Libre de créer: la liberté artistique en Europe - Sara Whyatt - E-Book

Libre de créer: la liberté artistique en Europe E-Book

Sara Whyatt

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«Quand la démocratie est soumise à de fortes pressions, le rôle clé des arts et de la culture en tant que moyens puissants de maintenir un dialogue constructif dans des sociétés démocratiques diverses et ouvertes devient de plus en plus évident. Le droit à la liberté d'expression artistique en est la clé et garantit le pluralisme et la vitalité du processus démocratique.» (Marija Pejčinović Burić, Secrétaire Générale) Ce rapport donne un aperçu complet des défis auxquels les artisteset les acteurs culturels européens sont confrontés dans l’exercice de leur droit à la liberté d’expression artistique. Ces défis vont des lois qui restreignent la liberté de création, des agressions de la part de groupes non gouvernementaux et des menaces en ligne, aux pressions « discrètes » qui contribuent à l’autocensure. Il reflète, outre l’expérience et les perspectives des artistes, le travail effectué par le Conseil de l’Europe et par d’autres organisations intergouvernementales internationales promouvant la liberté d’expression et les droits humains, ainsi que par des organisations non gouvernementales, de la société civile et culturelle défendant les droits des artistes et les droits culturels. Ce rapport s’achève par des recommandations sur ce qui pourrait être fait par des institutions internationales, telles que le Conseil de l’Europe, par le secteur culturel et par les artistes eux-mêmes pour protéger la liberté artistique.

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LIBRE DE CRÉER :

LA LIBERTÉ ARTISTIQUE

EN EUROPE

 

 

Rapport du Conseil de l’Europe

sur la liberté d’expression artistique

 

 

Sara Whyatt

 

Sommaire

 

Cliquez ici pour consulter la table des matières complète, ou allez directement sur l’option « Table des matières » de votre lecteur numérique.

CHAPITRE 1 INTRODUCTION

Les restrictions à la liberté d’expression et à la liberté artistique affectent la société tout entière, car elles entraînent la perte du pluralisme et de la vitalité du processus démocratique ; l’écosystème de la liberté artistique a une incidence sur l’éducation, le développement culturel, les normes sociales et économiques, le bien-être, la qualité de vie et la cohésion sociale.1

Le Manifeste du Conseil de l’Europe sur la liberté d’expression dans le domaine des arts et de la culture à l’ère numérique a été publié le 10 novembre 2020 par le Comité directeur de la culture, du patrimoine et du paysage (CDCPP) à l’occasion du 70e anniversaire de la Convention européenne des droits de l’homme (la Convention). Il entend répondre aux préoccupations suscitées par les attaques constantes et hétérogènes visant la liberté d’expression artistique en Europe et rappeler aux États membres la nécessité de garantir et de protéger ce droit et les encourager à le faire. Le principe selon lequel la liberté d’expression et d’expression artistique est un droit humain fondamental qui doit être protégé contre les attaques et les menaces est au cœur même du manifeste.

La Secrétaire Générale du Conseil de l’Europe, Marija Pejčinović Burić, a approuvé le manifeste par la déclaration suivante :

La liberté d’expression artistique fait partie de la liberté d’expression, protégée par l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme. Le Manifeste sur la liberté d’expression dans le domaine des arts et de la culture à l’ère numérique est le reflet d’un engagement politique de promouvoir le droit des artistes à s’exprimer librement, même dans des circonstances difficiles.

La liberté d’expression artistique fait l’objet de pressions croissantes. De plus en plus d’artistes, d’experts et de professionnels de la culture, qui font allusion aux problèmes, énoncent des vérités gênantes et rendent l’invisible visible, sont soumis à des pressions, à la censure, à l’intimidation et au harcèlement.

La crise de la covid-19 a en outre eu des répercussions très négatives sur les conditions de travail et les revenus des artistes et sur le secteur de la culture et de la création dans son ensemble.

Le manifeste attire l’attention sur ces risques et envoie un message politique sans équivoque pour protéger l’ouverture et la créativité, ingrédients essentiels de nos démocraties.

Déjà soumise à de fortes pressions à l’époque de l’élaboration du manifeste, la liberté artistique reste menacée aujourd’hui et la situation s’est parfois aggravée en raison de nombreux périls – extrémisme politique, effondrement économique, pandémie, menaces liées à la numérisation, catastrophe environnementale émergente et retour de la guerre en Europe – constituant autant de crises ayant un impact majeur sur les droits de l’homme dans toute la société. Comme l’a écrit la Secrétaire Générale du Conseil de l’Europe Marija Pejčinović Burić dans son rapport annuel 2021 : « Quand la démocratie est sous pression, le rôle essentiel de l’art et de la culture en tant que puissants vecteurs d’un dialogue constructif dans des sociétés démocratiques et ouvertes apparaît plus évident que jamais. Le droit à la liberté d’expression artistique en est un facteur déterminant : il garantit le pluralisme et assure la vitalité du processus démocratique. »2 En ces temps d’inquiétudes, de nombreux droits sont remis en cause, notamment le droit à l’expression artistique ; il est donc d’autant plus important de continuer à surveiller l’état de la liberté artistique et de proposer des solutions pour améliorer les domaines où elle décline.

Les artistes, la mobilité artistique et la liberté artistique sont des ressources stratégiques pour la société, à même de contribuer à surmonter la fragmentation et à répondre aux problèmes du monde d’aujourd’hui (Bjørn Berge, Secrétaire Général adjoint du Conseil de l’Europe).3

Pour toutes ces raisons, il est temps d’examiner la situation actuelle dans le domaine de la liberté artistique, de consigner l’étendue et les modes opératoires de la répression que cette liberté subit, d’identifier les bonnes pratiques et de donner des conseils sur les mesures qui s’imposent pour traiter les problèmes existants et trouver des solutions pour l’avenir.

En juillet 2022, 20 artistes et praticiens de la culture – plasticiens et artistes de performance, écrivains et chroniqueurs culturels –, originaires de 12 pays européens, se sont réunis au centre culturel Bunker de Ljubljana, en Slovénie. Cette rencontre avait pour but de les amener à exposer leurs points de vue sur la liberté artistique là où ils vivent et travaillent afin d’alimenter la présente étude. Elle a mis en lumière les nombreux facteurs qui empêchent les artistes de toute l’Europe d’exprimer et de partager pleinement leur créativité, qu’il s’agisse d’attaques ostensibles, comme l’emprisonnement, les menaces physiques et les poursuites judiciaires, ou de pressions moins évidentes mais plus répandues, qui s’exercent « sous le radar » et créent un subtil climat de répression qui inhibe leur créativité ou les amène à s’autocensurer.

Le présent rapport rend compte, entre autres, des travaux menés par le Conseil de l’Europe et d’autres organisations intergouvernementales, internationales et régionales de défense de la liberté d’expression et des droits de l’homme, ainsi que par des organisations non gouvernementales et des associations de la société civile et associations culturelles concernées par les droits des artistes et les droits culturels. Il s’appuie aussi sur l’expérience et les points de vue exprimés par les artistes réunis à Ljubljana et passe en revue les différents types d’atteintes à la liberté d’expression artistique, ainsi que l’évolution de la législation et des activités de veille et de défense des droits dans ce domaine. Il se conclut par des recommandations sur ce que chacun peut faire pour protéger la liberté artistique, des institutions intergouvernementales telles que le Conseil de l’Europe aux acteurs du secteur culturel en passant par les artistes eux-mêmes.

MÉTHODOLOGIE

Le présent rapport s’appuie sur des recherches documentaires menées à partir de sources consacrées à la liberté artistique, auprès d’observateurs des droits de l’homme et des droits culturels, de groupes de défense des droits des médias, de la presse, et à partir des données recueillies par l’autrice dans le cadre de sa pratique. Il est circonscrit aux événements survenus entre 2019 et 2022. Les commentaires et observations des participants à la réunion de Ljubljana et les propositions d’actions constituent une part importante de ce rapport. Conformément à la pratique suivie par la Secrétaire Générale du Conseil de l’Europe dans ses rapports sur la situation de la démocratie, des droits de l’homme et de l’État de droit en Europe, le présent rapport ne nomme pas les États membres dans lesquels des atteintes à la liberté artistique ou à d’autres droits ont été constatées, sauf lorsqu’il cite des commentaires et déclarations déjà publiés par le Conseil de l’Europe.

1 Conseil de l’Europe (2020a).

2 Conseil de l’Europe (2021e).

3 Conseil de l’Europe (2021c).

CHAPITRE 2 LE CONSEIL DE L’EUROPE ET LA DÉFENSE DE LA LIBERTÉ D’EXPRESSION ARTISTIQUE

Ce sont bien souvent les artistes, experts et professionnels de la culture, qui signalent l’existence d’un problème, qui dévoilent des vérités inconfortables, qui révèlent le non-dit, ou qui rendent visible l’invisible. Usant de leurs moyens artistiques et culturels, ils créent des espaces pour le débat sociétal aussi bien à l’intérieur qu’en dehors du cadre ordinaire du discours politique et des réseaux sociaux.1

Dès sa fondation, en 1949, le Conseil de l’Europe a reconnu que la culture était un facteur déterminant pour la réalisation de sa mission fondamentale, qui est de promouvoir les droits de l’homme, la pratique de la démocratie et l’État de droit parmi ses États membres. Plus précisément, sa mission dans le domaine culturel est définie comme suit :

La culture est « l’âme de la démocratie ». La défendre comme telle exige de plaider en faveur d’une gouvernance et de politiques culturelles fortes – visant la transparence, l’accessibilité, la participation et la créativité, ainsi que le respect de l’identité et de la diversité, le dialogue interculturel et les droits culturels – et d’en faire les fondements du vivre-ensemble dans le respect et la tolérance mutuels dans un monde de plus en plus complexe.2

Ces objectifs sont mis en pratique par le CDCPP du Conseil de l’Europe, qui supervise des projets allant d’études sur la contribution de la culture à la démocratie à l’impact de la numérisation et de l’intelligence artificielle sur la culture en passant par les répercussions de l’épidémie de covid-19 sur le secteur culturel et créatif. Il mène également des missions de conseil en matière de politique culturelle sous la forme d’examens des politiques entre pairs et a élaboré un Compendium des politiques et tendances culturelles en Europe pour le suivi des évolutions de la politique culturelle dans un vaste ensemble de domaines, qui fournit une base de données d’information publique comprenant des rapports d’études nationales ou comparatives portant sur tous les États membres. En outre, le CDCPP met en œuvre un certain nombre de projets gravitant autour des conventions du Conseil de l’Europe dans les secteurs du patrimoine culturel et du paysage, qui sont uniques dans leur domaine.

LE MANIFESTE SUR LA LIBERTÉ D’EXPRESSION DANS LE DOMAINE DES ARTS ET DE LA CULTURE À L’ÈRE NUMÉRIQUE

Depuis quelques années, face au déclin de la démocratie en Europe, le droit à la liberté d’expression artistique revêt une importance croissante. Cette importance est reconnue par le Manifeste sur la liberté d’expression dans le domaine des arts et de la culture à l’ère numérique, présenté par le Conseil de l’Europe à l’occasion du 70e anniversaire de la Convention européenne des droits de l’homme, qui insiste sur la nécessité d’un engagement politique clair et sérieux pour garantir la liberté artistique dans l’Europe d’aujourd’hui. Cet engagement devra servir de base commune de compréhension des valeurs fondamentales de la démocratie entre les États membres.

Manifeste sur la liberté d’expression dans le domaine des arts et de la culture à l’ère numérique

10 novembre 2020

Les droits de l’homme sont indivisibles. La liberté d’expression est un droit fondamental.

La liberté d’expression doit être protégée, que ce soit contre les abus des développements technologiques, les tentatives de faire taire les voix dissidentes de la société ou l’utilisation abusive de la liberté d’expression pour favoriser les récits conflictuels, l’intolérance et la haine.

L’expression artistique et créative fait partie de la liberté d’expression et les artistes doivent être protégés contre la censure et toute forme de pression ou d’intimidation. Une quelconque limitation ne peut intervenir qu’en conformité avec la Convention européenne des droits de l’homme et la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme.

Les restrictions à la liberté d’expression et à la liberté artistique affectent la société tout entière, car elles entraînent la perte du pluralisme et de la vitalité du processus démocratique. L’écosystème de la liberté artistique a une incidence sur l’éducation, le développement culturel, les normes sociales et économiques, le bien-être, la qualité de vie et la cohésion sociale.

C’est la diversité des cultures, des langues, des formes d’art et des expressions artistiques librement choisies qui nourrit le dialogue et la coopération interculturels. La liberté d’expression trouve son reflet dans un environnement artistique et culturel varié et stimulant et contribue à la compréhension mutuelle et au vivre-ensemble.

La liberté artistique va de pair avec, inter alia, la curiosité, la créativité, l’innovation, l’épanouissement personnel, la pensée critique et les compétences qui seront de plus en plus nécessaires pour assurer la médiation entre l’homme et les technologies : l’art et la culture revêtent une importance cruciale pour veiller à ce que l’humain reste au cœur de notre marche vers l’avenir, qui peut être marquée par l’intelligence de la machine et l’interaction homme-machine.

L’art et la culture sont un moyen de souligner, d’exprimer, de communiquer et d’anticiper les réactions humaines face aux mutations sociales. Ils permettent d’établir des liens entre les logiques économiques et technologiques et le développement durable. La créativité et les diverses expressions culturelles qui sont suscitées et stimulées par la liberté artistique et la liberté d’expression font ensuite office de catalyseurs pour l’élaboration de stratégies de développement durable.

Le pouvoir de communication et de transformation de l’expression artistique et l’ouverture à des perspectives et des idées nouvelles font de l’artiste, de la mobilité et de la liberté artistique des ressources stratégiques pour la société, qui aident à surmonter les processus d’atomisation et à répondre aux enjeux planétaires d’aujourd’hui.

En ces temps difficiles marqués par la crise de la covid-19, où les sources de revenus des artistes et du secteur culturel et créatif sont considérablement réduites en raison des mesures de confinement, l’importance de l’art et de la culture devient en même temps encore plus visible ; la société s’appuie sur les ressources artistiques et culturelles pour permettre à tout un chacun de rester intégré, connecté et inspiré ; il est dès lors essentiel que les artistes et le secteur culturel ne soient pas exclus des dispositifs d’aide financière mis en place par les États.

Les artistes et les acteurs culturels bâtissent le patrimoine de demain, en conjuguant souvent passé, présent et futur dans leurs actes et dans leur production. Anticipation de l’avenir, miroir de la société, œuvre de mémoire, leur travail nous inspire en renforçant les identités individuelles et collectives et en favorisant la prise de conscience démocratique.

Le désintérêt envers le patrimoine culturel, sa dégradation, sa falsification ou sa destruction, surtout en temps de crise, affectent les droits de l’homme. La protection, la conservation et la mise en valeur du patrimoine culturel sont essentielles à la liberté d’expression des sociétés humaines.

Pour rendre hommage au rôle primordial de l’art et de la culture et au travail des artistes qui mènent un combat sans relâche afin de défendre les droits de l’homme, la démocratie et l’État de droit, l’Organisation est invitée à organiser une exposition virtuelle permanente qui, à l’instar de la 30e exposition d’art (2012-2015) du Conseil de l’Europe intitulée « Soif de liberté – L’art en Europe depuis 1945 », serait la vitrine d’œuvres artistiques et culturelles des États membres évoquant directement la quête permanente de liberté d’expression et montrant que les artistes sont des acteurs essentiels pour assurer la survie de démocraties dynamiques dans la société mondialisée d’aujourd’hui.

LIBRE DE CRÉER – CRÉER POUR ÊTRE LIBRE

La publication du manifeste s’est accompagnée d’une exposition en ligne d’œuvres d’artistes originaires d’États membres du Conseil de l’Europe, intitulée « Libre de créer – Créer pour être libre »3 et proposant une réflexion sur la liberté artistique. S’appuyant sur les expositions d’art qui font partie de la tradition du Conseil de l’Europe, cette exposition a offert un regard neuf et des moyens innovants pour communiquer les valeurs du Conseil de l’Europe et le rôle moteur qu’il reconnaît aux artistes pour œuvrer à la survie de démocraties dynamiques dans une société mondialisée et en constante mutation. L’initiative s’est inscrite dans le droit fil de la 30e exposition d’art (2012-2015) du Conseil de l’Europe intitulée « Soif de liberté – L’art en Europe depuis 1945 ». Reflétant les inquiétudes croissantes suscitées par les pressions qui s’exerçaient sur l’unité européenne, cette exposition itinérante a été présentée à Berlin, Tallinn, Milan et Cracovie entre 2012 et 2014. Les œuvres exposées exploraient les réflexions des artistes sur les droits de l’homme, l’égalité et la démocratie4. Depuis près de 70 ans, le Conseil de l’Europe manifeste son engagement en faveur des arts et de la culture par une série d’expositions artistiques, dont la première, en 1954, avait pour but de « mieux faire connaître et apprécier l’art européen comme l’une des plus hautes expressions de la culture et des valeurs communes de l’Europe ». Ces expositions visent à renforcer le rôle de la culture et des arts comme vecteurs des valeurs européennes communes, en réponse aux défis politiques et sociétaux actuels5.

La dernière exposition en date, « Libre de créer – Créer pour être libre », est présentée dans un format numérique novateur et largement accessible, destiné à un public nombreux et diversifié. Conçue sans l’intervention d’un commissaire d’exposition chargé de choisir les artistes et de définir le fil conducteur et le propos des œuvres présentées, elle est ouverte à tous les États membres du Conseil de l’Europe, qui peuvent y contribuer en présentant une ou deux œuvres dont le sujet et le format leur paraissent pertinents par rapport à la thématique générale. À la fin de 2022, l’Allemagne, la Pologne, l’Autriche, l’Azerbaïdjan, la Lituanie, la Serbie, la Géorgie et l’Arménie avaient proposé des œuvres, tandis que le Luxembourg et la Norvège préparaient leurs contributions. Cette exposition, qui illustre les liens entre le développement démocratique, l’art, la culture et les droits de l’homme, montre aussi le potentiel, la puissance et les perspectives que la liberté artistique en conditions démocratiques peut offrir aux niveaux local, national voire mondial. Le but est que la plateforme évolutive que constitue cette exposition devienne, lorsqu’elle aura reçu des œuvres d’art des 46 États membres, une archive vivante de la liberté artistique dans l’Europe du XXIe siècle.

LA CONVENTION EUROPÉENNE DES DROITS DE L’HOMME

Le Conseil de l’Europe est une organisation dont les États membres œuvrent, conformément à son statut, à la promotion des droits de l’homme, de la démocratie et de l’État de droit. Il s’efforce de répondre aux préoccupations communes par le consensus et une action concertée plutôt que par le jugement et la sanction. Le Conseil de l’Europe n’étant investi d’aucun pouvoir législatif, ses recommandations, lignes directrices et déclarations constituent un corpus de « droit souple ». Cependant, en adhérant à ses conventions, les États en reconnaissent la valeur et sont dès lors liés par les principes énoncés par ces traités internationaux. C’est grâce à cette approche reposant sur la coopération plutôt que sur la confrontation que le Conseil de l’Europe apporte quelque chose d’unique à la protection de la liberté artistique.

La Convention européenne des droits de l’homme, qui est le plus connu des traités du Conseil de l’Europe, est le principal mécanisme de protection des droits de la personne dans ses pays membres. Comme les conventions des Nations Unies consacrant des droits, elle renvoie aux protections de la Déclaration universelle des droits de l’homme proclamée en 1948 par les Nations Unies et les complète, notamment en ce qui concerne le droit fondamental à la liberté d’expression. En cas de violation de cette convention, il est possible de saisir la Cour européenne des droits de l’homme (la Cour) et si celle-ci conclut qu’un État a effectivement violé les droits garantis par la Convention, il est tenu d’accorder des réparations et des indemnisations (voir également ci-dessous). Le principal article de la Convention relatif à la liberté d’expression artistique est l’article 10, qui dispose :

Toute personne a droit à la liberté d’expression. Ce droit comprend la liberté d’opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu’il puisse y avoir ingérence d’autorités publiques et sans considération de frontière (article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme).6