Superglu pour cœur brisé - Julie Grêde - E-Book

Superglu pour cœur brisé E-Book

Julie Grêde

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Beschreibung

À consommer quand on vient de se faire plaquer !

Un chagrin d’amour t’a brisé le cœur, tu aimerais qu’on te foute la paix et que l’on cesse de te dire qu’il serait temps de « passer à autre chose ».
Oui, en gros, tout le monde te bassine avec ça.
Et comme si ça ne suffisait pas, juste la nuit où tu parviens enfin à dormir un peu paisiblement, tu te réveilles en sentant une présence dans ta chambre : une espèce de nana-spectre affublée d’une tablette Apple rose fuchsia à paillettes se tient près de toi et prétend qu’elle va te guérir de ton chagrin d’amour.
Superglu te servira de guide, à travers notre culture populaire, pour réparer ton petit cœur meurtri.

Comme un pansement, découvrez les cœurs brisés de Mélanie Ravenswood, Anne Franck, Ross et Rachel, Gabrielle Russier, Serge Gainsbourg, Willam Wallace, le marquis de Montespan...

EXTRAIT

— Superglu : D’abord, il y a Roméo : un rebelle au chômage puisqu’il n’a pas de cause à défendre. Il glande, écrit de la poésie et tombe amoureux toutes les semaines. Un indécrottable romantique en rébellion, mais contre rien. James Dean, Jim Morrison, Byron… Kurt Cobain avec un joli teint, tu vois ? Un anti-héros universel qui fait tourner les têtes des donzelles. Un ado avec des « méga » problèmes d’ado, qui va sur la plage à l’aube pour écrire son journal dans son petit carnet miteux. Ah oui ! C’est important : Roméo est un Montaigu.
Et puis, il y a l’autre famille de l’histoire : les Capulet. Super riches, super vulgos. Le chic pour eux, c’est annoncer leurs fiestas dans le journal. On devine que leur fortune n’est pas tip top légale. D’ailleurs, le monde représenté semble régi par une puissante guerre des gangs. La loi des armes règne. Juliette est de cette famille, mais y vit isolée, façon tour d’ivoire : sorties quasi interdites. Elle n’a jamais rien vu ni fait : le premier mec avec un peu de tchatche qui va passer, elle va y aller, c’est clair. Roméo sera une promesse de fête foraine, un chevalier à l’épée libératrice.

CE QU'EN PENSE LA CRITIQUE

Un guide/témoignage anti-coeur brisé à offrir à vos amies qui souffrent d’une peine de cœur ou à vous mêmes. A lire aussi pour replonger dans des histoires d’amour populaires, réelles ou cinématographiques. Un moment sympa, feelgood en perspective. - Blog Bettie Rose Books

À PROPOS DE L'AUTEUR

Julie Grêde a 33 ans, est philologue de formation et déjà l’auteur de deux livres aux éditions La Boîte à Pandore. Une critique a décrit le premier de ces livres comme étant un « concentré de bonne humeur » et l’auteur comme ayant « un léger grain de folie ». Julie Grêde est passionnée par l’Histoire et ses histoires, mais aussi de littérature, de musique, de cinéma et de culture populaire, comme saura vous le prouver ce livre.

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© La Boîte à Pandore

Bruxelles — Paris

http ://www.laboiteapandore.fr

La Boîte à Pandore est sur Facebook. Venez dialoguer avec nos auteurs, visionner leurs vidéos et partager vos impressions de lecture.

ISBN : 978-2-39009-162-2 — EAN : 9782390091622

Toute reproduction ou adaptation d’un extrait quelconque de ce livre par quelque procédé que ce soit, et notamment par photocopie ou microfilm, est interdite sans autorisation écrite de l’éditeur.

Julie grêde

Superglu pour cœur brisé

Pour Monna, pour « Tit » (qui ne se reconnaîtra pas, enfin, j’espère) et pour Alexis Loret (googelisable, lui). En souvenir de très heureux délires adolescents.

Pour F. (qui peut se lire F comme Fabrice Lucchini, aussi), mais ça, lui seul le comprendra. Où qu’il soit.

Pré en bulle

Tu es là dans ton lit, tu dors tranquillou, quand soudain tu sens à côté de toi une présence. Une présence qui n’y était pas – tu en es sûre ! – juste avant. Pourtant, il n’y a personne dans ton lit – aucun boyfriend ici, non Madame, pas de ça chez nous ! Tu as beau trifouiller ton cerveau, personne n’aurait d’excuse pour être dans ta chambre en plein milieu de la nuit. Du coup, tu prends ton courage à deux mains et ouvres les yeux : on ne sait jamais… Et si c’était le Prince charmant promis par les contes de fées de ton enfance ? Raté ! Tu devrais le savoir depuis le temps, les Princes, c’est seulement au rayon « biscuits ». Pas de bellâtre, c’est une nana qui est plantée juste à côté de toi, ou plutôt sa projection… Un putain d’hologramme de nana : une sorte de fantôme à travers lequel tu aperçois ta commode.

À vrai dire, le plus bizarre, ce n’est ni la nana ni son état gazeux. Ce qui attire ton regard, c’est la tablette Apple fuchsia et pailletée qu’elle tient dans la main. Tout ça n’a pas de sens, tu décides que tes yeux te jouent un tour – tu dois être en train de rêver –, tu laisses tomber et te retournes pour te rendormir. Merde ! T’es pas d’humeur à te laisser hanter.

— La nana gazeuse : Hum hum.

Là, pas le choix, t’es bien obligée de rouvrir les yeux, y’a quelqu’un, plus de doute là-dessus, et ce quelqu’un vient de faire « Hum hum ».

— Toi : …

— La nanagazeuse (plaisantant) : Tu te demandes qui je suis ? Ça se voit, non ? Je suis un spectre, venu te tourmenteeeeeer !

— Toi : Hein ? C’est quoi ce délire ? Qu’est-ce que tu fous dans ma chambre ?

— La nana gazeuse : Je suis là pour ton bonheur ! Lève-toi et marche avec moi ! (Devant ton air ahuri) Ok, je vais t’expliquer, mais il serait plus poli de me proposer de m’assoir.

— Toi (éberluée et vexée d’être prise en défaut comme une enfant) : Ça va, pardon. Je n’ai pas de chaise, mais assieds-toi sur le bord du lit. Comme tu vois, il est grand et je suis seule dedans.

— La nana gazeuse (l’air surexcité) : Je fais partie d’un groupe, type caritatif avec des volontaires, qui s’occupe des cas comme toi. Je suis responsable des cœurs brisés non recollés. Tu peux m’appeler Superglu… Superglu pour cœurs brisés. (Rires) Tu es mon premier cas en tant que titulaire. C’est un grand jour !

— Toi : Pa… pardon… Quoi ? T’es là pourquoi ? (Râlant) Je comprends rien.

La nana spectre, Superglu, prend sa tablette à deux mains et entreprend de l’allumer.

— Superglu : Attends, je vérifie mes notes pour être sûre d’employer les termes exacts. Ah oui, voilà : « Je suis une âme obligée d’errer par le monde ». Enfin pas vraiment, mais c’est la formule qu’on doit utiliser. Le folklore…

— Toi : Je me réveille là, je comprends rien à ce que tu me racontes.

— Superglu : Comment dire ? T’es mon « Scrooge Ebenezer », et moi, je suis comme les spectres qui viennent lui dire qu’il est temps de changer de cap, quoi !

— Toi : Je comprends de moins en moins…

— Superglu : Attends, je vais sur Wikipédia, voilà.

« Monsieur Scrooge est le personnage principal du récit Un conte de Noël, le premier et le plus célèbre des contes de Charles Dickens. "Son œuvre la plus parfaite". Scrooge est le personnage dickensien le plus universellement connu. Un classique de la littérature de Noël des temps modernes… »

— Toi : Voilà, tu t’es trompée d’adresse, c’est pas encore Noël sur ma planète. Casse-toi, reviens dans six mois, si ça te chante. Moi, je pieute. C’est tout poussiéreux, ton histoire, et il fait beaucoup trop sommeil.

— Superglu : Ben non, c’est super connu, il y a même un film avec Jim Carrey ! Le drôle de Noël de Scrooge.

— Toi (te retournant, toujours l’œil bougon, mais un peu plus réveillée) : Ouais, c’est vrai, je l’ai vu. (Tu réfléchis) Attends voir, donc si j’ai bien compris, tu vas te la jouer psy. T’es là pour me faire oublier… enfin lui, quoi. Tu comptes m’expliquer comment faire mon deuil, suuuuurmonter mon chagrin d’amour ?

— Superglu (gloussant) : Non. Non ! Je ne suis pas du tout psy, moi. Non, je vais te raconter des histoires. Je suis raconteuse diplômée.

— Toi (moqueuse) : Tu vas me raconter des histoires édifiantes pour que j’en prenne de la graine ?

— Superglu : Non, ça serait chiant, ça. Je vais t’emmener dans ces histoires, mais le but est bien que tu te débarrasses de la chaîne de chagrin hyper lourde que tu trimballes partout ces jours-ci. Je dois te faire comprendre que… (Superglu replonge le nez sur sa tablette) « L’immensité de nos regrets ne pourra pas compenser les occasions manquées dans notre vie ! » Il te reste une dernière chance d’échapper à ta destinée – devenir une vieille fille acariâtre – et je suis là pour te la faire saisir. Pour cela, je dois te montrer « les ombres de ce qui a été ».

— Toi : Finalement, je crois que je préfèrerais encore me taper le laïus psy, tu sais.

— Superglu : Ah, ben pas de problème, je peux le faire. Ah, ma page Wikipédia est toujours ouverte : « Un chagrin d’amour est la grande peine qu’une personne est susceptible d’éprouver lorsqu’une relation sentimentale se termine, ou ne s’établit pas… »

— Toi (l’interrompant): Si tout ce que tu sais faire, c’est me lire Wiki, merci, mais je peux le faire toute seule.

— Superglu : J’ai compris, je lâche la tablette. Pour résumer le blabla des psychiatres, disons qu’un chagrin d’amour est une souffrance quasi inévitable qui peut durer et qu’il faut faire déboucher sur quelque chose de meilleur. Ça arrive à tout le monde, le tout étant de survivre jusqu’au prochain amour.

— Toi : Et pourquoi moi je chiale, alors que lui est passé à autre chose ? Pourquoi c’est pas lui qui est hanté ? Pourquoi il fait la bringue et moi non ?

— Superglu (attendrie face à ta carapace prête à se fendre): Oui, ce n’est pas juste. Généralement, la nana déguste beaucoup plus. Je n’ai pas tout compris à cette partie du cours, mais je crois que c’est parce que tu n’as pas de zizi…

— Toi : C’est dégueu et vaseux, ton truc. Je ne suis pas la seule avec un cœur brisé, pourquoi c’est moi que tu viens faire ch… visiter ?

— Superglu (embêtée) : Écoute, concrètement, si quelqu’un t’a offert ce livre, c’est que « quelqu’un » estime que tu ne te remets pas d’une déception amoureuse. Disons que tu ressembles un peu à un zombie shooté aux antidépresseurs. A priori, tu fais pitié à une personne au moins, et il va falloir passer à autre chose pour retrouver ta vie sociale. Euh… Tu dois arrêter la nostalgie... Radio Nostalgie ! (Rires satisfaits) La musique adoucit les mœurs, mais nourrit aussi les chagrins d’amour.

— Toi (rires aussi, mais jaunes) : Merci de m’enfoncer encore plus. En fait, ton blabla psy est un flot de platitudes qui me déprime. T’es qui en vrai, t’as des références pour être « Superglu pour cœurs brisés », qu’est-ce que t’y connais en dehors de ta tablette ?

— Superglu : Tu veux des anecdotes perso ?

— Toi : Ça me paraîtrait équitable, tu sembles tout savoir sur moi, et ça serait pas mal que tu te mettes à poil aussi, histoire qu’on soit à égalité.

— Superglu : Tu n’as pas tort, mais j’ai rien préparé… (Devant ton air « t’accouche ou je me barre ») Ok. Je vais te raconter un souvenir d’enfance… mais c’est un peu imprécis.

Première scène : je suis avec mon papa, dans la cuisine de notre appartement. À l’époque, on habitait en ville. J’ai forcément moins de 7 ans puisqu’on a déménagé en 1988. Papa est mi-figue mi-raisin, comme souvent, on ne sait pas si ce qu’il dit est vrai ou s’il prépare une blague. On vient de finir de manger, il a l’air perdu dans ses souvenirs, mais en même temps, il est possible aussi qu’il prépare un des « attrape-couillons » qu’il me sert régulièrement. On parle de choses et d’autres, je ne sais plus, puis il dit, comme ça, « Il ne faut pas, jamais, que tu te maries avec un garçon qui s’appelle Éric, surtout s’il a 3-4 ans de plus que toi ». Paf. Mon regard dit « Pourquoi ? », mais il ne dit plus rien, il rigole, comme s’il m’avait bien eue avec une de ses farces. On débarrasse la table, je ne sais pas si je dois rire ou pas, je sens qu’il y a là quelque chose d’important. Je finis par conclure qu’il a simplement fait une blague que je n’ai pas comprise. Dans ces cas-là, je ne suis pas du genre à le montrer. Trop fière. Oui, à 7 ans, déjà. Je suis sur le point d’aller jouer, quand Papa lâche « Parce que c’est peut-être ton frère ». Re-paf. Quoi ? Comment ? Hein ? Mais je ne dis rien, il ne dit rien, et voilà.

Avant la scène deux, je dois t’expliquer quelque chose : Papa adore Brel. La plupart du temps, quand j’étais petite, Maman n’était pas là, et Papa n’était pas du genre à me raconter des histoires pour m’endormir. 

— Toi : Ah ben voilà, je ne suis pas psy, mais j’ai compris pourquoi tu tiens tant à en raconter, des histoires…

Tu attends une réponse à ton trait d’humour, mais Superglu ne réagit pas. Tu finis par comprendre et prends un air contrit pour qu’elle poursuive. Elle attend encore un moment, puis reprend.

— Superglu : Il ne me racontait pas d’histoire, mais on regardait un livre ensemble, chaque soir, et il me posait des questions : « Trouve dix choses qui font du bruit, cinq choses qu’on ne peut pas acheter, cinq choses qui poussent… » Puis, il chantait et dansait : il fredonnait Madeleine de Brel et esquissait quelques pas avec un bouquet de lilas imaginaire. Il me le tendait du bas de mon lit, comme s’il était Roméo et moi Juliette au balcon. Ce que je te raconte là, tous ceux qui le connaissent en diront : « C’est faux, pas possible, lui ! Il n’a jamais pu faire ça ». Papa ne chante pas (ou alors seulement L’internationale,le premier mai) et, surtout, il ne danse pas (sauf quand ma tante Paola l’oblige, mais alors, il lui pelote les fesses pour qu’elle le laisse tranquille). On te dira qu’intrinsèquement, il est impossible qu’il fasse quelque chose de si « second degré », de si ridicule. Lui-même niera. En fait, il devait se dire que je ne me souviendrais pas, qu’il n’y avait pas de mal, puisque pas de preuves. Sauf que je me souviens de tout, surtout de ça. Enfin, tout ça pour te dire que Papa aime Brel, au-delà de bien des choses et que moi, quasiment naturellement, j’adore Brel, au-delà de tout.

Donc voilà, on est bien des années plus tard, il fait chaud, et Papa et moi sommes à nouveau autour d’une table, dans la cour. On a déménagé à la campagne il y a des années. Je pense à Brel et dit à Papa que j’aurais bien aimé le voir sur scène (Brel, pas Papa !) et que lui a de la chance de l’avoir vu. Je réfléchis encore, dis que je ne sais pas ce que ça m’aurait fait s’il avait été vivant durant ma vie et qu’un jour soudain, en lisant le journal, j’avais appris qu’il était mort : « Comme ça aurait été dur. Tu ne m’as jamais dit ce que tu as ressenti quand tu as appris que Brel était mort ». Papa me répond : « Je ne sais pas, je ne me souviens pas. J’étais dans autre chose à ce moment-là, j’avais mal pour une autre raison : je ne m’en suis quasiment pas rendu compte ». Et là, ça n’a pas de sens parce que, je le répète, Papa adore Brel et n’est pas du genre à donner de l’importance à ce qui n’en a pas. Alors, qu’est-ce qui a bien pu être plus important que la mort de Brel ? Je ne comprends pas, mais ne dis rien. On a la politesse de la pudeur chez nous.

Dans les coulisses, je tente de définir cette étrange équation : Brel est mort en 1978, je suis née en 1981, et il y a un garçon quelque part qui a trois ans de plus que moi et dont mon père n’est (peut-être) pas sûr de ne pas être le père. Même s’il semble prendre la chose à la rigolade et qu’il est peu probable que j’aie un frère, je résous l’équation : Papa était amoureux, la fille hésitait entre deux gars, la décision était urgente à prendre, elle était en cloque, et Papa a perdu. Donc, s’il n’avait pas de larmes pour Brel en 1978, c’est parce qu’il pleurait autre chose, un amour perdu. Voilà ce qu’est, concrètement, un chagrin d’amour. Ça existe pour de vrai et pas seulement chez les adolescentes trop sensibles, puisque même Papa en a souffert.

Voilà comment j’ai compris ce qu’est un chagrin d’amour.

— Toi : Jolie histoire, mais tu es une tricheuse. C’est pas un chagrin d’amour à toi, ça.

— Superglu (rougissante et regardant ses pieds) : J’ai une histoire, mais je ne l’ai jamais racontée à personne... Ok.

Classique, je suis en fin d’enfance, en préadolescence, j’ai 11-12 ans et je suis folle amoureuse : il est intelligent, brillant, gentil. Ce n’est pas la première fois que je suis in love, loin de là, mais pour la première fois, il ne s’agit pas d’un poster, ni d’une lubie passagère. Pour autant, c’est un amour totalement impossible, voire ridicule, puisque qu’il a 25 ans de plus que moi et qu’il s’agit d’un [PASSAGE CENSURÉ POUR DES RAISONS ÉVIDENTES DE PUDEUR].

— Toi : Mais c’est arrivé à tout le monde, ça ! Tu ne l’as pas vécue, l’histoire. Tu t’es pâmée quelques mois et puis basta, au suivant. 

— Superglu : Ça aurait dû se passer comme ça, mais il est tombé malade et est mort. Je n’ai jamais eu l’occasion de réaliser, avec le temps, qu’il était trop vieux, trop chauve et pas si idéal. Le processus normal a capoté parce qu’il a disparu d’un coup et qu’on n’a pas reconnu ma peine.

— Toi : Ouais, dur, désolée.

— Superglu (retrouvant couleurs et entrain) : Merci ! Tu es la première à me le dire, en même temps comme je n’en avais jamais parlé à personne… Mais ouf, voilà, c’est fait, ça fait du bien.

— Toi : Et quoi, cette histoire, ça a laissé des choses en toi ?

— Superglu : Ma haine du tabac confine à l’absolu. Enfin, pas que pour ça. (Longue pause) Et puis, mon cher et tendre, le père de ma fille, mon mec passé et futur, il fait aussi de très jolies [MOT CENSURÉ POUR DES RAISONS ÉVIDENTES DE PUDEUR].

— Toi : Je ne comprends pas l’allusion, mais j’imagine que c’est voulu… Bon, allez. Tu m’as convaincue. Envoie, raconte-moi tes histoires. (Légère réflexion) Enfin, j’ai encore une question...

— Superglu : Non, ça suffit là ! On a du pain sur la planche, et je ne peux pas te raconter tout ce que je voudrais, certaines choses sont secret défense. On n’a plus le temps. Go ! Go ! Go !

— Toi : Et comment tu vas m’y emmener dans tes histoires ?

— Superglu : Tu as lu Harry Potter ?

— Toi (subitement inquiète) : Oui…

— Superglu : On va transplaner. Donne-moi la main, ferme les yeux !

— Toi : On va se « téléporter », tu veux dire ?

Superglu n’a pas le temps de te répondre, c’est comme si un hameçon s’était accroché à ton nombril et que quelqu’un tirait violemment dessus. Apeurée, tu obéis : tu fermes les yeux.

Chapitre 1 : Le manoir de Ravenswood

Afin de comprendre qu’il n’est pas bon d’attendre le retour de l’être aimé trop longtemps

D’un coup, tu as l’impression d’être sur des montagnes russes, tu es trimballée dans tous les sens. Brusquement, ça s’arrête, et tu sens à nouveau le sol sous tes panards.

— Toi : Je peux ouvrir les yeux, maintenant ?

— Superglu : Pas tout de suite ! Essaie de deviner où tu es d’abord…

— Toi : Très bien. Ça sent le bois mouillé… Il y a du monde… De la musique... western ? Un cheval... Un chien aboie, des tirs de fusil au loin… sur des boîtes de conserve…

— Superglu (excitée) : Alors, où sommes-nous ?

— Toi : Des studios de cinéma ?

— Superglu : Presque. Ouvre les yeux !

Tu ouvres les yeux, tu observes, tu comprends et… t’as pas l’air jouasse du tout.

— Toi : Disneyland. Disneyland ! Tu crois que j’ai quel âge ? Pour me consoler : un tour de manège, puis une barbe à papa, et mon problème sera réglé ?

— Superglu : Non, pas de friandises au programme. Allez, râle pas et suis-moi.

— Toi : Je te suis, mais je râle.

— Superglu : Nous ne sommes pas n’importe où à Disneyland, c’est Frontierland : les paisibles rivières de l’Ouest, la montagne ocre de Big Thunder Moutain. Le plein Far West. Le mythique Far West tel que rêvé par les visages pâle européens.

— Toi : Ouais, blablabla, j’ai compris, c’est le début de ton « histoire édifiante »… Il y a bien plus dur que mes petits soucis. Enfin, moi, je croyais que tu allais me raconter des histoires vraies…

— Superglu (rieuse) : « Édifiante » ! Tu l’aimes, ce mot… Attends d’entendre avant de décréter que ce n’est pas vrai…

Nous sommes en pleine ruée vers l’or, en 1860 : la terre entière rêve de la Californie. L’Or est l’âme de la mine de la montagne du tonnerre aux rochers ocre face à nous : on dirait Monument Valley.

— Toi (moqueuse) : Méfie-toi, il commence à y avoir des trémolos ridicules dans ta voix, ça fait tâche. (Pressant le pas) On va faire un tour dans le train de la mine, c’est ça ? Allez, let’s go, j’adore ça !

— Superglu (pointant un point plus à gauche) : Non, c’est là que nous allons.

— Toi (pâlissant et la voix moins assurée) : C’est nul, les trains fantômes, ça m’effraie plus à mon âge… C’est idiot.

— Superglu : Ce que, par ici, on appelle « Phantom Manor » n’est pas un vulgaire train fantôme. Tu vas voir.

Résignée, tu suis en traînant les pieds, alors que Superglu commence à raconter.

— Superglu : Nous traversons une petite ville de mineurs prospère de l’Ouest américain, appelée « Thunder Mesa ». La mine est un véritable poumon économique pour l’endroit. Nous nous dirigeons vers le quartier le plus cossu de la ville, vers cette demeure lugubre, ce manoir délabré situé sur un promontoire. 

— Toi