2,99 €
La nécessité s’impose, au début de tout cours d’Algèbre supérieure ou d’Analyse, de définir avec précision les nombres irrationnels, et de montrer rigoureusement que les règles de calcul algébrique, démontrées en Algèbre élémentaire pour le cas des nombres rationnels, s’appliquent encore aux nouveaux nombres. Les procédés employés pour faire cette extension sont nombreux, et peut-être s’étonnera-t-on d’en voir publier un de plus. Toutefois, un simple coup d’œil jeté sur le sommaire du présent ouvrage montrera, je pense, que mon plan diffère assez notablement de ceux qui sont généralement suivis. Sauf erreur de ma part, ce plan est nouveau ; je dois tout d’abord essayer de le justifier.
Das E-Book können Sie in Legimi-Apps oder einer beliebigen App lesen, die das folgende Format unterstützen:
Veröffentlichungsjahr: 2021
THÉORIE
DES
NOMBRES IRRATIONNELS,
DES LIMITES
ET DE LA CONTINUITÉ
PAR
René BAIRE
MAÎTRE DE CONFÉRENCES À l’UNIVERSITÉ DE MONTPELLIER
First Edition, 1905
© 2021 Librorium Editions
Introduction.
I.
—
Définition des nombres irrationnels.
II.
—
Bornes supérieure et inférieure d’un ensemble.
III.
—
Limite d’une suite de nombres.
IV.
—
Valeurs approchées d’un nombre.
V.
—
Différence de deux nombres.
VI.
—
Théorèmes sur les limites.
VII.
—
Notions de fonction et de continuité.
VIII.
—
Fonctions d’arguments rationnels.
IX.
—
Principe d’extension.
X.
—
Extension du calcul algébrique.
XI.
—
Théorèmes sur les fonctions continues.
XII.
—
Fonctions inverses.
XIII.
—
Définition des fonctions m√x, ax, xy, log x.
La nécessité s’impose, au début de tout cours d’Algèbre supérieure ou d’Analyse, de définir avec précision les nombres irrationnels, et de montrer rigoureusement que les règles de calcul algébrique, démontrées en Algèbre élémentaire pour le cas des nombres rationnels, s’appliquent encore aux nouveaux nombres. Les procédés employés pour faire cette extension sont nombreux, et peut-être s’étonnera-t-on d’en voir publier un de plus. Toutefois, un simple coup d’œil jeté sur le sommaire du présent ouvrage montrera, je pense, que mon plan diffère assez notablement de ceux qui sont généralement suivis. Sauf erreur de ma part, ce plan est nouveau ; je dois tout d’abord essayer de le justifier.
Les méthodes courantes pour l’introduction des nombres irrationnels se rattachent à deux principales : l’une repose sur la notion de coupure, l’autre sur la notion de suite convergente ; dans l’une et l’autre, une fois les nombres irrationnels introduits, on se préoccupe immédiatement de leur étendre les quatre opérations arithmétiques. Je procède différemment à cet égard : j’ajourne l’étude de ces quatre opérations, sauf la différence, à laquelle je fais une place à part, parce qu’elle joue dans toute la théorie un rôle prédominant, comme une simple réflexion le montre : la notion de différence est en effet la forme précise de la notion vague de rapprochement, de voisinage, qui domine nécessairement toute étude où il s’agit du continu ; or, le rôle des nombres irrationnels est précisément de servir à construire le continu, en comblant les lacunes que présente l’ensemble des nombres rationnels. L’ordre classique des quatre règles : addition, soustraction, multiplication, division, qui est le seul logique en arithmétique, ne s’impose plus lorsqu’il s’agit des nombres irrationnels. Au contraire, en me bornant, comme je le fais, à définir la différence (V), j’ai tout ce qu’il faut pour établir le célèbre théorème de Cauchy (condition nécessaire et suffisante pour qu’une suite ait une limite) ; à l’aide de ce théorème et de quelques autres analogues (VI), j’établis, sous le nom de principe d’extension (IX), une proposition générale d’où résultent comme cas particuliers les définitions de la somme, du produit, du quotient de deux nombres [ainsi que, un peu plus loin (XIII), la définition de ]. Ces notions se trouvent ainsi définies en bloc, et, ce qui est plus important encore, la justification des règles de calcul algébrique se fait également en bloc (X), au lieu d’exiger un raisonnement spécial pour chaque règle.
D’ailleurs, la notion de différence elle-même n’est pas indispensable pour définir la notion générale de limite. C’est là un fait masqué par l’habitude invétérée d’écrire : , , là où il suffit de dire : tout nombre inférieur, tout nombre supérieur à . Cette remarque n’a pas seulement, à mon avis, un simple intérêt de curiosité : certains raisonnements sur les limites me paraissent plus faciles à saisir en adoptant la forme de définition que je donne au § 12, basée simplement sur la notion d’ensemble ordonné.
Dans le même ordre d’idées, je crois avantageux de définir les bornes supérieure et inférieure d’un ensemble, immédiatement après avoir défini les nombres irrationnels. Cette manière de faire permet de substituer tout de suite et définitivement à la notion de coupure la notion plus générale et plus maniable de borne d’un ensemble : on remarquera que, après la Section II, il n’est plus fait aucun usage de la notion de coupure sous sa forme primitive.
J’estime enfin qu’il n’y a pas intérêt à ajourner la définition d’un mot, lorsqu’on se sert déjà depuis longtemps de la chose que ce moi représente ; c’est pourquoi j’introduis le plus tôt possible les notions de fonction et de continuité (VII). La notion de fonction est déjà impliquée dans la notion d’opération, et rien n’oblige de considérer les fonctions d’une seule variable comme plus simples que les fonctions de plusieurs variables ; c’est plutôt le contraire qui est vrai, car la première fonction que chacun a vue, c’est la somme de deux nombres entiers.
En définitive, je me suis efforcé d’ordonner les différentes matières que je traite de manière à éviter les redites et à n’utiliser autant que possible, comme propositions intermédiaires, que des théorèmes ayant leur place marquée en mathématiques.
Je me suis placé au point de vue de l’Analyse pure ; mais il est certainement avantageux, dans l’enseignement, d’éclairer une théorie aussi abstraite par une image géométrique (points sur une droite indéfinie). Il sera facile, sans rien changer à l’ordre suivi, de compléter la théorie à cet égard.
1. Rappelons les propriétés suivantes de l’ensemble des nombres rationnels :
1o De deux nombres rationnels différents, l’un est plus petit que l’autre ; si sont trois nombres rationnels tels que , , on a . Ces faits s’expriment en disant que l’ensemble des nombres rationnels est ordonné.
2o étant rationnel, il y a une infinité de nombres rationnels inférieurs à , et aucun d’eux n’est supérieur à tous les autres ; il y a une infinité de nombres rationnels supérieurs à , et aucun d’eux n’est inférieur à tous les autres ; si et sont rationnels et si , il y a une infinité de nombres rationnels tels que .
2. On dit qu’on effectue une coupure dans l’ensemble des nombres rationnels si l’on partage cet ensemble en deux classes telles que tout nombre de la première est inférieur à tout nombre de la seconde. Il ne peut se présenter alors que l’un des trois cas suivants :
1o Dans la première classe existe un nombre supérieur à tous les autres. Soit ce nombre : tout nombre de la première classe est . Tout nombre de la seconde est , puisque est de la première.
Un nombre rationnel ne peut faire partie de la seconde classe, sans quoi il serait ; donc il fait partie de la première.
Ainsi, la première classe est l’ensemble des nombres rationnels ; par suite, la seconde est l’ensemble des nombres rationnels : elle ne contient pas de nombre inférieur à tous les autres.
2o L’hypothèse du cas 1o n’est pas réalisée, c’est-à-dire qu’il n’y a pas dans la première classe de nombre supérieur à tous les autres ; mais on suppose qu’il existe dans la seconde un nombre inférieur à tous les autres. On reconnaît que la première classe est l’ensemble des nombres rationnels , la seconde est l’ensemble des nombres rationnels .
Les cas 1o et 2o sont évidemment réalisables.
3o Aucune des hypothèses 1o et 2o n’est réalisée. C’est donc que la première classe ne renferme pas de nombre supérieur à tous les autres, et que la seconde ne renferme pas de nombre inférieur à tous les autres.
3. Montrons qu’on peut réaliser le cas 3o.