Montana : La reconquête de l'Ouest - Isabelle Falconnier - E-Book

Montana : La reconquête de l'Ouest E-Book

Isabelle Falconnier

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  • Herausgeber: Nevicata
  • Kategorie: Lebensstil
  • Sprache: Französisch
  • Veröffentlichungsjahr: 2018
Beschreibung

Parce que pour connaître les peuples, il faut d’abord les comprendre.

Cet État américain, plus que tout autre, rime avec aventure. Entre Rocheuses et Canada, terre de grands espaces et de pionniers, le Montana incarne le rêve de la frontière, toujours repoussée, jamais vaincue, toujours recherchée. Sept réserves indiennes, deux parcs nationaux, et l’impression de vivre dans l’un des ultimes sanctuaires sauvages de l’Amérique, aujourd’hui menacé par l’exploitation du gaz de schiste.

Le Montana est un rêve. Il fut celui des immigrants à la recherche d’un destin pour eux et pour les États-Unis naissants. Il demeure celui des écrivains et des cinéastes qui en ont fait l’ultime destination créative, loin de New York ou d’Hollywood. Et il y a le passé, fait de grandeur et de douleurs. Le Montana, ou la solitude absolue que l’Amérique a érigée en culte.

Ce petit livre n’est pas un guide. Il dit la part d’ombre et d’héroïsme des États-Unis. Parce qu’au Montana, une Amérique unique vous attend sous le Big Sky, ce grand ciel auquel personne n’échappe.

Un grand récit suivi d’entretiens avec Zoe Ann Stoltz (Une grande partie du passé du Montana a été romantisé à outrance), Ian Frazier (Nous avons besoin de croire que ces immenses espaces appartiennent à tous les Américains) et Nancy S. Cook (Pour beaucoup d'écrivains, les paysages du Montana sont des outils de travail).

Un voyage au gré de personnages forts et de lieux marquants, pour mieux connaître les passions américaines. Et donc mieux les comprendre.

EXTRAIT

Longtemps la région du Montana a été au-delà de la « frontière », ligne fluctuante, mobile, incertaine, marquant la zone limite de l’implantation des populations d’origine européenne sur le continent américain sur le point d’être conquis, du sud au nord et de l’est à l’ouest. Cette région a été la dernière à se trouver aux confins d’un territoire dit civilisé, avant la « sauvagerie » et la « barbarie », jusqu’à ce qu’en 1890, l’existence officielle de la frontière prît fin lorsque le Bureau de recensement des États-Unis déclara que l’ensemble du territoire était désormais maîtrisé.
Mais lorsque meurt la frontière, naît l’esprit de la frontière. Soit, selon l’historien Frederick Jackson Turner en 1893 déjà, un esprit d’entreprise, d’innovation, de résurrection perpétuelle et d’expansion qui a entièrement modelé la société américaine. 

CE QU'EN PENSE LA CRITIQUE

- "(...) Belle et utile collection petit format chez Nevicata, dont chaque opuscule est dédié à un pays en particulier. Non pas un guide de voyage classique, mais, comme le dit le père de la collection, un «décodeur» des mentalités profondes et de la culture. Des journalistes, excellents connaisseurs des lieux, ont été sollicités (...). A chaque fois, un récit personnel et cultivé du pays suivi de trois entretiens avec des experts locaux. - Le Temps

- "Comment se familiariser avec "l'âme" d'un pays pour dépasser les clichés et déceler ce qu'il y a de juste dans les images, l'héritage historique, les traditions ? Une démarche d'enquête journalistique au service d'un authentique récit de voyage : le livre-compagnon idéal des guides factuels, le roman-vrai des pays et des villes que l'on s'apprête à découvrir." - Librairie Sciences Po

À PROPOS DE L'AUTEUR

Isabelle Falconnier est journaliste. Critique littéraire et chroniqueuse (L’Hebdo, Le Matin Dimanche), elle a présidé le Salon du Livre de Genève et programme les festivals du Livre Suisse de Sion et Lausan’noir à Lausanne.

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Couverture

Page de titre

L’ÂME DES PEUPLES

Une collection dirigée par Richard Werly

Signés par des journalistes écrivains de renom, fins connaisseurs des pays, des métropoles et des régions sur lesquels ils ont choisi d’écrire, les livres de la collection L’âme des peuples ouvrent grandes les portes de l’histoire, des cultures, des religions et des réalités socio-économiques que les guides touristiques ne font qu’entrouvrir.

Écrits avec soin et ponctués d’entretiens avec de grands intellectuels rencontrés sur place, ces riches récits de voyage se veulent le compagnon idéal du lecteur désireux de dépasser les clichés et de se faire une idée juste des destinations visitées.

Une rencontre littéraire intime, enrichissante et remplie d’informations inédites. Parce que pour connaître les peuples, il faut d’abord les comprendre.

Richard Werly est le correspondant pour la France et les affaires européennes du quotidien suisse Le Temps. Précédemment basé à Bruxelles, Genève, Tokyo et Bangkok, il s’est lancé dans l’aventure éditoriale de L’âme des peuples après avoir réalisé combien, en Europe et dans le monde, la compréhension mutuelle et la connaissance des racines culturelles et religieuses ne cessent de reculer sous la pression d’une économie toujours plus globalisée et de crises nouvelles et parfois brutales.

Remerciements à Visit Montana

Carte

AVANT-PROPOS

Pourquoi le Montana ?

Le Montana est beaucoup plus qu’un État de l’Union. Peu de lieux ont été à ce point imaginés, fantasmés avant que d’être parcourus, foulés aux pieds, vécus réellement. Peu de lieux ont eu une existence aussi intense avant même que d’exister officiellement. Peu de lieux hantent l’imaginaire collectif autant que ces 381 000 km2 de montagnes, de plaines, de vallées, de forêts et de rivières. Si la Terre promise était davantage qu’une belle idée, si l’Eldorado plus qu’un mirage, ils s’incarneraient là, précisément, au cœur du Nouveau Monde, à l’ouest de l’Ouest.

Longtemps la région du Montana a été au-delà de la « frontière », ligne fluctuante, mobile, incertaine, marquant la zone limite de l’implantation des populations d’origine européenne sur le continent américain sur le point d’être conquis, du sud au nord et de l’est à l’ouest. Cette région a été la dernière à se trouver aux confins d’un territoire dit civilisé, avant la « sauvagerie » et la « barbarie », jusqu’à ce qu’en 1890, l’existence officielle de la frontière prît fin lorsque le Bureau de recensement des États-Unis déclara que l’ensemble du territoire était désormais maîtrisé.

Mais lorsque meurt la frontière, naît l’esprit de la frontière. Soit, selon l’historien Frederick Jackson Turner en 1893 déjà, un esprit d’entreprise, d’innovation, de résurrection perpétuelle et d’expansion qui a entièrement modelé la société américaine. La frontière, mythe historique central de l’histoire des États-Unis, a joué un rôle très fort dans l’imaginaire et dans la construction même de la société et de l’identité américaines. C’est une notion capitale pour comprendre l’histoire réelle et l’histoire légendaire des États-Unis (cette dernière transmise essentiellement par les westerns). Du coup, comprendre le Montana, c’est comprendre les États-Unis d’hier, d’aujourd’hui et sans doute de demain.

Peu de lieux sur Terre ont suscité une telle fièvre, une telle succession de ruées d’hommes et de femmes à la recherche d’or, d’argent, de terres, de champs, un tel enchaînement d’élans, de convoitises. Le Montana n’est pas le fruit du hasard. C’est ce qui le rend si fascinant. C’est un endroit qui a été cherché, désiré, voulu comme peu de lieux dans l’histoire. Lewis et Clark, les premiers à le parcourir et le décrire méthodiquement, sont envoyés par le président des États-Unis en quête de nouvelles ressources naturelles, de nouveaux espaces pour ses concitoyens. Les milliers de pionniers arrivés dans les plaines ou les vallées du Montana suivent les explorateurs. Plus qu’un voyage, un mythe prend corps au fil de longues semaines, voire de longs mois d’un voyage difficile, dangereux, tenus au corps par leur seule volonté.

Peu de lieux sur Terre ont connu une histoire aussi accélérée. En 1805, la première exploration officielle, celle de Lewis et Clark, découvre les merveilles de Yellowstone et les hardes de bisons, jusqu’ici seulement connues des trappeurs et des tribus indiennes. En 1850, les plaines situées entre le Missouri et les Rocheuses constituent encore les mystérieux « territoires » des Indiens. Mais en quelques petites décennies, les jeux sont faits et, avant le tournant du siècle, les tribus indiennes sont refoulées définitivement dans les réserves, les bisons exterminés, l’Ouest cultivé, accessible par chemin de fer et bientôt routes. Du coup, le Montana est un pays qui se lit à livre ouvert. Vous pouvez toucher du doigt ses ghost towns (villes fantômes) orphelines de la ruée vers l’or, ses ranchs centenaires, ses mines-musées et ses milliers de kilomètres de voies ferrées désaffectées.

Le Montana a été, et est toujours, un idéal, voire un concept marketing. L’exemple fut donné dès la fin du dix-neuvième siècle par les compagnies de chemin de fer, impatientes de rentabiliser les investissements énormes consentis pour relier l’Atlantique au Pacifique. Les autorités actuelles manient aussi le concept en parlant du Big Sky, inventé par l’écrivain Alfred Bertram Guthrie, en 1947.

Toujours le même refrain : l’endroit parfait sur Terre. Celui où vivre et revivre. Celui où l’on peut devenir enfin riche pour être libre.

L’envers du décor est connu : la violence s’y est enracinée dans les paysages. Guerres successives entre trappeurs, chasseurs de bisons et Indiens, pionniers, éleveurs de vaches contre éleveurs de moutons, écologistes contre exploitants agricoles ou mineurs. Personne ne s’est fait de cadeaux. Il a fallu prendre ce qu’on voulait, toujours. Et on a pris. On ne s’est pas gêné.

Au Montana, c’est un raccourci de notre histoire que l’on parcourt. À l’arpenter, c’est notre rêve et son ombre que nous traversons. Même si la frontière a disparu, si le Far West n’a plus rien de lointain, le Montana, qui doit son nom à un dérivé du mot latin montaanus, « montagneux », choisi par le député de l’Ohio James Ashley, lorsqu’en 1864 il s’est agi de choisir un nom pour le nouveau territoire, incarne l’Ouest à lui tout seul, et à jamais.

On y respire toujours mieux qu’ailleurs, le ciel y est toujours aussi vaste. Peu de lieux sur Terre offrent une nature aussi grandiose, somptueuse, terrifiante ou apaisante, inspirante et hostile. Plus que partout ailleurs, on est au Montana confronté à ses limites, à sa volonté, à ses états d’âme, ses forces et faiblesses. Parce que beaucoup de choses, si ce n’est pas tout, dépendent de vous au Montana. Parce que le rêve du Montana est en chacun de nous.

La reconquête de l’Ouest

On dirait un buisson-ardent. Des bribes de tissu rouge, blanc ou violet sont attachées aux branches, des colliers de perles se débattent dans le vent sec et violent qui fige les collines de l’ex-champ de bataille.

L’arbuste défie discrètement, depuis le côté de la route, les pierres blanches en forme de pierres tombales, disséminées sur des centaines de mètres carrés. Là tombèrent les 263 soldats du général George Amstrong Custer, et Custer lui-même, tués lors de la bataille de Little Bighorn le 25 juin 1876.

Aucun autre lieu n’incarne de manière aussi poignante le destin paradoxal du Montana, théâtre de l’affrontement violent entre deux civilisations qui auraient pu s’entendre si l’une n’avait pas été convaincue d’avoir tous les droits, l’autre comprenant vite qu’elle n’en avait plus aucun. Little Bighorn est une victoire et une défaite : un succès militaire des Sioux et des Cheyenne contre l’armée américaine, mais la dernière de leurs victoires. Une victoire vaine, inutile, symbolique – celle de tribus indiennes refusant de se rendre dans les réserves qui leur ont été attribuées. Celle de leur chef, Sitting Bull, réfugié au Montana, où il remporte le combat déraisonnable engagé par un général aux commandes d’un régiment en infériorité numérique. George Armstrong Custer a incarné durant des décennies la figure du martyr, mort pour permettre aux pionniers blancs de vivre leurs rêves et pour soumettre les Indiens aux règles « civilisatrices » dont il était porteur. En 1991, ce qui s’appelait alors le Custer Battlefield National Monument fut rebaptisé Little Bighorn Battlefield National Monument. En 2003, un monument circulaire représentant l’esprit des guerriers indiens morts vint rééquilibrer une muséographie entièrement tournée vers les pertes militaires de l’US Army. Mais comment effacer ce simple fait ? Un an après Little Bighorn, il n’y a plus un Indien réellement libre, non soumis aux règles des nouveaux maîtres du Montana, sur le territoire. Little Bighorn Battlefield National Monument est le site touristique le plus visité du Montana, après les parcs nationaux de Yellowstone et de Glacier. Un lieu hanté, forcément. Les Crow – le site est sur leur réserve – croient que lorsque le superintendant en charge du lieu descend chaque soir le drapeau américain, les esprits sont autorisés à sortir, et qu’à son lever, les âmes des morts retournent dans leur tombe.

L’ancien champ de bataille est situé dans cette part du territoire du Montana qui mord dans les Grandes Plaines, immenses étendues qui s’étalent du Canada au Texas, le long du Missouri et de ses affluents. Tout ce qu’on dit sur le Montana y est vrai. Le ciel y est plus vaste, justifiant le surnom de Big Sky Country donné au 41e État des États-Unis. Les paysages, le big out there, engloutissent tout : hommes, maisons, voitures, animaux. Le voyageur s’y retrouve errant dans l’immensité d’un paysage qui aspire l’âme et le cœur.

De l’est à l’ouest, de la petite ville de Wibaux à la frontière avec le Dakota au Lookout Pass glissant sur l’Idaho, le long ruban gris de la transcontinentale Interstate 90 flirte sur ses quasi 1000 km avec la ligne de chemin de fer, la vénérable Northern Pacific Railway qui était là bien avant la route. Régulièrement, la voiture dépasse des trains de marchandises grinçants, dont on ne voit pas la fin. Au nord, la U.S. Highway 2 fait de même en jouant à cache-cache avec l’itinéraire de la mythique Great Northern Railway. Vous roulez, et parfois pensez faire du sur place. Tous les dix, vingt, trente kilomètres : mêmes stations-service, mêmes gares, mêmes bourgades nées avec le chemin de fer, même poussière en été, même vent en hiver. Partout, des cathédrales en forme de silos à grains pour ne pas mourir de faim durant l’hiver.

Le Montana est un paysage avant d’être une histoire. On ne comprend guère cet État si on n’appréhende pas sa géographie, qui dicte sa loi aux hommes et aux femmes qui l’habitent. Six habitants peuplent en moyenne chacun de ses 235 000 km2, ce qui en fait le quatrième plus grand et le septième moins peuplé des États américains. Assis sur le Continental Divide, la ligne de partage des eaux coulant vers le Pacifique ou l’Atlantique, ce territoire a deux visages. À l’est ? La prairie, des collines et ravins secs, terre des bisons puis des moutons, des champs de blé, des vaches. À l’ouest ? Les Rocheuses, rangées de montagnes à perte de vue, vallées, rivières, qui ont attiré les chasseurs de fourrure, les chercheurs d’or, les constructeurs de barrages. Au-dessus de ces deux Montana, le même ciel immense, ce même Big Sky, titre d’un roman d’Alfred B. Guthrie récupéré par le Montana State Highway Department pour orner les plaques minéralogiques des voitures, puis par les instances successives de promotion touristique.

Lewis et Clark, pères fondateurs