Milan : Audacieuse et orgueilleuse - Luisa Ballin - E-Book

Milan : Audacieuse et orgueilleuse E-Book

Luisa Ballin

0,0

Beschreibung

Parce que pour connaître les peuples, il faut d'abord les comprendre

Vous êtes en Italie et vous arpentez les travées de l’Exposition universelle de Milan 2015. Pavillons et nouveaux quartiers respirent la vocation architecturale de cette métropole où le design et la mode sont un art de vivre. Ici s’affichent les influences espagnoles, autrichiennes, françaises. La Lombardie est une autre Italie. Audacieuse, orgueilleuse, mais toujours ouverte sur l’Europe, à l’image de la quinzaine de sculpteurs, venus de tout le continent, qui façonnèrent sa Madonnina juchée au sommet du Duomo.

Ce petit livre n’est pas un guide. C’est un décodeur. Passionnée par cette formidable fabrique transalpine de talents qu’est Milan, Luisa Ballin nous promène dans une métropole qui, à plus d’un titre, incarne le meilleur du continent européen.

Un grand récit suivi d'entretiens avec Danilo Zardin (Milan s'est toujours revendiquée comme une deuxième Rome), Ferrucio de Bortoli (Milan, dans sa pluralité, est un ensemble de capitales) et Antonio Steffenoni (Milan est le champ de bataille du choc des valeurs en Italie).

Un voyage intelligent, résolument tourné sur l’avenir, pour décrypter les secrets des ambitions de Milan. Et donc mieux les comprendre

CE QU'EN PENSE LA CRITIQUE

- "(...) Belle et utile collection petit format chez Nevicata, dont chaque opuscule est dédié à un pays en particulier. Non pas un guide de voyage classique, mais, comme le dit le père de la collection, un «décodeur» des mentalités profondes et de la culture. Des journalistes, excellents connaisseurs des lieux, ont été sollicités (...). A chaque fois, un récit personnel et cultivé du pays suivi de trois entretiens avec des experts locaux. - Le Temps

- "Comment se familiariser avec "l'âme" d'un pays pour dépasser les clichés et déceler ce qu'il y a de juste dans les images, l'héritage historique, les traditions ? Une démarche d'enquête journalistique au service d'un authentique récit de voyage : le livre-compagnon idéal des guides factuels, le roman-vrai des pays et des villes que l'on s'apprête à découvrir." - Librairie Sciences Po

À PROPOS DE L'AUTEUR

Luisa Ballin est une journaliste italo-suisse basée à Genève. Ses articles et entretiens ont été publiés dans de nombreux journaux, dont La Croix, La Tribune de Genève, Le Temps, Le Courrier et La Cité.

Sie lesen das E-Book in den Legimi-Apps auf:

Android
iOS
von Legimi
zertifizierten E-Readern

Seitenzahl: 88

Das E-Book (TTS) können Sie hören im Abo „Legimi Premium” in Legimi-Apps auf:

Android
iOS
Bewertungen
0,0
0
0
0
0
0
Mehr Informationen
Mehr Informationen
Legimi prüft nicht, ob Rezensionen von Nutzern stammen, die den betreffenden Titel tatsächlich gekauft oder gelesen/gehört haben. Wir entfernen aber gefälschte Rezensionen.



L’ÂME DES PEUPLES

Une collection dirigée par Richard Werly

Signés par des journalistes écrivains de renom, fins connaisseurs des pays, des métropoles et des régions sur lesquels ils ont choisi d’écrire, les livres de la collection L’âme des peuples ouvrent grandes les portes de l’histoire, des cultures, des religions et des réalités socio-économiques que les guides touristiques ne font qu’entrouvrir.

Écrits avec soin et ponctués d’entretiens avec de grands intellectuels rencontrés sur place, ces riches récits de voyage se veulent le compagnon idéal du lecteur désireux de dépasser les clichés et de se faire une idée juste des destinations visitées.

Une rencontre littéraire intime, enrichissante et remplie d’informations inédites. Parce que pour connaître les peuples, il faut d’abord les comprendre.

Richard Werly (1966) est le correspondant permanent à Paris du quotidien suisse Le Temps. Précédemment basé à Bruxelles, Genève, Tokyo et Bangkok, il s’est lancé dans l’aventure éditoriale de L’ âme des peuples après avoir réalisé combien, dans une Europe en crise, la compréhension mutuelle et la connaissance des racines culturelles et religieuses ne cessent de reculer sous la pression d’une économie toujours plus rapide et globalisée.

AVANT-PROPOS

Pourquoi Milan ?

Milano vicino all’EuropaMilano a portata di manoti fa una domanda in tedescoe ti risponde in siciliano…

Comme dans la chanson du regretté Lucio Dalla, « Milan est près de l’Europe. Milan est à portée de main. Elle te pose une question en allemand et te répond en sicilien… »

Pour la décrire à défaut de la définir, trois axes d’excellence et une constante : mode, design, opéra et finance. Je reviens arpenter ses rues après une longue absence pour en respirer à nouveau l’atmosphère. Je la redécouvre avec les yeux du visiteur qui débutait jadis son voyage en Italie dans la cité des Visconti et des Sforza et avec le regard des voyageurs d’aujourd’hui conviés à la rencontre de la Milan du vingt et unième siècle. Une escale dans les lieux qui ont forgé sa réputation demeure un émerveillement : le Teatro alla Scala, la bibliothèque Ambrosienne, le musée du Risorgimento et le musée Poldi Pezzoli, les pittoresques canaux appelés navigli, le Duomo et la Cène de Leonardo da Vinci. Et pour capter son esprit résolument contemporain, balade aux pieds des gratte-ciels et dans les boutiques et cafés du quartier réaménagé de Porta Nuova.

Moins envoûtante que Venise, moins artistique que Florence, moins solaire que Naples ou moins représentative de la dolce vita que Rome, Milan ne figure pas d’emblée au palmarès des destinations préférées des Italiens et des visiteurs venus d’ailleurs. Pourtant, la ville hôte de l’Exposition universelle de 2015 révèle ses richesses si l’on prend le temps de découvrir ses charmes qu’elle ne dévoile pas de prime abord.

La capitale de la Lombardie ne frappe pas par une beauté immédiate, elle séduit plutôt par son dynamisme. Les Milanais ont eu de tous temps la fibre entrepreneuriale et, outre leur indéniable sens des affaires, ils ont le culte du style, la passion de la culture sous toutes ses formes, un talent pour l’édition et l’audace de proposer une architecture futuriste. Toujours en avance sur les tendances, Milan est devenue, depuis quelques années, un haut lieu de l’alimentation de qualité, bien avant l’engouement pour le tourisme gastronomique, et a naturellement choisi ce thème pour l’Exposition universelle 2015 : Nourrir la planète, énergie pour la vie.

Si Milan n’est pas d’une latinité exubérante, elle incarne parfaitement l’élégance à l’italienne, cet art de vivre et du paraître à son avantage qui a conquis le monde, tout comme il avait séduit Stendhal, qui vécut sept ans à Milan, de 1814 à 1821, et y découvrit, dit-on, « le grand art d’être heureux ». C’est cet art-là que je me propose, dans ce petit livre, de vous faire partager.

Audacieuse et orgueilleuse

Dans le roman noir d’Antonio Steffenoni Un delitto molto milanese (Un délit très milanais), il pleut souvent sur la capitale économique et financière de l’Italie, mais giboulées et brume peuvent s’avérer des alliées pour visiter les musées de la ville, comme les pinacothèques Ambrosienne et de Brera, le Museo del Novecento et sa collection de tableaux et de sculptures d’artistes avant-gardistes, ou la Triennale, le musée du design qui relate la naissance et l’évolution de cet artisanat élevé au rang d’art, qui a contribué à la renaissance économique de l’Italie après la guerre en créant une ligne esthétique épurée pour sublimer les objets du quotidien : ustensiles de cuisine, cafetières, canapés, machines à écrire, ou la Vespa de nos échappées belles et autres petites merveilles. Vico Magistretti, l’un des pères du design italien, résumait ainsi l’idée de ces créateurs de style nouveau, qui ont pu compter sur le savoir-faire exceptionnel des artisans de la Lombardie et du reste de l’Italie depuis des siècles : « Le design est un concept. L’objet doit avoir un sens. Le beau design ne compte pas. Seules les idées comptent ».

Cinq ans après Shanghaï, Milan, ville phare de l’ingéniosité, a su faire valoir ses atouts et obtenir l’Exposition universelle 2015. Un enjeu majeur pour asseoir sa légitimité européenne et pour redorer le blason de l’Italie. Car pour le fringant président du Conseil italien Matteo Renzi, né en 1975, pas de doute : soutenir Milan c’est soutenir l’Italie. « L’Expo Milan 2015 doit devenir le fleuron de notre pays » n’a cessé de marteler l’ambitieux Florentin dès son arrivée au pouvoir en février 2014. L’objectif de ce happening mondial que le président du Conseil communicateur souhaite associer à son image ? Placer durablement l’alimentation au cœur de l’agenda international, contribuer à remettre en forme l’Italie, pays en perte de force propulsive, et consolider le rôle de Milan comme place forte internationale au cœur de l’Europe.

Car si la ville la plus dynamique d’Italie est le poumon économique incontesté de la péninsule transalpine, elle n’est jamais parvenue à en devenir la capitale politique, malgré l’apport important des Milanais à l’unification du pays, en 1861. Milan fa e sta a se (Milan agit et reste de son côté). Et ce fut particulièrement vrai au moment de l’Unité d’Italie. « Ce sera sa faiblesse organique permanente, qui se répétera jusqu’à ce que l’histoire ne devienne anthropologie » écrit Giulio Sapelli, professeur d’Histoire économique à l’Università degli Studi de Milan.

De fait, le complexe de supériorité des Milanais leur a parfois joué des tours au moment de hisser leur ville au plus haut niveau du pouvoir politique national. Anna Grimaldi, « demi-Milanaise DOC2 » comme elle se définit avec humour, puisqu’ayant grandi à Milan et à Alessandria dans le Piémont, affirme que les Milanais aiment leur ville d’un amour aveugle au point d’en arriver presque à nier certains problèmes, comme par exemple la pollution, pourtant alarmante. Ses concitadins sont entreprenants, énergiques et dotés « d’une vitesse en plus » par rapport à l’Italien moyen. À Milan, métropole urbaine où le rythme est à l’effervescence, les habitants ont le sens du devoir et le culte du travail bien fait. Le revers de la médaille est que les Milanais sont toujours en compétition pour démontrer qu’ils sont in gamba et plus malins que les autres. « Ce qui les rend souvent insupportables » reconnaît Anna. Et snobs, ajoutent leurs détracteurs.

Son époux, Andrea Buscaglia, directeur financier, Milanais d’adoption, arrivé tout jeune du Piémont, résume l’idiosyncrasie de Milan. Petite New York d’Italie, forte de son melting-pot qui englobe des gens venus de toutes les provinces italiennes et d’une myriade d’autres pays et continents, le chef-lieu lombard sait intégrer ses nouveaux habitants, qui après un bref laps de temps se sentent Milanais, entraînés qu’ils sont dans le tourbillon de la vie frénétique ambiante.

A Milano se sta mai coi man in man. « À Milan, on ne reste jamais les bras ballants ». Avocat ou cantonnier, chirurgien ou boulanger, le Milanais met un point d’honneur à accomplir sa tâche avec rigueur et professionnalisme, justement parce qu’il est de Milan. Les Milanais peuvent devenir d’imbuvables baùscia (frimeurs) dès qu’ils ont franchi le périphérique, et pire encore s’ils sont à l’étranger, note Andrea. Lorsqu’il affirme mi sun de Milan, le Milanais est sûr d’être le plus futé, le plus calé, le plus éveillé. « Ce provincialisme métropolitain frise parfois le pathétique » poursuit Andrea, le Milanais parfaitement intégré mais toujours considéré mandrogno, mot du dialecte local qui signifie « commerçant » et désigne les natifs d’Alessandria, « une race bâtarde, ni Turinois, ni Génois, ni Milanais ». Andrea reconnaît toutefois que lorsqu’il est à l’étranger et qu’on lui demande d’où il vient, il répond fièrement : mi sun de Milan.

Trop entreprenants et pas assez inspirés de Machiavel, les Milanais, contrairement à leurs compatriotes piémontais, florentins et surtout romains qui ont su faire de la Ville éternelle et siège de la papauté la capitale de l’Italie unifiée ? Mais la politique nationale a-t-elle jamais été la priorité des Milanais, à part celle de Bettino Craxi, président du Conseil du gouvernement italien de 1983 à 1987 et celle de son ami Silvio Berlusconi, homme d’affaires né à Milan en 1936, descendu dans l’arène politique en 1994 sous les couleurs de son parti Forza Italia et qui deviendra président du Conseil d’Italie par trois fois ?

Si Milan n’est pas la capitale politique de l’Italie, elle s’est toujours considérée comme sa capitale morale et celle de l’entreprenariat. L’ingéniosité des Milanais, unanimement reconnue, y compris par les Florentins et les Romains, avait déjà fait merveille, notamment dans le domaine du design, lors de l’Exposition universelle de 1906, qui s’était d’ailleurs tenue à Milan. Un concours de décoration des intérieurs de maisons des classes populaires y avait été lancé. L’industrie était alors perçue comme un moyen de répondre aux besoins d’une classe ouvrière qui accédait aux biens de consommation. L’intelligence des designers italiens fut d’intégrer l’esthétique dans la conception tant des objets uniques que de ceux fabriqués en série, créés notamment pour faciliter la vie des femmes, entrées dans le monde du travail rémunéré, dans la gestion quotidienne des tâches ménagères qu’elles ont presque toujours été les seules à assumer. Mode, architecture d’intérieur, ligne automobile, dessin industriel, habillement, chaussures, maroquinerie, gastronomie ou objets de communication, le design italien est un modèle universel de classe et d’élégance et est devenu une institution dont Milan est le centre névralgique.

La mode, fleuron chic de l’économie

Tout comme Milan a donné ses lettres de noblesse au design lors de son Exposition universelle de 1906, l’Expo 2015 est une vitrine pour la mode italienne avec la mise en place de L’Expo in città