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Traité de la résolution des équations numériques de tous les degrés E-Book

Joseph Louis Lagrange

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La solution de tout problème déterminé se réduit, en dernière analyse, à la résolution d’une ou de plusieurs équations, dont les coefficients sont donnés en nombres, et qu’on peut appeler équations numériques. Il est donc important d’avoir des méthodes pour résoudre complètement ces équations, de quelque degré qu’elles soient. Celle que l’on trouve dans le Recueil des Mémoires de l’Académie de Berlin pour l’année 1767, est la seule qui offre des moyens directs et sûrs de découvrir toutes les racines tant réelles qu’imaginaires d’une équation numérique donnée, et d’approcher le plus rapidement et aussi près que l’on veut de chacune de ces racines. On a réuni dans le présent Traité le Mémoire qui contient cette méthode et les Additions qui ont paru dans le volume des Mémoires de la même Académie, pour l’année 1768. Et pour rendre ce Traité plus intéressant, on y a joint plusieurs Notes, dont les deux dernières paraissent pour la première fois dans cette nouvelle édition. Ces Notes contiennent des recherches sur les principaux points de la théorie des équations algébriques.

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Traité de la résolution des équations numériques de tous les degrés

Joseph-Louis Lagrange

 

 

© 2024 Librorium Editions

ISBN : 9782385746131

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

CHAPITRE PREMIER. méthode pour trouver, dans une équation numérique quelconque, la valeur entière la plus approchée de chacune de ses racines réelles.

CHAPITRE II. de la manière d’avoir les racines égales et les racines imaginaire des équations.

CHAPITRE III. nouvelle méthode pour approcher des racines des équations numériques.

CHAPITRE IV. application des méthodes précédentes à quelques exemples.

CHAPITRE V. sur les racines imaginaires.

CHAPITRE VI. sur la manière d’approcher de la valeur numérique des racines des équations par les fractions continues.

NOTE I. SUR LA DÉMONSTRATION DU THÉORÈME I.

NOTE II. SUR LA DÉMONSTRATION DU THÉORÈME II.

NOTE III. SUR L’ÉQUATION QUE DONNENT LES DIFFÉRENCES ENTRE LES RACINES D’UNE ÉQUATION DONNÉE, PRISES DEUX À DEUX.

NOTE IV. SUR LA MANIÈRE DE TROUVER UNE LIMITE PLUS PETITE QUE LA PLUS PETITE DIFFÉRENCE ENTRE LES RACINES D’UNE ÉQUATION DONNÉE.

NOTE V. SUR LA MÉTHODE D’APPROXIMATION DONNÉE PAR NEWTON.

NOTE VI. SUR LA MÉTHODE D’APPROXIMATION TIRÉE DES SÉRIES RÉCURRENTES.

NOTE VII. SUR LA MÉTHODE DE FONTAINE, POUR LA RÉSOLUTION DES ÉQUATIONS.

NOTE VIII. SUR LES LIMITES DES RACINES DES ÉQUATIONS ET SUR LES CARACTÈRES DE LA RÉALITÉ DE TOUTES LEURS RACINES.

NOTE IX. SUR LA FORME DES RACINES IMAGINAIRES.

NOTE X. SUR LA DÉCOMPOSITION DES POLYNÔMES D’UN DEGRÉ QUELCONQUE EN FACTEURS RÉELS.

NOTE XI. SUR LES FORMULES D’APPROXIMATION POUR LES RACINES DES ÉQUATIONS.

NOTE XII. SUR LA MANIÈRE DE TRANSFORMER TOUTE ÉQUATION, EN SORTE QUE LES TERMES QUI CONTIENNENT L’INCONNUE AIENT LE MÊME SIGNE ET QUE LE TERME TOUT CONNU AIT UN SIGNE DIFFÉRENT.

NOTE XIII. SUR LA RÉSOLUTION DES ÉQUATIONS ALGÉBRIQUES.

NOTE XIV. OÙ L’ON DONNE LA RÉSOLUTION GÉNÉRALE DES ÉQUATIONS À DEUX TERMES.

INTRODUCTION.

La solution de tout problème déterminé se réduit, en dernière analyse, à la résolution d’une ou de plusieurs équations, dont les coefficients sont donnés en nombres, et qu’on peut appeler équations numériques. Il est donc important d’avoir des méthodes pour résoudre complètement ces équations, de quelque degré qu’elles soient. Celle que l’on trouve dans le Recueil des Mémoires de l’Académie de Berlin pour l’année 1767, est la seule qui offre des moyens directs et sûrs de découvrir toutes les racines tant réelles qu’imaginaires d’une équation numérique donnée, et d’approcher le plus rapidement et aussi près que l’on veut de chacune de ces racines. On a réuni dans le présent Traité le Mémoire qui contient cette méthode et les Additions qui ont paru dans le volume des Mémoires de la même Académie, pour l’année 1768. Et pour rendre ce Traité plus intéressant, on y a joint plusieurs Notes, dont les deux dernières paraissent pour la première fois dans cette nouvelle édition. Ces Notes contiennent des recherches sur les principaux points de la théorie des équations algébriques.

Il faut bien distinguer la résolution des équations numériques de ce qu’on appelle en Algèbre la résolution générale des équations. La première est, à proprement parler, une opération arithmétique, fondée à la vérité sur les principes généraux de la théorie des équations, mais dont les résultats ne sont que des nombres, où l’on ne reconnaît plus les premiers nombres qui ont servi d’éléments, et qui ne conservent aucune trace des différentes opérations particulières qui les ont produits. L’extraction des racines carrées et cubiques est l’opération la plus simple de ce genre ; c’est la résolution des équations numériques du second et du troisième degré, dans lesquelles tous les termes intermédiaires manquent. Aussi conviendrait-il de donner dans l’Arithmétique les règles de la résolution des équations numériques, sauf à renvoyer à l’Algèbre la démonstration de celles qui dépendent de la théorie générale des équations.

Newton a appelé l’Algèbre Arithmétique universelle. Cette dénomination est exacte à quelques égards ; mais elle ne fait pas assez connaître la véritable différence qui se trouve entre l’Arithmétique et l’Algèbre. Le caractère essentiel de celle-ci consiste en ce que les résultats de ses opérations ne donnent pas les valeurs individuelles des quantités qu’on cherche, comme ceux des opérations arithmétiques ou des constructions géométriques, mais représentent seulement les opérations, soit arithmétiques ou géométriques, qu’il faudra faire sur les premières quantités données pour obtenir les valeurs cherchées ; je dis arithmétiques ou géométriques, car on connaît depuis Viète les constructions géométriques par lesquelles on peut faire sur les lignes les mêmes opérations que l’on fait en Arithmétique sur les nombres.

L’Algèbre plane pour ainsi dire également sur l’Arithmétique et la Géométrie ; son objet n’est pas de trouver les valeurs mêmes des quantités cherchées, mais le système d’opérations à faire sur les quantités données pour en déduire les valeurs des quantités qu’on cherche, d’après les conditions du problème. Le tableau de ces opérations représentées par les caractères algébriques est ce qu’on nomme en Algèbre une formule ; et lorsqu’une quantité dépend d’autres quantités, de manière qu’elle peut être exprimée par une formule qui contient ces quantités, on dit alors qu’elle est une fonction de ces mêmes quantités.

L’Algèbre, prise dans le sens le plus étendu, est l’art de déterminer les inconnues par des fonctions des quantités connues, ou qu’on regarde comme connues et la résolution générale des équations consiste à trouver, pour toutes les équations d’un même degré, les fonctions des coefficients de ces équations qui peuvent en représenter toutes les racines.

On n’a pu jusqu’à présent trouver ces fonctions que pour les équations du second, du troisième et du quatrième degré ; mais, quoique ces fonctions expriment généralement toutes les racines des équations de ces mêmes degrés, elles se présentent néanmoins, dès le troisième degré, sous une forme telle qu’il est impossible d’en tirer les valeurs numériques des racines par la simple substitution de celles des coefficients, dans les cas mêmes où toutes les racines sont essentiellement réelles ; c’est cette difficulté que les analystes désignent sous le nom de cas irréductible ; elle aurait lieu à plus forte raison dans les équations des degrés supérieurs, s’il était possible de les résoudre par des formules générales.

Heureusement, on a trouvé le moyen de la vaincre dans le troisième et le quatrième degré, par la considération de la trisection des angles et par le secours des Tables trigonométriques ; mais ce moyen, qui dépend de la division des angles, n’est applicable dans les degrés plus élevés qu’à une classe d’équations très-limitée ; et l’on peut assurer d’avance que, quand même on parviendrait à résoudre généralement le cinquième degré et les suivants, on n’aurait par là que des formules algébriques, précieuses en elles-mêmes, mais très-peu utiles pour la résolution effective et numérique des équations des mêmes degrés, et qui, par conséquent, ne dispenseraient pas d’avoir recours aux méthodes arithmétiques qui sont l’objet de ce Traité.

Viète est le premier qui se soit occupé de la résolution des équations numériques d’un degré quelconque. Il a fait voir, dans le Traité De numerosa potestatum adfectarum resolutione, comment on peut résoudre plusieurs équations de ce genre par des opérations analogues à celles qui servent à extraire les racines des nombres.

Harriot, Oughtred, Pell, etc., ont cherché à faciliter la pratique de cette méthode, en donnant des règles particulières pour diminuer les tâtonnements, suivant les différents cas qui ont lieu dans les équations relativement aux signes de leurs termes. Mais la multitude des opérations qu’elle demande et l’incertitude du succès dans un grand nombre de cas l’ont fait abandonner entièrement.

En effet, il est aisé de se convaincre qu’elle ne peut réussir d’une manière certaine que pour les équations dont tous les termes ont le même signe, à l’exception du dernier tout connu ; car alors, ce terme devant être égal à la somme de tous les autres, on peut, par des tâtonnements limités et réglés, trouver successivement tous les chiffres de la valeur de l’inconnue, jusqu’au degré de précision qu’on aura fixé. Dans tous les autres cas, les tâtonnements deviendront plus ou moins incertains, à cause des termes soustractifs.

Il faudrait donc, pour l’emploi de cette méthode, qu’on pût, par une préparation préliminaire, réduire toutes les équations à cette forme. Nous prouverons, dans une des Notes[1], que cette réduction est toujours possible, pourvu qu’on ait deux limites d’une racine, l’une en plus, l’autre en moins, et qui soient telles que toutes les autres racines, ainsi que les parties réelles des racines imaginaires, s’il y en tombent hors de ces limites. Mais la difficulté de trouver ces limites est elle-même aussi grande, et peut-être quelquefois plus grande que celle de résoudre l’équation.

À la méthode de Viète a succédé celle de Newton, qui n’est proprement qu’une méthode d’approximation, puisqu’elle suppose que l’on ait déjà la valeur de la racine qu’on cherche, à une quantité près moindre que sa dixième partie ; alors on substitue cette valeur plus une nouvelle inconnue à l’inconnue de l’équation proposée, et l’on a une seconde équation dont la racine est ce qui reste à ajouter à la première valeur pour avoir la valeur exacte de la racine cherchée ; mais, à cause de la petitesse supposée de ce reste, on néglige dans la nouvelle équation le carré et les puissances plus hautes de l’inconnue ; et l’équation étant ainsi rabaissée au premier degré, on a sur-le-champ la valeur de l’inconnue. Cette valeur ne sera encore qu’approchée ; mais on pourra s’en servir pour en trouver une autre plus exacte, en faisant sur la seconde équation la même opération que sur la première, et ainsi de suite. De cette manière, on trouve à chaque opération une nouvelle quantité à ajouter ou à retrancher de la valeur déjà trouvée, et l’on a la racine d’autant plus exacte qu’on pousse le caleul plus loin.

Telle est la méthode que l’on emploie communément pour résoudre les équations numériques ; mais elle ne sert, comme l’on voit, que pour celles qui sont déjà à peu près résolues. De plus, elle n’est pas toujours sûre ; car, en négligeant à chaque opération des termes dont on ne connaît pas la valeur, il est impossible de juger du degré d’exactitude de chaque nouvelle correction, et il peut arriver, dans les équations qui ont des racines presque égales, que la série soit très-peu convergente, ou qu’elle devienne même divergente après avoir été convergente [2]. Enfin, elle a encore l’inconvénient de ne donner que des valeurs approchées des racines mêmes qui peuvent être exprimées exactement en nombres, et de laisser, par conséquent, en doute si elles sont commensurables ou non.

Le problème qu’on doit se proposer dans cette partie de l’Analyse est celui-ci : Étant donnée une équation numérique sans aucune notion préalable de la grandeur ni de l’espéce de ses racines, trouver la valeur numérique exacte, s’il est possible, ou aussi approchée qu’on voudra de chacune de ses racines. Ce problème n’avait pas encore été résolu ; il fait l’objet des recherches suivantes.

Depuis la première édition de cet Ouvrage[3], il a paru différentes méthodes pour la résolution des équations numériques ; mais la solution rigoureuse du problème dont il s’agit est restée au même point où je l’avais portée, et jusqu’ici on n’a rien trouvé qui puisse dispenser, dans tous les cas, de la recherche d’une limite moindre que la plus petite différence entre les racines, ou qui soit préférable aux moyens donnés dans la Note IV pour faciliter cette recherche.

Voir

la Note XII.

Voir

la Note V.

En 1798.

TRAITÉ

DE LA

RÉSOLUTION DES ÉQUATIONS NUMÉRIQUES

DE TOUS LES DEGRÉS[1].

CHAPITRE PREMIER.méthode pour trouver, dans une équation numérique quelconque, la valeur entière la plus approchée de chacune de ses racines réelles.

1. Théorème I. — Si l’on a une équation quelconque, et que l’on connaisse deux nombres tels qu’étant substitués successivement à la place de l’inconnue de cette équation, ils donnent des résultats de signes contraires, l’équation aura nécessairement au moins une racine réelles dont la valeur sera entre ces deux nombres.

Ce théorème est connu depuis longtemps, et l’on a coutume de le démontrer par la théorie des lignes courbes ; mais on peut aussi le démontrer directement par la théorie des équations, en cette sorte. Soient l’inconnue de l’équation, et ses racines ; l’équation se réduira, comme l’on sait, cette forme

Or soient et les nombres qui, substitués par donneront des résultats de signes contraires ; il faudra donc que ces deux quantités

soient de signes différents ; par conséquent, il faudra qu’il y ait au moins deux facteurs correspondants, comme et qui soient de signes contraires ; donc il y aura au moins une des racines de l’équation, comme qui sera entre les nombres et c’est-à-dire plus petite que le plus grand de ces deux nombres, et plus grande que le plus petit d’entre eux ; donc cette racine sera nécessairement réelle.

2. Corollaire I. – Donc, si les nombres et ne diffèrent l’un de l’autre que de l’unité ou d’une quantité moindre que l’unité, le plus petit de ces nombres, s’il est entier, ou le nombre entier qui sera immédiatement moindre que le plus petit de ces deux nombres, s’il n’est pas entier, sera la valeur entière la plus approchée d’une des racines de l’équation. Si la différence entre et est plus grande que l’unité, alors, nommant les nombres entiers qui tombent entre et il est clair que, si l’on substitue successivement, à la place de l’inconnue, les nombres on trouvera nécessairement deux substitutions consécutives qui donneront des résultats de signes différents ; donc, puisque les nombres qui donneront ces deux résultats ne diffèrent entre eux que de l’unité, on trouvera, comme ci-dessus, la valeur entière la plus approchée d’une des racines de l’équation.

3. Corollaire II. – Toute équation dont le dernier terme est négatif, en supposant le premier positif, a nécessairement une racine réelle positive, dont on pourra trouver la valeur entière la plus approchée en substituant, à la place de l’inconnue, les nombres jusqu’à ce que l’on rencontre deux substitutions qui donnent des résultats de signes contraires.

Car, en supposant le premier terme et le dernier ( étant un nombre positif), on aura, en faisant le résultat négatif et en faisant le résultat positif donc on aura ici et donc les nombres entiers intermédiaires seront tous les nombres naturels donc, etc. (corollaire précédent).

De là on voit :

1o Que toute équation d’un degré impair, dont le dernier terme est négatif, a nécessairement une racine réelle positive ;

2o Que toute équation d’un degré impair, dont-le dernier terme est positif, a nécessairement une racine réelle négative ; car, en changeant en le premier terme de l’équation deviendra négatif donc, changeant tous les signes pour rendre de nouveau le premier terme positif, le dernier deviendra négatif ; donc l’équation aura alors une racine réelle positive ; par conséquent, l’équation primitive aura une racine réelle négative ;

3o Que toute équation d’un degré pair, dont le dernier terme est négatif, a nécessairement deux racines réelles, l’une positive et l’autre négative ; car, premièrement, elle aura une racine réelle positive ensuite, comme, en changeant en le premier terme demeure positif, la transformée aura aussi une racine réelle positive donc l’équation primitive en aura une réelle et négative.

4. Remarque. – Comme on peut toujours changer les racines négatives d’une équation quelconque en positives, en changeant seulement le signe de l’inconnue, nous ne considérerons dans la suite, pour plus de simplicité, que les racines positives ; ainsi, quand il s’agira d’examiner les racines d’une équation donnée, on considérera d’abord les racines positives de cette équation ; ensuite on y changera les signes de tous les termes où l’inconnuese trouvera élevée à une puissance impaire, et l’on considérera de même les racines positives de cette nouvelle équation ; ces racines, prises en moins, seront les racines négatives de la proposée.

5. Théorème II. – Si, dans une équation quelconque qui a une ou plusieurs racines réelles et inégales, on substitue successivement à la place de l’inconnue deux nombres, dont l’un soit plus grand et dont l’autre soit plus petit que l’une de ces racines, et qui diffèrent en même temps l’un de l’autre d’une quantité moindre que la différence entre cette racine et chacune des autres racines réelles de l’équation, ces deux substitutions donneront nécessairement deux résultats de signes contraires.

En effet, soient une des racines réelles et inégales de l’équation, et les autres racines quelconques ; soit de plus la plus petite des différences entre la racine et chacune des autres racines réelles de l’équation ; il est clair qu’en prenant et les quantités et seront de signes contraires, et que les quantités seront chacune de même signe que sa correspondante car, si et étaient de signes contraires, il faudrait que fût aussi compris entre et ce qui ne se peut ; donc les deux produits

c’est-à-dire les résultats des substitutions de et à la place de l’inconnue (no 1), seront nécessairement de signes contraires.

6. Corollaire I. – Donc, si dans une équation quelconque on substitue successivement à la place de l’inconnue les nombres en progression arithmétique

(A)

les résultats correspondants formeront une suite dans laquelle il y aura autant de variations de signes que l’équation proposée aura de racines réelles positives et inégales, mais dont les différences ne seront pas moindres que la différence de la progression ; de sorte que, si

l’on prend égale où moindre que la plus petite des différences entre les différentes racines positives et inégales de l’équation, la suite dont il s’agit aura nécessairement autant de variations de signes que l’équation contiendra de racines réelles positivés et inégales.

Donc, si la différence est en même temps égale ou moindre que l’unité, on trouvera aussi, par ce moyen, la valeur entière approchée de chacune des racines réelles positives et inégalesde l’équation (no 2).

Si l’équation ne peut avoir qu’une seule racine réelle et positive ou si elle en a plusieurs, mais dont les différences ne soient pas moindres que l’unité, il est clair qu’on pourra faire c’est-à-dire qu’on pourra prendre les nombres naturels pour les substituer à la place de l’inconnue ; mais, s’il y a dans l’équation des racines inégales dont les différences soient moindres que l’unité, alors il faudra prendre moindre que l’unité, et telle qu’elle soit égale ou moindre que la plus petite des différences entre les racines dont il s’agit ainsi la difficulté se réduit à trouver la valeur qu’on doit donner à en sorte qu’on soit assuré qu’elle ne surpasse pas la plus petite des différences entre les racines positives et inégales de l’équation proposée c’est l’objet du problème suivant.

7. Corollaire II. – Toute équation qui a un seul changement de signe a nécessairement une seule racine réelle positive.

Il est d’abord clair que l’équation aura nécessairement une racine réelle positive, à cause que son dernier terme sera de signe différent du premier (no 3). Or je vais démontrer qu’elle ne peut en avoir qu’une.

Soient (en supposant le premier terme positif, comme à l’ordinaire) la somme de tous les termes positifs de l’équation, et la somme de tous les négatifs, en sorte que l’équation soit et puisqu’il n’y a, par l’hypothèse, qu’un seul changement de signe, il est clair que les puissances de l’inconnue du polynôme seront toujours plus hautes que celles du polynôme de sorte que si est la plus petite puissance de dans le polynôme et qu’on divise les deux polynômes et par la quantité ne contiendra que des puissances positives de et la quantité ne contiendra que des puissances négatives de d’où il suit que, croissant, la valeur de devra croître aussi, et, diminuant, diminuera aussi, à moins que le polynôme. ne contienne que le seul terme auquel cas sera toujours une quantité constante ; au contraire, croissant, la valeur de diminuera nécessairement, et, diminuant, ira en augmentant. Soit la racine réelle et positive de l’équation, on aura donc, lorsque donc aussi donc, en substituant au lieu de des nombres quelconques plus grands que on aura toujours et par conséquent égal à un nombre positif, et, en substituant au lieu de des nombres moindres que on aura toujours et par conséquent égal à un nombre négatif : donc il sera impossible que l’équation ait des racines réelles positives plus grandes ou plus petites que

Si l’équation a plusieurs changements de signe, elle peut avoir aussi plusieurs racines réelles positives ; mais leur nombre ne peut jamais surpasser celui des changements ou variations de signe c’est ce théorème qu’on appelle la règle de Descartes. (Voir la Note VIII.)

8. Problème. – Une équation quelconque étant donnée, trouver une autre équation dont les racines soient les différences entre les racines de l’équation donnée.

Soit donnée l’équation

(B)

on sait que peut être indifféremment égal à une quelconque de ses racines. Soit une autre racine quelconque de la même équation, en sorte que l’on ait aussi

et soit la différencie entre les deux racines et de manière que l’on ait substituant cette valeur de dans la dernière équation et ordonnant les termes par rapport à on aura une équation en du même degré laquelle, en commençant par les derniers termes, sera de cette forme

les coefficients étant des fonctions de telles que

c’est-à-dire, suivant la notation du Calcul différentiel,

donc, puisque par l’équation donnée (B) on a l’équation précédente étant divisée par deviendra celle-ci :

(C)

Cette équation, si l’on y substitue pour une quelconque des racines de l’équation (B), aura pour racines les différences entre cette racine et toutes les autres de la même équation (B) ; donc, si l’on combine les équations (B) et (C) en éliminant on aura une équation en dont les racines seront les différences entre chacune des racines de l’équation (B) et toutes les autres racines de la même équation ce sera l’équation cherchée.

Mais, sans exécuter cette élimination, qui serait souvent fort laborieuse, il suffira de considérer :

1o Que étant les racines de l’équation en celles de l’équation en seront

d’où l’on voit que ces racines seront au nombre de e t que de plus elles seront égales deux à deux et de signes contraires ; de sorte que l’équation en manquera nécessairement de toutes les puissances impaires de donc, en faisant et l’équation dont il s’agit sera de cette forme

(D)

2o Que étant les différentes valeurs de dans l’équation (D), le coefficient sera égal à la somme de toutes ces valeurs, le coefficient sera la somme de tous leurs produits deux à deux, etc.

Or il est facile de voir que

mais on sait que

donc on aura

savoir

et l’on pourra, de la même manière, trouver la valeur des autres coefficients

Pour y parvenir plus facilement, supposons

et l’on aura, comme l’on sait,

Supposons de plus

il est facile de voir que l’on aura

ou bien

et, en général,

Les quantités étant ainsi connues, on aura sur-lechamp les valeurs des coefficients de l’équation (D) par les formules

Ainsi l’on pourra déterminer directement les coefficients de l’équation (D) par ceux de l’équation donnée (B). Pour cela on cherchera d’abord, par les formules ci-dessus, les valeurs des quantités jusqu’à ensuite, à l’aide de celles-ci, on cherchera celle des quantités jusqu’à et enfin, par ces dernières, on trouvera les valeurs cherchées des coefficients

9. Remarque. – Il est bon de remarquer que l’équation (D) exprime également les différences entre les racines positives et négatives de l’équation (B) ; de sorte que la même équation aura lieu aussi lorsqu’on changera en pour avoir les racines négatives (no 4).

De plus, il est clair que l’équation (D) sera toujours la même, soit qu’on augmente ou qu’on diminue toutes les racines de l’équation proposée d’une même quantité quelconque ; donc, si cette équation a son second terme, on pourra le faire disparaître et chercher ensuite l’équation en on aura ainsi la même équation qu’on aurait eue si l’on n’avait pas fait évanouir le second terme. Mais l’évanouissement de ce terme rendra toujours la recherche des coefficients un peu plus facile, parce qu’on aura et par conséquent aussi de sorte que les formules du numéro précédent deviendront

10. Corollaire I. – Puisque les racines de l’équation (D) sont les carrés des différences entre les racines de l’équation proposée (B), il est clair que si cette équation (D) avait tous ses termes de même signe, auquel cas elle n’aurait aucune racine réelle positive, il est clair, dis-je, que, dans ce cas, les différences entre les racines de l’équation (B) seraient toutes imaginaires ; de sorte que cette équation ne pourrait avoir qu’une seule racine réelle ou bien plusieurs racines réelles et égales entre elles. Si ce dernier cas a lieu, on le reconnaîtra et on le résoudra par les méthodes connues (voir aussi plus bas le Chapitre II) ; à l’égard du premier cas, il suit du no 6 qu’on pourra prendre

11. Corollaire II. – Si l’équation (B) a un ou plusieurs couples de racines égales, il est clair que l’équation (D) aura une ou plusieurs valeurs de égales à zéro ; de sorte qu’elle sera alors divisible une ou plusieurs fois par Cette division faite, lorsqu’elle a lieu, soit l’équation restante disposée à rebours, de cette manière :

(E)

étant ou qu’on fasse et ordonnant l’équation par rapport à on aura

(F)

Qu’on cherche par les méthodes connues la limite des racines positives de cette équation, et soit cette limite, en sorte que surpasse chacune des valeurs positives de donc sera moindre que chacune des valeurs positives de ou de et par conséquent moindre que chacune des valeurs de à cause de (problème précédent).

Donc sera nécessairement moindre qu’aucune des valeurs de c’est-à-dire qu’aucune des différences entre les racines réelles et inégales de l’équation proposée (B).

Donc :

1o Si alors on sera sûr que l’équation (B) n’aura pas de racines réelles dont les différences soient moindres que l’unité ; ainsi, dans ce cas, on pourra faire sans scrupule (no 6) ;

2o Mais, si ou alors il peut se faire qu’il y ait dans l’équation (B) des racines dont les différences soient moindres que l’unité ; mais, comme la plus petite de ces différences sera toujours nécessairement plus grande que on pourra toujours prendre ou (numéro cité).

En général, soit le nombre entier qui est égal ou immédiatement plus grand que et l’on pourra toujours prendre

12. Scolie I. – Quant à la manière de trouver la limite des racines d’une équation, la plus commode et la plus exacte est celle de Newton, laquelle consiste à trouver un nombre dont, les racines de l’équation proposée étant diminuées, l’équation résultante n’ait aucune variation de signe, car alors cette équation ne pourra avoir que des racines négatives par conséquent, le nombre dont les racines de la proposée auront été diminuées surpassera nécessairement la plus grande de ces racines.

Ainsi, pour chercher la limite des racines de l’équation

(F)

on y mettra au lieu de et ordonnant l’équation résultante par rapport à elle deviendra

dans laquelle

et il n’y aura qu’à chercher une valeur de qui, étant substituée dans les quantités les rende toutes positives ; en commençant par la dernière de ces quantités, laquelle n’aura que deux termes et remontant successivement aux quantités précédentes, on déterminera facilement le plus petit nombre entier qui pourra être pris pour/, et qui sera la limite la plus proche cherchée.

Si l’on voulait éviter tout tâtonnement, il n’y aurait qu’à prendre pour le plus grand coefficient des termes négatifs de l’équation (F), augmenté d’une unité ; car il est facile de prouver qu’en donnant à cette valeur, les quantités seront toujours positives.

Cette manière d’avoir la limite des racines d’une équation quelconque est due, je crois, à Maclaurin ; mais en voici une autre qui donnera le plus souvent des limites plus approchées.

Soient

les termes négatifs de l’équation (F); on prendra pour la somme des deux plus grandes des quantités

ou un nombre quelconque plus grand que cette somme. Cette proposition peut se démontrer de la même manière que la précédente ; ainsi nous ne nous y arrêterons pas.

Au reste, il faut observer que les limites trouvées de l’une ou de l’autre de ces deux manières seront rarement les plus prochaines limites. Pour en avoir de plus petites, on essayera successivement pour des nombres moindres, et l’on prendra le plus petit de ceux qui satisferont aux conditions que soient des nombres positifs.

13. Scolie II. – Ayant donc trouvé la limite de l’équation (F) et pris égal ou immédiatement plus grand que on fera (no 11), et l’on substituera successivementdans l’équation proposée, à la place de l’inconnue, les nombres

les résultats venant de ces substitutions formeront une série dans laquelle il y aura autant de variations de signe que l’équation proposée contiendra de racines réelles positives et inégales, et, de plus, chacune de ces racines se trouvera entre les deux nombres qui auront donné des résultats consécutifs de signes différents ; de sorte que si les nombres

et donnent des résultats de signe contraire, il y aura une racine entre et et par conséquent, le nombre entier qui approchera le plus de sera la valeur entière approchée de cette racine (no 2).

Ainsi l’on connaîtra par ce moyen, non-seulement le nombre des racines positives et inégales de l’équation proposée, mais encore la valeur entière approchée de chacune de ces racine.

Au reste, il est clair que si l’on trouvait un ou plusieurs résultats égaux à zéro, les nombres qui auraient donné ces résultats seraient des racines exactes de l’équation proposée.

Pour faciliter et abréger ce calcul, on fera encore les remarques suivantes :

1o Si l’on cherche par les méthodes des numéros précédents la limite des racines positives de l’équation proposée, il est clair qu’il sera inutile d’y substituer à la place de l’inconnue des nombres plus grands que cette limite. En effet, il est facile de voir qu’en substituant des nombres plus grands que cette limite, on aura toujours nécessairement des résultats positifs. Ainsi, nommant la limite dont il s’agit, le nombre des substitutions à faire sera égal à et par conséquent toujours limité.

En général, sans chercher la limite il suffira de pousser les substitutions jusqu’à ce que le premier terme de l’équation ou la somme des premiers termes, s’il y en a plusieurs consécutifs avec le même signe soit égale ou plus grande que la somme de tous les termes négatifs ; car il est facile de prouver, par la méthode du no 7, qu’en donnant à l’inconnue des valeurs plus grandes, on aura toujours à l’infini des résultats positifs.

2o Au lieu de substituer à la place de l’inconnue les fractions on y mettra d’abord à la place de ou, ce qui revient au même, on multipliera le coefficient du second terme par celui du troisième terme par et ainsi des autres ; et l’on substituera ensuite à la place de les nombres naturels jusqu’à la limite de cette équation, ou bien jusqu’à ce que le premier terme ou la somme des premiers, quand il y en a plusieurs consécutifs avec le même signe, soit égale ou plus grande que la somme des négatifs ; par ce moyen, les résultats seront tous des nombres entiers, et les racines de l’équation proposée se trouveront nécessairement entre les nombres consécutifs qui donneront des résultats de signes contraires, ces nombres étant divisés par comme nous l’avons vu plus haut.

3o Soit le degré de l’équation dans laquelle il s’agit de substituer successivement les nombres naturels je dis que, dès que l’on aura trouvé les premiers résultats, c’est-à-dire ceux qui répondent à on pourra trouver tous les suivants par la seule addition.

Pour cela, il n’y aura qu’à chercher les différences des résultats trouvés, lesquelles seront au nombre de ensuite les différences de ces différences, lesquelles ne seront plus qu’au nombre de et ainsi de suite jusqu’à la différence ième.

Cette dernière différence sera nécessairement constante, parce que l’exposant de la plus haute puissance de l’inconnue est ainsi l’on pourra continuer la suite des différences ièmes aussi loin qu’on voudra, en répétant seulement la même différence trouvée ; ensuite, par le moyen de cette suite, on pourra, par la simple addition, continuer celle des différences ièmes, et, à l’aide de celle-ci, on pourra continuer de même la suite des différences ièmes, et ainsi de suite, jusqu’à ce qu’on arrive à la première suite, qui sera celle des résultats cherchés.

Il est bon d’observer ici que, si les termes correspondants des différentes suites dont nous parlons étaient tous positifs, les termes suivants dans chaque suite seraient tous aussi positifs. Or, puisque la dernière différence est toujours positive, il est clair qu’on parviendra nécessairement dans-chaque suite à des termes tous positifs ; ainsi il suûira de continuer toutes ces suites jusqu’à ce que leurs termes correspondants soient devenus tous positifs_1, parce qu’alors on sera sûr que la série des résultats, continuée aussi loin qu’on voudra, sera toujours positive, et que, par conséquent, elle ne contiendra plus aucune variation de signe.

Pour éclaircir cela par un exemple, soit proposée l’équation

on trouvera d’abord que les résultats qui répondent à sont d’où l’on tirera les différences premières les différences secondes et la différence troisième ainsi on formera les quatre séries suivantes :

dont la loi est que chaque terme est égal à la somme du terme précédent de la même série, et de celui qui y est au-dessus dans la série précédente ; de sorte qu’il est très-facile de continuer ces séries aussi loin qu’on voudra.

La dernière de ces quatre séries sera, comme l’on voit, celle des résultats qui viennent de la substitution des nombres naturels à la place de dans l’équation proposée ; et comme les termes de la septième colonne, savoir sont tous positifs, il s’ensuit que les termes suivants seront tous aussi positifs ; de sorte que la série des résultats, continuée aussi loin qu’on voudra, n’aura plus aucune variation de signe.

14. Remarque. – On avait déjà remarqué que l’on pouvait trouver la valeur approchée de toutes les racines réelles et inégales d’une équation quelconque, en y substituant successivement à la place de l’inconnue différents nombres en progression arithmétique ; mais cette remarque ne pouvait pas être d’une grande utilité, faute d’avoir une méthode pour déterminer la progression que l’on doit employer dans chaque cas, en sorte que l’on soit assuré qu’elle fasse connaître toutes les racines réelles et inégales de l’équation proposée. Nous en sommes heureusement venus à bout, à l’aide du problème du no 8, et nous verrons encore, ci-après d’autres usages de ce même problème par rapport aux racines égales et imaginaires.

Au reste, la recherche de la quantité (no 11) ne serait point nécessaire si l’équation proposée n’avait que des racines réelles ; mais les conditions par lesquelles, on peut reconnaître d’avance la réalité de toutes les racines ; lorsqu’elle a lieu dans une équation donnée, dépendent de l’équation même des différences ou de formules équivalentes. (Voir la Note VIII.)

Le Mémoire de Lagrange

Sur la résolution des équations numériques

et les

Additions au Mémoire sur la résolution des équations numériques

ont paru d’abord dans les

Mémoires de l’Académie royale des Sciences et Belles-Lettres de Berlin

, t. XXIII, 1769, et t. XXIV, 1770. Nous les avons reproduits dans le tome II des

Œuvres de Lagrange

, p. 539 et p. 581.

Lagrange, après avoir ajouté des Notes importantes, dont la longueur dépasse le double de celle des Mémoires et des Additions, a réuni l’ensemble de son travail en un seul volume qu’il a intitulé Traité de la résolution des équations numériques, et dont il a publié deux éditions en 1798 et 1808.

Nous avons cru devoir respecter la disposition de Lagrange, et nous réimprimons intégralement ce volume, qui forme le tome VIII des Œuvres de Lagrange. Il eût été d’ailleurs peu commode pour le lecteur de lire le Mémoire et les Additions dans le tome II de ces Œuvres et les Notes dans le tome VIII. (Note de l’Éditeur.)

CHAPITRE II.de la manière d’avoir les racines égales et les racines imaginaire des équations.

15. Nous n’avons considéré, dans le Chapitre précédent, que les racines réelles et inégales de l’équation proposée (B) ; supposons maintenant que cette équation ait des racines égales. Dans ce cas, il faudra (no 11) que l’équation (D) soit divisible autant de fois par qu’il y aura de combinaisons de racines égales deux à deux ; par conséquent, il faudra qu’il y ait dans cette équation (D) autant des derniers termes qui manquent ; ainsi on connaîtra par ce moyen combien de racines égales il y aura dans la proposée.

Mais on peut s’assurer d’avance si l’équation proposée a des racines égales, et même trouver ces racines indépendamment de l’équation (D) ; car puisque, dans le cas des racines égales, on a nécessairement (no 8), l’équation (C) du même numéro donnera pour ce cas ainsi il faudra que les deux équations en et aient lieu en même temps lorsque est égal à une quelconque des racines égales de l’équation (B).

On cherchera donc, par les méthodes connues, le plus grand commun diviseur des deux polynômes et et, faisant ensuite ce diviseur, égal à zéro, on aura une équation qui ne sera composée que de racines égales de là proposée, mais élevées à une puissance moindre de l’unité.

Soit le plus grand commun diviseur de et de et le quotient de divisé par il est facile de voir que l’équation contiendra toutes les mêmes racines que l’équation proposéé avec cette différence que les racines multiples de cette équation seront simples dans l’équation Ainsi l’équation sera dans le cas des méthodes précédentes.

On peut encore, si l’on veut, trouver deux équations séparées dont l’une contienne seulement les racines égales de l’équation et dont l’autre contienne les racines inégales de la même équation. Pour cela, il n’y aura qu’à chercher de nouveau le plus grand commun diviseur des polynômes et et nommant ce diviseur on prendra le quotient de divisé par lequel étant nommé on fera ces deux équations et

La première contiendra seulement les racines inégales de l’équation et la seconde contiendra seulement les racines égales de la même équation, mais chacune une seule fois ; de sorte que les deux équations et n’auront que des racines inégales et par conséquent seront susceptibles des méthodes du Chapitre précédent.

16. Connaissant ainsi le nombre des racines réelles, tant inégales qu’égales de l’équation proposée, si ce nombre est moindre que le degré de l’équation, on en conclura que les autres racines sont nécessairement imaginaires.

En général, pour que l’équation (B) ait toutes ses racines réelles, il faut que les valeurs de soient réelles aussi ; donc il faudra que les valeurs de ou de soient toutes réelles et positives par conséquent, l’équation (D) du no 8 doit avoir toutes ses racines réelles positives ; donc il faudra, par la règle connue, que les signes de cette équation soient alternativement positifs et négatifs ; de sorte que si cette condition n’a pas lieu, ce sera une marque sûre que l’équation (B) a nécessairement des racines imaginaires.

Or on sait que les racines imaginaires vont toujours en nombre pair, et qu’elles peuvent se mettre deux à deux sous cette forme

et étant des quantités réelles[1] ; donc on aura

et par conséquent

d’où l’on voit que l’équation (D) aura nécessairement autant de racines réelles négatives qu’il y aura de couples de racines imaginaires dans l’équation (B).

Donc, si l’on fait ce qui changera l’équation (D) en celle-ci

(G)

cette équation aura nécessairement autant de racines réelles positives qu’il y aura de couples de racines imaginaires dans l’équation (B).

17. Il suit de là que, pour avoir la valeur des racines imaginaires de l’équation (B), il n’y a qu’à chercher les racines réelles positives de l’équation (G). En effet, soient ces racines, on aura d’abord pour les valeurs de ensuite, pour trouver les valeurs correspondantes de on substituera, dans l’équation (B), à la place de et l’on fera deux équations séparées des termes tous réels et de ceux qui seront multipliés par de cette manière, on aura deux équations en de cette forme

(H)

dans lesquelles les coefficients seront donnés en et en

Donc, si l’on donne à quelqu’une des valeurs précédentes, il faudra nécessairement que ces deux équations aient lieu en même temps, et, par conséquent, il faudra qu’elles aient un diviseur commun. On cherchera donc leur plus grand commun diviseur, et, le faisant égal à zéro, on aura une équation en et par laquelle, étant connu, on trouvera

Il est bon de remarquer que, si toutes les valeurs de tirées de l’équation (G) sont inégales entre elles, alors à chaque valeur de il ne pourra répondre qu’une seule valeur de donc, dans ce cas, les deux équations (H) ne pourront avoir qu’une seule racine commune, et, par conséquent, leur plus grand commun diviseur ne pourra être que du premier degré.

On poussera donc la division jusqu’à ce que l’on parvienne à un reste où ne se trouve plus qu’à la première dimension, et l’on fera ensuite ce reste égal à zéro ; ce qui donnera la valeur cherchée de

Mais si, parmi les valeurs de tirées de l’équation (G), il y en par exemple, deux égales entre elles, alors, comme à chacune de ces valeurs égales de il peut répondre des valeurs différentes de il faudra qu’en mettant cette valeur double de dans les équations (H), elles puissent avoir lieu par rapport à l’une et l’autre des valeurs de qui y répondent ; ainsi ces deux équations auront nécessairement deux racines communes, et, par conséquent, leur plus grand commun diviseur sera du second degré. Il faudra donc, dans ce cas, ne pousser la division que jusqu’à ce qu’on arrive à un reste où se trouve à la seconde dimension seulement ; et alors on fera ce reste égal à zéro, ce qui donnera une équation du second degré, par laquelle on déterminera les deux valeurs de lesquelles seront nécessairement toutes deux réelles.

De même, s’il y avait trois valeurs égales de il faudrait, pour trouver les valeurs de qui répondraient à cette valeur triple de ne pousser la division que jusqu’à ce que l’on parvînt à un reste où la plus haute puissance de fût la troisième ; et alors, faisant ce reste égal à zéro, on aurait une équation en du troisième degré, laquelle donnerait les trois valeurs réelles de correspondantes à la même valeur de et ainsi de suite.

Voir

la Note IX.

 

CHAPITRE III.nouvelle méthode pour approcher des racines des équations numériques.

18. Soit l’équation

et supposons qu’on ait déjà trouvé, par la méthode précédente ou autrement, la valeur entière et approchée d’une de ses racines réelles et positives ; soit cette première valeur en sorte que l’on ait

on fera

et substituant cette valeur dans l’équation proposée, à la place de on aura_1, après avoir multiplié toute l’équation par et ordonné les termes par rapport à une équation de cette forme

Or, comme (hypothèse) et on aura donc l’équation aura nécessairement au moins une racine réelle plus grande que l’unité.

On cherchera donc, par les méthodes du Chapitre Ier, la valeur entière approchée de cette racine ; et comme cette racine doit être nécessairement positive, il suffira de considérer y comme positif (no 4).

Ayant trouvé la valeur entière approchée de que je nommerai on fera ensuite

 

et substituant cette valeur de dans l’équation , on aura une troisième équation en de cette forme

laquelle aura nécessairement au moins une racine réelle plus grande què l’unité, dont on pourra trouver de même la valeur entière approchée.

Cette valeur approchée de étant nommée on fera

et, substituant, on aura une équation en qui aura au moins une racine réelle plus grande que l’unité, et ainsi de suite.

En continuant de la même manière, on approchera toujours de plus en plus de la valeur de la racine cherchée ; mais, s’il arrive que quelqu’un des nombres soit une racine exacte, alors on aura ou et l’opération sera terminée ; ainsi, dans ce cas, on trouvera pour une valeur commensurable.

Dans tous les autres cas, la valeur de la racine sera nécessairement incommensurable, et l’on pourra seulement en approcher aussi près qu’on voudra.

 

19. Si l’équation proposée a plusieurs racines réelles positives, on pourra trouver, par les méthodes exposées dans le Chapitre Ier, la valeur entière approchée de chacune de ces racines ; et nommant ces valeurs on les emploiera successivement pour approcher davantage de la vraie valeur de chaque racine. Il faudra seulement remarquer :

1o Que si les nombres sont tous différents l’un de l’autre, alors les transformées du numéro précédent n’auront chacune qu’une seule racine réelle et plus grande que l’unité car si, par exemple, l’équation avait deux racines réelles plus grandes que l’unité, telles que et on aurait donc

 

de sorte que ces deux valeurs de auraient la même valeur entière approchée contre l’hypothèse : il en serait de même si l’équation ou quelqu’une des suivantes avait deux racines réelles plus grandes que l’unité.

De là il s’ensuit que, pour trouver dans ce cas les valeurs entières approchées des racines des équations il suffira de substituer successivement à la place de les nombres naturels positifs jusqu’à ce que l’on trouve deux substitutions consécutives qui donnent des résultats de signe contraire (no 6).

2o Que, s’il y a deux valeurs de qui aient la même valeur entière approchée en employant cette valeur, l’équation aura aussi deux racines plus grandes que l’unité, et si leur valeur entière approchée est la même, l’équation aura encore deux racines plus grandes que l’unité, et ainsi de suite jusqu’à ce que l’on arrive à une équation dont les deux racines, plus grandes que l’unité, aient des valeurs entières approchées différentes ; alors chacune de ces deux valeurs donnera une suite particulière d’équations qui n’auront plus qu’une seule racine réelle plus grande que l’unité.

En effet, puisqu’il y a deux valeurs différentes de qui ont la même valeur entière approchée ces deux valeurs seront représentées par de sorte qu’il faudra que ait nécessairement deux valeurs réelles plus grandes que l’unité ; et si ces deux valeurs de ont la même valeur approchée il faudra de nouveau qu’en faisant ait deux valeurs différentes plus grandes que l’unité, et ainsi de suite.

Mais, si les valeurs entières approchées de étaient différentes, alors, nommant ces valeurs et on ferait successivement et et il est clair que dans l’une et l’autre de ces deux suppositions, n’aurait plus qu’une seule valeur réelle plus grande que l’unité ; autrement, les valeurs de au lieu d’être seulement doubles, seraient triples ou quadruples, etc.

Donc, quand on sera parvenu à une transformée dont les deux racines plus grandes que l’unité auront des valeurs entières différentes, on sera assuré que les autres transformées résultant de chacune de ces deux valeurs n’auront plus qu’une seule racine plus grande que l’unité. Quant à la manière de trouver les valeurs entières approchées lorsqu’elles répondent à plus d’une racine, voir ci-après, Chap. VI, art. IV.

On peut faire des remarques analogues sur le cas où il y aurait dans l’équation trois racines, ou davantage, qui auraient la même valeur entière approchée.

 

20. Nous avons supposé dans le no 18 que les racines cherchées étaient positives ; pour trouver les négatives, il n’y aura qu’à mettre à la place de dans l’équation proposée, et l’on cherchera de même les racines positives de cette dernière équation ce seront les racines négatives de la proposée (no 4).

Quant aux racines imaginaires, qui sont toujours exprimées par nous avons donné, dans le Chapitre II, le moyen de trouver les équations dont et sont les racines ; ainsi il n’y aura qu’à chercher les racines réelles de ces équations, et l’on aura la valeur de toutes les racines imaginaires de l’équation proposée.

 

21. Pour faciliter les substitutions (no 18) de au lieu de de au lieu de , etc., il est bon de remarquer que les coefficients de la transformée peuvent se déduire immédiatement de ceux de l’équation en cette sorte

On aura de même ceux de la transformée par ceux de la transfor-

 

mée en mettant, dans les formules précédentes, à la place de à la place de et à la place de et ainsi de suite.

De là il est évident que le premier coefficient ou ne sera jamais nul, à moins que le nombre ou ne soit une racine exacte, auquel cas nous avons vu que la fraction continue se termine à ce nombre (no 18). En effet, si ou on aura ou donc ou

 

22. Soient donc les valeurs entières approchées des racines des équations en sorte que l’on ait

Substituant successivement ces valeurs dans celle de on aura

Ainsi la valeur de c’est-à-dire de la racine cherchée, sera exprimée par une fraction continue. Or on sait que ces sortes de fractions donnent toujours l’expression la plus simple, et en même temps la plus exacte qu’il est possible, d’un nombre quelconque, rationnel ou irrationnel.

Huyghens paraît être le premier qui ait remarqué cette propriété des fractions continuels, et qui en ait fait usage pour trouver les fractions les plus simples et en même temps les plus approchantes d’une fraction quelconque donnée. (Voir son Traité De Automato planetario.)

Plusieurs habiles géomètres ont ensuite développé davantage cette théorie et en ont fait différentes applications ingénieuses et utiles ; mais on n’avait pas encore pensé, ce me semble, à s’en servir dans la résolution des équations.

23. Maintenant, si l’on réduit les fractions continues

en fractions ordinaires, on aura, en faisant

on aura, dis-je, cette suite de fractions particulières

lesquelles seront nécessairement convergentes vers la vraie valeur de et dont la première sera plus petite que cette valeur, la deuxième sera plus grande, la troisième plus petite, et ainsi de suite ; de sorte que la valeur cherchée se trouvera toujours entre deux fractions consécutives quelconques. C’est ce qu’il est aisé de déduire de la nature même de la fraction continue d’où celles-ci sont tirées.

Or il est facile de voir que les valeurs de