Sous un ciel égyptien - Tome 3 - Armelle Hanotte - E-Book

Sous un ciel égyptien - Tome 3 E-Book

Armelle Hanotte

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Beschreibung

Célèbre pour ses talents d'enquêteur, il ne parvient pourtant pas à résoudre le mystère qu'elle représente.

Alors que Noë se tâtait de se rendre à la soirée entre passionnés d'Égypte, il y fait la connaissance de Neferti, une femme aussi envoûtante que troublante. Leur intense rencontre prend aussitôt fin lorsque Noë doit reprendre l'avion tôt le lendemain. Trois ans plus tard, il est envoyé au Caire pour enquêter sur un vol au musée. Noë, en tant que grand scientifique, ne croit pas au hasard ni aux divinités. Pourtant, le destin semble avoir remis sur son chemin cette femme qui le hante depuis trois ans. Au musée du Caire, Neferti est chargée de la même enquête que lui. Les choses ne sont pas pour autant plus simples pour Noë. Alors qu'il aimerait saisir cette chance pour lui déclarer ce qu'il ressent pour elle, l'enquête du vol n'avance pas et ses cauchemars d'enfance reprennent. Et si le vol de la statuette, ses rêves et Neferti étaient liés ? 

Armelle Hanotte clôture sa saga égyptienne d'une main de maitre, en conservant les points forts qui participent à son succès : une passion dévorante, une intrigue mystérieuse, mêlant les dieux et l'amour, et un cadre magique qui vous emportera au pays des pyramides.

CE QUE PENSE LA CRITIQUE DU TOME 1

"Ce roman est une pure merveille." - MjeyW sur Babelio

"Quelle belle découverte, l'auteure nous plonge dans cet univers mystique à l'aide de sa plume addictive, la lecture est fluide et fort agréable." koala_bouquine sur Instagram

" Je suis totalement conquise par ce livre, c'est un coup de coeur qui plairait à beaucoup de lecteurs." murmureslitteraires sur Babelio

"J’ai appris énormément de chose sur l’Egypte, et j’ai adoré les citations." audrey_bouquine sur Instagram

À PROPOS DE L'AUTEURE

Armelle Hanotte est une jeune auteure belge. Pour elle, tout a commencé dans une bibliothèque à l’âge de 13 ans. Elle y a découvert son amour de la lecture, mais aussi et surtout son besoin d’écrire, qui ne la quitte plus. Après Calypso et The Beast, elle revient chez So Romance avec sa trilogie Sous un ciel égyptien.

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Partie 1 : À la recherche d’aventure

« Tu as la vie, ton ka existe, tes membres sont intacts ; éveille-toi à ton corps ! Tu ne seras pas refoulé par les briseurs qui sont dans l’au-delà. La pensée appartient de nouveau à ton âme, afin qu’elle se souvienne de ton corps et qu’elle rende heureux l’œuf qui t’a créé. »

Textes des Sarcophages

Trois ans plus tôt

Noë

La soirée a commencé. La décoration me couple le souffle. Des statues égyptiennes de plusieurs mètres de haut ont été sculptées pour l’événement. Elles sont posées à l’entrée où des femmes nous accueillent. Vêtues d’une robe égyptienne aux tissus fins, elles rentrent parfaitement dans le thème. Des rideaux roses ont été posés aux fenêtres, et de multiples buffets placés aux quatre coins de la pièce. Les organisateurs ont pensé aux moindres détails : des glaçons en forme de pyramide jusqu’aux amulettes autour de leur cou. Ce qui m’étonne le plus reste cette magnifique vue des balcons, affichant le site de Gizeh. Une musique orientale envahit les lieux. Les tables et les chaises ressemblent à celles de Toutankhamon. Des pattes de lion remplacent le bas, Isis est positionnée aux accoudoirs, développant ses longues ailes, et le dos est rempli d’hiéroglyphes. Toutes ces couleurs rayonnent de mille feux sous l’éclairage de la pièce. Je n’ai pas pensé que les organisateurs se donneraient autant de mal pour nous recevoir.

En tant qu’enquêteur reconnu dans ce domaine, ils m’ont invité à cette grande occasion. L’État égyptien souhaite remercier tous les travailleurs du monde pour les avoir aidés lors des découvertes de temples. Pour ma part, j’ai arrêté des pilleurs et résolu maintes affaires. Ma présence ne passe pas inaperçue à travers la foule. Cette salle est bondée de personnes qui me sont inconnues, et pourtant, elles me reconnaissent.

Cette popularité me gêne. C’est la passion qui m’a poussé à travailler de la sorte. Aucun Dieu, aucun pharaon n’a de secrets pour moi. J’ai eu la chance de visiter chacune des tombes et plusieurs endroits sacrés.

Habillé tel un aventurier, je me distingue du lot. La plupart de mes amis me comparent à Indiana Jones depuis mes succès.

— Bienvenu, Monsieur, un verre ? me propose un serveur.

Je saisis la première coupe et le remercie. Il fait une chaleur torride par ici, je ne tiendrai pas longtemps si je ne m’abreuve pas.

J’ai horreur de ces soirées, mais Adam m’a convaincu de m’y rendre. C’est mon meilleur ami et c’est grâce à lui que j’en suis arrivé là. S’il ne m’avait pas soutenu dans mes démarches, jamais Noë Desert n’aurait traversé l’Égypte entière pour résoudre ses énigmes.

Tout à coup, je me sens serré dans ma chemise. J’ouvre les boutons sur le haut, dévoilant ainsi une partie de ma poitrine. J’espère que le directeur de cet événement ne sera pas déçu. Il s’avère que je suis loin d’être le gentleman parfait.

Mes pas me guident vers le centre de la pièce où plusieurs groupes se sont formés. Tous les hommes sont en costard-cravate alors que j’ai gardé mes chaussures de chantier et porte une chemise froissée. Je balaie la scène du regard. Un faucon orne le centre de la pièce, arborant un disque solaire sur sa tête. Son pigment doré m’éblouit. Sa prestance en surprend plus d’un. Cela me rassure. Adam a eu raison : cette soirée va peut-être être mémorable.

Les musiciens sur la gauche jouent de la flûte et des harpes, les instruments de l’Égypte ancienne. Leurs tuniques blanches me rappellent l’époque. Je me laisse surprendre par la beauté des lieux avant d’apercevoir au loin Romane et Ousir, le couple reconnu pour sa connexion avec les Dieux. Leurs yeux scintillent lorsqu’ils se regardent et des sourires se dessinent sur leurs lèvres. Il vaut mieux éviter de les coller, je n’apprécie pas avoir l’attention sur ma personne. Et puis, je n’ai jamais été attiré par les écrits de Romane ni son délire avec Horus. Sans vous mentir, je ne comprends pas pourquoi les invités les encerclent. Il doit bien y avoir d’autres personnes remarquables dans cette pièce, non ? En vain, mon esprit analyse la situation. Ils sont tous là, collés contre leur amour. Aucune de mes connaissances n’est présente ce soir. La déception m’envahit. L’ennui ne devrait plus tarder à pointer le bout de son nez. Mon atelier me manque déjà, avec ses enquêtes et ses mystères. J’espère qu’on m’appellera bientôt pour une nouvelle aventure.

Avec qui puis-je bien discuter ? Mon tempérament réservé m’amène vers le buffet auprès des balcons. Il faut croire que je vais passer ma soirée ici, en face de l’alcool et des mets salés. Des verrines y sont proposées, pleines de saumon et de kiwis enveloppés dans de la crème fraîche. Ma bouche en salive déjà. Des toasts en forme de scarabée règnent sur le présentoir. Mon ventre gargouille, son bruit se mêlant à la mélodie. Je suis en train de dévorer la nourriture quand une femme apparaît sur ma droite. Elle semble avoir eu la même idée que moi puisqu’elle plonge sur les verrines.

Mes lèvres trahissent un sourire amusé. J’avale avec rapidité ma bouchée. Même les plats sont délicieux. C’est une soirée de luxe dont peu peuvent s’offrir le confort. Alors, la musique change de ton. Les musiciens s’amusent puis nous présentent différents sons qui égayent le public. Toutes ces choses ne sont pas pour moi. Je ne danse pas et l’hypocrisie des invités a tendance à m’irriter. Combien d’eux souhaitent se rapprocher de Romane pour la célébrité ? Ou d’Ousir pour ses connaissances ? Ce sont des foutaises. Cet événement a un but bien précis : réunir les personnalités afin de former de nouveaux groupes et de tisser des liens. Dommage que je ne fasse pas partie de leur bande. Ma tenue les a peut-être effrayés. Après tout, qui se collerait à un aventurier raffolant du danger et des secrets ?

— C’est délicieux, proclame l’inconnue la bouche pleine.

Son charme naturel me surprend. Sa chevelure ébène est mêlée à des fils dorés qu’elle a attachés. Son teint mat et sa petite taille se distinguent parmi la plupart des personnes blanches. Elle est égyptienne. À coup sûr, j’ai raison. Son regard est sombre et son corps enveloppé dans une robe moulante. Les vêtements de l’époque lui vont à ravir, je dirais même que j’entrevois ses tétons se durcir à la première brise fraîche de la nuit. Proche de la fenêtre, le vent pénètre dans la pièce et nous caresse. Ses poils se hérissent. Comme vous le voyez, je suis un fanatique de détails et d’analyses. J’ai des yeux de lynx.

— On peut dire ça. J’ai de quoi passer la soirée au moins.

Lorsqu’elle se tourne vers moi, j’aperçois qu’un collier doté d’une amulette d’Isis embellit son cou. Ses ailes sont serties de lapis et d’émeraude. L’ambiance rosée de la fête nous sépare des invités. Ils sont tous au centre, à danser et à rire de joie. Je n’en saisis pas trop l’utilité, mais la vie m’a finalement apporté un petit joyau. Peut-être ne finirais-je pas la soirée seul ?

— Alors, c’est vous, Noë ?

Sa voix aigüe me parvient aux oreilles. Son regard me scrute de la tête aux pieds. Oui, je ne suis pas vraiment dans le thème. Mon corps est la tache noire sur ces tissus blancs. Où ont-ils acheté ces tuniques brodées de fils colorés ? Ils se ressemblent tous, cependant, cette inconnue se distingue des autres. Ses bijoux dorés mettent en valeur ses origines.

— Pour vous servir, et vous ?

Nous faisons connaissance. De toute façon, nous n’avons rien de mieux à faire. Elle ne semble pas apprécier non plus la piste de danse ni le coin des musiciens. Une question vient semer le trouble dans mon esprit. Est-ce qu’elle est seule ? Aucune alliance au doigt, aucune trace d’amant. La voie est libre pour ce soir.

— Neferti.

J’écarquille les yeux. Sur toutes les femmes de la fête, je tombe sur celle qui est le cliché de l’Égyptienne de l’époque. Elle paraît ignorer son charme et ses mimiques. Son nez se plisse lorsqu’elle ricane. Réfléchis, Noë, que vas-tu lui répondre ? Sa manière de m’observer me perturbe. Que cherche-t-elle en moi ? Peut-être ne suis-je pas l’homme que Neferti imaginait. Et ce prénom… Il sonne vraiment bien.

— Pourquoi êtes-vous à cette soirée ?

Elle s’appuie sur la table puis pose sa main sur la hanche. Une seconde bourrasque vient nous frapper et à cet instant, la fierté me bombe le torse. Avec ma tenue, cette fraîcheur ne m’atteint pas. Peut-être aurais-je dû faire un effort pour mes chaussures ? Mes yeux retracent mon chemin où des grains de sable se sont perdus.

— Je travaille au British Museum pour le culte d’Anubis. Mon travail est, comment dire, moins excitant que le vôtre pour les déplacements mais très passionnant !

Les personnes me voient souvent comme un chasseur de trésors. Ils n’ont pas compris que mon travail consiste en la recherche de suspects dans les vols de musées. Malheureusement, il a suffi d’un succès pour faire de moi l’aventurier de l’année. C’est l’Égypte qui m’a rendu connu et c’est en partie pour cette raison que j’ai accepté leur invitation.

— Je n’en doute pas une seconde. Vous n’avez pas d’amis ou de connaissances avec qui discuter ?

La question la fait rire. Je vois alors des petites fossettes se creuser sur ses joues. C’est mignon. Pourquoi est-elle venue seule ? En général, les femmes aussi belles sont accompagnées ou populaires. Toutes celles que j’ai eu la chance de rencontrer étaient encerclées de leurs amies.

— Non, je suis comme vous, un scarabée solitaire.

Cette fois-ci, c’est à mon tour de plaisanter. Un rire m’échappe et elle me suit très vite. Sa compagnie est agréable. Cela me change des hommes d’affaires qui cherchent à comprendre mon secret, bien que je n’en possède aucun. Tandis que je gratte la naissance de ma barbe, Neferti gigote les bracelets de différentes nuances qu’elle porte sur son poignet.

— Vous allez énerver les Dieux à nous comparer à Rê, dis-je d’un ton ironique.

Elle hausse les épaules et ses yeux brillent. Son cœur bat donc bien pour sa passion. Il a suffi d’aborder le sujet et la voilà charmée. Enfin une femme qui me ressemble un peu plus. Mon rendez-vous sur les terres sacrées aura eu au moins une utilité, la rencontre de cette belle inconnue. Celle-ci m’invite à nous rendre sur le balcon avant de m’expliquer qu’elle vivait ici. Neferti connaît Le Caire comme sa poche, ville de son enfance. Je réalise soudain que cette femme n’est pas intimidée par ma présence. Cette discussion va se montrer très intéressante !

Discussion alléchante

Noë

Nous nous rendons sur le premier balcon vide. Plusieurs couples y sont installés afin d’être à l’abri des regards tandis que nous y venons car nous préférons simplement parler sans devoir crier. La musique a envahi les moindres recoins du lieu. Cette place est le seul endroit où nous nous entendons sans hausser le ton. Le balcon est plus petit que nous le pensions. C’est donc un peu plus serrés qu’on se retrouve sur le bord du bâtiment. Le site de Gizeh est face à nous sous les étoiles scintillantes du ciel. Ce paysage est magnifique et m’impressionne encore. Il y a quelques mois, l’État m’a proposé de visiter le site en guise de remerciements. J’ai accepté sans hésitation et le lieu m’a directement séduit. Auparavant, l’idée d’y mettre les pieds ne m’avait pas traversé l’esprit. Depuis qu’un guide touristique m’a lancé un petit pitch historique, je ne pense qu’à une chose : résoudre une nouvelle énigme de ce pays.

Ces trois pyramides sont les plus célèbres au monde. Plusieurs auteurs s’en sont inspirés pour leurs écrits. Le sphinx à l’avant est d’une beauté indescriptible. J’ai parfois du mal à réaliser qu’il se tient là depuis des millénaires. Ces tombeaux des momies attisent la curiosité de nombreux touristes, et d’après Romane, l’Égypte a encore beaucoup à nous révéler. Cela ne m’étonnerait pas qu’on décèle de nouvelles chambres, des couloirs secrets dans l’enceinte des pyramides. Beaucoup de pilleurs ont tenté l’impossible afin de voler les joyaux, en vain, il faut être fou pour pénétrer à l’intérieur. Dans le passé, il y a eu une barque solaire en l’honneur du pharaon Kheops. Des historiens ont eu la chance de la reconstruire pour le plus grand plaisir des adorateurs de l’Égypte.

— Même si je vis en Angleterre, ce pays reste celui de mon cœur. Mes racines sont ici.

Ses explications m’intriguent. Neferti a vécu une partie de sa vie dans la capitale avant que ses parents ne s’envolent vers le Royaume-Uni. Ce sont des historiens employés par des grands musées. Je suis étonné par son franc-parler et l’ouverture dont elle fait preuve. Souvent, les filles se cachent derrière leur sourire. Elles essayent de dissimuler leur passé avec leur présent et leurs nouveaux exploits. Combien d’entre elles m’ont vu comme un bad boy ? Elles m’appelaient comme ça, mais si elles avaient pris le temps de me connaître, elles auraient su que je reste un homme respectable. C’est dommage que ma tenue les attire, mais pas l’homme derrière son image.

Cette femme, elle, semble différente. Son attitude n’a rien de provocant. Neferti ne flirte pas avec moi, elle discute comme si nous nous connaissions depuis des années. C’est étrange, cependant, ça ne me dérange pas. Cela nous évite des complications. Je rentre alors dans son jeu et peut-être que nous tisserons des liens. À mon âge, on se fait peu d’amis dans le domaine. Dès que vous atteignez la barre des trente ans, les autres prennent leurs jambes à leur cou. Je les ai eus le mois dernier et il y a une nette différence avec mes anciennes fréquentations. Les hommes d’affaires ne sont plus autour de moi. Il n’y a que mes collègues de police et les amis du lycée qui restent présents.

— Depuis que l’État m’a fait visiter plusieurs sites historiques, je ne veux plus quitter ces terres. Cette sensation de sable chaud sur la peau, le soleil et son ambiance mystérieuse…

Elle approuve mes paroles. Les touristes voyagent en Égypte pour se prendre en photo et raconter cette folle aventure à leurs amis quand nous, nous rêvons de découvrir les nouveaux trésors de l’Après-Vie.

Ses cheveux au vent virevoltent en douceur. Ses gestes tendres m’impressionnent. Je n’ai jamais vu une femme aussi gracieuse. Ma main passe dans ma crinière blonde et les mèches retombent sur mon front.

— Vous êtes donc un fan de momies et de tombeaux, n’est-ce pas ? J’ai entendu vos enquêtes et la rapidité avec laquelle vous les concluez. Ces terres n’ont plus aucun secret pour vous si je pense à tout ce que vous avez traversé.

Sa remarque m’interpelle. La seule interview à laquelle j’ai répondu est celle d’un journal belge. J’ai décliné les autres afin d’éviter les reformulations et les mensonges à mon sujet. Le bouche-à-oreille a déclenché le succès et tout s’est vite enchaîné. L’Égypte a pourtant encore bien des choses à m’apprendre et je suis prêt à tout pour les découvrir.

— Si, bien sûr. Il me faudrait encore des années pour examiner le fin fond du pays sans en rater une partie.

Cette destination est une sorte de cocon selon moi. J’y trouve mon réconfort, les pieds nus plongés dans le sable. Le ciel est souvent dégagé de nuages, et les déserts vides de brouhaha. Les temples sont d’une beauté à couper le souffle. L’histoire se ressent sous chacun de nos pas à travers nos visites. Je raffole de ce qu’offre ce pays si riche. Il y a des jours où je n’ai qu’une envie : naviguer sur le Nil ou voyager entre les étagères de la bibliothèque du Caire.

— Vous devriez venir au British Museum. Il y a des informations qui vous seraient peut-être utiles pour vos enquêtes.

Comment faut-il prendre cette invitation ? Les femmes sont un mystère à elles seules et celles-ci ne s’en rendent même pas compte. Les hommes se cassent la tête à comprendre leurs désirs pour les satisfaire. En ce qui concerne mon cas, je n’ai jamais su résoudre leurs secrets, cependant, mon côté aventurier ne lâche rien. Un jour viendra ma princesse, non ? Peut-être sera-t-elle aussi folle d’énigmes que moi !

— J’y penserai, je vous le promets.

Nous restons dans le silence, le regard fixé vers l’horizon. Les pyramides se tiennent sous nos yeux avec fierté. Leurs pointes visent le ciel. Plusieurs théories parlent de la ceinture d’Orion. Néanmoins, je n’ai jamais compris un mot des explications des scientifiques. Je me tiens loin de ce domaine qui ne m’appartient pas. Dans l’obscurité de la nuit, Le Caire continue de vivre. Des voitures klaxonnent et des touristes crient dans la rue. Ils brisent cet instant précieux et agréable. Neferti me paraît calme et apaisée sous ce qu’elle me dévoile.

— Connaissez-vous la légende de l’Atlantide ? Son auteure est dans la pièce d’à côté.

J’hésite entre pouffer de rire ou me retenir. La crainte de froisser cette jolie invitée me prend. Cette légende est pittoresque, c’est le cas de le dire ! Toutefois, j’ai une sainte horreur de ces histoires sans queue ni tête. Si j’ai envie d’en découvrir, il me suffit d’ouvrir les contes de Mille et une nuits, au lieu d’écouter ces sornettes. Depuis que Romane a lancé l’idée, tout le monde cherche à travers ce pays des indices. N’ont-ils pas compris que l’Atlantide n’existe pas ? Et ce n’est pas faute d’avoir essayé. Mon enfant intérieur rêve de déceler la Vérité sur cet endroit mystérieux, cependant, aucune trace n’a subsisté à travers les époques, excepté les textes de Platon. Et puis, l’auteure l’a précisé : la Vérité se cache dans votre cœur. Les naïfs payent trois milles balles ce voyage et d’autres le cherchent la nuit à travers leurs songes.

— Oui, je la connais, mais nul besoin de l’entendre à nouveau.

Nerfeti se tourne vers moi. Le vent se rafraîchit. Je l’observe dans la pénombre. La lumière qui nous éclaire provient de l’intérieur. J’aperçois ses tétons durcir dans cette atmosphère gelée. Mon corps en attrape des frissons. La fraîcheur de la nuit par ici échappe à plus d’un et beaucoup s’y retrouvent médusés, pestant car la conseillère ne les avait pas prévenus. La situation me divertit, cependant, mon visage n’exprime rien.

— Et pourquoi cela, monsieur Desert ? Êtes-vous trop sérieux pour vous laisser prendre au jeu ?

Un sourire se dresse sur mes lèvres. Cette femme me réserve bien des surprises, elle est dépourvue de timidité. Elle croise ses bras sur sa poitrine. Un pas après l’autre, je me rapproche d’elle. Nos bras se frôlent. Je la dépasse de quelques centimètres, et ma carrure paraît énorme à côté de la sienne. Mes muscles sont serrés dans cette chemise trop petite. Maudit soit Adam, je ne le laisserai plus préparer mes valises la prochaine fois ! On n’est jamais mieux servi que par soi-même. Mes mèches folles tombent sur mon visage que j’abaisse.

Alors, nos regards se rencontrent et ma voix entrecoupe le silence :

— Je ne lis pas des histoires d’aventure, vous savez. Je les vis.

Une douce soirée

Noë

Tandis que les minutes défilent et que l’Égypte se refroidit sous les étoiles, la soirée se termine. Les invités partent aux compte-gouttes et la pièce se vide. Les buffets sont vidés, seuls quelques toasts restent intacts sur le présentoir. Romane et Ousir ont été les premiers à quitter la soirée, et quand j’y pense, leur fille n’était pas parmi nous. Cela ne m’étonne pas. Ces personnes ne m’intéressent pas de toute façon, contrairement à la plupart du public ce soir. Tout a tourné autour de ces derniers. J’ai eu de la chance de tomber sur Neferti. Elle m’a diverti et occupé pendant des heures.

Notre discussion a pris un tournant inattendu lorsqu’on a abordé les Dieux de l’Égypte. Cette belle inconnue m’a partagé sa passion pour Anubis et ses mystères. De l’embaumement des momies aux quatre fils d’Horus, elle m’a tout décrit. Notre conversation s’est avéré attrayante lorsque deux autres personnes sont arrivées, croyant le balcon désert, et ont entendu notre échange – saviez-vous qu’à l’époque, nous retirions les plusieurs organes des corps ? Il y avait tout un rituel ! Les yeux de Neferti pétillent dès qu’elle parle de ce sujet. Je vous prie de dire que ces personnes ont pris la poudre d’escampette dès qu’ils nous ont entendus, et évidemment, ils m’ont reconnu. Mon prénom a été cité à plusieurs reprises dans la masse.

Alors que l’événement prend fin, nous nous dirigeons tous deux vers la sortie. Mon regard se pose sur la sculpture d’Horus puis sur les deux à l’extérieur. Elles symbolisent Isis et Osiris. Je ne cherche pas à comprendre ce choix. La fête s’est montrée assez longue, je n’ai plus qu’une envie : me glisser sous la couette. Cependant, la présence de Neferti m’intrigue. Je désirerais savoir ce qui se cache sous ce costume d’Égyptienne.

— Avez-vous prévu de sortir ailleurs, ou puis-je vous raccompagner jusqu’à l’hôtel ?

Ma proposition l’étonne. Son visage exprime sa confusion. Suis-je trop direct ? Ma personnalité est assez spéciale et peu l’apprécient. Je voyage à travers le monde chaque année. Si la vie de famille n’est pas faite pour moi, j’aimerais toutefois rencontrer le grand amour. La solitude se fait ressentir de jour en jour, et mon âge n’aide pas.

— Hm… Non, je suis libre. Qu’avez-vous à l’esprit ?

À l’extérieur, le vent nous frappe. Des frissons fourmillent le long de mon échine. La compagnie de Neferti est un délice. Nul besoin de jouer le rôle d’un homme séduisant ou d’un trentenaire sexy, elle ne paraît pas attirée par cet aspect-là. Neferti s’intéresse à d’autres détails de ma vie, dont mon métier. Cette jeune femme ignore la beauté que Mère Nature lui a offerte.

Son corps se met à trembler, maintenant enveloppé de cet air glacial. Je regrette presque de ne pas avoir une veste.

— Nous pourrions continuer notre conversation, qu’en pensez-vous ?

Ce vouvoiement m’égaye. J’ai l’impression qu’elle est plus sérieuse que mes précédentes rencontres. Les coups de jambes en l’air, c’est fini pour moi. Le besoin de me poser et de fonder mon petit cocon se fait de plus en plus présent.

— Vous savez, je suis quelqu’un de très compliqué.

— Je l’ai remarqué, dis-je sans hésitation.

Aussitôt, je regrette mes mots. Elle me fusille du regard avant de s’adoucir. Le silence fait rage entre nous sur le chemin. Nous prenons le même taxi, et mon portefeuille prend soin de payer le trajet. Ce calme dans notre conversation ne me dérange pas, ce qui ne semble pas l’ennuyer non plus. Lorsque nous arrivons, elle semble plongée dans ses songes. La route n’est pas trop longue, les organisateurs ont tout prévu. Ils nous ont réservé nos billets d’avion et les chambres à l’hôtel. De toute manière, je n’aurais pas mis un centime dans ce voyage. Les soirées ne sont pas ma tasse de thé, et seul Adam le sait.

On parle souvent des femmes piégées par les stigmates de la société, pourtant, il en est de même pour les hommes. Elles attendent de nous de l’attention, une belle carrure, un sourire de rêves, mais quand elles rencontrent cet homme, elles le jugent comme une mauvaise fréquentation ou un briseur de cœur. Ce n’est qu’un bon coup, non ? Les femmes ne sont pas les seules à souffrir de ces préjugés, et malheureusement, elles l’oublient souvent. Je mettrais ma main à couper que Neferti me voit tel un bad boy que l’on retrouve dans les romances érotiques. On me l’a tant de fois répété que ça ne me surprend plus.

Enfin arrivés à l’hôtel, nous descendons du véhicule puis nous allons promener dans le parc à l’arrière. De multiples dattiers s’élancent vers le ciel, un chemin de pierres blanches nous amène vers un centre vert de plantations. Ce jardin ressemble à une petite oasis. Plusieurs fontaines jaillissent du sol et nous saisissent. La nuit va être courte et demain, il faudra se lever tôt. Mon avion décolle à neuf heures du matin.

— Où habitez-vous ? me demande-t-elle d’un air curieux.

L’interrogation se lit sur son visage. Elle rejette sa chevelure derrière ses épaules. Ses formes se discernent mieux sous cet angle. Face à elle et dos au bâtiment, la lumière l’éblouit. J’admire ce spectacle. On pourrait croire en la réincarnation d’Isis. C’est magnifique. Les couleurs de ses bijoux parsèment l’endroit de plusieurs pigments.

— En Belgique, dans le Hainaut. Rien d’impressionnant à côté de Londres.

Elle glousse puis plaisante sur le nom de ma ville – Tournai. Ce n’est pas la mieux réputée, ni la plus magnifique. Son beffroi est cependant très beau, ainsi que sa grand-place et sa cathédrale. Mais, à choisir, je préfère l’Angleterre. Rien ne me retient là-bas. Mon cœur attend mon âme sœur pour s’envoler à l’étranger.

— Ah oui ? Et il n’y a rien à voir là-bas ?

Un rire s’échappe de mes lèvres. Tout le monde connaît Londres et sa rue commerciale, ses musées, son parc et bien d’autres endroits, tandis que Tournai n’inspire rien aux étrangers. L’histoire de la Belgique attire peu les touristes et les curieux. Il n’y a rien d’autre à découvrir sur place.

— Euh… Si, mais vous avez vite fait le tour.

— Si la Belgique vous ennuie tant, j’espère que vous trouverez le temps de me rendre visite au musée !

Nous continuons notre conversation. Des bancs sont à disposition dans le jardin. Nos corps s’y échouent, et mon bras frôle le sien. Elle est différente. Une rencontre ainsi est inoubliable, d’abord sa beauté, son caractère et maintenant sa façon d’insister pour que l’on garde le contact. Nous passons le reste de la nuit assis sur ces bouts de bois, entourés des palmiers. Le froid ne nous empêche pas de continuer notre discussion. Neferti me raconte les coulisses du British Museum et la manière dont ils s’organisent. Je ne prononce aucun mot, préférant sa voix à la mienne. Elle sonne comme une mélodie. Ses petits rires résonnent au fond de mon cœur. Non, l’amour ne se crée pas ainsi en quelques heures, mais c’est un bon commencement.

Néanmoins, je me vois attristé lorsqu’il est temps de nous séparer. Son humour et son attitude vont me manquer lors de prochaines soirées auxquelles je serai invité. Ce ne sera pas pareil. J’y pars toujours des pieds de plomb alors qu’à ses côtés, tout devient plus drôle. Si j’ai survécu à cette fête, c’est grâce à elle. Nos discussions m’ont permis de tenir et de me divertir.

La nuit s’éclaircit, laissant bientôt place au soleil. Le téléphone en main, Neferti me donne son numéro. Après des promesses échangées, nos corps se guident vers nos chambres respectives. Dans la lumière des couloirs, mes yeux observent cette dernière déambuler gracieusement. Cette robe la moule bien plus que je ne l’aurais cru. Le tissu colle ses fesses. Je dévie mon regard dès qu’elle vient me saluer.

— Envoie-moi un message demain, dès que tu es rentré à Tournai.

D’un hochement de tête, j’acquiesce. Elle m’adresse un sourire avant de disparaître dans sa cabine. D’un air ahuri, je reste planté là, derrière sa porte, à croire qu’elle va réapparaître, mais non. Cette soirée a bien une fin et la voici. Mon côté aventurier ne prend pas le dessus. L’Indiana Jones qui sommeille en moi ne se réveille pas. Je repars d’un pas nonchalant, tête baissée, puis réfléchis à cette rencontre.

Nerfeti… Un drôle de prénom, n’est-ce pas ?

De nos jours

Noë

La lumière traverse l’épaisseur des rideaux. Mon réveil sonne et le bruit des voitures m’extirpe de mon sommeil. Je grogne, fatigué par cette nuit pénible. Je me suis endormi à trois heures du matin. La chaleur dans l’appartement est invivable, et ce, même en ouvrant les fenêtres. Cette atmosphère lourde me pèse et me garde éveillé un bon bout de temps.

D’un pas nonchalant, je me dirige vers la cuisine. Mes doigts se faufilent dans ma barbe. Mes yeux sont mi-clos, les paupières lourdes. Cette journée va être longue, je le sens. Lorsque j’ouvre le frigo, la fraîcheur me frappe. Des frissons me parcourent le long de l’échine. Cet air glacial suffit à me réveiller. Et puis, après une bonne tasse de café, mon cerveau sera prêt à raisonner de manière efficace.

Le lait à table avec le sucre, je me fais couler un expresso. L’odeur embaume la pièce et me réchauffe le cœur. Je raffole de ce parfum délicieux et sucré. La tasse pleine, je la pose sur le plan de travail, toujours plongé dans l’obscurité. Les rideaux restent fermés. Les jours se ressemblent et n’en finissent plus. Aucune affaire intéressante ne m’attire. Elles sont toutes d’un ennui à dormir sur une chaise. Pour l’instant, je me contente de me rendre au bureau de police pour prendre les dépositions, mais aujourd’hui, nous sommes dimanche. Il n’y a rien à faire et le ménage n’est pas mon dada.

Des livres traînent partout dans l’appartement, sur les tables, les meubles, au sol. Je prends tout de même le temps de débarrasser le reste de pizza de la veille. Adam m’a tenu compagnie devant le match des Diables. Deux bouteilles de bière vides et hop, le salon est rangé selon moi. Il faudrait penser à laver tous les caleçons sales qui parsèment mon parquet.

Avant de retourner dans la cuisine, j’attrape au passage mon ordinateur portable puis l’allume. L’écran bleu se présente puis impose un mot de passe. En deux temps trois mouvements, mes doigts défilent sur le clavier. Mon meilleur ami m’a parlé hier d’un temple trouvé en Égypte, celui de Seth, découvert par Becke et Shaï, il y a trois ans de cela. Ils ont pris un mois à découvrir l’identité du culte et son utilité. Je vérifie la date ; tout me semble plus clair maintenant. Les organisateurs les avaient invités à la fameuse soirée, mais ils avaient décliné leur proposition, préférant leur tranquillité. Il faut avouer qu’après un bon mois dans le désert, on ne désire qu’une chose : retrouver son confort et son lit douillet. Comment ai-je pu zapper cette découverte ? Adam lui-même n’en revient pas. Il m’est impossible de me souvenir de mon travail à cette époque ; j’ai enchaîné tant d’enquêtes.

L’ordinateur charge l’entièreté de la page avant de l’afficher. Le liquide est déjà un peu refroidi lorsque je porte la tasse à mes lèvres. Le café me réveille et se déverse dans ma bouche. Ce goût est exquis. Les photos de l’article dévoilent plusieurs endroits du temple. Sa couleur sombre m’intrigue ainsi que ses objets. Pourquoi personne ne m’a appelé pour me rendre sur le site ? La déception me saute le visage et me tord l’estomac. Peut-être ne suis-je plus autant apprécié que par le passé ? Cela reste étonnant que je n’ai pas vu cette découverte passer aux informations il y a trois ans. Peut-être étais-je trop distrait par la compagnie de ces dames ou ma mélancolie liée à mon vieillissement. Je ne vois plus le temps s’écouler depuis mes trente ans.

Je lis alors le texte, afin d’attiser ma curiosité et d’en apprendre davantage sur ce temple qui m’est toujours inconnu. L’article date de trois petites années déjà.

« Depuis bientôt deux mois, l’archéologue Becke Batrawi a percé le mystère de ce temple, accompagnée de son collègue, Shaï Salhi. Les différentes ressources et recherches conduites sur cet endroit ont pris naissance au musée du Caire où les trouvailles ont été amenées. Le chantier comptait une quarantaine d’hommes et plusieurs techniciens. Il faut croire que pour la famille Batrawi, l’Égypte n’a plus aucun secret. La fille de Romane a accepté de répondre à nos questions. »