Sur les traces du jeune prince Békir - Jo-Rémi Faye - E-Book

Sur les traces du jeune prince Békir E-Book

Jo-Rémi Faye

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Beschreibung

Laissant définitivement s’éloigner les secrets de collège, Gorka et ses amis vont découvrir l’univers du lycée et les premiers émois amoureux.

Claire-Lucille, seule fille du groupe, va faire la connaissance de Békir, un adolescent turc et le prendre en amitié. Apprécié de tous, Békir va être associé à la rédaction d’un journal de lycée. Malheureusement pour lui, la publication d’un article sur la culture de son pays d’origine va mettre le feu aux poudres.

Subissant les brimades de trois élèves irrévérencieux, Békir va soudainement disparaître à quelques jours de Noël.

Jamais la bande à Gorka n’aurait pu imaginer, qu’en franchissant les portes du lycée, elle affronterait un monde d’adultes imprévisible et impitoyable.



À PROPOS DE L'AUTEUR


Clermontois, Jo-Rémi Faye est auteur de romans et d’essais depuis 2018.
Chargé d’Affaires Juridiques au Conseil régional Auvergne-Rhône-Alpes depuis 2000, il soutient les valeurs de service public, la qualité de vie au travail et le bien-être des agents, les projets de territoire des associations et des élus.
Ces histoires s’inspirent d’évènements de son vécu, de rencontres insolites et de faits de société.
La littérature est pour lui un jardin de pensées qu’il est heureux de partager pour fleurir l’existence de ses lecteurs.

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Jo-Rémi FAYE

Sur les traces du

jeune prince Békir

La nouvelle aventure de la bande à Gorka

« Celui qui cherche un ami sans défaut

Le mot de l’auteur

« La foi, la liberté et l’amitié sont les

principaux biens de l’âme de l’homme » (Tacite)

Une belle amitié nait par hasard sur le chemin de notre existence, parfois dans des lieux improbables, parfois sur les bancs du lycée.

Cette attirance singulière a ce goût de la guimauve trempée dans du chocolat. Parfois, rien ne prédit qu’une alchimie s’opère entre des êtres aux caractères opposés ou aux cultures différentes.

Mais quand on est lycéen, l’imprévisible fait partie du quotidien. Il peut faire des étincelles comme des miracles.

Si, dans nos vies d’adulte, la désolation est fréquemment à nos portes, nos adolescents nous montrent la voie pour trouver la clé de l’inspiration, l’innovation, l’engagement et du respect de l’autre et de soi-même.

Avec quelques décennies de recul, nous avons tous ressemblé à cette « gamine qui n’a que la quinzaine », cette « Petite Angèle » décrite dans la chanson de Daniel Balavoine. Il est encore temps de comprendre « qu’ils ont forcément leurs raisons, ils veulent savoir vers quoi on les entraîne et qui ils sont » …

Claire-Lucille, Gorka et toute la bande sont des adolescents contemporains qui, à leur tour, s’interrogent sur ce monde cupide et inquiétant qui les entoure.

En franchissant le seuil du lycée, ils ne s’attendaient pas à vivre des heures aussi mouvementées !

Rémi FAYE

Préface

Le harcèlement scolaire est un phénomène particulièrement difficile à appréhender en raison de la grande variété d’actions par lesquelles il est susceptible de se concrétiser.

Selon les femmes et les hommes qui nous gouvernent, ce sont des textes et des lois qui devraient bousculer les lignes, encadrer les dérives.

Le gouvernement a même publié un rapport de presque deux cents pages destiné à la rédaction d’un autre texte à l’attention des académies, des recteurs et autres cadres de l’éducation nationale.

Jo-Rémi Faye n’a pas la prétention de jouer dans cette cour. La sensibilisation des élèves au harcèlement scolaire ne peut passer que par les élèves eux-mêmes et par un soutien indéfectible des directions d’établissements et de la justice. Le harcèlement est une violence sur autrui, physique ou psychologique, et des lois existantes en permettent déjà la gestion. Un élève condamné à de tels faits se voit déjà amputé d’un avenir professionnel tel l’administration, le droit, ou la sécurité, une tache sur son curriculum pour une opinion, une position qui changera avec le temps mais qui restera gravée comme un souvenir douloureux d’une jeunesse ignorante et désinvolte.

A la lecture de son livre, j’imagine très bien une classe entière, de la fin du premier cycle à la deuxième année de lycée, à l’étude de ce texte de par son approche simple et parfaitement illustrée de faits. Bien au-delà de l’aspect littéraire avec pour thème l’amitié entre « copains de classe » et des premières amours, la différence prend toute son importance. Celle-ci est bien trop souvent exploitée négativement par celles et ceux qui estiment avoir un pouvoir sur l’autre, pouvoir physique bien éloigné de celui qui devrait être le fer de lance de l’établissement scolaire, à savoir l’intelligence.

Est-il imaginable qu’à l’âge des premières grandes décisions, l’adulte, celui qui devrait pouvoir mener la « danse » devant les élèves, ne puisse poser la grande question de l’avenir pour chacun des élèves présents ? Dénoncer par le texte, la violence ne fera certes pas changer les agresseurs, mais la limite des choix dans un futur proche peut amener certains à réfléchir à l’acte du moment, peut-être aussi la parole se fera plus audible et l’agresseur agressé…

Bien sûr, nous n’avons pas le pouvoir individuellement de faire changer les choses, bien sûr, nous en sommes tous réduits à critiquer, juger. Toutefois nous avons un pouvoir, une obligation, ECOUTER, écouter en tant que parents, acteur principal de l’éducation en famille, SUIVRE, suivre l’évolution de l’action éducative au sein des établissements scolaires et s’impliquer réellement.

Je suis aussi père et grand-père. Mes enfants ont suivi des études secondaires et ont évolué dans des conditions pas toujours faciles, pour eux comme pour nous, les parents. Aucun d’entre eux n’a eu à subir de désagréments, malgré un nom pas forcément facile à porter. Nous n’avons, leur mère et moi, veillé à ce que leur scolarité se déroule au mieux car tel est le devoir des parents, nous avons veillé à leur inculquer des valeurs, celles du respect, celle du bien d’autrui, des valeurs comme le travail mais surtout de la confiance en soi.

Chaque parent a donc un grand pouvoir sur ses enfants, tout comme chaque enseignant a un grand pouvoir éducatif, tant en termes de connaissances qu’en règles de vie en société, car la vie dans une école peut ressembler en bien des points à une société, celle de l’image de la vie de famille, celle vécue par les ados dans leur foyer, que ce soit l’indifférence voire l’ignorance, ou celle de la violence, l’accent sur l’ouverture d’esprit ou l’exclusion de toute forme de nouveauté.

La cour de récréation est le révélateur de l’individu, la photo de ce que l’élève pourrait devenir si l’adulte ne joue pas son rôle.

Jo-Rémi Faye a peint dans son livre une fresque géante de notre société, les amis, les perturbateurs et même bien au-delà une notion de violence extrême qui aboutit à un autre axe de réflexion qui ne manquera pas d’interpeller les parents.

J’ai lu ce livre avec la satisfaction du parent ayant eu la chance d’échapper à ces incertitudes et autres soucis concernant mes enfants, mais aussi avec la crainte de voir notre société confiée à un monde dont le pouvoir consisterait à opprimer le faible, à enfermer toute forme de paix sociale de par la méconnaissance de l’autre, à orienter le savoir vers l’obscur, l’impalpable, et les nouvelles technologies font partie du processus d’abêtissement de notre société.

Comment pousser nos enfants vers plus de savoir-vivre en société lorsque les acteurs de l’éducation, à savoir parents, enseignants et dirigeants restent impuissants face à l’évolution sociétale ?

Parents, adolescents, élèves de tout poil, lisez ce livre, il ne manquera pas de vous donner le courage de réfléchir, d’agir dans le bon sens, de défendre surtout en parlant, et de ces petites choses naîtra peut-être une société meilleure, plus humaine, plus cohérente, où le respect de soi et de l’autre fera de notre collectif un exemple aux yeux de notre pays, mais aussi et surtout aux yeux de votre descendance.

Andrew LEARSI

PARTIE 1 - Les doléances lycéennes

« Écouter les autres, c’est encore la

1 – Une nouvelle étape

Une mélodie de Pipa, cet instrument à cordes pincées traditionnel chinois de la famille du Luth, mit un terme à la nuit agitée de Gorka.

Les yeux mi-clos, il s’évertua à faire les mouvements pour éteindre la sonnerie de son téléphone portable. Après plusieurs vaines tentatives, il envoya valser l’appareil qui se fracassa contre l’un des pieds de la table de chevet.

Fort heureusement, le tapis près de son lit fit office d’airbag. Les dégâts se limitèrent à une petite faille sur l’écran.

Il grogna. Il se rendit vite à l’évidence que les vacances d’été étaient bel et bien finies. Il brancha le vieux radio-réveil offert par ses parents avant que ces derniers ne cèdent aux sirènes de l’achat d’un téléphone portable pour leur fils. Il affichait sept heures du matin. L’animateur de la station passa la parole à son collègue pour présenter le journal.

Il n’échappa pas à l’actualité brûlante du matin : « … C’est le jour de la rentrée scolaire pour des milliers d’élèves avec son paquet de réformes. Le nouveau ministre de l’Éducation nationale a annoncé pour 2023-2024 le remplacement automatique des professeurs absents et entend faire de la lutte contre le harcèlement scolaire une priorité. Le port de l’uniforme à l’école sera expérimenté pour les communes volontaires à condition que la communauté éducative d’un établissement le demande … ».

Inconsciemment, Gorka contempla ses vêtements. Pour l’instant, il se sentait libre de ses mouvements dans son pyjama Albator pirate de l’espace. Il ne parvenait pas imaginer une classe avec des élèves portant tous la même tenue.

Même s’il savait que le but recherché était de lutter contre le harcèlement scolaire et les inégalités sociales, une seule image lui venait à l’esprit, celle d’un épisode de Harry Potter où les pensionnaires de Poudlard étaient tous vêtus aux couleurs de l’école de sorcellerie.

Il se rassura en se disant que cette mesure ne s’appliquerait pas pour cette rentrée au Lycée Hubertine Auclert. Désormais, il allait endosser le rôle de lycéen. Ce nouveau statut lui plairait-il ?

Ses parents lui avaient répété que la seconde allait lui apprendre à devenir plus autonome et plus organisé, qu’il allait développer son esprit critique et peut être même qu’il allait connaître son premier amour. Mais ils avaient ajouté que cela ne devait pas le perturber dans la réussite de son année scolaire, un peu comme après une publicité d’une boisson alcoolisée … à boire « avec modération ».

Il se dirigea vers la cuisine.

Ses parents avaient déjà fini de déjeuner. Léandro leva ses lunettes de ses yeux.

⸺ Alors, mon fils, c’est le grand jour ?

Gorka approuva d’un signe de tête.

Amaya se précipita vers lui pour plier le col gauche de sa chemise, droite comme un I, à l’image de ses cheveux qui faisaient des « rebiquettes ».

⸺ Il faut que tu sois tiré à quatre épingles pour cette première journée. Passe encore un coup de peigne dans tes cheveux !

⸺ Je mettrai un peu de laque, ne t’inquiète pas maman, je gère.

⸺ Veux-tu que je t’accompagne, tu n’es pas trop angoissé au moins ?

⸺ Mais maman, je n’ai pas dix ans ! Je connais le chemin.

Amaya fit un sourire. Elle se dit qu’elle n’avait pas suffisamment vu grandir son fils.

Gorka prit le temps d’observer les mets posés sur la table. Les yeux grands ouverts, il se délecta du charme de ces nombreuses friandises provenant du Pays Basque : de la confiture de cerises noires au piment d’Espelette, de la pâte à tartiner au chocolat noir 70% cacao et noisette de fabrication artisanale et des parts d’un gâteau basque sorti la veille du congélateur.

Ses parents avaient pensé à tout pour le mettre en forme.

Léandro prit alors un air grave.

⸺ Ta mère et moi comptons sur toi pour ne pas nous décevoir. La seconde est une classe charnière. Tu devras, à l’issue de cette année, être en mesure de retenir trois enseignements de spécialité. J’espère que tu sauras faire le bon choix.

Amaya l’interrompit.

⸺ Enfin, Léandro ! Ce n’est vraiment pas le moment de parler de sa future orientation. Ne lui mets pas la pression dès le premier jour !

Léandro bougonna mais, au fond de lui, il reconnut qu’il avait été un peu excessif.

Après une bonne douche, Gorka se servit un jus vitaminé pétillant orange-mandarine. Il se sentait maintenant prêt à découvrir le nouvel univers qui l’attendait.

Vingt minutes plus tard, Gorka se mêla à la foule de lycéens qui gravirent les premières marches de l’établissement. Des voix d’élèves surexcités fusaient de toutes parts.

Au milieu de cette fourmilière, il reconnut quelques professeurs munis de sacoches cartables qui se hâtaient pour être à l’heure de la grande messe. Ils ne devaient surtout pas ternir une légendaire réputation. Un fonctionnaire doit toujours être en état de marche et ne jamais montrer des signes de fatigue.

Gorka fut frappé de stupeur par l’allure et le visage d’un de ses professeurs. C’était le portrait craché de Jésus-Christ. Il l’imaginait déjà crucifié sur une croix.

Il ne savait pas encore qu’il allait devenir son futur professeur d’anglais. Ce dernier aimait toujours terminer les cours avec cinq minutes d’avance. Cela lui permettait ainsi d’être le premier devant le distributeur à café dans la salle des profs.

Avachi sur un mange-debout, il attendait patiemment ses collègues pour leur remettre en mains propres des tracts dont le contenu se finissait toujours par la date d’une future manifestation, car, pour le professeur Séverin Arsouille, il n’était nullement question d’accepter la moindre réforme de ces ministres successifs d’Éducation qu’il qualifiait dans la langue de Shakespeare « d’illeterate ».

Gorka suivit les autres élèves au milieu de la cour du lycée.

Sous l’un des porches, un homme d’une quarantaine d’années à l’allure élégante se tenait prêt à attaquer un discours. Il était entouré d’une ribambelle d’enseignants dévoués à la tâche.

Il se racla la gorge et demanda à l’assistance une minute de silence.

⸺ Je vous demande de vous arrêter …

Cet ordre fit l’effet d’un pétard mouillé. Il répéta les mêmes mots nettement plus forts.

⸺ Je vous demande de vous arrêter !

Le professeur Séverin Arsouille ne put s’empêcher de rire. Il s’adressa à son voisin de couloir.

⸺ C’est drôle, mais cette phrase me rappelle quelqu’un.

L’orateur s’en aperçut et ne manqua pas de lui faire de gros yeux.

⸺ Bonjour à vous tous. Bienvenue au Lycée Hubertine Auclert. Je me présente. Marc Buse, je suis votre Proviseur.

Quelques instants plus tard, les professeurs principaux se présentèrent à tour de rôle puis se divisèrent en groupes pour former les différentes classes de seconde. L’appel des élèves par classe débuta.

Gorka cherchait du regard depuis un moment s’il apercevait ses amis de collège. Il se sentait soudainement bien seul.

Les prénoms des élèves continuaient à défiler quand, tout à coup, un doigt lui tapota l’épaule gauche.

⸺ Eh bien, Gorka, on fait bande à part ?

C’était Cyrus, l’un de ses plus fidèles copains de collège. Mais il y avait aussi Guistino, Kelvin et Adonis. La troupe était presque au complet. Il ne manquait plus que Claire-Lucille, la seule fille de la bande à Gorka.

⸺ Les gars, franchement, vous n’êtes pas très « fair-play » ! Vous auriez pu m’attendre.

Claire-Lucille avait dû en catastrophe faire un tour aux toilettes.

Gorka était ravi de retrouver ses compagnons de route.

⸺ Content que vous soyez là. Vous avez tous passé de bonnes vacances ?

Kelvin, le plus extraverti de la bande, répondit le premier.

⸺ Oh que oui ! Et vous savez la meilleure ? Je me suis retrouvé sans le vouloir sur une plage de naturistes !

Amusé par cette situation, Adonis, d’habitude réservé, souhaitait en savoir davantage.

⸺ Où cela t’est-il arrivé ?

⸺ Je vous explique. Alors que je faisais du « fat bike » depuis une heure sur les chemins sableux de l’île de Porquerolles, j’ai dû à un moment donné me planter de chemin. Et sans m’en rendre compte, je me suis retrouvé sur l’île du Levant. Croyez-moi, cela m’a fait l’effet d’un coup de soleil quand j’ai vu tous ces corps nus !

Claire-Lucille le regarda dubitative.

⸺ Et tu crois que nous allons gober ton histoire ? Je suis certaine que tu as fait exprès de te rendre là-bas.

Kelvin chercha à lui démontrer le contraire.

⸺ Mais non, je t’assure ! Je n’avais pas l’intention de pointer le bout de mon nez en ces lieux.

Guistino se moqua de lui.

⸺ Ouh le voyeur ! Cela ne sert à rien de nous le cacher.

Kelvin maintenait sa version.

⸺ Mais non, il faut me croire.

Il n’eut pas le temps de continuer. Il venait d’être appelé. Il abandonna ses amis. Appelé à son tour, Guistino se retrouva dans la même classe que Kelvin.

Gorka rejoignit une autre classe de seconde. Il regrettait que Kelvin et Guistino ne fassent pas partie de sa classe.

Fort heureusement, Adonis, Cyrus et Claire-Lucille allaient faire leur année scolaire à ses côtés.

⸺ Quel dommage que Kelvin et Guistino ne soient pas avec  nous !

Claire-Lucille chercha à apaiser Gorka.

⸺ Ne t’en fais pas, nous aurons bien l’occasion de tous nous retrouver pour de nouvelles aventures.

⸺ Tu as certainement raison, ma « Clé ». C’était le surnom affectueux que Gorka attribuait à Claire-Lucille.

Sans le savoir, Claire-Lucille avait deviné que cette nouvelle année scolaire allait leur réserver bien des surprises.

2 – Le souvenir de la vieille bâtisse abandonnée

La porte de la classe se referma derrière Gorka. Comme pour les autres nouveaux lycéens, c’était l’heure de découvrir le règlement intérieur de l’établissement, la charte informatique à lire et à approuver dans le carnet de liaison.

Il n’arrivait pas à s’enlever de la tête le drôle de menu recommandé par le Proviseur qui se résumait en cinq lettres :       « R.E.P.A.S. ». Cela signifiait « Respect, Entraide, Ponctualité, Assiduité, Sociabilité ». Étrangement, il possédait la saveur d’un des avertissements de son père.

Gorka savait par avance que ses parents comptaient sur lui pour que cette nouvelle étape scolaire se passe du mieux possible. Mais, en même temps, cela l’angoissait. La vie au lycée lui plairait-elle ? Trouverait-il ses repères ? Toutes ces questions se bousculaient dans son esprit.

Le professeur principal le sortit de ses pensées.

⸺ Bonjour, je m’appelle Aurore Clerfeuille, je suis votre professeure de français, mais également votre professeure principale. Nous allons passer une année ensemble. Avant de découvrir tous les professeurs de votre classe, vous allez prendre connaissance de votre emploi du temps. Nous allons ensuite faire une visite de l’établissement, vous pourrez ainsi mieux situer le bureau de la vie scolaire, la salle d’étude, le Centre de Documentation et d’Information ou encore la cafétéria.

Gorka se réjouissait par avance de sortir déjà de la classe.

Il allait pouvoir en profiter pour se rapprocher de Claire-Lucille et papoter discrètement.

Sur le chemin de la visite, Adonis et Cyrus les rejoignirent.

Quand ils longèrent la salle d’étude, la professeure principale reprit la conversation.

⸺ … Durant l’année, nous aurons l’occasion d’organiser des projets pédagogiques, d’animer des ateliers où vous pourrez exprimer votre créativité, développer des savoir-faire et échanger entre vous. Je tiens vraiment à ce que chacun puisse s’épanouir, que cet établissement soit votre deuxième maison. Il est important que vous vous sentiez bien. En qualité de professeure principale, je serai à votre écoute, je suivrai de près votre parcours, j’animerai les conseils de classe et j’aurai parfois l’occasion de rencontrer vos parents. Il ne faudra pas hésiter à venir me voir pour toutes difficultés que ce soient.

Gorka apprécia beaucoup cette entrée en matière qui instaura immédiatement un climat de confiance.

Les nouveaux lycéens découvrirent ensuite le Centre de Documentation et d’Information appelé plus communément le     « CDI ».

Cyrus, le plus « geek » de la bande remarqua immédiatement les ordinateurs mis à leur disposition.

⸺ Formidable, je pense que je vais me rendre souvent au             « CDI » !

Claire-Lucille le stoppa net dans son élan.

⸺ Cyrus, les ordinateurs ne sont pas mis ici à ta disposition pour être utilisés seulement dans le but de communiquer avec ta communauté d’amis passionnés de jeux vidéo mais pour effectuer des recherches sur des livres ou sur du travail demandé en cours.

Cette remontrance fit rire Gorka. Il aimait bien ce trait de personnalité de Claire-Lucille qui, parfois, se comportait comme une mère pour eux.

Cela lui rappela sa clairvoyance lors de leurs précédentes aventures au collège{1}.

Claire-Lucille avait un don qu’elle avait développé à la fin de son enfance. Elle ressentait des perceptions extrasensorielles. Parfois, au cours d’un déplacement sur des lieux inconnus, elle avait des flashs. Cela permettait à l’équipe d’anticiper des évènements et de résoudre plus facilement des enquêtes.

⸺ Les amis, vous vous rappelez la vieille bâtisse abandonnée ?

Adonis voyait toutes les images défiler sous ses yeux.

⸺ Quelle aventure en effet ! Nous ne sommes pas près de revivre une telle histoire.

⸺ Tout à faire d’accord avec toi, nous avions fait de belles rencontres à cette occasion. Gorka ressentait alors une certaine nostalgie.

Il se rappelait alors ses premiers baisers langoureux au collège avec sa « Clé ». De peur de perdre ses amis, il avait préféré mettre un terme à cette relation naissante, mais non sans regret.

⸺ Qui sait ? Peut-être que nous allons croiser de curieux personnages, être au cœur d’une affaire qu’il faudra démêler ? Claire-Lucille ne croyait pas si bien dire …

Les lycéens pénétrèrent dans le Bureau de la Vie Scolaire nommé couramment le « BVS ». Adonis pensa alors qu’il serait certainement obligé de se rendre plusieurs fois en ces lieux pour justifier ses retards vu qu’il avait souvent du mal à se réveiller.

Ce début d’intégration au lycée se déroulait sous les meilleurs auspices. Deux jours passèrent. Gorka ne mit pas longtemps pour se faire des camarades de classe.

Depuis le premier jour, Claire-Lucille était intriguée par un lycéen qui se mettait à l’écart des autres dans la classe. Comme Cyrus s’éternisait à discuter avec Gorka, assis à la place de Claire-Lucille, elle en profita pour aller s’asseoir près de ce lycéen inconnu et entama la conversation.

⸺ Cela ne te dérange pas si je me mets à côté de toi ?

⸺ Bien sûr que non.

⸺ Je m’appelle Claire-Lucille et toi ?

⸺ Békir ! 

⸺ C’est un prénom que je ne connais pas.

⸺ Cela est tout à fait normal. C’est un prénom d’origine turc. Il signifie « celui qui annonce une bonne nouvelle ».

⸺ C’est chouette comme choix de prénom.

Sans en avoir réellement conscience, Claire-Lucille était troublé par le charme de ce lycéen.

De taille assez petit et habillé tout en noir, Békir avait des cheveux bruns ondulés, des yeux marrons et portait une barbe naissante. Son regard perçant procurait en elle l’effet d’un mystère qui n’attendait plus qu’à être dévoilé.

Le professeur d’Allemand se présenta.

⸺ Bonjour à tous, je m’appelle Loris Capillaire.

Gorka ne put s’empêcher de rire. Le nom de son professeur collait parfaitement à l’image de son personnage aux cheveux gras avec une queue de cheval roulant les mécaniques.

Gorka interpella Cyrus.

⸺ J’aimerais bien connaître la dernière fois qu’il s’est lavé les cheveux.

Cyrus fut à son tour pris d’un fou-rire. Au bout de quelques secondes, il parvint enfin à lui répondre. 

⸺ Tu ne trouves pas qu’il a la dégaine de l’acteur Belmondo ?

Il voulut renchérir.

⸺ Ce professeur est l’as des as de tous nos professeurs !

Ils éclatèrent de rire.

Par malchance, le professeur d’allemand les aperçut et ne sembla guère apprécier leur bavardage.

⸺ Arrêtez de murmurer ! Je ne m’entends plus penser !

Cette fois-ci, toute la classe était hilare.

Il descendit alors de l’estrade et se plaça face à Cyrus, les yeux dans les yeux.

⸺ Alors, comme ça, on veut faire les pitres ? Sachez que j’en connais un chapitre pour calmer les turbulents de votre genre !

Quelques postillons volèrent et atterrir sur le visage de Cyrus.

Il se mit alors à le fixer et à ne plus le lâcher des yeux.

⸺ Nous verrons quel est celui qui tient le plus longtemps et nous reprendrons ensuite les cours.

Deux minutes interminables s’écoulèrent. Un silence de mort régnait dans la salle de classe. Cyrus finit par baisser les yeux.

Rouge cramoisi, Loris Capillaire sortait vainqueur de cette confrontation subie pour Cyrus.

⸺ Maintenant que nous avons tous fait connaissance, nous allons pouvoir commencer le cours.

Gorka chuchota quelques mots à l’oreille de Cyrus.

⸺ Heureusement que tous nos professeurs ne lui ressemblent   pas !

⸺ J’espère surtout qu’il ne me prendra pas en grippe.

Cyrus appréhendait vraiment pour la suite de l’année scolaire.

3 – Le nouveau « Q.G »

Cela faisait maintenant une semaine que la bande à Gorka avait pris ses marques dans deux classes différentes de seconde. Guistino et Kelvin se trouvaient dans une classe qui avait déjà la réputation de rassembler les élèves les moins assidus. Pour l’instant, cela ne semblait guère les déranger.

Au grand désespoir de ses parents, Guistino avait pour ambition de devenir cuisinier. Il ne cessait de leur répéter qu’il s’agissait d’un métier noble. Mais rien n’y faisait. Ses parents voulaient qu’ils fassent avant tout des études dans un lycée d’enseignement général.

Mais sa passion ne mangeait pas de ce pain-là. Pratiquement tous les matins, il arrivait les bras chargés de friandises. Il s’était fait rapidement de nouveaux copains.

Kelvin, quant à lui, rêvait un jour d’être à son compte, imaginer par exemple un produit révolutionnaire pour ensuite le promouvoir. Sa mère le motivait pour qu’il intègre plus tard une école de commerce, mais elle craignait que son faible niveau scolaire et son manque de concentration lui empêchent d’y accéder.

Son père lui avait même prédit un jour où il était en colère qu’il finirait camelot. Pour Kelvin, cette voie n’avait rien de péjorative. Elle pouvait même lui permettre d’exercer son talent d’orateur.

Soudain, une alarme retentit dans tout l’établissement.

Les professeurs demandèrent aux élèves de les suivre, d’emprunter les issues de secours sans se bousculer pour rejoindre la cour du lycée.

En moins de cinq minutes, tous les lycéens étaient regroupés au milieu de la cour. Ils comprirent vite qu’il s’agissait d’un test alarme incendie.

Ce baptême de feu permit à toute l’équipe de se retrouver pour prendre des nouvelles de chacun. Claire-Lucille s’empressa de présenter Békir à Kelvin et Guistino. Ils le trouvèrent fort sympathique.