Time to Love - Laetitia Romano - E-Book

Time to Love E-Book

Laetitia Romano

0,0
5,99 €

-100%
Sammeln Sie Punkte in unserem Gutscheinprogramm und kaufen Sie E-Books und Hörbücher mit bis zu 100% Rabatt.
Mehr erfahren.
Beschreibung

Jayden et Jennie se sont rencontrés et aimés de façon fulgurante. Apres de nombreuses péripéties, ils aspirent à avoir une vie tranquille avec leur petite fille Joy et le bébé à venir...Mais la vie ne semble pas vouloir les épargner. Et malgré tout l'amour qu'ils se portent, arriveront-ils à surmonter encore une fois les embûches qui se dressent devant eux? Tout semblait parfait pourtant il suffit d'une seule chose pour que tout bascule et marque définitivement la fin de l'innocence.

Sie lesen das E-Book in den Legimi-Apps auf:

Android
iOS
von Legimi
zertifizierten E-Readern

Seitenzahl: 512

Bewertungen
0,0
0
0
0
0
0
Mehr Informationen
Mehr Informationen
Legimi prüft nicht, ob Rezensionen von Nutzern stammen, die den betreffenden Titel tatsächlich gekauft oder gelesen/gehört haben. Wir entfernen aber gefälschte Rezensionen.



TOME 2

LAETITIA ROMANO

Ce livre est une fiction. Toute référence à des évènements historiques, des personnes ou des lieux réels serait utilisée de façon fictive. Les autres noms, personnages, lieux, évènements sont issus de l’imagination de l’auteure et toute ressemblance avec des personnages vivants ou ayant existé serait totalement fortuite.

Titre de l’édition originale :

Time To Love

Par Laetitia Romano

L’œuvre présente sur le livre que vous venez de vous procurer est protégée par des droits d’auteur. Toute reproduction d’un extrait quelconque ou d’utilisation autre que personnelle de ce livre constituera une contrefaçon et sera susceptible d’entraîner des poursuites civiles et pénales.

Copyright Laetitia Romano

Tous droits réservés

– Time To Love —

[Octobre 2022]

Photographie de couverture : Shutterstock

Réalisation de couverture : Laurie ESCHARD

Dépôt légal : Septembre 2022

ISBN version broché : 9798353618072

I've found a reason for meTo change who I used to beA reason to start over newAnd the reason is you …

The Reason — Hoobastank

Prologue

Deux ans plus tard.

« En ce qui concerne la garde alternée, la cour refuse ce droit à Monsieur Warner. En effet, son activité lui demande beaucoup de déplacements et ne peut être compatible avec les modalités de celle-ci. J’accorde donc à Monsieur Warner, ici présent, de prendre en charge son enfant, un week-end sur deux et durant les vacances scolaires. Le calendrier sera élaboré en concertation avec les deux parents ».

Je ne réagis même pas. Je m’en doutais. Je lève juste les yeux vers elle. Elle me dévisage tristement. J’imagine qu’elle ne voulait pas cela pour nous, pour notre fille, mais son conseiller a effectué son travail à la perfection.

Et puis quelle chance, j’avais face à moi un juge de sexe féminin.

— Nous pouvons faire appel, m’informe Jake, mon avocat.

— Non laisse tomber, je n’ai pas envie que Joy subisse ce genre de choses…

Je l’observe encore une fois, ses yeux sont brillants, mais pas comme j’aimais à les voir quand tout allait bien entre nous. Là, elle se retient de pleurer, pourtant c’est elle qui a pris cette décision. Elle détourne son attention et sort un mouchoir de son sac.

— Ni Jennie…

— OK, comme tu veux, il faudra demander à Jennie de passer au cabinet pour mettre en place le planning de garde, à moins qu’elle souhaite qu’on se déplace chez son avocat.

— Je verrai avec elle, merci, Jake.

— Je suis désolé, Jayden, mais je pense que nous sommes tombés sur la pire des juges.

— Oui je crois, je suis fatigué par toute cette histoire.

— Si tu as un souci, n’hésite surtout pas.

— OK, merci.

Il prend son cartable de cuir noir et s’éloigne, la salle du tribunal se vide petit à petit. Je reste légèrement transi, passant mes mains sur mon visage.

— Jayden…

Sa voix, celle que je n’entends pratiquement plus depuis des mois ou seulement quand nous nous disputons. À ce moment précis, elle est douce, presque empreinte de pitié.

Je relève mes yeux vers elle, je lui souris timidement.

— Je suis désolée.

— Pas tant que moi Jennie.

— Je ne voulais pas que ça se passe de cette manière.

— Si mes souvenirs sont bons, c’est toi qui en as fait la demande pourtant.

— Oui, mais pour la garde…

— Ne t’inquiète pas, c’est le lot de beaucoup de pères de se sentir inutiles.

— Ne dis pas ça ! Répond-elle avec un léger sanglot dans la voix.

— Pourtant…

— Jay ?

— Quoi ? Je lance, légèrement irrité.

— Rien… Si tu veux que nous réglions toute cette affaire rapidement, tu pourrais venir à la maison pour vérifier nos disponibilités.

— Je préfère que ce soit effectué chez mon avocat si ça ne te dérange pas.

— Euh… Oui, j’en parlerai au mien.

— Et je souhaiterai voir Joy, ce soir ou demain, pour lui expliquer.

— Oui bien sûr.

Sa mère s’approche.

Comme je peux la détester. Parce que si on en est là aujourd’hui, c’est clairement à cause d’elle. Elle me hait depuis ce fameux jour, depuis que nous avons perdu le bébé. C’était il y a presque un an. Je m’en souviens encore. Elle m’a considéré, comme si j’étais le diable en personne.

Elle me dévisage et me sourit. L’envie de me faire payer tout ce qui s’est passé jusqu’à présent se voit dans ses yeux.

— Jayden, me salue-t-elle avec dédain.

— Hannah… Je hoche la tête en soupirant d’ennui.

Elle se tourne vers Jennie.

— Chérie, il faut se dépêcher, j’ai réservé à midi pile, je ne voudrai pas perdre notre table.

— Oui j’arrive ! Deux secondes !

Jennie semble irritée par cette intrusion.

Sa mère l’horripile, mais elle n’a jamais pu couper le cordon. C’est elle qui lui dicte sa vie. Elle s’en défend, mais elle ne peut s’en détacher. Pourtant après le procès de son mari et d’Andy, elle n’avait pas souhaité poursuivre les relations avec ses proches. Elle est restée au manoir. Et puis il y a deux ans, le jour de l’anniversaire de Joy, elle a repris contact avec Jennie. Elle est revenue dans nos vies pendant la grossesse de sa fille et j’aurai voulu que jamais ça n’arrive parce qu’à partir de ce moment-là, notre quotidien est devenu un enfer.

Elle se retourne pour discuter avec mon ex-belle-sœur, Emmy.

— Je vois que vous allez célébrer cette décision dignement ! J’ironise.

— Je ne fête rien du tout ! Tu crois que je suis heureuse à l’instant ?

Je l’observe, j’essaie de chercher ne serait-ce qu’un soupçon d’amour, de retrouver ses yeux d’antan, où elle n’avait pas besoin de parler pour que je la comprenne. Mais rien. Elle est tiraillée entre sa famille et moi. Elle lutte. Je le sais.

— J’imagine que non.

— Jayden… Je ne voulais pas que tout ça arrive, mais tu n’as rien tenté pour arranger les choses ! J’aspirais à une vie normale !

Je la coupe.

— Tu ne crachais pas sur cette vie au début ! Merde Jennie !

Mon ton est monté. Elle est gênée. Elle regarde autour de nous pour être sûre que personne n’entende.

— Est-ce qu’on pourrait au moins une fois, essayer d’en parler sans se disputer ?

— Oui, mais pas aujourd’hui, ta mère t’attend avec impatience pour sabrer le champagne et fêter dignement NOTRE divorce !

Elle baisse les yeux. Elle en pleurerait, je la connais. Je ne veux pas l’affliger davantage. Je m’approche d’elle, dépose un baiser sur sa joue.

Elle inspire.

Elle sent si bon. Tout d’elle me manque.

— Au revoir, Jennie, je passerai plus tard pour voir Joy.

— Oui, ce soir, c’est bien, je serai seule avec la puce.

— OK.

J’enfile ma veste et traverse la longue allée de la salle du tribunal. Sa mère me regarde partir en souriant, conquérante. Je me tourne vers elle et lui lance :

— Et surtout, n’oubliez pas, Hannah, de porter un toast pour moi !

Elle marmonne un truc que je n’entends pas. Je laisse la grande porte en bois se refermer derrière moi.

***

De l’air.

Enfin.

Il fallait que je respire. Je remets mon portable en marche et m’avance vers ma voiture. Je m’installe au volant et démarre. La route est encombrée, je suis pris dans les embouteillages, mais mon souci n’est pas là. Je réfléchis aux mots que je vais devoir employer ce soir pour expliquer à ma fille qu’elle ne me verra plus quand elle le souhaitera ou quand moi je le voudrai. Qu’il faudra attendre toutes les deux semaines pour s’embrasser, se serrer fort dans les bras, se raconter nos petits secrets ou réaliser plein d’autres choses qui me permettaient de m’évader de ma putain de vie !

Je tape sur le volant. Je lâche prise. Des larmes coulent sur mes joues. La circulation se ralentit encore. La sonnerie de mon téléphone m’avertit de l’arrivée d’un message.

« Tu peux penser ce que tu veux de moi, tu peux être en colère après moi, mais je sais que tu feras toujours partie de ma vie. Je suis désolée. »

Je n’attends pas pour répondre.

« Tout ce qui m’importe à l’heure actuelle, c’est de ne pas briser le cœur de ma petite fille. Et à travers elle, de toute façon, tu seras éternellement avec moi ».

Chapitre 1

Jennie

Je regarde pour la centième fois sa réponse et pour la centième fois, je me demande si j’ai opté pour le bon choix. Je repense à toute notre histoire et j’imagine quelques secondes qu’il y avait peut-être d’autres solutions pour éviter tout ce gâchis.

Et puis non, tout est bien fini, car Jayden n’a pas fourni les efforts nécessaires pour que notre couple perdure. Je l’ai prévenu et je lui ai expliqué que la vie que nous menions ne me convenait plus. Ses absences répétées, ses excès, ses colères, ont eu raison de notre couple. Il ne m’a pas écouté ou il ne voulait pas comprendre. Je ne sais pas, mais face à tous ces problèmes, j’ai pris une décision.

— Ça va ? Me demande ma sœur.

— Oui, je réponds, émue par mes pensées.

— Tu as discuté avec Jayden, ça s’est bien passé ? Je n’ai pas voulu en parler au restaurant parce qu’il y avait maman.

Je lève les yeux vers elle, attristée.

— Tu le connais, il est persuadé de toute façon que c’est elle qui a tiré les ficelles de notre divorce et de la garde, alors…

— Il n’a pas tort.

— Emmy ! Tu ne vas pas t’y mettre toi aussi !

— Jennie, je ne te juge pas c’est juste que la vie avec Jayden n’était pas si catastrophique.

— Et tu ne me juges pas là ?

Je passe nerveusement, une mèche de mes cheveux derrière mon oreille.

— Il y avait pire comme situation et si maman ne t’avait pas détourné de lui, peut-être que vous auriez trouvé la solution à votre problème !

— De toute façon, tu n’es pas objective toi !

Elle me dévisage l’air étonné par mon attaque.

— Pourquoi ?

— Parce que…

— Développe s’il te plaît ?

— Tu es proche de Jayden.

— Ça ne m’a jamais empêché de lui dire le fond de mes pensées que je sache !

— Tu lui trouves toujours des excuses !

— Ce n’est pas vrai ! Mais il ne méritait pas cet acharnement ! La garde alternée, c’était une chouette décision et il aurait mieux accepté la séparation !

— Je ne t’ai pas mis le couteau sous la gorge pour écrire ta lettre de soutien !

— Bien sûr que non, mais je n’ai pas enfoncé Jay non plus ! Tu es ma sœur et je t’ai défendue, mais je n’aurai jamais pu faire ce que maman a mis à exécution !

— C’était pour mon bien !

— Et tu as cautionné, tu sais pourtant qu’il t’aimait et qu’il aurait tout donné pour toi ! Je n’arrive pas à croire que tu dises une chose pareille !

— Ah oui ! Et toutes ses fausses excuses, son travail et son absence lors de la perte de notre fils hein ? C’est toi qui as subi ?

Emmy reste muette et change de conversation.

— Tu en as parlé à Joy ?

Je relève la tête et observe ma fille qui joue dans le jardin avec le chien que Jayden lui a offert pour son dernier anniversaire.

— Non, c’est lui qui va le faire, il vient ce soir.

— D’accord.

— D’ailleurs, je ne vais pas tarder à rentrer, je vais dire au revoir à maman.

— OK.

Emmy me fixe et je sens bien qu’elle veut me dire quelque chose.

— Jennie ?

— Oui ? Je réponds en me levant.

— Si tu as besoin, je suis là.

— Je sais…

Chapitre 2

Flashback Jennie

J’entame mon sixième mois aujourd’hui.

Ce sera un garçon, on le sait depuis deux mois à peu près et Jayden est ravi. Moi aussi, pourtant depuis quelque temps notre relation s’est dégradée.

Jayden qui a développé une chaîne de bars branchés est souvent absent. Et quand je lui fais la remarque, il ne comprend pas mon attitude. Il pense que nous vivons bien et que nous n’avons pas le droit de nous plaindre.

Quand nous avons eu Joy, il était très présent, il venait à tous les rendez-vous médicaux, il a assisté à l’accouchement, il s’est occupé de sa fille, mais là je sens qu’il pourrait manquer le jour fatidique. Il s’implique beaucoup dans son travail, parfois trop et nous nous disputons de plus en plus.

Je suis toujours aussi bien entourée, ma sœur Emmy, Julia, Priss et ma mère qui a repris contact avec moi à l’annonce de ma grossesse. À l’époque, j’étais réticente à la revoir, car elle ne voulait pas sortir du manoir. Mais après une longue thérapie, elle a réussi à se séparer de la communauté et du joug de mon paternel. Les rapports restent un peu tendus avec Jayden, mais je la rencontre quand il n’est pas là et comme il n’est pas très présent…

Cela fait quelques minutes que j’ai des douleurs au ventre. Je m’assois un instant, mais ça continue. J’appelle Jayden et je tombe encore une fois sur sa messagerie. Mais cette fois, je ne peux plus attendre. Les maux deviennent insupportables alors je téléphone à Julia, ma belle-sœur qui est la seule à pouvoir me conduire à l’hôpital. Elle arrive en un temps record à la maison.

— Comment te sens-tu ? Me demande-t-elle, inquiète, par ma mine triste.

— J’essaie de joindre ton frère. Il y a quelque chose d’anormal, Julia. J’ai peur pour le bébé.

— Ne t’affole pas, je t’emmène tout de suite, allez, suis-moi m’ordonne-t-elle en me soutenant. Je tenterai d’avoir Jayden de l’hôpital.

***

Il est mort.

Notre bébé est mort.

Et il n’est pas là.

Je vais devoir accoucher de ce petit être que j’aimais déjà et lui, il brille par son absence.

Les larmes coulent sur mes joues et Julia qui est restée avec moi, serre ma main pour me donner du courage.

— On voulait l’appeler Jérémy…

Julia m’écoute attentivement et moi, ça me fait du bien de parler de mon enfant.

— C’est très joli, ajoute-t-elle en sanglotant, elle aussi.

— Oui un prénom avec un J… Pour perpétuer la tradition de ta maman.

Julia a du mal à cacher sa tristesse et elle s’excuse auprès de moi pour sa détresse.

— Tu restes avec moi ?

— Bien sûr me répond-elle avec un sourire compatissant.

— Où est-il Julia ? J’ai besoin de lui et il n’est pas là.

— Je sais Jen, je lui ai laissé un message, il va arriver, ne t’inquiète pas.

— Il faut que tu prennes soin de lui, ça va lui faire mal d’apprendre que notre enfant est mort.

— Pense à toi d’abord.

— J’ai peur.

Elle serre ma main un peu plus fort.

Et puis les médecins sont venus me chercher. Ils ont interdit l’accès à la salle d’opération à Julia. Et je me suis retrouvée seule face à mon chagrin et l’angoisse de la suite des évènements.

***

— Pardon bébé…

Mes yeux cillent et je sens une main posée sur la mienne. J’aperçois la silhouette de Jayden, son front appuyé sur les draps de mon lit d’hôpital. Il ne bouge pas et j’entends des sanglots.

Mais je ne suis pas en capacité de supporter sa tristesse. Mes doigts se crispent sous sa paume et il relève aussitôt la tête.

— Jennie…

Je le foudroie du regard. La froideur avec laquelle je retire ma main de la sienne l’interpelle.

— Jen…

— Va-t’en lâché-je dans un murmure.

Il fronce les sourcils.

— Jennie… Je…

— Je t’ai demandé de partir !

Je lui tourne le dos en m’effondrant.

Je le sens derrière moi et quand ses doigts se posent sur mon épaule, je le repousse en criant.

— Je ne veux plus te voir tu m’entends ? Plus jamais ! Laisse-moi tranquille !

Il reste transi un instant, le temps que mes paroles fassent leur chemin jusqu’à son cerveau embué.

— SORS ! Je hurle pour qu’il réagisse.

Il sursaute. Il attrape sa veste et fait ce que je lui ordonne sans demander son reste. Il m’observe une dernière fois et referme la porte derrière lui.

Chapitre 3

Jayden

Je gare la voiture dans mon parking privé. Je suis fatigué. J’ai juste envie d’une bonne douche et de me relaxer un peu avant de rejoindre ma fille pour les explications.

Mon téléphone sonne. C’est Julia.

— Hey ! Tu ne m’as pas appelé, ça va ?

— J’ai perdu Ju.

— Quoi ?

— Je ne la verrai que toutes les deux semaines ! Tu te rends compte ? Quinze jours entre chaque visite, Putain !

Je m’effondre. Ma sœur reste silencieuse au téléphone.

— Je suis désolée, Jay. Je ne sais pas quoi te dire.

— Il n’y’a rien à dire de toute façon.

— Tu veux que je passe ?

— Non, ce soir je vais chez Jennie. Je vais expliquer la situation à Joy.

— Ne t’inquiète pas Jayden, je suis persuadée qu’un jour tout s’arrangera. Jennie t’aime, je le sais, elle ouvrira les yeux tôt ou tard. Et puis vous avez vécu une chose terrible tous les deux et…

— J’ai été minable.

— Ne dis pas ça Jayden.

Je pose mon front contre la grande baie vitrée du salon et je laisse passer un long silence, puis je reprends la parole.

— J’y vais, désolé Julia, mais je suis pressé.

— OK… Jayden ?

— Oui ?

— Je t’aime petit frère.

— Moi plus que toi.

Je raccroche et des images de notre vie à deux me reviennent instantanément. Mes pensées s’envolent alors vers elle encore.

— Pourquoi te maquilles-tu ? Tu es si jolie au naturel !

— Arrête Jay, tu as vu dans quel état je suis. Je n’arrive plus à sortir trois fois d’affilée jusqu’à cinq heures du matin !

— Moi je te préfère sans !

Elle me contemple en souriant. Je passe ma main sur son petit ventre arrondi.

— J’espère que ce sera un garçon !

— Pourquoi ?

— Parce que j’éviterai d’attendre mon tour dans la salle de bain !

— N’importe quoi ! Ça sera une fille tu verras !

Je pose mon menton sur son épaule, je l’admire dans le miroir au-dessus de la vasque.

— Je suis fou de joie à l’idée d’avoir ce bébé !

Elle continue à se mettre du mascara, elle sourit. Elle est si belle.

— J’ai peut-être trouvé un prénom féminin qui me plaît.

— Ah oui ? Lequel ?

— Jodie !

— Jodie… Jodie… Je feins d’hésiter en déposant mon index sur mon menton.

Elle arrête de se maquiller, elle me dévisage attentivement.

— Ouais, c’est pas mal !

— Chouette ! C’est donc réglé !

— Si c’est une fille… Moi je pensais à Jérémy pour un garçon non ?

Elle râle gentiment. Je dépose un baiser dans son cou. Elle baisse la tête pour me laisser plus de place. Mes mains desserrent le nœud de son peignoir. Elle range le tube de mascara sur la vasque et joint ses doigts aux miens.

Nous continuons à nous considérer dans le miroir. Ma bouche se perd sur ses épaules que je dénude lentement. Elle se retourne pour se retrouver face à moi. Elle retire délicatement des mèches de cheveux qui tombent sur ses yeux. Elle me sourit. Elle est superbe.

Je sens sa chaleur sur mon torse, ses mains s’immiscent dans mon boxer, elle le fait glisser le long de mes jambes. Mon sexe est déjà tendu et chaud. Je l’embrasse langoureusement, ma langue appelle la sienne. Elle me la donne. Ce baiser sensuel réveille nos sens.

Mes doigts se perdent sur un de ses seins, son téton se durcit au contact de mes caresses. Un frisson la parcourt. Elle me rend fou. Comme au premier jour. Je la respire. J’ai envie d’elle. Mes entrailles bouillonnent. J’imagine que les siennes sont dans le même état.

— Je t’aime, me murmure-t-elle d’une voix presque inaudible.

Je lui souris à nouveau et la soulève. Je la repose sur le meuble de notre salle de bain, maintes fois témoin de nos ébats passionnés. Elle passe ses jambes autour de ma taille. Mon sexe frôle le sien déjà humide. Sa main l’accompagne jusqu’à l’entrée de ses secrets, je m’avance légèrement, elle gémit, je suis en elle.

— Je ne te fais pas mal ? Je lui demande soucieux.

— Non ne t’inquiète pas, j’ai envie de toi.

Ma bouche titille sa poitrine, mon bassin va et vient. Elle baisse la tête en arrière, je lèche son cou et mordille sa carotide.

Je m’emploie avec délectation à faire monter sa jouissance. Ses cris deviennent plus forts, je la contemple, j’adore quand elle est dans cet état. Ses gémissements m’excitent, j’accélère ma cadence. Elle souffle mon prénom.

Un dernier mouvement et nous accédons tous les deux à l’orgasme ultime. Je la serre dans mes bras. Sa respiration se perd dans mon cou. Elle m’étreint amoureusement. Elle laisse des petits baisers sur mon oreille. Je fais de même.

— Je t’aime, je murmure ému.

L’eau qui coule sur mon visage m’est bénéfique. J’ai son image ancrée en moi. Je me souviens de tout, des sensations, de son parfum…

J’ouvre les yeux et arrête la douche. Je prends ma serviette et me sèche. Je m’observe dans le miroir et je souris au souvenir de ce moment merveilleux.

Jennie, si tu savais combien tu me manques, combien je m’en veux de n’avoir rien écouté. C’est seulement aujourd’hui que je m’en rends compte… Et il est trop tard.

***

20 h — Chez Jennie.

J’appuie sur la sonnette. J’entends déjà Joy qui crie de joie. Jennie essaie de la tempérer, mais la porte s’ouvre avec fracas.

— Papa !

— Ma puce, je lui réponds avec émotion.

Elle saute dans mes bras.

— Comment va ma princesse ?

— Bien papa.

Elle dépose un baiser sur ma joue. J’enfouis mon visage dans sa douce chevelure blonde.

— Tu restes manger avec nous ?

J’observe Jennie qui n’a pas l’air contre cette idée, mais ce ne serait pas judicieux après les explications que je vais lui fournir.

— Non pas ce soir mon cœur, papa est juste venu te voir, j’ai des choses à te dire.

— Des secrets ? Demande-t-elle avec sa petite frimousse.

— Oui.

— Et maman, elle peut écouter ?

— Non, seulement toi et moi.

— Je vais dans ma chambre alors ! Tu viens ?

— Je te rejoins !

Je me débarrasse de ma veste.

— Tiens donne-la moi, je vais la mettre dans le placard, me soumet Jennie.

Je relève mon visage vers elle. Elle est émue. J’aperçois ses yeux larmoyants. Je lui tends mon vêtement.

— Tu peux rester dîner avec nous, propose-t-elle l’air de rien.

— Je ne pense m’attarder après avoir parlé avec Joy.

A ma réponse, je peux voir une nouvelle fois la tristesse dans son regard.

— Je vais monter.

— Oui.

Je m’avance vers les escaliers quand elle m’interpelle.

— Jayden ?

Je me tourne dans sa direction.

— Tu… Prends ton temps surtout.

— OK.

J’ouvre la porte de la pièce. La décoration a été changée.

— Comment tu trouves ma nouvelle chambre ?

— Elle est magnifique ma puce.

— Tu as vu mon lit, un vrai lit de princesse.

— Oh oui alors, digne des contes de fées.

— Viens on s’assoit dans mon château.

— Je ne sais pas si je vais pouvoir entrer là-dedans.

— Mais si ! Baisse-toi !

— OK.

Nous voilà tous les deux dans un mètre carré de tissu. Elle s’est blottie dans le creux de mon bras.

— C’est mamie qui m’a tout acheté !

— Ah…

— Alors, papa, raconte-moi les secrets !

Je la regarde, elle est si belle. Ma réussite, mon bonheur, c’est ce petit bout de femme. Elle a volé la beauté de sa mère et ses yeux.

— Papa ! Papa, m’appelle-t-elle en me tirant sur la manche.

— Oui.

— Tu rêves !

— Excuse-moi.

— Alors je t’écoute moi !

J’entrouvre la bouche pour commencer. Elle m’interrompt.

— Attends papa ! Est-ce que tous les secrets il faut qu’ils restent secrets ?

— Pourquoi ?

— Est-ce que je peux les raconter à maman après ?

— Non, ma puce, je ne préfère pas.

Elle me considère interdite, mais me répond innocemment.

— D’accord.

Je respire un grand coup.

— Tu sais ce matin, nous avions un rendez-vous avec le juge.

— C’est le monsieur qui a dit que tu ne pouvais plus habiter dans la maison ?

— Oui c’est lui.

— Il a changé d’avis ? Me questionne-t-elle en souriant.

— Non chérie.

— Ah… Elle semble déçue.

— Et…

Je sens l’émotion me submerger. Elle attrape ma main comme si elle pouvait ressentir ma tristesse.

— Et aujourd’hui, il nous a donné la réponse pour les visites.

— II veut que j’aille à ta maison ? Hein, papa, c’est oui ?

Les larmes m’envahissent. Comment vais-je lui faire comprendre ?

— Pas exactement, mon cœur.

— C’est toi qui reviens alors ?

Elle m’étonne par sa faculté de discernement. Elle reprend son air sérieux. Ses sourcils se froncent.

— Il a déclaré qu’on ne pourrait se voir que le week-end.

— C’est après l’école ?

— Oui.

— Et je n’aurai pas le droit de venir les autres jours ?

— Non ma puce, juste le samedi et le dimanche.

Les larmes coulent sur mes joues.

— Pourquoi tes yeux sont mouillés papa ? C’est bientôt, on est mercredi aujourd’hui, parce que je n’ai pas eu école et il reste plus que deux dodos.

— Oui ma chérie, mais ce ne sera pas tous les week-ends.

Elle commence à pleurer. Je la prends dans mes bras.

— Il est méchant ce juge ! Moi je ne veux pas ! Je veux que tu viennes à ma maison et je veux aller à ta maison ! Il n’a pas le droit de faire ça !

— Mais on en profitera quand on se verra et puis il y aura aussi les vacances !

— Je ne veux pas ! Crie-t-elle.

Elle sort du château en tissu et saute sur son lit en pleurs. Elle attrape son doudou. Je la rejoins. Malo lève sa tête et oriente ses oreilles vers ma fille.

— Pourquoi papa ? Pourquoi tu n’es pas avec maman dans notre maison ?

— Je ne sais pas, parfois les papas et les mamans ne s’entendent plus et…

— Tu ne l’aimes plus ?

Je reste silencieux un moment.

— Tu veux entendre un autre secret ?

Elle se redresse pour mieux m’écouter et j’efface avec mon pouce les larmes qui roulent sur son visage.

— J’aimerai toujours ta maman, vous êtes mes princesses toutes les deux.

— Je pourrai te téléphoner ?

— Bien sûr ! J’espère que tu le feras tous les jours ! Pour me faire le bisou du matin et du soir.

— Je le ferai, je te promets papa !

— C’est bien ma puce.

— Tu es triste ?

— Oui.

— Je n’aime pas quand tu pleures.

— Moi non plus tu sais.

— Maman aussi elle pleure beaucoup et puis elle regarde les photos et elle continue à pleurer.

— Tu dois la consoler.

— Je le fais et si toi tu es triste il faut que tu m’appelles.

— Je le ferai, promis.

Elle attrape mes joues avec ses mains et me dépose un énorme bisou. Son chien nous rejoint et nous gratifie de léchouilles qui la font rire.

— Je t’aime mon papa.

— Moi aussi mon cœur.

J’essaie de gérer mon émotion au mieux, mais c’est difficile. Je l’embrasse tendrement encore une fois et referme la porte de sa chambre derrière moi.

Je descends les escaliers rapidement. Jennie me dévisage. Elle aperçoit mes yeux rougis et s’approche avec prudence.

— Tout va bien ? Me demande-t-elle gentiment.

— Tu peux me donner ma veste s’il te plaît ?

— Si tu veux on peut mettre en place le calendrier de garde.

— Non ! Pardon Jennie, mais là c’est trop difficile pour moi, on verra ça plus tard.

Elle décroche ma veste du cintre dans le placard et me la tend. Je la récupère et la remercie d’un signe de tête.

— OK, mais si tu le souhaites ce week-end tu peux venir chercher Joy.

Je lève les yeux vers elle.

— Oui j’aimerai bien.

— C’est d’accord, tu pourras la prendre vendredi soir.

— Merci, je réponds démuni par mes larmes.

— Jay…

— Non s’il te plaît, on se voit à la fin de la semaine.

J’aurai besoin de l’embrasser, j’aurai envie qu’elle m’enlace dans ses bras tellement la situation m’est insupportable, mais je me dirige vers la porte pour partir au plus vite, car je sais que tout cela n’arrivera pas.

Dans la voiture, sur le chemin du retour, mon esprit divague pour me rappeler encore des moments douloureux.

Elle est dos à moi devant la fenêtre et elle fixe l’horizon avec son regard vide. Nous sommes rentrés hier de l’hôpital et depuis elle n’a pas cessé de pleurer.

Elle ne m’a pas adressé la parole depuis qu’elle m’a demandé de quitter sa chambre d’où elle m’a fait comprendre qu’elle ne voulait plus me voir.

Elle tourne la tête, elle a dû sentir ma présence.

— Où est Joy ?

Trois mots, trois putain de mots qui me font du bien.

— Chez ma sœur, tu as besoin de quelque chose ?

Elle ne me répond pas et elle se repositionne comme il y a cinq minutes. Je n’insiste pas et la laisse seule dans la pièce.

Je passe quelques coups de fil pour le travail. Je vais prendre quelques jours. J’ai envie d’être avec elle et d’être là pour elle.

Quand je reviens, elle n’est plus dans la salle à manger. Je monte à l’étage.

Ça me rend malade de la voir allongée sur notre lit, sa main sur son ventre. Je m’approche d’elle, me positionnant contre son corps. Mais je la sens se raidir.

— Jennie… S’il te plaît, parle-moi, dis-moi quelque chose n’importe quoi, mais parle-moi.

J’entends son sanglot et ça me rend fou. Elle est malheureuse et je ne peux rien y faire. Je m’aventure à glisser ma main autour de sa taille.

D’un geste violent, elle la dégage et elle se rapproche du bord du lit.

Je soupire et essaie de me contenir, mais la colère l’emporte.

— Vas-y ! Balance-moi en pleine gueule ce que tu meurs d’envie de me dire ! J’en ai assez de ton silence et de tes yeux qui m’assassinent à chaque fois que tu me regardes !

Elle lève ses obsidiennes vers moi et bordel elle m’arrache le cœur rien que de la voir dans cet état.

— Je…

Elle avale sa salive.

— Je veux que tu t’en ailles, je dois réfléchir.

— Réfléchir à quoi ?

— À nous, notre vie.

— Tu souhaites divorcer ?

Son silence me tue. Elle y pense.

— J’ai… J’ai besoin d’être seule.

— Tu me tiens pour responsable de sa mort ?

Elle essuie rageusement son visage.

— Non, je t’en veux de ne pas avoir été présent. J’avais besoin de toi et tu n’étais pas là. Et tu n’es plus là depuis longtemps maintenant.

— Je me suis excusé. Tout ce que je fais, c’est pour nous, pour notre famille. Tout ça, je montre la pièce, c’est pour que toi et Joy vous ne manquiez de rien et tu me le reproches !

— C’est de toi dont j’ai besoin, pas de ton fric et de cette maison.

— Tout ça comme tu dis ! C’est pour nos enfants, pour leur laisser quelque chose ! Je bosse dur pour…

— Tu aurai dû être là pour notre fils, rétorque-t-elle en me coupant la parole.

Ses mots me font l’effet d’une bombe. Je la dévisage, sans réaction. Putain je suis amoureux d’elle comme au premier jour et je la perds. J’avais l’impression de tout bien faire pour lui offrir une belle vie et c’est ce qu’elle me reproche.

Je me déplace vers le placard et prends mon sac de voyage que je remplis de mes vêtements. Elle est toujours là devant moi en larmes et me regarde. Je ne prononce pas un mot. Quand je finis de le remplir, je lève les yeux vers elle, mais je ne sais pas quoi lui dire.

Elle se tourne et pleure de plus belle. J’aimerai à cet instant la prendre dans mes bras et la consoler, mais elle ne voudra pas de ce contact.

Je ferme la porte derrière moi et j’appelle Priss.

— Salut, mon beau, comment tu te sens ?

— Je me sens mal Priss… Il faut que tu viennes à la maison tenir compagnie à Jennie.

— Pourquoi, tu es là non ? Ne me dis pas que tu vas bosser ? Elle a besoin de toi Jay ! Reste près d’elle !

— Elle ne veut plus de moi Priss, elle m’a demandé de partir, alors je ne veux pas qu’elle soit seule, pas en ce moment. S’il te plaît, aide-moi.

— Je… Pardon Jayden, tu es sûr de toi ?

— Oui, j’ai pris mes affaires et je pars chez mon père.

— Elle est peut-être sous le choc encore.

— Non Priss, elle me tient pour responsable de la mort du bébé et elle est malheureuse avec moi.

— Ne dis pas ça.

— C’est pourtant la réalité, je pensais pouvoir lui offrir une belle vie et je n’ai rien vu venir, rien du tout. C’est fini…

Chapitre 4

Jennie

J’entre dans la chambre de ma fille. Elle pleure et parle à son doudou. Elle a la photo de Jayden entre les mains.

— Hey ma puce, je viens partager un câlin.

— Moi je veux que papa soit là pour le câlin.

— Il a dû t’en faire juste avant qu’il ne parte.

— Oui, mais il était triste et je n’aime pas quand papa pleure.

— Je sais ma puce, mais ça ira mieux, ne t’inquiète pas, il est fort, tu sais.

Elle m’observe comme pour être rassurée.

— Le juge ne veut pas que j’aille dans sa maison.

— Non chérie, le juge a décidé que papa pouvait venir te chercher, mais pendant des jours précis.

— Je crois que ce n’est pas une bonne nouvelle.

— Disons qu’il préférerait te voir tous les jours.

— Il n’a qu’à revenir ici alors !

Elle resserre son doudou contre elle.

— Joy, c’est compliqué, tu sais. Je t’ai déjà expliqué.

— Est-ce que tu l’aimes toujours ?

— Pourquoi tu me poses cette question ?

— Réponds-moi maman.

— Oui… Enfin je veux dire que papa est important pour moi.

— Papa a répondu lui.

— Ah et je peux savoir ?

— Je ne peux pas te le dire, c’est un secret.

— Ah…

Elle me toise. Et je la connais, elle ne peut pas garder un secret et elle meurt d’envie de le révéler. Et moi, je meurs d’envie de connaître la réponse.

— Maman, qu’est-ce qui arrive si je dis un secret ?

— Je ne sais pas.

— Tu crois que papa sera en colère ?

— Non Joy, ton papa ne pourra jamais être en colère après toi.

— J’ai envie de te le dire.

— Alors, motus et bouche cousue.

— Promis ?

— Promis, je rajoute en fermant mes lèvres avec mes doigts.

Joy se rapproche de moi et me souffle dans l’oreille :

— Papa a répondu qu’il t’aimait toujours et que tu étais sa princesse comme moi.

— Vraiment ?

— Oui

Elle se blottit contre moi et nous restons l’une contre l’autre pendant un petit moment jusqu’à ce que je prétexte qu’il est temps d’aller prendre le repas.

***

« Tu me fais souffrir. Je vais en crever tu m’entends je vais en crever ! »

Je me relève brusquement dans mon lit. Je suis en sueur. J’attrape ma bouteille d’eau posée sur la table de chevet et

en bois quelques gorgées.

Ce cauchemar avait tellement l’air réel. Jayden était là à côté de moi. Mon souffle est encore saccadé et j’ai du mal à revenir à la réalité. J’allume ma petite lampe et retombe sur mes coussins. Je ramène la couette sur moi tout en fixant le plafond.

Combien de temps encore tout cela va durer ?

Est-ce qu’il souffre autant dans la réalité ?

Toutes les nuits, il pleure, il hurle et je recommence chaque soir à me poser des tas de questions.

Est-ce que j’ai tout mis en place pour sauver mon couple ?

Est-ce que ma fille souffre de cette séparation ? Ne feint-elle pas d’être heureuse devant moi ?

Je sais que je vais mettre des heures à me rendormir. Je suis à bout. Je voudrai partir et dormir pendant des jours pour essayer de retrouver une tête à peu près correcte.

Les cernes sous mes yeux se creusent chaque jour. Mon sourire n’existe plus et mes larmes se tarissent tellement je les ai laissées couler pendant des semaines.

La souffrance est comme une deuxième peau. Je pense sans cesse à mon bébé. Jayden était tellement heureux d’avoir un fils. Je voulais tellement ce deuxième enfant avec lui. Tout était parfait. J’avais une vie parfaite avec un homme qui m’aimait, une petite fille adorable.

Et puis Jayden s’est mis en tête de réussir. Il voulait que notre vie soit merveilleuse alors que je me serai contentée qu’elle soit simplement belle. Il voulait toujours plus. Il voulait qu’on ne manque de rien. Comment lui en vouloir ? Quelle femme pourrait lui reprocher ?

Pourtant je l’ai fait…

Il n’était plus présent pour moi, plus présent pour ma fille, pour sa famille. Et quand j’ai dû accoucher seule de notre fils mort-né, je n’ai pas su lui pardonner.

Je fais celle qui reste forte, qui n’est pas touchée. Mais quand je vois ma fille qui pleure avec son doudou dans les bras, je me demande si j’ai pris la bonne décision.

Il hante mes nuits.

Je n’arrive plus à avoir le recul nécessaire à la situation et ma mère ne m’aide pas à toujours vouloir le dénigrer.

Chapitre 5

Jayden

Je ne sais pas comment expliquer mon état. Je suis là devant la baie vitrée, je contemple la ville illuminée. J’ai une boule au ventre. Ma fille m’a anéanti ce soir. Je revois ses petits yeux bleus tristes si expressifs.

Comment je peux supporter toute cette merde ?

Comment j’ai pu laisser s’envenimer la situation ?

Je ne peux m’en prendre qu’à moi-même. J’aurai dû l’écouter, être plus présent et sauver mon mariage.

Bordel ! Je l’aime comme un fou et je n’arrive même pas à la détester quand je vois ce qu’elle peut commettre à cause de sa mère. Quand elle me contemple avec ses yeux larmoyants, ça me rappelle la première fois où nous nous sommes embrassés et où elle m’a avoué n’avoir jamais donné un baiser à un garçon. À partir de ce moment, même si nous avons eu des passages difficiles, j’ai pensé qu’elle était la femme de ma vie. Pour moi, je vivais un conte de fées avec elle et notre fille. Ma formation me prenait beaucoup de temps, mais nous arrivions à en avoir pour nous, puis je me suis mis à mon compte et j’ai bossé dur pour ouvrir mes deux premiers bars. Je me souviens qu’elle me soutenait dans mon entreprise et elle me donnait des ailes. Nous vivions toujours dans la maison près de la plage que mon père m’avait cédée. C’était petit, mais on s’en accommodait. Puis pour les quatre ans de Joy, Jenny est tombée enceinte et nous avons dû nous mettre en quête d’une maison plus grande.

Et nous avons perdu le bébé… Mon fils. J’étais fier qu’elle me donne un petit garçon. Je bossais dur pour lui offrir tout ce dont elle rêvait et j’ai sacrifié ma famille sans m’en rendre compte.

Elle a souffert de la perte de notre enfant, peut-être plus que moi, car elle le portait. Mais moi, j’ai été anéanti et j’ai essayé de faire face. Tout seul parce que je voulais que notre entourage s’occupe d’elle et pas de moi. C’est elle qui avait besoin de l’attention et Joy aussi, car même si elle est encore jeune, elle a très bien compris la situation.

Il n’y a que mon père qui a pris la mesure de ma tristesse, car il m’a plusieurs fois surpris effondré, ou complètement saoul tellement je n’arrivais pas à surmonter mon chagrin. Je lui ai demandé de ne rien dire à personne. Qu’il fallait que j’arrive à m’en sortir tout seul et être fort pour Jennie et Joy. Même si je savais qu’elle me détesterait. Il m’a beaucoup épaulé et j’ai réussi à repartir de l’avant grâce à lui.

Aujourd’hui, je me sens mieux, mais une partie de mon cœur s’est envolé avec ce petit ange. Jérémy…

Je suis sorti de mes pensées par la sonnerie de mon téléphone.

— Allo !

— Jay ?

— Ah, salut Emmy.

— Comment tu vas ?

— Pas trop mal.

— Je suis désolée pour ce matin.

— Je sais.

— J’ai parlé avec Jennie dans l’après-midi et…

— Je ne veux pas savoir, je t’assure ça me fait du mal, ne me parle pas d’elle.

— Désolée, tu as prévu quelque chose pour ce soir ?

— Non je ne suis pas trop en forme, je reviens de la maison, je suis allée voir Joy.

— Ça s’est bien passé ?

— Entre deux pleurs oui, je crois qu’elle n’a pas la notion du temps, alors pour elle un week-end tous les quinze jours ça ne veut rien dire contrairement à moi.

— Tu devrais faire appel Jay !

— Appel ? Pourquoi ? De toute façon Emmy, j’ai bien mérité tout ce qui m’arrive, je n’avais qu’à être à l’écoute de Jennie, mais j’étais trop occupé avec mes conneries.

— Ce ne sont pas des conneries Jay, c’est ton travail !

— Ouais, mais j’aurai pu fournir des efforts, je le sais.

— Et puis par-dessus rajoute ma mère et le compte est bon…

— Oui Hannah ne m’a pas aidé sur ce coup-là.

— Je ne cautionne absolument pas Jay, je te le dis, je me suis un peu pris la tête avec Jennie à ce sujet.

— Merci, Emmy, mais je ne veux pas que tu te disputes avec elle. Elle a besoin de toi.

— Elle ouvrira les yeux Jay, ne t’inquiète pas, je connais Jennie, elle t’aime toujours.

— C’est ce qui me fait le plus mal… de le savoir.

— Je sais.

— Et toi ? Comment tu vas ?

— Ça roule, la routine !

Emmy. Ma belle-sœur, mon ex-belle-sœur maintenant, toujours là pour moi avec Priss et Julia.

— Bon Jay, je vais te laisser, si tu as besoin tu connais mon numéro, tu as toujours mon numéro au moins ?

Elle a le mérite de me faire rire.

— Bien sûr que oui, je ne pourrai pas me passer de toi ma belle !

— Je t’embrasse, à très vite.

— Merci Emmy, je t’appelle dans la semaine.

— D’accord bye !

Mais je n’ai pas le temps de raccrocher qu’on sonne à ma porte. Enzo est là un pack de bière à la main.

— Salut mec ! J’ai ramené les munitions, tu me laisses entrer ?

— Ouais.

J’ouvre la porte et il me donne l’accolade.

— Je pensais que tu ne voudrais pas rester tout seul ce soir. Priss t’embrasse, elle t’appellera plus tard.

— Merci. Je viens de chez Jennie, je suis allé voir Joy pour lui expliquer.

— Comment tu te sens ?

— Vide… Seul…

— Jayden, ne te laisse pas abattre mec, on est tous là pour toi, ne t’inquiète pas.

— Je sais.

— Et Joy ? Elle a compris ?

— C’était super dur, mais elle comprend tout.

— Tu l’as ce week-end ?

— Oui.

— Cool, je la verrai alors, on a prévu un repas à la maison avec Priss, tu viendras ?

— Ouais OK pas de soucis.

La soirée avec Enzo m’a détendu. J’ai bu plus que de raison, mais j’en avais besoin pour oublier toute cette journée merdique. Enzo l’a bien compris, car il ne m’a fait aucune remarque concernant la boisson. En même temps, j’étais chez moi, je ne risquais rien.

Allongé dans mon lit, je n’arrête pas de penser à elle, à nous. Des pans de notre vie me reviennent chaque soir, mais je n’arrive toujours pas à comprendre comment on en est arrivé là.

Même si une personne nous a bien aidés. Ma belle-mère.

Mon téléphone sonne. Hannah.

Je n’ose pas répondre. D’une, parce que j’ai pris une cuite monumentale hier soir et que j’ai la tête en vrac. De deux, je ne vois pas ce que je vais pouvoir lui dire, car je suis certain qu’elle va me parler du bébé.

Et je ne veux pas parler de mon enfant. Pas avec elle.

Depuis des semaines, elle me harcèle et me menace et je n’ai plus aucun contact avec Jennie, car elle filtre tous ses appels.

A son regard à l’hôpital, j’ai compris qu’elle ne me pardonnerait pas mon absence auprès sa fille.

Au départ, j’étais heureux pour Jennie qu’elle se rapproche de sa mère, elle avait besoin d’elle d’autant plus qu’elle était enceinte de notre deuxième et ses conseils et son soutien ont été très importants. Pas que nous étions proches, mais parfois elle canalisait mes colères et lors de nos disputes, elle veillait à ce que nous nous pardonnions rapidement.

Et puis nous avons perdu notre fils… À partir de là, elle m’a considéré comme le diable en personne et toutes les rancœurs qu’elle avait enfouies au fond d’elle ont refait surface.

Dès notre séparation, qui devait être provisoire au départ, elle a commencé à me reprocher l’incarcération de son mari, d’Andy qui aurait pu être un très bon parti pour sa fille.

Vraiment ? On croit rêver ! Un violeur de mineure !

Et puis elle m’a tenu pour responsable de la mort de mon enfant et j’ai compris que les mots de Jennie n’étaient pas forcément les siens et qu’elle était sous le joug de sa mère. Notre histoire reprenait au point zéro, au jour où Jennie s’était échappée du manoir.

Je lis le message qu’elle m’a laissé.

« Jayden, je vous demande pour la dernière fois de ne plus approcher ma fille. Elle n’a plus besoin de vous. Sa famille l’aide à remonter la pente pendant que vous… Vous êtes aux abonnés absents. Je suis prête à vous proposer une somme d’argent, une belle somme même pour que vous disparaissiez et que vous laissiez la garde exclusive de Joy à Jennie. Ce serait le mieux pour cette pauvre petite. Il faudra bien qu’un jour, vous répondiez à mes appels ! Je vous laisse une semaine de réflexion ».

Elle croit vraiment que j’ai besoin de son putain de fric ! C’est elle qui ne fait plus partie du même monde que nous. Elle me menace ! Alors que nous l’avons sortie de la merde !

Je vais péter un plomb.

J’essaie d’appeler Jennie, encore une fois. Je trépigne et je n’ai qu’une envie c’est d’insulter Hannah de tous les noms si jamais c’est elle qui répond.

— Allo ?

Cette voix toute faible redescend ma tension. C’est elle. C’est Jennie. Ça fait des semaines que j’essaie de l’avoir au téléphone.

— Jen ?

J’entends un sanglot.

— Jen ne raccroche pas s’il te plaît, écoute-moi, juste quelques secondes.

Je l’entends toujours pleurer, preuve qu’elle veut bien m’écouter alors je continue ce qui ne sera qu’un monologue, mais je m’en fous du moment qu’elle reste en ligne.

— Je suis désolé. Je t’aime et je souffre de ne plus vous voir, toi et Joy. Je pense à lui tu sais, tous les jours que Dieu fait, je pense, à lui et ce qu’aurait pu être notre vie si on ne l’avait pas perdu.

Son sanglot s’intensifie.

— Ne pleure pas Jen, tu sais que je n’aime pas te voir en larmes, je ne sais jamais comment arrêter ta peine à part te prendre dans mes bras et te serrer fort contre moi.

— C’est… fini… Jayden, nous deux, c’est terminé.

Ces quelques mots me glacent le sang.

— Jennie, laisse-moi te voir s’il te plaît, ne laisse pas ta mère s’immiscer entre nous.

— Ma mère n’a rien à voir avec notre histoire.

— Si bien au contraire ! Elle te détourne de moi ! Au lieu de régler nos problèmes, on s’éloigne et on fait du mal à Joy.

— C’était avant qu’il fallait que tu t’inquiètes, maintenant il est trop tard. Au revoir Jayden.

— NON ! Ne raccroche pas s’il te plaît, je veux voir ma fille tu m’entends ? Je veux voir Joy !

— Vous n’avez qu’à faire une demande au juge, Jayden !

— Putain… Hannah, passez-moi Jennie !

— Il en est hors de question ! Au revoir !

Et cette discussion s’est terminée ainsi, comme toutes les autres que j’avais eu la chance d’avoir avec ma femme.

***

Quand son mari a été incarcéré pour viol, la mère de Jennie a continué à s’occuper du manoir avec les autres personnes de la communauté. Puis petit à petit, elle n’a plus donné de nouvelles jusqu’aux quatre ans de notre fille où elle a envoyé un message à Jennie. Emmy quant à elle, a vécu un temps chez mon père pour ensuite se prendre un appartement avec Mike, le frère d’Enzo.

Hannah est quelqu’un qui a beaucoup de ressources et qui sait très bien se débrouiller toute seule à la grande surprise de sa fille qui la croyait soumise à son mari. Avec l’aide de Jennie, elle a vendu les biens de la communauté, car ils étaient la propriété de Hawkins et elle a investi dans la pierre. Elle s’est retrouvée rapidement rentière et elle vit très bien de ses locations.

Et aujourd’hui, elle est celle qui tire les ficelles de mon divorce et de la garde de ma fille. Mais si elle croit que je pourrai abandonner mon enfant, elle se trompe. Ma vie, mon sang c’est Joy et jamais je ne laisserai tomber.

Heureusement qu’Emmy, qui a des problèmes relationnels avec sa mère depuis cette histoire de manoir, est toujours restée proche de moi. Nous entretenons presque des relations fraternelles. Elle ne cautionne pas ce que peut me faire subir sa mère par l’intermédiaire de Jennie.

C’est comme si l’histoire recommençait. Avant c’était son père qui gérait et maintenant c’est sa mère. Il n’y a pas un jour qu’elle ne passe pas avec elle.

Jennie. Joy.

Elles me manquent. Terriblement. Mais il est trop tard.

Pourtant quelque chose en moi me pousse à me battre car rien n’est terminé…

Chapitre 6

Jayden

Vendredi soir chez Jennie.

— Papa ! Papa ! Est-ce que je peux amener ma poupée et mes jouets ?

— Tout ce que tu veux ma puce.

— N’apporte pas toute ta chambre, mon cœur, papa a des jouets aussi dans sa maison.

— Je sais, mais je veux ma poupée.

— Prends-la ma puce, je lui déclare avec un grand sourire.

— Et Malo, il peut venir avec moi ?

— Chérie, Malo va être malheureux dans un appartement, il vaut mieux qu’il reste ici avec maman pour se promener dans le jardin.

Elle regarde son chien qui est debout près de moi.

— D’accord.

Elle dépose un bisou sur le museau de son animal et lui explique avec ses mots d’enfants qu’elle revient très vite puis elle remonte les escaliers à la vitesse de l’éclair.

Je me retourne vers Jennie toujours avec le sourire aux lèvres.

— Elle va te faire tourner la tête ! Plaisante-t-elle.

— Je crois que c’est fait depuis sa naissance.

— Oui… répond-t-elle en s’asseyant sur le canapé.

J’épie l’entrée pour voir si elle redescend. Le silence est pesant. Je ne sais pas quoi lui dire. J’aurai tant de choses à lui expliquer pourtant, mais les mots ne viennent pas et je n’ai pas envie de me disputer.

Elle brise ce silence insoutenable.

— Dans son sac, j’ai mis des médicaments, elle est un peu enrhumée alors si elle a de la fièvre…

— OK.

— Et si tu peux la faire appeler demain matin, ça me ferait plaisir, ajoute-t-elle avec un timide sourire.

— Oui d’accord. Tu peux l’appeler si tu veux, je n’y vois pas d’inconvénients.

— Merci.

Je respire un grand coup. Ma résolution de ne pas me disputer n’aura tenu que quelques secondes.

— Tu vois où on en est ?

— Quoi ? De quoi tu parles ? Elle semble surprise par le ton employé.

— Putain Jennie, on en est à se faire des courbettes pour notre fille !

— Non Jay, je n’ai pas cette impression… Je…

— Je ne comprends toujours pas pourquoi on en est arrivé là tous les deux, on la fait souffrir j’en suis sûr et au lieu de trouver une solution, on en est à se dire des banalités et à se parler à demi-mots !

— Mais…

— Quand est ce qu’on pourra se dire les choses ? Quand est-ce qu’on essaiera de sauver ce qui peut être sauvé !

Elle se tourne. Les larmes envahissent ses beaux yeux verts. Je me sens coupable de son état, mais je n’arrive qu’à le traduire par la colère et l’incompréhension.

— Il fallait y réfléchir avant Jay, c’est trop tard maintenant.

— Jennie…

— Non ! Pourquoi à chaque fois qu’on se voit, tu me fais pleurer ! J’en ai marre Jayden ! Je ne suis pas coupable de cette situation ! C’est toi le fautif !

— Vous vous disputez ?

Joy se tient debout dans le couloir, elle nous dévisage tour à tour. Ses yeux respirent la tristesse.

— Non, ma puce, ne t’inquiète pas maman et papa parlaient.

— Pourquoi maman elle pleure alors ?

— Je ne pleure pas ma puce, lui répond-t-elle en s’essuyant les yeux.

— Tu es triste parce que je vais chez papa ?

— Non je suis contente que tu ailles chez papa.

Elle reste un instant, interdite essayant de jauger le vrai du faux dans ce que vient de lui dire sa mère.

— Bon on y va papa !

Elle répond d’une façon détachée. Comme si elle était rassurée par les paroles de sa mère.

Jennie m’observe. Elle embrasse Joy et la serre contre elle. Je prends les affaires de ma fille et sors de la maison.

Joy est près de moi. Elle monte dans la voiture.

— J’arrive ma puce, j’ai oublié de dire quelque chose à maman. Attache-toi.

— Oui et dis-lui que je l’aime aussi !

— OK.

Je rejoins Jennie sur le parvis.

— Je suis désolé, je ne voulais pas te faire pleurer.

— Ce n’est rien.

— Si ! J’aimerai qu’on puisse discuter tous les deux sans cris ou sans pleurs.

Elle reste muette, mais sa tristesse me révèle tout.

— J’aimerai qu’un soir on aille dîner tous les deux, quelque part, juste pour qu’on puisse parler sans prise de tête.

—  Oui si tu veux.

Je suis étonné par sa réponse.

— Vraiment ?

— Oui vraiment.

— OK, on verra dimanche alors.

— Oui c’est une bonne idée.

Je retourne vers mon véhicule, mais je reviens rapidement.

— J’ai oublié de faire un truc !

— Quoi donc ?

— Ça !

Je l’embrasse sur la joue en passant ma main sur sa nuque. Elle frissonne. Moi aussi.

— Joy m’a demandé de te dire qu’elle t’aime très fort, je rajoute en chuchotant dans son oreille.

Elle reste quelques secondes, transie dans mes bras. Elle bouge légèrement son visage pour sentir la chaleur de ma main encore un petit moment. C’est moi qui me détache le premier. Je lui fais un sourire qu’elle me rend et je me sens apaisé.

***

Même soir 22 h 30.

J’ai couché Joy, elle était exténuée. Je lui ai raconté son histoire préférée et nous avons parlé quelques minutes. Ses yeux se fermaient tout seuls.

Je range les quelques affaires qu’elle a laissées traîner et décide d’aller me coucher aussi.

Deux heures du matin, je suis réveillé en sursaut par ma fille qui pleurniche.

— Papa, papa !

Elle bouge mon bras pour que je me réveille. J’ouvre un œil.

— Oui ma chérie, qu’est-ce qui se passe ? Je l’interroge d’une voix caverneuse.

— Je veux dormir avec toi.

— Mais Joy, tu seras mieux dans ta chambre.

— Non ! Papa j’ai peur.

J’éclaire la lampe de chevet. Elle est à moitié endormie son doudou à la main. Ses yeux se font suppliants.

— Allez viens.

Elle s’immisce dans les couvertures et pose sa petite tête dans le creux de mon épaule. J’éteins la lumière.

— Ça va ?

— Oui avec toi je n’ai plus peur.

— On fait dodo maintenant, OK ?

— Oui, mais papa.

— Quoi ?

— Tu peux me chanter une chanson ?

— Joy…

— S’il te plaît papa !

J’imagine sa bouille et je craque. Jennie a raison, elle me fait tourner la tête.

Je chante la mélodie qu’elle connaît en chuchotant, elle fait les chœurs pendant quelques secondes. Sa respiration se fait plus lente. Je continue jusqu’à devenir silencieux. Cette fois-ci, c’est la bonne.

***

— Joy ! Mange tes céréales, on s’amusera après.

J’essaie de prendre un ton plus grave, mais apparemment ça ne prend pas.

— Chez maman je mange des pancakes le matin, lance-t-elle boudeuse.

— Tu aimes les céréales aussi.

— Oui, mais je préfère les pancakes de chez maman.

— Joy… Il faut déjeuner sinon on ne pourra pas aller voir tatie Priss.

— Mais je n’aime pas ! Et je veux pareil que chez maman !

Elle a changé de ton. Elle cherche l’affrontement. Je lui réponds le plus calmement possible.

— Ma puce, nous ne sommes pas chez maman ici, nous sommes chez papa et nous mangeons des céréales.

— Et ben moi, je veux que chez maman ce soit chez papa aussi !

Elle éclate en sanglots. Elle prend son doudou et court vers sa chambre.

Je reste assis devant mon bol de café. Je ne sais pas comment réagir face à sa requête. Je me lève tranquillement et tape à sa porte.

Elle ne répond pas.

— Il y a quelqu’un ? Lancé-je sur le ton de l’amusement.

Toujours pas de réponse.

— Je cherche Joy, est-elle là ?

— Non, répond une petite voix.

— Est-ce que je peux entrer pour voir de moi-même ?

— Oui.

J’ouvre la porte. Elle s’est enfouie dans sa couette. Je l’entends chouiner.

— Ma puce, j’insiste avec prudence assis sur le rebord du lit.

Elle reste dans la même position.

— Je suis désolé, papa n’a pas pensé à acheter des pancakes, la prochaine fois je te promets, je n’oublierai pas.

— Et le sirop d’érable aussi.

— OK.

Elle bouge un peu.

— Mais je ne veux pas que tu sois fâchée après moi, d’accord ?

— D’accord.

— Maintenant tu as deux maisons et c’est un peu différent.

— Je ne veux pas avoir deux maisons moi.

— Je sais, mais c’est compliqué pour l’instant.

— Est-ce qu’un jour tu reviendras ?

— Oui… Enfin peut-être, il faut être patient.

— Tu promets ?

— Je ne sais pas chérie, c’est…

— Promets papa !

— Je te promets.

Elle se relève et me serre dans ses bras. Je sais que je n’aurai pas dû lui faire cette promesse, mais je suis faible devant cette petite bouille triste.

— Alors tu ne seras plus méchant avec maman maintenant ?

— Méchant avec maman ? Qui t’a raconté ça ?

— C’est mamie, c’est parce que tu as été méchant avec maman que vous êtes en divorce.

La colère monte en moi, mais je vais me contenir pour éviter qu’elle ne se pose plus de questions.

— Mamie se trompe, mon cœur, papa ne peut pas être méchant avec maman, je l’aime trop.

— Je sais, je l’ai dit à mamie.

— C’est bien ma puce, je suis content que tu le penses.

Cette fois, c’est moi qui la serre fort dans mes bras.

— Tu veux qu’on appelle maman ?

— Oui !

***

Samedi après-midi.

— Tu es prête ?

— Oui.

— Attention je lance le ballon.

— Pas trop haut tonton Enzo, pas trop haut !

— OK, c’est parti !

Je les entends rire tous les deux. Priss et Julia sont sur la terrasse avec James qui tient ma nièce endormie dans ses bras. Preston est dans sa poussette près de sa mère et Josh quant à lui est à l’intérieur, jouant à la console de jeux. Je reste debout les yeux dans le vide.

Il n’y a pas un moment où je ne pense pas à elle. Une situation, une parole, un son… peut me faire dévier vers quelque chose que nous avons vécu tous les deux.

— Putain Jennie ! tu n’es qu’une chieuse, une grosse égoïste et tu ne penses qu’à toi ! J’ai du boulot merde !

— Pardon ? Tu peux répéter ce que tu viens de dire ?

— Tu as très bien entendu !

Je me concentre sur la route au volant de ma voiture. Je ralentis. Le feu devient rouge. Elle est effarée par mes paroles.

— Tu penses ce que tu viens de dire ?