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Si l'on ne devait garder qu'un nom dans le riche tableau des poètes français du XXème siècle, il faudrait choisir celui qui a écrit ces lignes :
« Sur mes cahiers d’écolier
Sur mon pupitre et les arbres
Sur le sable sur la neige
J’écris ton nom »
Extrait de: "Paul Eluard". "Poésie et vérité". iBooks.
À PROPOS DE L'AUTEUR
Paul Eluard - Dadaïste, Surréaliste, Poète, Sur les murs, j'écris ton nom... Liberté
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Seitenzahl: 37
Paul Éluard
POÉSIE ET VÉRITÉ
suivi de : Au rendez-vous allemand
Liberté
Sur mes cahiers d’écolier Sur mon pupitre et les arbres Sur le sable sur la neige J’écris ton nom
Sur toutes les pages lues Sur toutes les pages blanches Pierre sang papier ou cendre J’écris ton nom Sur les images dorées Sur les armes des guerriers Sur la couronne des rois J’écris ton nom Sur la jungle et le désert Sur les nids sur les genêts Sur l'écho de mon enfance J’écris ton nom Sur les merveilles des nuits Sur le pain blanc des journées Sur les saisons fiancées J’écris ton nom Sur tous mes chiffons d’azur Sur l’étang soleil moisi Sur le lac lune vivante J’écris ton nom
Sur les champs sur l’horizon Sur les ailes des oiseaux Et sur le moulin des ombres J’écris ton nom Sur chaque bouffée d’aurore Sur la mer sur les bateaux Sur la montagne démente J’écris ton nom Sur la mousse des nuages Sur les sueurs de l’orage Sur la pluie épaisse et fade J’écris ton nom Sur les formes scintillantes Sur les cloches des couleurs Sur la vérité physique J’écris ton nom Sur les sentiers éveillés Sur les routes déployées Sur les places qui débordent J’écris ton nom
Sur la lampe qui s’allume Sur la lampe qui s’éteint Sur mes maisons réunies J’écris ton nom Sur le fruit coupé en deux Du miroir et de ma chambre Sur mon lit coquille vide J’écris ton nom Sur mon chien gourmand et tendre Sur ses oreilles dressées Sur sa patte maladroite J’écris ton nom Sur le tremplin de ma porte Sur les objets familiers Sur le flot du feu béni J’écris ton nom Sur toute chair accordée Sur le front de mes amis Sur chaque main qui se tend J’écris ton nom
Sur la vitre des surprises Sur les lèvres attentives Bien au-dessus du silence J’écris ton nom
Sur les pentes inférieures Aussi bas que le silence
Aussi bas que le silence D’un mort planté dans la terre Rien que ténèbres en tête Aussi monotone et sourd Que l'automne dans la mare Couverte de honte mate Le poison veuf de sa fleur
Première marche la voix d’un autre
Riant du ciel et des planètes La bouche imbibée de confiance Les sages Veulent des fils Et des fils de leurs fils Jusqu’à périr d’usure Le temps ne pèse que les fous
Le rôle des femmes
En chantant les servantes s’élancent Pour rafraîchir la place où l’on tuait Petites filles en poudre vite agenouillées Leurs mains aux soupiraux de la fraîcheur Sont bleues comme une expérience Un grand matin joyeux Faites face à leurs mains les morts Faites face à leurs yeux liquides C’est la toilette des éphémères La dernière toilette de la vie Les pierres descendent disparaissent Dans l’eau vaste essentielle La dernière toilette des heures À peine un souvenir ému Aux puits taris de la vertu Aux longues absences encombrantes
Patience
Toi ma patiente ma patience ma parente Gorge haut suspendue orgue de la nuit lente Révérence cachant tous les ciels dans sa grâce
Un feu sans tache
La menace sous le ciel rouge Venait d’en bas des mâchoires Des écailles des anneaux D’une chaîne glissante et lourde La vie était distribuée Largement pour que la mort Prît au sérieux le tribut Qu’on lui payait sans compter La mort était le dieu d’amour Et les vainqueurs dans un baiser S’évanouissaient sur leurs victimes La pourriture avait du cœur Et pourtant sous le ciel rouge
La terre utile effaça Les tombes creusées d’avance Les enfants n’eurent plus peur Des profondeurs maternelles