Sombres Créatures: Saga Des Sombres Créatures Tome I - Ella Stone - E-Book

Sombres Créatures: Saga Des Sombres Créatures Tome I E-Book

Ella Stone

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Beschreibung

Sombres Créatures est une fantasy urbaine qui se déroule à Londres. À la recherche du vampire qui a tué son père, Narissa se retrouve face à des êtres surnaturels dangereux.

Un mystérieux vampire. Une sorcière en fuite. Un agent paranormal suspect. Et une femme déterminée à se venger. Depuis dix ans, Narissa Knight recherche le vampire qui a assassiné son père. Désespérant d'accéder au monde secret des vampires, elle s'offre comme repas à l'élite des suceurs de sang. Le nouveau donneur de sang de Calin ne ressemble à personne qu'elle n’ait jamais rencontré, mais à mesure que ses soupçons sur ses véritables motivations grandissent, sera-t-il capable de choisir entre ses croyances et son cœur ? Alors que les mensonges et les secrets commencent à s'accumuler, la proie de Narissa retourne la situation, et elle se retrouve confrontée au secret le plus dévastateur de tous... le prix de la vengeance est-il trop élevé, même pour elle ? Sombres Créatures est le premier tome de la saga passionnante des Sombres Créatures. Si vous aimez les vampires lunatiques, les héroïnes insolentes et l'action rapide, vous allez adorer le récit surnaturel d'Ella Stone.

PUBLISHER: TEKTIME

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Sombres Créatures

Saga des Sombres Créatures Tome I

Ella Stone

LA SAGA DES SOMBRES CRÉATURES

Sombres Créatures

Sombre Destinée

Sombre Déception

Sombre Rédemption

Sombre Jugement

Table des matières

Prologue

Chapitre 1

Chapitre 2

Chapitre 3

Chapitre 4

Chapitre 5

Chapitre 6

Chapitre 7

Chapitre 8

Chapitre 9

Chapitre 10

Chapitre 11

Chapitre 12

Chapitre 13

Chapitre 14

Chapitre 15

Chapitre 16

Chapitre 17

Chapitre 18

Chapitre 19

Chapitre 20

Chapitre 21

Chapitre 22

Chapitre 23

Chapitre 24

Chapitre 25

Chapitre 26

Chapitre 27

Chapitre 28

Chapitre 29

Chapitre 30

Chapitre 31

Chapitre 32

Chapitre 33

Chapitre 34

Chapitre 35

Chapitre 36

Chapitre 37

Chapitre 38

Chapitre 39

Chapitre 40

Chapitre 41

Chapitre 42

Épilogue

À L’ATTENTION DE MES FANS

Ce livre est une œuvre de fiction. Les noms, les personnages, les lieux et les événements sont le fruit de l'imagination de l'auteur ou sont utilisés de manière fictive. Toute ressemblance avec des personnes réelles, vivantes ou décédées, serait pure coïncidence.

© Dark Creatures, 2021, Ella Stone

Première publication par Darkerside en 2021

Traduit de l’anglais par: Marie de Virigny

Édition: Carol Worwood

Couverture: Christian Bentulan

Tous droits réservés. Aucune partie de ce livre ne doit être reproduite de quelque manière que ce soit sans l'autorisation expresse de l'auteur.

Prologue

Je fais un pas de plus vers lui. Je n’ai plus peur maintenant. Je n’ai qu’une seule certitude en tête. Je vais mourir, ce soir, ici, dans cette pièce, et j’aurai les yeux plongés dans le regard qui me hante depuis dix ans. Je n’ai plus rien à craindre.

- Tu peux me dire la vérité, maintenant, dis-je. Je suis si près de lui que je peux voir les pointes acérées de ses crocs. Même l’abîme sombre de ses pupilles. On sait qu’il ne quittera jamais cette pièce. Je mérite au moins la vérité. Alors dis-moi, pourquoi tu l’as tué ?

Il s’approche et lève une main. Ses doigts glacés caressent le côté de mon cou et j’étouffe un souffle. Une larme égarée se faufile le long de ma joue.

- C’est comme tu veux.

Je retiens mon souffle en me disant que ce que je vais entendre sera la dernière chose que j’entendrai de toute ma vie.

1

Narissa

Des choses stupides, j’en ai fait beaucoup dans ma vie, mais je suis prête à parier que celle-ci les surpasse toutes.

Resserrant ma veste sur ma poitrine, je rebondis sur place pour lutter contre le froid, tandis que je baisse les yeux et vérifie l’heure sur ma montre. 20 h 15. Deux minutes de plus que la dernière fois que je l’ai regardée. Quatre minutes depuis la fois d’avant. C’est comme si j’instaurais une sorte de routine. Mais c’est le stress. J’en suis sûre. Du stress prudent, mais du stress quand même. Après tout, si ça tourne mal, il y a plus en jeu que ma seule et unique amitié restante.

T’inquiète, tu vas y arriver, me dis-je au fond de moi-même tout en scrutant la route de haut en bas. Comme sur des roulettes.

Je ne suis pas sûre que ce discours d’encouragement m’aide beaucoup. Je ne suis pas le genre de personne qui les apprécie. Plutôt le genre de personne qui lève les yeux au ciel quand on lui parle de cette manière et quand on lui dit d’aller de l’avant. Pourtant, cela voudrait dire que je ne devrais pas regarder ma montre en me demandant si ce que je m’apprête à faire est stupide ou pas. Je suis sûre que si quelqu’un avait la moindre idée de ce que je suis sur le point d’affronter, il dirait que je suis suicidaire. Mais ce n’est pas le cas. Je connais les risques. Je suis juste à court d’options.

À d’autres endroits de cette ville, les gens jetteraient un regard dégoûté ou amoureux à une étudiante de 24 ans, debout sur le trottoir dans un jean déchiré et une veste courte à cette heure de la soirée. Dans beaucoup d’endroits, à vrai dire. Mais ce n’est pas ce genre d’endroit. Ici, c’est plus un quartier agréable de Londres. Parce qu’ici, on est à Mayfair, avec Hyde Park à quelques rues. Ici, les maisons sont aussi grandes que des musées et ont de tout petits balcons avec des arbres dans de jolis pots. Des petits arbres, évidemment, mais ils sont tous parfaitement taillés de la même forme et de la même taille. Ils pourraient être en plastique, je suppose, mais je parie qu’ils ne le sont pas. Je parie que lorsque vous avez assez d’argent pour vivre dans un endroit comme celui-ci, vous payez des gens pour qu’ils les entretiennent tous les jours.

Le fait qu’il vive ici signifie qu’il a de l’argent. Et, s’il a de l’argent, il est susceptible de savoir des choses. Et c’est ce dont j’ai besoin en ce moment. Je n’aurais pas pris pas ce risque pour un vampire de bas étage.

Je sors une feuille de papier froissée de ma poche et l’étire le plus possible en scannant les informations qui s’y trouvent, mais en ignorant le nom du destinataire indiqué en haut du papier. Un nom qui n’est pas le mien. En fait, le mien n’est aucun des trois noms qui apparaissent sur ce document. La culpabilité m’envahit. Si Blackwatch apprenait que j’ai réussi ce coup, Oliver se retrouverait probablement dans la merde et, de toutes les personnes dans le monde que je ne veux pas voir dans la merde, c’est bien lui. Mais s’il m’avait aidée quand je lui avais demandé, je n’aurais pas été obligée d’en arriver ici et de le voler.

Inspirant profondément, je vérifie à nouveau l’heure, la date et l’adresse (l’heure sur le papier, et non sur ma montre, cette fois-ci). J’ai bien la date et l’adresse. Quant à l’heure, je suis en avance. Mais c’est pas plus mal comme ça. Les notes du papier me disent d’arriver tôt et de me laisser entrer. Avec un peu de chance, cela me donnera un peu plus de temps pour fouiner aussi.

Je suis sur le point de vérifier ma montre à nouveau, quand je l’aperçois de l’autre côté de la route, et quelque chose dans ma poitrine fait un grand saut. Elle est trop bien habillée pour un endroit comme celui-ci, dans un long manteau bleu poudré à double boutonnage, et sa coiffure est trop bien élaborée avec ses cheveux épinglés sur le haut de sa tête. Mais ses chaussures sont éraflées et elle n’arrête pas de jeter des regards par-dessus son épaule comme si elle était terrifiée que quelqu’un l’observe. Ce qui est le cas. Mais ce n’est pas le problème. Je ne suis pas celle qu’elle redoute. Et je doute fort qu’elle sache encore qui sont ceux qu’elle devrait craindre.

- Joanna ? Je me précipite sur la route et lui bloque le passage. Tu es bien Joanna Castle ? C’est ça ?

Elle s’arrête brusquement, ses yeux s’écarquillent et elle jette un nouveau regard pétrifié autour d’elle.

- Et toi ? Qui es-tu ? Tu es de leur côté ? Tu serais pas envoyée par l’un de ceux qui m’ont envoyée, toi aussi ?

Je tente un :

- Blackwatch ?

Ses yeux se posent sur le morceau de papier que j’ai en main. Aussi vite que possible, je le froisse pour en faire une boule et le remets dans ma poche.

- Non. Je ne suis pas avec eux. Enfin, pas officiellement. Je suis ici pour te faire une offre.

Un sillon se forme entre ses sourcils.

- Je pensais que c’était pour ça que j’étais là ? Je pensais que... c’est la première fois que je fais ça. Ils ont dit que je comprendrai ce qu’il faut faire une fois que je serai sur place.

La culpabilité que je ressens pour avoir volé Oliver est balayée immédiatement. Cette pauvre fille n’a pas la moindre idée de ce qui l’attend. Vraiment pas la moindre. Je pense que Blackwatch l’a ramassée dans un coin de rue louche en lui proposant dix fois son tarif habituel et en lui indiquant qu’elle pourrait garder les jambes fermées à condition qu’elle garde aussi sa bouche fermée. Pas de sexe, mais il faudrait quand même qu’elle se vende. Juste une autre partie de son corps.

J’enchaîne en disant :

- Écoute. Je sais qu’ils ne t’ont pas dit grand-chose, mais tu dois me croire. Là où ils t’envoient, c’est pas un endroit où tu veux aller. C’est pas un travail que tu veux faire, non plus.

Elle me répond en me crachant :

- Ouais ! He ben tu parles ! Comme si j’avais b’soin qu’tu m’dises ça ! Mais j’ai b’soin d’argent. Ses yeux rencontrent les miens. J’ai vraiment b’soin d’argent !

Je peux le dire. Pas seulement à cause de ses chaussures éraflées. En la regardant de plus près, je vois que ses joues sont creuses, que sa peau est terne et que son maquillage ne fait que couvrir les cercles bleu-gris qui cernent ses yeux. Un élan de sympathie me prend par surprise, et je lui tends la main :

- Écoute, je comprends. Je comprends tout à fait. Mais tu dois me faire confiance. Ces... choses. Ce ne sont pas les clients « normaux » que tu connais. Parce que justement, ils ne sont pas... normaux.

Ses lèvres commencent à trembler :

- D’accord, mais… je n’peux rien faire d’autre. J’ai b’soin d’cet argent.

Alors qu’elle se tourne pour partir, je lui prends la main :

- Joanna, écoute. Laisse-moi y aller. On peut partager l’argent. Moitié-moitié. Tu ne veux pas faire ça.

- Pa’ce-que toi, tu le veux ?

Ses sourcils se lèvent d’un air perplexe avec un air dur dans son expression.

- Non, pas particulièrement, mais je suis mieux préparée. Je sais dans quoi je m’engage. Je m’arrête un moment pour laisser le temps à mes mots de faire effet. Écoute, je parie que 50 % de ce que tu obtiens pour ça, c’est toujours l’équivalent d’une demi-semaine de ce que tu gagnes de manière plus « classique ». C’est bien ça ? Et comme ça, tu ne risques rien.

Un sillon profond se creuse entre ses sourcils toujours levés.

- Et toi, qu’est-ce que t’y gagnes ? me demande-t-elle. Si ce type est aussi mauvais que tu l’dis, pourquoi risquer d’y aller ?

C’est une bonne question à laquelle je ne peux pas donner de réponse honnête. Mais j’essaie de rester aussi près que possible de la vérité.

Alors je dis :

- Pour tourner la page.

Elle secoue immédiatement la tête :

- Hors de question ! Ces gars - Blackwatch, c’est ça ? - Ils savent que je suis ici. Ils m’ont envoyée ici. Si tu vas là-bas et que tu remues quelque chose... si tu, tu sais...

- Oh mon Dieu, non. Je lève les mains en réalisant à quel plan elle est en train de penser. Je ne vais pas lui faire de mal. Je ne pense même pas que je pourrais. J’ai juste besoin de lui parler, c’est tout. Je te le promets. Rien de mal n’arrivera si tu me laisses y aller. J’ai juste besoin de lui parler.

Et puis, comme si elle comprenait à un certain niveau - même si c’est improbable - elle acquiesce.

- Soixante-quarante ?

J’essaie d’avoir l’air énervé. Il se trouve que j’ai moi-même besoin d’une injection de liquidités, mais je ne monterais pas là-haut pour rien. Et en plus, je sais très bien combien ils la payent.

- Très bien, dis-je en lui offrant une main à serrer qu’elle accepte à contrecœur.

Un flot de soulagement m’envahit. Trouver un document imprimé dans le bureau d’Oliver m’avait pris des semaines à fouiner, à l’envoyer chercher des pizzas et à lui suggérer les films les plus ennuyeux possibles à regarder, dans l’espoir qu’il s’endorme afin que je puisse me glisser dans sa chambre pour y fouiller. Si ça n’avait pas marché, je serais retournée rôder dans les stations de métro et les bars louches.

- Il m’a envoyé un message tout à l’heure, dit Joanna en sortant son téléphone de son manteau bleu layette. C’est le client. Il y a un code pour la porte. Ici.

Elle tourne l’écran vers moi, et je lis le message en enfermant le numéro à quatre chiffres dans ma mémoire. 1891. Si je devais hasarder une supposition, je dirais que c’est une date de naissance. La sienne probablement. Même les morts sont prévisibles.

- Et ça, c’est moi, dis-je, en tapant mon numéro dans son téléphone. Appelle-moi maintenant pour que j’aie aussi ton numéro. Ensuite, quand j’aurai fini, je t’appellerai pour te donner ta part.

Un bref moment d’hésitation se dessine sur son visage :

- Juste pour être claire : tu n’vas pas... tu sais... faire quelque chose qui me causerait des problèmes, n’est-ce pas ? Tu me le promets ?

Puis c’est le silence pendant une fraction de seconde. Un silence qui nous engloutit tellement que je peux presque entendre son cœur battre. Tout comme le mien. Une centaine d’images défilent dans ma tête. Des souvenirs de ces dix dernières années que j’ai passées à essayer de refouler. Des souvenirs qui font que ma poitrine est brûlante de douleur et que mon pouls est tellement fort qu’il pourrait me casser une côte. Pourtant, quand je regarde cette fille, mon expression reste impassible. Après tout, dans une ville de dix mille vampires, quelle est la probabilité que ce soit celui que je veuille tuer ?

Alors, je lui offre mon plus beau sourire :

- Non. Bien sûr que non. Tout ce que je veux, c’est discuter.

2

Ma bonne humeur s’atténue lorsque j’entre dans le bâtiment, portant le manteau de laine bleu. Cette chose me démange comme tout. Je ne plaisante pas. Ce n’est pas étonnant que les femmes riches aient toujours l’air si malheureux, si leur garde-robe les fait se sentir comme ça. Elles devraient plutôt investir dans du polyester doux et soyeux. Pourtant, c’était une bonne décision de la part de Joanna. J’étais seulement à deux mètres de l’entrée, quand elle m’avait rappelé.

- Attends, m’avait-elle dit en s’approchant de moi et en retirant son manteau. L’homme qui... qui m’a trouvée. Celui de Blackwatch. Il a dit que je devais bien m’habiller pour ça. Tu sais... elle m’avait regardé de haut en bas. Classe.

Je suis sûre qu’une personne moins douée aurait réagi à l’insulte flagrante de son commentaire et de son regard. Pour être honnête, je n’avais pas vraiment pensé au caractère approprié ou non de ma tenue vestimentaire lorsque je m’étais habillée ce matin. Ou n’importe quel matin de ces dix dernières années, d’ailleurs. Un jean, un vieux T-shirt et des baskets en été. Un jean, un pull et des bottes en hiver. Avec une telle garde-robe, on ne peut pas se tromper. On est paré à tout : travail, conférences, situations sociales. Bon, on oublie la partie sur les situations sociales. Je n’étais pas vraiment très « sociale » avant que tout cela n’arrive. Mais maintenant, on dirait que je suis à la limite d’être une recluse. Si je n’avais pas à faire des choses comme assister à des conférences et gagner de l’argent (un autre petit problème que j’ai choisi de mettre en veilleuse), je doute que je sortirais de chez moi. Quoi qu’il en soit, je pense vraiment ce que je disais tout à l’heure : c’était une bonne décision de la part de cette fille. Blackwatch n’aurait jamais pu me laisser aller chez un client habillée comme je l’étais ; l’idée du manteau était donc très bonne. Même s’il n’allait probablement ne pas rester en place très longtemps, une fois que je serai à l’intérieur.

Même de l’extérieur, on peut voir que le bâtiment dégouline d’argent. C’est l’un de ces endroits avec de grandes fenêtres à guillotine et une énorme voûte en pierre placée sur le porche. À l’intérieur et au-delà des escaliers du hall, il y a un ascenseur avec une grille en fer. Je suis sérieuse ! Un vrai ascenseur. J’entre, je fais glisser la porte métallique et je prends une seconde pour calmer ma respiration. D’après les instructions du papier d’Oliver, cette chose vit au troisième étage, j’appuie donc sur le « 3 ». Pendant les trente secondes qui suivent, les étages glissent lentement de l’autre côté de la grille. Avec une secousse soudaine, la cabine s’arrête et je me retrouve très vite sur le palier, fixant une grande porte en bois solitaire. Un peu comme moi.

Comme Joanna me l’avait dit, un clavier est placé près de la porte d’entrée et il ne me faut qu’un instant pour taper le numéro. Je suis pressée de fouiner dans l’appartement le plus possible avant qu’il n’arrive, mais quand le feu devient vert et que la porte s’ouvre, je perds une minute en restant debout, bouche bée.

- Mon Dieu !

Vu le style classique et typique de l’extérieur du bâtiment, je m’attendais à la même chose en ce qui concerne l’intérieur, mais cet endroit pourrait sortir d’un film de James Bond. Même si je déteste l’admettre, je suppose que mes stéréotypes sur les vampires sont assez ancrés et je réalise en entrant que je m’attendais à quelque chose de bien plus gothique. Des rideaux en velours, peut-être. Peut-être quelques chandeliers et des lustres, ou bien des tableaux représentant des portraits d’hommes cravatés à l’air sérieux, qui regardent fixement depuis leur point de vue sur le mur. Je sais que ça fait très cliché, mais quand on boit le sang des gens pour survivre, on perd le droit d’être offensé.

Même s’il ne s’agit pas d’une crypte souterraine, cet endroit n’est pas vraiment accueillant. Je suppose qu’on pourrait appeler ça un studio, dans le sens où c’est un espace ouvert, mais il est facilement deux fois plus grand que tous les appartements dans lesquels j’ai vécu. Mon regard est attiré par la cuisine, et je suis prête à parier qu’elle n’a jamais été utilisée. Les plans de travail sont en marbre noir luisant, ce qui contraste fortement avec les placards blanc brillant. Seul le plancher en bois, verni couleur miel, offre un peu de chaleur. La curiosité prend le dessus et je me dirige vers le réfrigérateur pour l’ouvrir. À ma grande déception, je constate qu’il ne contient que quelques bouteilles d’eau gazeuse.

- Intéressant, dis-je en mettant ce petit détail de côté.

Peut-être qu’il y a quelque chose de significatif à ce sujet. Peut-être que l’eau gazeuse offre une sorte de répulsif naturel à l’eau bénite. Non pas que ça marche vraiment, d’après mon père. Mon père. La raison pour laquelle je suis ici. La seule raison pour laquelle je sais que ces choses existent. Et la raison pour laquelle je veux me venger.

Le frigo étant refermé, j’ouvre quelques tiroirs. Les couverts sont effroyablement propres et obsessionnellement droits, comme s’ils n’avaient jamais été utilisés. Ce qui est probablement le cas. Pourtant, je fais attention à ne rien déranger. Il ne me faut pas longtemps pour me lasser de regarder dans les placards de cet appartement témoin, alors à la place, je me dirige vers le lit. Si je ne suis pas une spécialiste au niveau du textile, je peux dire que l’étoffe du tissu n’est pas donnée. Loin de là. Bleu foncé. Super douce. Passant ma main dessus, je laisse un énorme pli sur ce qui était auparavant un lit parfaitement fait.

- Et merde !

J’essaie de le lisser à nouveau, mais ça ne fait qu’empirer les choses. Je sais que ça a l’air nul, mais je suis une vraie quiche pour faire les lits. Je pourrais dire que c’est dû au fait que j’ai perdu ma mère quand j’étais jeune, mais mon père était très doué pour ça. Alors peut-être que c’est de sa faute. Peut-être que je n’ai jamais pris la peine d’apprendre correctement, parce qu’il s’en tirait vraiment très bien à ce niveau-là. C’était aussi le cas en termes de cuisine. Et qu’est-ce qu’elle me manque, sa cuisine ! Tout comme tout le reste, d’ailleurs. Même ses blagues de merde. Et il en aurait apprises, des choses au sujet de ce monstre, juste en entrant ici. Bon sang, il aurait même pu tout apprendre sur lui. Mais Papa n’est pas là. C’est pourquoi moi, je le suis. Et c’est pourquoi je dois faire tout ce que je peux pour leur faire payer ce qu’ils lui ont fait. Je sens que la chaleur commence à me piquer les yeux. J’essaie de chasser les souvenirs et de me distraire en farfouillant dans l’armoire. La sélection de vêtements à l’intérieur est, comme prévu, monochrome.

- Je vois que tu as fait comme chez toi ? En me retournant, je me force à étouffer un souffle. Eh bien, je te conseille d’arrêter dès maint’nant.

3

C’est le choc qui me donne envie de crier. Comme je l’aurais fait si quelqu’un m’avait sauté dessus, dans ce que je pensais être un appartement entièrement vide. Du coup, mon instinct me pousse à poser la main sur ma poche arrière afin d’y prendre le pieu effilé qui s’y trouve, mais une fois que je parviens à me calmer, ce que je pense avoir fait assez vite, je réalise qu’il y a une bonne et une mauvaise nouvelle. La bonne nouvelle, c’est qu’il ne me saute pas tout de suite à la gorge. La mauvaise nouvelle, c’est que ce n’est pas lui que je cherche.

Je suppose qu’au fond de moi, je savais que ça serait le cas. Pourtant, j’avais espéré que les choses se dérouleraient aussi facilement. Tout comme j’avais espéré, avec tous les jobs dans des bars miteux que j’avais acceptés, qu’un jour il tomberait dans l’un d’eux. Ou toutes les nuits où j’ai parcouru les stations de métro les unes après les autres, cherchant dans les ombres que la plupart des gens évitent. C’est pourquoi je suis venue ici. Pour obtenir des informations. Et maintenant, que je le veuille ou non, je vais devoir mener ce plan à bien.

- Joanna, n’est-ce pas ? demande-t-il en enlevant sa veste, les yeux fixés sur moi.

J’acquiesce, en resserrant mon manteau autour de moi. Son regard reste sur moi une seconde de plus et je suis convaincue qu’il sait que je mens, mais il se retourne et accroche sa veste à un crochet près de la porte.

- Blackwatch a dit que tu es nouvelle dans ce milieu. C’est vrai ?

Je hoche encore la tête. Je ne suis toujours pas sûre de la manière dont j’allais procéder ici. Le menacer ne me mènera nulle part. La séduction pourrait être une option mais, là encore, peut-être que celui-ci n’aime pas jouer avec sa nourriture. J’opte pour la terrifiante désinvolture. C’est ce que Joanna aurait fait, je pense. En plus, c’est, à ce moment précis, cent pour cent vrai.

- Je vais avoir besoin de me rafraîchir.

Sans sa veste, il commence à déboutonner sa chemise et se dirige vers une porte que je suppose être celle de la salle de bain. Quand sa main touche la poignée, il se retourne vers moi :

- Et si tu pouvais laisser le lit tranquille et t’asseoir sur le canapé, j’apprécierais grandement.

Une seconde plus tard, il est déjà parti. Connard. Du moins, c’est ce que je me dis en faisant attention à ne pas murmurer des choses dans ma bouche, étant donné qu’ils ont l’ouïe fine. Quand même, qui parle comme ça ? « J’apprécierais grandement ».

Et lui, il sait ce que j’apprécierais grandement ? Que chaque personne de son espèce soit éradiquée de la planète. Et, puisque les chances que cela arrive sont minces, je vais me contenter de tuer celui qui a totalement ruiné ma vie.

Quand il sort de la salle de bains, sa chemise est remplacée par un T-shirt noir moulant. Peut-être que mes yeux s’attardent un instant sur ses abdos mais, il est vrai qu’il ne doit pas être difficile de maintenir une telle silhouette quand on ne boit que du sang. Sans livraison de pizza tard le soir. Sans kebab tentant sur le chemin du retour après une longue journée de travail. Et je sais - du moins, d’après Papa et Oliver - que ces types dorment. Mais je doute fort qu’ils dorment comme nous. Je veux dire, au diable les huit heures de sommeil, je suis une fille qui dira oui à quatorze heures si on me les laissait ! Même, si entre mes études et mes tentatives pour gagner un peu d’argent, je n’ai pas vu l’intérieur d’une salle de sport depuis une éternité, ce n’est pas un problème pour ce type. Il a l’éternité. Littéralement. Alors oui, il se peut que je fixe ses abdos par inadvertance, mais c’est uniquement parce que ça me fait le détester encore plus.

- Je peux t’offrir quelque chose à boire ? demande-t-il en s’essuyant la main sur son pantalon. J’ai vu que tu avais déjà évalué le contenu de mon frigo, tu es donc consciente que la variété des boissons est limitée. Je peux toujours commander quelque chose, si tu le souhaites. Ou bien de la nourriture, si tu as faim.

- Et moi qui pensais que c’était pour ça que j’étais là, lui dis-je.

Ses yeux clignent. Ce n’était qu’une tentative d’humour et, de toute évidence, il ne s’est pas montré à la hauteur.

- Ils ne t’ont pas dit pourquoi on a besoin de toi ?

- Je... eh bien...

Je peux sentir une boule dans ma gorge, alors que je cherche comment m’en sortir. Ça ne devrait pas être si difficile, j’essaie de m’en rappeler. J’ai menti à mes amis pendant des années. Et j’étudie l’anglais. Les mots, c’est censé être mon univers. Seulement, à ce moment précis, ce n’est pas du tout le cas. Rejetant mes cheveux en arrière, comme si j’étais dans une putain de télénovela, je poursuis :

- J’ai entendu des ragots.

- Quel genre de ragots ?

- Rhôôô, tu sais bien. Des filles comme moi. On leur propose beaucoup d’argent pour que des hommes comme toi leur fassent des choses.

Ses yeux se rétrécissent. Je suis presque sûre à cent pour cent que les vampires n’ont aucune capacité psychique, mais je ne peux m’empêcher de penser que je suis dans la merde. Je m’attends à ce qu’il me mette à la porte ou, pire encore, qu’il appelle Blackwatch pour dire qu’il veut changer d’interlocutrice, mais c’est alors qu’il se perche sur l’un des grands tabourets de bar.

- Eh bien, comme j’ai l’impression que les subtilités sont clairement superflues, dans ce cas, je pense que nous devrions simplement nous atteler à la tâche à accomplir.

Il fait un geste vers le tabouret à côté de lui. Putain. C’est le seul mot qui me vient à l’esprit. Le but était que je voulais qu’il parle. J’ai besoin qu’il me parle d’eux. J’aurais dû faire semblant d’être ignorante et lui demander de m’expliquer autant que possible. Combien ils sont. Où ils traînent. Qui sont les plus importants. J’aurais dû faire durer ça aussi longtemps que possible, mais maintenant je vais vraiment devoir le faire : laisser ce monstre se nourrir de moi. Je sens l’air frémir dans mes poumons. S’il doit me dire quelque chose qui pourrait m’aider à trouver le vampire que je recherche, j’ai besoin qu’il me fasse confiance. Et si perdre quelques onces d’hémoglobine est ce qu’il faut que je subisse, alors je suppose que je vais le laisser faire.

Je ne fais aucune tentative pour me calmer alors que je traverse la pièce pour m’asseoir à côté de lui. Il peut déjà entendre que je suis terrifiée. Il doit aussi le sentir de manière olfactive. Tant mieux. Je me fiche de la trêve de merde entre Blackwatch et les vampires. Ils ont peut-être réussi à rester cachés pendant un bon moment et à duper Oliver et Jessop - et tous les autres. Mais pas moi. J’ai vu ce qu’ils peuvent faire. Aux premières loges. On n’oublie pas une chose pareille. Jamais.

Comme si j’étais sur le point de vomir, je prends place sur le tabouret à côté de lui. Ma peau s’hérisse. Tous les poils de ma nuque se dressent. Chaque cellule qui vit en moi est repoussée par son absence de vie. Déglutissant, je fais passer mes cheveux par-dessus mon épaule et j’incline la tête, lui exposant ma gorge. J’attends comme ça, me demandant si je vais d’abord vomir ou m’évanouir, quand il se racle la gorge.

Il me dit :

- En fait, je préfère le poignet.

- Oh, ok.

En me déplaçant sur mon siège, je fais glisser le manteau bleu. Je peux me tromper, mais je jure que j’ai vu un semblant de sourire sur ses lèvres alors que je révèle mon haut de gilet moins chic.

Maintenant certaine que le vomissement va l’emporter, je lui tends le bras. C’est mieux que le cou ? Je me le demande. Je connais des aliments comme ça. Mon père m’en a dit assez pour le savoir. Donc, si celui-là veut se nourrir à cet endroit, qu’il le fasse. Je le laisserais même me prélever du sang sur ma rotule si ça me permettait de me rapprocher de ce que je veux savoir. Tenant l’arrière de mon poignet d’une main, il trace une ligne de la moitié de mon avant-bras à l’endroit où mes veines commencent à être bleu-vert sous la peau avec l’autre. Je me prépare à une morsure quand, au lieu de cela, il fait un geste de la main et un long ongle en forme de poignard sort de son index, à quelques millimètres seulement de mon poignet.

- C’est quoi c’bordel ?

J’arrache ma main et la porte à ma poitrine. Un regard confus, presque craintif, jaillit dans ses yeux.

- Je suis désolé, j’aurais dû t’expliquer. Vu ton assurance, je pensais que tu savais ce que j’étais. Ce pour quoi tu es ici.

- Tu es un vampire, je le sais. Mais avec des crocs. Je m’y attendais, à des crocs ! Pas un truc bizarre avec des doigts en forme de poignard !