Notre humanité - Ai Weiwei - E-Book

Notre humanité E-Book

Ai Weiwei

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Beschreibung

Ai Weiwei est un artiste contemporain polyvalent : sculpture, installation, photographie, performance et architecture sont quelques-uns de ses moyens d’expression. Il est également l’un des artistes les plus influents au monde et un réalisateur de documentaires engagé. Son œuvre toute entière alerte sur les attaques contre la démocratie et la liberté d’expression, les violations des droits de l’Homme et les déplacements de personnes.
Ce recueil illustre l’éventail et la profondeur des réflexions d’Ai Weiwei sur ce qui fonde notre humanité et sur les migrations de masse, questions qui l’occupent depuis des décennies. Les mots d’Ai Weiwei témoignent d’une urgence profonde. Ils témoignent surtout d’un rôle impérieux que peut avoir l’art pour donner une voix aux sans-voix.


À PROPOS DE L'AUTEUR


Ai Weiwei est né à Pékin en 1957. Il est le fils du poète et intellectuel Ai-Qing et est considéré comme l’un des artistes majeurs de la scène artistique indépendante chinoise. Le magazine Art Review l’a même désigné comme la figure la plus puissante de l’art contemporain en 2011. Il est à la fois artiste conceptuel, photographe, commissaire d’exposition, blogueur et architecte. Ai Weiwei, en raison de son activisme politique, a été arrêté par la police chinoise le 3 avril 2013 et détenu pendant 81 jours dans un lieu inconnu. Il est resté en liberté conditionnelle jusqu’au 22 juillet 2015, date à laquelle l’artiste a récupéré son passeport chinois.

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Seitenzahl: 64

Veröffentlichungsjahr: 2022

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Notre Humanité

Notre Humanité

Ai Weiwei

Textes choisis et préfacés par Larry Warsh

Traduit de l’anglais par Olivier Colette

Éditions Intervalles

INTRODUCTION

Quel est le devoir d’un être humain ? Aujourd’hui plus que jamais, cette question est brûlante. Chaque jour, des milliers de personnes sont déplacées, mais trop peu de gens accordent de l’attention à cette crise. Pour l’enfant de réfugiés que je suis, l’histoire est pourtant en train de se répéter. La crise actuelle fait resurgir les mêmes récits de propriété saisie, de biens spoliés ou détruits et d’êtres déracinés que racontaient mes parents. Les tragédies qu’ils ont endurées frappent en ce moment même des millions de personnes dans le monde.

Parce qu’il a lui-même connu l’exil, Ai Weiwei partage ce sentiment et contribue à maintenir la voix collective des réfugiés au premier plan des arts et de la politique. Humanité rassemble ses réflexions lors d’un voyage dans vingt-trois pays entrepris pour affronter et à décrire la réalité de la crise mondiale des réfugiés. Issues de différentes sources, notamment d’interviews, d’articles de magazines et de podcasts du monde entier, ces citations reflètent la diversité de cette voix. Ses mots, adressés à un public varié, revêtent de multiples tons permettant d’illustrer la complexité de la crise. Mais surtout, ils attirent l’attention sur l’indifférence que ces questions de droits humains suscitent encore trop souvent chez ceux qui ont le pouvoir d’agir mais qui ont failli à leur devoir. Ai Weiwei en appelle non seulement aux gouvernements et aux autorités, mais à chacun d’entre nous. Car aucun geste n’est trop modeste ou trop tardif.

Cet appel survient à un moment crucial. Le monde compte plus de soixante-dix millions de déplacés et de nombreux pays adoptent des politiques d’exclusion particulièrement décourageantes à leur égard. L’attention qu’Ai Weiwei ne cesse d’attirer sur cette crise reflète l’espoir que l’art associé au dialogue politique puisse conduire à davantage de conscience, de soutien et de guérison parmi les humains.

Comme Ai Weiwei, je suis convaincu que chaque être humain mérite de nourrir les mêmes aspirations : profiter pleinement de la vie qui nous est offerte, imprégner notre monde de sens et de sensibilité et affronter les obstacles auxquels nous sommes confrontés. Pour réaliser ces aspirations, nous sommes appelés à utiliser notre pouvoir individuel afin de venir en aide à ceux qui ont perdu le leur. Nous devons résister à la suffisance et à l’indifférence et nous efforcer d’attirer une attention immédiate et soutenue sur cette crise mondiale. Il est de notre responsabilité collective d’encourager la liberté, l’émancipation, l’expression créative et la détermination dans le monde. C’est là notre devoir.

Larry Warsh

Notre Humanité

Nous formons une seule et même humanité, telle est ma conclusion. Si l’un d’entre nous est blessé, nous sommes tous blessés. Si l’un d’entre nous est joyeux, nous sommes tous joyeux. (1)

N’importe qui pourrait être réfugié. Y compris vous et moi. La crise dite des réfugiés est une crise humaine. (2)

Faire partie de l’humanité est une réalité difficile à saisir. Lorsqu’on est un arbre, il est difficile de saisir la forêt. (3)

Souvent, la manière dont on considère les autres en dit long sur soi-même. Je pense qu’il s’agit d’une vision honnête de la nature humaine. (4)

Celui qui aide une personne aide l’humanité tout entière. (5)

Je veux montrer la beauté des réfugiés. Même dans les situations les plus difficiles, la beauté est toujours là. Le beau et le sombre coexistent dans la même image. (6)

Les gens qui ont peur des migrants, parce qu’ils manquent de connaissance et, par conséquent, de compréhension de l’humanité, m’inspirent beaucoup de compassion. (7)

Les êtres humains ont de la chance d’être doués d’imagination. Nos cœurs peuvent être si grands, nous pouvons nous projeter au-delà des frontières physiques. Les humains sont si beaux en ce sens. C’est ce qui explique que nous ayons la poésie, la musique et l’art. (8)

Les humains ne contrôlent pas l’univers. Nous ne sommes que des passagers éphémères. (9)

En Chine, on dit que l’eau qui goutte suffisamment longtemps peut pénétrer une pierre. C’est de cette manière qu’il faut voir les choses. Au bout du compte, il s’agit toujours d’une forme de lutte, qui peut durer des siècles, mais l’esprit humain – la volonté d’être libre, de saisir des opportunités, de communiquer en face-à-face, de se serrer la main et de partager de l’espace – est bien plus fort que tout le reste. (10)

Je ne peux pas offrir de la nourriture, du thé ou de l’argent à tous les réfugiés, mais je peux faire entendre et reconnaître leurs voix. Je peux leur offrir une plate-forme qui leur permette d’être reconnus, d’attester qu’ils sont des êtres humains. (11)

À ma naissance, mon père était réfugié. J’ai compris jusqu’où l’humanité pouvait s’abaisser. (12)

En tant qu’artiste, je dois me sentir concerné par les luttes de l’humanité. Je ne les sépare jamais de mon travail. (13)

L’humanité est en train de perdre sa vision et son courage. (14)

La crise des réfugiés est une crise mondiale, une crise humaine. On ne peut pas la réduire à un problème de réfugiés. Elle n’est pas régionale, elle ne se limite pas au Moyen-Orient. Elle touche également l’Afrique, le Bangladesh et beaucoup, beaucoup d’autres pays. (15)

Dans toute religion, sauver une vie ou aider son prochain est le rite suprême. Il n’y a rien au-delà. (8)

On commence à comprendre que nous avons tous les mêmes besoins fondamentaux – que notre sens de l’humanité et de l’intégrité, notre désir de chaleur et de sécurité, d’être bien traités et respectés, sont les mêmes. (16)

Je ne suis pas né artiste, je suis né humain. Je m’intéresse davantage aux situations humaines qu’à l’opinion des autres. Je n’ai pas le choix. (17)

On doit toujours faire preuve de compassion envers autrui – sinon, comment prétendre être humain ? (8)

Les drones sont fascinants – ils offrent un point de vue qui n’est pas celui des humains, mais d’un oiseau ou de Dieu. Les êtres humains sont impossibles à différencier lorsqu’on les contemple ainsi. Et les flux de réfugiés semblent appartenir à la nature – on dirait une eau qui s’écoule ou de la glace qui fond. J’aime ce genre de métaphore car on entend souvent dire combien ces gens sont différents et étrangers. (18)

Dans notre société, on entend souvent parler d’individualité – mais est-ce qu’elle existe réellement sans droits essentiels ? (19)

Les droits humains doivent être défendus toujours et partout. C’est un combat qui bénéficie à tous. (20)

L’art est une affaire d’esthétique, de morale, de croyance en l’humanité. Sans ces éléments, il n’y a tout simplement pas d’art. (21)

Lorsqu’on sent que les êtres humains sont connectés les uns aux autres, on a la solution. Lorsqu’on parle de géopolitique, de législation et de problèmes techniques, on passe à côté de l’essentiel. (22)

La nature humaine nous pousse à croire que nous sommes suffisamment malins pour contrôler l’univers. Mais la nature humaine est suicidaire, car nous n’apprécions jamais pleinement le caractère temporaire et éphémère de notre destin. (3)

D’un point de vue religieux, les êtres humains, considérés d’une certaine hauteur, sont tous les mêmes. (9)

Cette crise des réfugiés teste et défie l’humain en chacun de nous. Nous devons comprendre que nous faisons tous partie de l’humanité. (23)

Nous sommes tous des êtres humains. Nous devons chercher à nous faire du bien, à nous aider les uns les autres, plutôt qu’à nourrir la haine. (24)

« Nous valons mieux qu’eux, disent les gens. Ils sont le danger. Ils sont le problème. » Mais c’est nier l’unicité de l’humanité. C’est contraire à l’idée que nous naissons tous égaux et à notre conception de la dignité et des droits humains. (25)

J’interroge notre aptitude à nous imaginer à la place des gens. Si nous ne le faisons pas, je ne crois pas que l’humanité ait le moindre espoir. (4)