, je ne comprends rien à tout ça. C’est vrai qu’il était devenu plus distant et que c’était parfois difficile de communiquer, mais je croyais que l’on s’aimait, que l’on était un couple solide. Je n’ai rien vu venir. Et là, il me dit que tout est terminé.

Bénédicte était abasourdie par ce qu’elle entendait. Romain pouvait à certains moments être un peu froid et caustique avec Florence lorsqu’il avait des soucis au travail ou lorsque le couple avait un désaccord, mais il semblait heureux avec sa femme. Antoine, le mari de Bénédicte, avec qui Romain faisait du VTT, n’avait jamais eu vent de dissensions au sein du couple, alors que les deux hommes étaient assez proches.

— Vous devez absolument avoir une discussion sérieuse, reprit Bénédicte. Il a peut-être des problèmes au travail ou un mal-être passager. Dans tous les cas, vous devez vous expliquer.

— Oui, c’est mon avis aussi. Il faut que je comprenne ce qui se passe sinon je vais devenir folle. Depuis une heure, j’ai l’impression que ma vie a volé en éclats et que tout ce qui lui donnait du sens vient de s’effondrer. C’est comme si j’étais au bord d’un précipice prise d’étourdissement et que je risquais de basculer au fond du gouffre d’un instant à l’autre. Je n’ai plus aucun repère et je suis totalement paumée.

— Tu as essayé de l’appeler ?

— Non. Je ne cesse de pleurer et je repense à notre vie.

— Téléphone-lui pour en savoir plus ou envoie-lui un SMS. Il faut que vous puissiez échanger. Allez au restaurant tous les deux pour parler de tout ça.

— Je n’ose pas le joindre. Pour la première fois de ma vie, j’ai peur d’avoir mon mari au téléphone parce que je suis épouvantée à l’idée qu’il me rejette… Je ne pourrais pas le supporter.

— Je reste auprès de toi. Allez, Flo, il faut que tu prennes les choses en mains.

Avec beaucoup d’appréhension, Florence composa le numéro du portable de Romain. Personne ne décrocha et la boîte vocale se mit en marche. Elle raccrocha à la fois dépitée et soulagée.

— Et maintenant, je fais quoi ?

— Envoie-lui un SMS pour lui demander quand vous pourrez parler calmement de vous et de votre couple. Tu dois éclaircir les choses.

C’était la première fois que Florence se sentait vide et incapable de prendre une décision. Elle s’accrochait à Bénédicte comme on s’agrippe à une bouée de sauvetage en pleine mer après que le navire a coulé et que les flots houleux risquent à chaque instant d’engloutir les rescapés. L’effort qu’elle fournissait pour maintenir sa tête hors de l’eau l’épuisait tellement qu’elle préférait l’engourdissement qui précède la mort à la lutte contre la masse mouvante et hostile des eaux tumultueuses. Pourquoi ne pas abandonner la partie et accepter l’inéluctable ? Pourquoi ne pas disparaître puisque Romain voulait continuer sa vie sans elle ? À quoi bon avoir des explications, entrer en conflit, se retrouver comme deux ennemis ?

— Florence, reprends-toi. Je sais que c’est difficile et que tu es en état de choc, mais il faut que tu puisses comprendre ce qui se passe. Envoie-lui au moins un SMS.

Bénédicte n’avait jamais vu son amie dans cet état. Florence était une jolie jeune femme de quarante-deux ans à l’allure très sportive. Petite, mince et musclée, elle portait souvent des jeans moulants sur de grands pulls en cachemire et affectionnait les sneakers ou les boots plats soulignant que c’était beaucoup plus pratique pour courir que les talons hauts. Elle avait un visage fin encadré par des cheveux longs châtains qu’elle aimait porter dégradés sur le devant et qu’elle ramassait souvent en queue de cheval. Sa frange mettait en valeur des yeux vert émeraude presque translucides qui illuminaient intensément ses traits et qui étaient son atout majeur. Combien de fois Romain lui avait-il dit qu’il aimait se noyer dans son regard phosphorescent ? Aujourd’hui, de grands cernes marquaient sa physionomie accentuant les quelques rides qui naissaient au coin de son regard empli de larmes, la rendant ainsi plus âgée. Bénédicte eut envie de la prendre dans ses bras pour la réconforter, mais Florence reprit :

— Et que dois-je lui mettre à ton avis ?

— Demande-lui quand il compte revenir parce que tu veux éclaircir la situation.

— Il m’a dit qu’il avait besoin de réfléchir à tout ça et qu’il ne rentrerait pas ce week-end.

— Raison de plus pour décider d’un moment où vous pourrez vous expliquer.

Florence se concentra sur son portable, réfléchit quelques instants puis écrivit :

Bonsoir Romain. J’aimerais comprendre ce qui se passe. Il faut que nous ayons une conversation. Quand pouvons-nous parler ?

Au bout de quelques minutes qui lui parurent une éternité, une réponse arriva.

Je ne suis pas joignable ce week-end, mais nous pouvons nous retrouver lundi soir à la maison pour discuter si cela te convient.

— Si cela me convient… Comme si j’avais le choix, reprit Florence d’une voix blanche où pointaient l’anxiété et un début de colère.

— Et toi, que vas-tu faire de ton week-end ? Tu ne peux pas rester seule ici. Veux-tu venir à la maison ?

Florence écrivit un OK laconique à Romain puis regarda Bénédicte.

— Pour le moment, je n’en ai aucune idée. Ma vie vient d’être mise entre parenthèses brutalement et je suis complètement perdue. Comment peut-il me faire ça ? Et où va-t-il passer le week-end ? Et tu crois qu’il est seul ? Antoine ne t’a parlé de rien ?

— Non. Je pense que Romain ne lui a rien dit. En tout cas, je n’étais pas au courant.

— Viens au moins dîner à la maison ce soir, ça t’évitera de penser à tout ça et de broyer du noir.

— C’est très gentil Béné, mais je ne me vois pas faire bonne figure face à Antoine. J’ai envie d’être seule. Je partirai peut-être ce week-end randonner dans le Jura ou rendre visite à ma mère. Je ne sais pas encore. En tout cas, merci pour tout.

— Tu sais que tu peux m’appeler à n’importe quel moment. N’hésite surtout pas.

— Oui, je le sais. Ne t’inquiète pas. Et encore merci d’être venue si vite. J’avais besoin de parler à quelqu’un de confiance.

Une fois Bénédicte partie, Florence se leva et alla prendre une douche dans la salle de bain qui jouxtait sa chambre. C’était ensemble qu’ils avaient dessiné cette suite parentale comme l’appelait pompeusement Romain. Chacun avait donné des idées selon ses envies sans oublier le côté pratique. Romain avait donné carte blanche à Florence pour la décoration. Elle avait choisi des matériaux naturels et des tons sobres. Un camaïeu de blanc, taupe et rose poudré se déclinait sur les murs et les stores offrant une ambiance zen et cossue tout à la fois. Ils avaient fait le choix d’une chambre ouverte sur la nature et une immense baie vitrée habillait tout un pan de mur leur offrant la possibilité de profiter au maximum de la beauté du jardin. Peu de meubles dans cet espace lumineux, juste un lit accompagné de ses chevets et d’un éclairage intégré, deux fauteuils crapauds en toile écrue et une jolie coiffeuse vintage au charme suranné, le tout mis en valeur par un magnifique parquet aux tons de pin chaud. La chambre à coucher se prolongeait d’un côté par un immense dressing qui occupait toute une pièce et de l’autre par une salle de bains fermée par une porte coulissante en verre blanc aux motifs géométriques. À la fois naturelle et pratique, cette suite parentale était leur nid douillet, le lieu où ils se retrouvaient pour partager des instants intimes et voluptueux, où ils s’étaient donnés l’un à l’autre pleinement et passionnément.

Aujourd’hui, laissant l’eau glissée sur sa peau, esseulée dans cette maison qui avait été un des projets de leur vie de couple, elle se demandait si tout ce qu’elle avait vécu n’avait pas été qu’une illusion, une gigantesque illusion. Comment pouvait-il, si vraiment il l’avait aimée véritablement, l’abandonner ainsi et s’affranchir de vingt ans de vie commune faite de moments complices, de petits et de grands bonheurs, mais aussi de difficultés et parfois de souffrance ? Comment pouvait-il continuer sans elle, alors qu’ils avaient choisi de devenir parents et s’étaient engagés ensemble à élever au mieux cet enfant qui n’avait rien demandé ?

Florence sortit de la douche et se regarda dans la glace. Elle n’avait jamais été très coquette. Longtemps garçon manqué, elle préférait grimper aux arbres et jouer à des jeux d’extérieur plutôt que s’amuser avec des poupées ou se maquiller. Devenue adulte, elle avait gardé cette allure sportive et un peu garçonne. Était-ce cela qui avait déplu à Romain à la quarantaine ? Est-ce parce qu’elle n’était pas assez féminine qu’il la quittait ? Sans se trouver magnifique, elle s’aimait physiquement. Elle appréciait son corps sculpté par le sport, ses cheveux lisses et brillants et ses yeux émeraude qu’ourlaient de longs cils noirs. Les hommes ne se retournaient pas sur son passage, mais elle savait que son regard translucide pouvait en aimanter plus d’un, ce qu’elle ne cherchait pas. Elle n’avait jamais été une séductrice et Romain lui suffisait amplement. Elle croyait en la fidélité, à l’engagement, à l’amour qui rime avec toujours. Pourtant, ce n’était pas ce modèle parental qu’elle avait connu. Elle avait beaucoup souffert de la mésentente de ses parents et lorsqu’ils avaient divorcé alors qu’elle était âgée de vingt-deux ans, elle s’était juré de ne pas faire vivre à ses enfants ce qu’elle avait enduré durant de longues années. Et pourtant, elle en était là aujourd’hui. On ne voulait plus d’elle et on la jetait comme un vieux sac usagé ! Elle se rappellerait toute sa vie ce vingt et un mars, le premier jour du printemps où son mari lui avait appris par SMS qu’il avait décidé de continuer sa vie sans elle.

Chapitre 2

Romain était encore à son bureau lorsque le SMS de sa femme était apparu sur son portable. La demande de Florence était totalement légitime et ils devaient effectivement s’expliquer comme des adultes en face à face. Il était en colère contre lui-même et se trouvait lâche et médiocre. Cela faisait des mois qu’il avait envie de la quitter, mais il ne pouvait se résoudre à le lui dire. Il y avait ces vingt ans de vie commune, leur fille Anaïs, et tout ce qu’ils avaient construit ensemble. Il était persuadé de ne plus éprouver de sentiments pour elle, mais Florence restait la mère de sa fille et il lui semblait qu’il ressentait encore de la tendresse à son égard. Divorcer revenait à détruire une partie de sa vie et pensait-il une partie de lui-même. Et paradoxalement, quitter sa femme, son confort de vie, cette routine qui lui avait apporté un certain bonheur était synonyme de retour à la liberté et de nouvelle vie.