Trilogie infernale Économie, eau et énergies - Eric Davalle - E-Book

Trilogie infernale Économie, eau et énergies E-Book

Eric Davalle

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Beschreibung

Une trilogie infernale ou comment l’économie, l’eau et l’énergie ont transformé nos vies jusqu’au réchauffement climatique. Cette trilogie a accompagné l’évolution du monde, stimulé le progrès et transformé en profondeur nos modes de vie. Sans complaisance, mais factuellement, dans ces pages, vous découvrirez l’univers des liens et des acteurs de la société pour comprendre pourquoi le climat est menacé, pourquoi l’eau que nous buvons se dégrade et pourquoi il devient urgent de décarboner toutes nos actions quotidiennes. Enfin, dans un élan proche de l’engagement politique, des solutions concrètes sont avancées pour passer de la désillusion à l’action et construire un avenir plus raisonné et durable.

À PROPOS DE L'AUTEUR

Docteur ingénieur diplômé de l’École polytechnique fédérale de Lausanne, Eric Davalle a mené une longue carrière dans la conception et la réalisation d’ouvrages hydrauliques. Expert de l’eau et de l’énergie, il met aujourd’hui son pragmatisme au service d’un avenir décarboné, en proposant des solutions concrètes et durables face aux enjeux climatiques.

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Veröffentlichungsjahr: 2025

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Eric Davalle

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Trilogie infernale

Économie, eau et énergies :

De la désillusion à l’action

Essai

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

© Lys Bleu Éditions – Eric Davalle

ISBN : 979-10-422-7135-0

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

 

 

 

 

 

Préface

 

 

 

À une époque où les crises économiques, climatiques et énergétiques s’entrelacent dans une valse inquiétante, Eric Davalle nous offre un ouvrage aussi percutant que nécessaire. Ingénieur, scientifique et observateur aguerri des mutations économiques et environnementales, l’auteur nous guide à travers les complexités du monde contemporain avec un regard analytique, sans concession et solidement ancré dans les faits.

Trilogie infernale n’est pas un simple constat accablant de nos dérives économiques et écologiques, c’est avant tout un appel à l’action. Eric Davalle ne se contente pas d’évoquer les impasses d’un modèle économique basé sur la surconsommation des ressources naturelles et la course à la croissance infinie ; il propose aussi des solutions pragmatiques, fondées sur l’innovation, la responsabilité collective et une refonte en profondeur de notre rapport à l’économie, à l’eau et à l’énergie.

 

Un ouvrage structuré autour de trois piliers essentiels

 

L’auteur explore en profondeur trois éléments indissociables :

– L’économie, qui façonne nos sociétés, détermine nos choix et orchestre les disparités. Eric Davalle en démontre les mécanismes et met en lumière ses dérives : financiarisation excessive, dette mondiale écrasante, corruption endémique, impact du changement climatique sur les modèles agricoles et industriels.
– L’eau, cet or bleu dont l’abondance supposée est une illusion. L’ouvrage souligne l’urgence d’une gestion plus responsable face aux pollutions, aux inégalités d’accès et aux aberrations d’une économie qui favorise la privatisation et la surexploitation des ressources hydriques.
– L’énergie, enfin, qui constitue à la fois le moteur et le talon d’Achille de nos sociétés modernes. Sommes-nous réellement prêts à abandonner les énergies fossiles au profit de solutions énergétiques plus durables ? L’auteur interroge notre capacité à relever le défi de la transition énergétique et pose la question du nucléaire, des énergies renouvelables et des opportunités qu’elles offrent.

 

Un angle original et un ton sans concession

 

Ce livre se démarque par son approche rigoureuse et engagée. Eric Davalle met en lumière les interconnexions systémiques entre ces trois domaines. Il refuse la langue de bois, privilégie les chiffres, les faits et les analyses documentées. Son style est direct, parfois incisif, mais toujours accessible, rendant compréhensibles des sujets pourtant d’une grande complexité.

Dans cette quête d’un avenir viable, les émissions de CO₂ occupent une place centrale. Si elles sont le symbole de la prospérité industrielle, elles sont aussi l’indicateur de notre impact environnemental. L’auteur pose ainsi une question essentielle : comment pouvons-nous concilier développement et sobriété carbone ? Comment transformer l’économie pour qu’elle ne repose plus sur une exploitation effrénée des énergies fossiles ? Eric Davalle rappelle que des solutions existent, qu’elles soient technologiques (capture du carbone, hydrogène, nucléaire de nouvelle génération) ou comportementales (sobriété énergétique, relocalisation des productions, taxation carbone). Ce qui manque, c’est la volonté politique et collective d’agir avec la rapidité nécessaire.

Trilogie infernale n’est pas un ouvrage de plus sur l’effondrement à venir, mais bien un manuel d’intelligibilité et d’action. Chaque chapitre s’achève sur une synthèse des points clés et propose des pistes concrètes pour un avenir plus soutenable.

 

Pourquoi ce livre ?

 

Parce que nous ne pouvons plus nous permettre d’être spectateurs. La crise climatique et la raréfaction des ressources ne sont pas des menaces lointaines, elles sont déjà notre réalité quotidienne. Ce livre donne des clés pour comprendre et agir : des politiques aux citoyens, des entreprises aux consommateurs, chacun a un rôle à jouer.

Éric Davalle nous exhorte à passer de la désillusion à l’action, à repenser nos choix et nos priorités, et surtout, à refuser la fatalité d’un monde qui brûle pendant que nous regardons ailleurs.

À vous maintenant de plonger dans cette « Trilogie infernale », d’en tirer vos propres conclusions et, surtout, de participer à l’indispensable transformation de notre société.

 

Lyesse Laloui,

Professeur à l’École polytechnique fédérale

de Lausanne (EPFL), Suisse,

Membre de l’Académie Suisse des Sciences Techniques,

Membre de l’Academia Europaea

 

 

 

 

 

Préambule

 

 

 

Notre vie ne tient qu’à un fil. Elle est précieuse, délicate et sensible à toutes transformations majeures. Depuis les tréfonds de l’Univers et après le Big Bang, nous savons du monde interstellaire1 que notre Terre s’est construite dans un ensemble d’équilibres naturels très organisés, mais fragiles. Nous sommes les survivants de transformations en chaîne et d’équilibres subtils venus de très loin et depuis bien longtemps. À la suite de l’Homme de Neandertal, soit il y a 300 000 ans, nous avons survécu, proliféré, pris possession de l’espace qui nous entoure, développé et civilisé notre planète. Nous l’avons fait sans trop nous soucier des conséquences des multiples empreintes et cicatrices que nous avons infligées au vivant qui est autour et avec nous.

De nombreux signes montrent que nous sommes allés trop loin dans l’appropriation environnementale. Notre « niche écologique2 » est en grave danger, marquée par la disparition d’espèces vivantes, par la dégradation de la qualité de l’air et de l’eau. Depuis plus d’un siècle, notre développement a eu pour moteur « l’Économie » et son marqueur qui est « la croissance ». Elles furent largement alimentées par l’usage sans réserve des énergies fossiles et des diverses applications issues des produits carbonés. Cette utilisation d’ampleur a conduit à la concentration, en excès, de gaz à effet de serre (GES) dans notre atmosphère. Le réchauffement climatique observé, mesuré et subi en est la conséquence directe. Beaucoup moins de personnes savent que cette utilisation des éléments fossiles sans discernements a aussi conduit l’eau potable à se dégrader partout et à notre insu. Ce que nous buvons, respirons et mangeons ne sont plus des actes anodins du quotidien, mais des gestes qui demandent attention et précaution dans le but de nous protéger. Nous allons donc analyser et nous demander, comment nous en sommes arrivés là ?

Louis Pasteur disait en 1873, à l’occasion de son entrée à l’académie de médecine : Il ne suffit pas de connaître la vérité, il faut encore la proclamer. Si l’on met de côté les climatosceptiques toujours actifs, la vérité sur le réchauffement climatique et des pollutions généralisées est avérée et connue depuis des dizaines d’années par les autorités de tous bords. Il n’y a plus d’excuses. Il est donc essentiel de comprendre ce qui s’est vraiment passé ? Depuis quarante ans que de nombreuses personnes se battent pour partager leurs inquiétudes sur l’avenir de notre planète, il semble si difficile d’inverser le cours des choses. Constater ou dénoncer certes, mais il est tout aussi important de savoir si des solutions aux difficultés environnementales identifiées sont envisageables et dans quelle direction il serait souhaitable de les mettre en œuvre ? Les idées défendues dans cet ouvrage sont développées pour retrouver une vision de notre futur plus sereine. Nous devons agir et maintenant pour construire une image nouvelle de notre devenir si mal engagé.

Avec un regard sans détour des secteurs de l’économie, de l’eau et de l’énergie, l’objectif de cet ouvrage est bien de permettre la compréhension de la situation dans laquelle nous évoluons. Cela va conduire à prendre conscience des enjeux qu’il est envisageable de mettre en œuvre sur le terrain avec plusieurs actions constructives et de se donner des objectifs faisables par tous, du politicien au citoyen, pour un futur plus éclairé.

Notre Nature, si bien ordonnée et au fonctionnement millimétré, ne peut plus absorber nos excès par les filières naturelles existantes. Il y a comme une indigestion, une saturation de la surcharge que nous infligeons à l’environnement. Nous sommes définitivement des anthropocentriques absolus qui ne voient dans le milieu naturel qu’un appui à notre développement. Il serait préférable d’être les gardiens d’un avenir décarboné qui ont pris conscience qu’il est encore possible d’agir pour freiner le réchauffement climatique.

En tant que scientifiques, les faits sont la base du raisonnement. En faire l’analyse, c’est nous amener à agir et donc proposer des alternatives pour un avenir plus encourageant et surtout durable. Le problème est là aujourd’hui et il faut bien le comprendre. Nous nous sommes engagés dans une voie économique qui dégrade tout ce qui nous entoure. Le titre de cet ouvrage propose d’aller de la désillusion, en montrant ce qui ne va pas, à l’action par des propositions concrètes d’améliorations et issues du terrain. Car les techniques sont là et les appliquer demande de faire preuve de volonté et de courage pour le mieux de tous.

Dans le titre, chacun peut voir en ce dernier une forme de provocation négative, en parlant de Trilogie infernale. Le mot « Trilogie » caractérise dans cet ouvrage comment l’économie, l’eau et l’énergie forment un ensemble à trois devenu indissociable et très interdépendant dans la vie de tous les jours. La défaillance de l’un a des conséquences sur les autres. C’est pour cette raison qu’il est indispensable d’en étudier les liens et les acteurs qui gravitent dans ces secteurs d’activité.

Le mot « infernal » peut aussi sembler excessif à plusieurs d’entre vous. En tant que scientifique et observateur de la vie économique, loin de moi vouloir philosopher à la manière de la trilogie de Dante et de décrire l’enfer sur Terre. Mais, l’inertie que nous constatons pour empoigner les solutions vers la décarbonation, pour réduire au plus vite les effets du réchauffement climatique, ou pour freiner les pertes de biodiversité interpelle et ne réjouit personne. Demandez à ceux qui ont vu brûler leurs maisons, à ceux qui ont tout perdu lors d’inondations ravageuses et à ceux qui, par milliards, n’ont plus accès à de l’eau propre, si l’enfer n’est pas déjà un peu sur Terre.

Dans une première partie de l’ouvrage qui n’est ni une dystopie3 ni une comédie légère, il s’agira de rentrer dans le contexte actuel. Même si la réalité que nous vivons est assez désagréable, il est important de comprendre, par l’analyse du comportement des acteurs impliqués, ce qui contrarie la bonne marche des éléments fondamentaux de notre existence. Cet examen passe par l’analyse des milieux aussi différents que ceux de la politique, de la finance, de l’agriculture, de l’entreprise et de nos comportements privés. Nous sommes tous concernés. C’est ainsi que nous décortiquerons la place de l’économie, puis celle de l’énergie comme support au développement économique. Ensuite, nous nous attacherons à décrire ce qui se passe avec l’eau qui est, dans bien des endroits sur cette Terre, de moins en moins potable et accessible, mettant en danger la santé de millions de personnes. L’eau, normalement en suffisance, mais très mal répartie sur notre globe, est tout simplement une victime collatérale quant à sa dégradation, pour cause, la croissance admise infinie par l’économie, sans précautions avec l’usage des produits fossiles, ni risques associés. Nous analyserons les relations et les interactions pour expliquer comment les agissements des unes, économie et énergie, contrarient ceux de l’autre, l’eau. Bien évidemment, les propos de ce livre vont droit au but. Ils sont francs et souvent sans circonlocutions. Avec autant de complications visibles dans notre quotidien, il est donc difficile de rester lisse, rond et convenu.

À ce stade, il est essentiel de mentionner que les aspects géopolitiques, trop volatils, alambiqués et diversifiés, ne seront pas abordés ici en détail, seulement cités de cas en cas pour le besoin de la compréhension. Bien évidemment, la géopolitique qui prend les devants de la scène par à-coup est un élément important qui vient se superposer aux considérations exprimées dans ce livre. La difficulté d’en parler vient du fait que personne ne sait exactement vers où nous allons et pour quelles orientations précises pour demain. Entre révisionnisme, impérialisme retrouvé et prédominances d’influences accrues, la palette des interventions sans mesure est large. Les « Maîtres du monde » ont l’art de nous embrouiller, ne visant que leurs propres intérêts commerciaux et stratégiques. Même les spécialistes politiques peinent à bien décrypter leurs agissements. Cependant, il est probable que nos problèmes environnementaux majeurs et si fondamentaux risquent de se retrouver relégués à des jours meilleurs et pour un bon moment. Faute d’attentions et de priorités mises sur l’importance des bouleversements géopolitiques en cours, plusieurs actions d’améliorations prévues pour soulager notre environnement sont suspendues. Fin février 2025, l’Union européenne a décidé de mettre un coup de frein à certains projets sur le climat4. Comme le dit un proverbe français : À pauvre cœur petit souhait.

Pourtant, la politique qui joue un rôle central dans le fonctionnement et l’évolution économique sera décortiquée dans cet ouvrage. Dans une situation internationale qui est capable de passer du coq à l’âne, rien ne peut être épargné aux responsables qui nous gouvernent, auxquels nous demandons d’être des personnes responsables du bien commun et éclairées vers un chemin enfin plus durable et enclin vers la paix.

Dans une deuxième partie de l’ouvrage, nous proposerons des solutions concrètes, comme des changements de comportement. Car, comme l’aime à le mentionner régulièrement l’écrivain Erik Orsenna dans ses interventions, la vie ne peut se comprendre et s’analyser qu’en maîtrisant l’imbrication des différents composants qui interagissent et font le lien, celui qui rend possible la poursuite de notre existence. Le but de cet ouvrage est aussi de fournir une information et une connaissance, fruit d’une expérience vécue sur le terrain. C’est aussi montrer que rien n’est inéluctable, mais que le temps presse pour inverser les tendances actuelles dangereuses pour la vie. Pour espérer vaincre les effets négatifs environnementaux que nous ressentons au quotidien, il va falloir adapter les modèles d’affaires actuels de chaque profession, en profondeur, mais dans les plus brefs délais et dans un objectif de durabilité.

L’actuel roi, Charles III, disait au Forum de Davos en 2020 : Je ne veux pas que mes petits-enfants m’accusent de n’avoir rien fait. En hauts lieux, il y a donc une prise de conscience que le nécessaire n’a pas été fait dans ce monde économique galopant. Le roi du Royaume-Uni accompagnait ses mots par un ambitieux projet de rendre les marchés financiers et l’économie, au sens large, plus acceptables. Ils ne le sont donc pas ! Nous expliquerons pourquoi les différents acteurs de l’économie ont une responsabilité dans cette dégradation environnementale clairement identifiée, comme celle qui touche le monde du vivant.

Nous tenterons de montrer les difficultés à participer à une transition énergétique nécessaire, vers le renouvelable. Nous proposerons de prendre conscience qu’il faut agir, sachant que des solutions existent, même si les circonstances actuelles semblent vouloir nous dire que l’urgence est ailleurs. Chacun d’entre nous peut, à son niveau, y participer. Le plus important est aussi de dire que les technologies sont là, reste à vouloir les mettre en œuvre.

Aujourd’hui et, au-delà des obstacles géopolitiques, nous sommes confrontés à une situation très sérieuse, souvent confuse, incomprise par une large majorité de personnes. Chacun constate une forte inertie d’action qui met en jeu l’économie, l’eau et l’énergie dans toute sa complexité. Il faut rappeler que le titre de ce livre, Trilogie infernale, n’a pas été choisi par hasard. En effet, chaque histoire d’un composant du trio de ce livre est à lui seul une forme de tragédie qui ne raconte pas toujours que de belles histoires. L’exercice qui va suivre est donc compliqué. Pourtant, nous avons un devoir d’explication et donc d’action. Les liens tissés avec le temps entre l’activité économique, les supports énergétiques qui ont été créés pour soutenir la croissance et les besoins en eau associés pour accompagner le développement et assurer la vie sont au cœur de notre quotidien. Ils devraient être au cœur de nos préoccupations.

Au-delà des comportements guerriers qui semblent se multiplier, ce livre a surtout l’objectif de donner espoir et d’apporter des propositions applicables sur le terrain. Ce pourrait être une feuille de route politique à mettre en œuvre pour sauver notre climat. En tout cas, cela devrait permettre de reconquérir nos équilibres vitaux et de continuer notre chemin dans les meilleures conditions. La volonté affichée ici est d’établir ce qui est connu et sans complaisance. C’est d’identifier les responsabilités, comprendre les comportements et de montrer qu’il est possible d’initier des changements d’attitudes à tous niveaux et par tous les acteurs économiques. Si nous souhaitons une inflexion positive des dégradations actuelles, une vraie prise de conscience et la volonté d’agir ensemble avec détermination s’imposent. Pour un monde moins sombre, légué aux générations suivantes, pour restaurer la confiance en l’avenir avec une lumière d’espoir visible, agissons en toute conscience de cause et avec détermination. Nous le faisons pour l’environnement, pourquoi ne pas aussi le faire pour la paix entre les peuples ?

 

 

 

 

 

Note sur le vocabulaire énergétique

 

 

 

Avant de poursuivre et, afin d’éviter toutes confusions, il est important de mentionner un peu de vocabulaire, en particulier celui qui concerne les termes énergétiques employés. De nombreuses personnes se trompent et confondent les notions d’énergie, d’électricité ou de puissance. Les valeurs utilisées et mal qualifiées peuvent conduire à des incompréhensions ou à des certitudes qui n’en sont pas.

En physique, l’énergie au sens large désigne la capacité à réaliser un travail5. Brûler du charbon permet de se chauffer ou utiliser du gaz permet de faire bouillir l’eau, par la transmission de chaleur. Brûler de l’essence permet à notre voiture d’avancer, en utilisant l’effort mécanique ou du mouvement. Allumer une lampe donne de la lumière, sous la forme d’une énergie de rayonnement. L’énergie existe donc sous plusieurs formes.

L’électricité est une forme particulière d’énergie qui se compose de particules chargées, les électrons, pour des usages très précis, comme allumer une lampe, faire fonctionner des appareils ménagers ou propulser une voiture ou un vélo électrique. Dans le monde, la part de l’électricité dans la consommation finale d’énergie se situe autour des 17 %.

L’unité pour l’énergie est le joule (J), mais celle pratiquée dans ce livre sera un multiple du kilowattheure (kWh)6. On parlera parfois de gigawattheures (GWh) pour un million de kWh, ou de térawattheures (TWh) pour un milliard de kWh. À titre d’exemple, la consommation mondiale d’énergie primaire, ensemble des produits énergétiques non transformés, exploités directement ou importés en 2023, a été de l’ordre de 172 000 TWh. Dans le même temps, la production mondiale d’électricité, en 2023, a été de plus de 29 900 TWh, soit seulement 17 % de l’énergie mondiale.

Concernant la puissance, elle est définie comme la variation d’énergie, en production ou consommation, pendant une certaine durée. L’unité utilisée est le watt (W). Par exemple, la puissance d’une centrale de production d’électricité de 1 000 mégawatts (MW) qualifie son potentiel, sa taille pour produire, et non la quantité d’énergie produite.

Pour connaître l’énergie qui est créée par une unité de production énergétique, il faut savoir durant combien de temps le gaz, le charbon ou tout autre élément énergétique ont été utilisés pour créer des quantités de chaleur ou d’électricité. À titre d’illustration, le parc éolien off-shore7, en mer donc, avait une puissance installée totale de 24 gigawatts (GW8). La production correspondante était de 68 térawattheures (TWh9), soit 32 % de la production que ce parc aurait pu produire s’il avait fonctionné à pleine puissance pendant les 8 760 heures de l’année. Autre illustration, dans chaque foyer, toute consommation d’électricité en kWh est enregistrée par un compteur qui sert à facturer l’énergie réellement consommée. La consommation moyenne annuelle d’électricité d’une famille de quatre personnes, en Suisse, est de l’ordre de 4 000 kilowattheures (kWh). Même si ces notions sont très spécialisées, soyons donc vigilants dans nos lectures et écritures de ne pas confondre énergie et puissance.

 

 

 

 

 

 

Éléments introductifs

 

 

 

Avant de rentrer dans le vif du sujet, il est proposé d’aborder quelques réflexions, comme une forme d’introduction à la suite du texte. C’est aussi la possibilité de répondre aux interrogations souvent adressées à l’auteur.

Le propre de l’économie est de faire partie de notre vie quotidienne, sans vraiment nous en rendre compte. Nos actes sont généralement la conséquence d’une structuration économique bien rodée et dont tout le monde, ou presque, participe. Il faut des épisodes de crises pour que l’économie revienne aux oreilles de chacun, avec plus ou moins d’acuité. Pourtant, et en traversant les époques, l’Homme a forgé son développement à partir de théories économiques ou religieuses diverses et variées pour justifier le sens du chemin à prendre. Parler de l’économie s’impose donc comme point de départ, constituant un des éléments de base d’analyse. Il en sera question abondamment dans la suite de ce livre.

C’est un fait, la structure économique développée depuis des décennies a façonné notre vie privée et professionnelle, ainsi que notre inconscient, nos habitudes comme nos travers, même les plus dommageables pour l’intérêt commun. Durant toutes ces années, nous n’avons pas assez accordé d’importance aux conséquences d’une activité professionnelle à croissance soutenue et souvent encouragée. Le constat de nos activités répétées est sans appel, en dégâts causés sur l’environnement naturel et sur l’humain au travail. Le penseur américain K. Boulding résume assez bien notre situation actuelle en disant : Celui qui croit qu’une croissance infinie peut continuer indéfiniment dans un monde fini est soit un fou, soit un économiste.

N’en déplaise aux climatosceptiques, la pollution en accroissement constant et son cortège de nuisances, comme le dérèglement climatique, sont apparus comme une réalité. Ce n’est pas une nécessaire fatalité10, raison pour laquelle nous devons en avoir conscience et agir. Mais, le temps presse. Les conséquences de nos comportements bien trop souvent irréfléchis ont été mesurées par des dizaines de milliers de scientifiques. Leurs conclusions passées et récentes deviennent alarmantes. Car, chaque personne sur cette Terre est capable de dysfonctionnements et de comportements inadaptés, sauf pour ses propres intérêts. Pourtant, et heureusement dans une large mesure, nous gardons en tête l’intérêt général et sa préservation.

Ce n’est pas le cas d’une poignée de personnes, attisées par l’appât du gain, l’égoïsme exacerbé ou par la réussite absolue. Nous le verrons. Pour ceux-là, le mot « économie » signifie outil d’actions, concupiscence, convoitise aveugle ou soif de pouvoir. L’esprit irresponsable de plusieurs acteurs économiques se développe quand ils s’engagent dans ces voies ténébreuses de l’avidité. En même temps, d’autres, et avec raison, s’en détournent. Si l’on voulait que ce livre traite au premier degré la « Trilogie infernale », on dirait que l’économie a réussi au fil des siècles le « crime parfait », celui de nous conduire tous au consumérisme sans fin, mais qui pourrait aussi nous emmener dans l’obscurantisme absolu. Bien évidemment, ce n’est pas sur cette voie que nous allons nous engager.

Dans un contexte compliqué et délicat, l’eau indispensable à la vie et l’énergie incontournable pour permettre le développement sont des acteurs centraux du fonctionnement économique. Ils sont au cœur de nos problèmes et des solutions à trouver. Ce sont aussi des leviers pour infléchir notre chemin vers une économie éclairée et plus responsable pour notre futur. Essayons donc d’y voir déjà plus clair et de tirer quelques leçons d’événements récents.

 

Pandémie et reprise économique

 

La question qui est souvent posée à l’auteur est de savoir pourquoi on ne change pas de modèle économique, si nos déconvenues trouvent leurs sources dans le modèle actuel. La réponse est partiellement dans ce qui a suivi de la récente pandémie de la Covid-19. À sa sortie et, après plus d’un demi-siècle d’un capitalisme libéral à court terme et non équitable pour tous au niveau mondial, qui n’a pas imaginé que l’activité économique pourrait cette fois changer de direction ? Alors que les pays du monde entier étaient en arrêt forcé, la nature soufflait. Le lien entre économie et dégradation environnementale était établi sous nos yeux, sans ambiguïté. Consciemment, il devenait possible d’imaginer de freiner la concentration de gaz à effet de serre, voire d’apporter des solutions au réchauffement climatique. Comme pour marquer notre aveuglement, la pandémie a été un révélateur très concret qu’un arrêt net de l’économie pouvait soulager l’environnement des effets de nos activités carbonées.

En parallèle, nos habitudes professionnelles avaient été cassées pour de nouvelles formes de travail, comme celui à distance, communément appelé télétravail. Rien ne devait plus être comme avant 2020, disaient les plus optimistes, sorte d’indication ou d’espoir ! Allions-nous tirer les conséquences structurelles de cette longue pause économique impromptue et de tous ces changements constatés ? Serait-ce l’heure d’une véritable mutation du paradigme économique connu jusqu’à présent ? La réponse est non et il n’y a aucun signe politique qui montrerait encore aujourd’hui le contraire.

Pour les plus positifs, il fallait rebondir. Pourquoi ne pas faire de cet arrêt sur image d’un monde habituellement aveugle de ses propres impacts, un déclic vers un horizon aussi enthousiasmant que responsable, pour un avenir moins anxiogène ? Ce ne fut pas le cas. Pour d’autres, ceux qui avaient affronté de près la maladie ou la mort de proches en 2020, le temps de la remise en question n’était pas à l’ordre du jour. La sinistrose s’était installée, avec son lot de doutes et d’interrogations aussi bien métaphysiques que matérielles. Cela ressemblait davantage à une vraie impasse remplie d’insécurités multiples que d’un espoir d’une vie plus enjouée. Des pans entiers de certitudes venaient de s’effondrer. Le monde dans sa large majorité ne semblait pas prêt au changement.

Au fond, et comme il fallait s’y attendre, tous les événements pandémiques fâcheux ne furent qu’un avertissement douloureux sur nos faiblesses et notre propension à garder toujours la tête dans le guidon du quotidien. La poursuite de l’économie néocapitaliste se reproduisait, comme si rien d’autre ne semblait possible. Car, l’image de la croissance infinie est fortement ancrée dans l’esprit des décideurs, comme dans nos habitudes de vie.

Pandémie ou pas, rien n’a pu éviter postérieurement une reprise économique presque aussi soutenue qu’avant l’apparition de la Covid-19. Début 2021, force est de constater11 qu’un changement de cap économique n’était pas à l’ordre du jour.

Faudrait-il s’en étonner ? Probablement pas. On ne change pas de modèle économique aussi rapidement. Pourtant, notre jeunesse, de 18 à 24 ans, ne semble pas se satisfaire de cette poursuite économique, comme celle qui prévalait en 2019. Elle dit ne pas avoir la foi en l’avenir à 42 %12. Il suffit d’avoir vu l’engagement de Greta Thunberg13 et de ses adeptes ou d’avoir lu le témoignage très sensé et lucide d’une jeune fille de 14 ans qui s’exprimait dans une chronique, parlant pour l’égalité « hommes-femmes » : Je ne vis pas au pays des Bisounours et je suis consciente que le monde n’est pas parfait, mais j’espère qu’avec le temps les choses bougeront vraiment. Notre jeunesse semble garder la tête sur les épaules, mais espère du changement.

Il y a de fortes espérances un peu partout, mais la mutation espérée n’est pas très claire et ne s’exprime que par de sporadiques contestations, souvent désordonnées, voire malheureusement extrémistes. Les actes de malveillance inacceptables, avec de la soupe lancée sur des œuvres d’art célèbres dans des musées pour attirer l’attention, en sont une preuve de plus. On ne change pas la vie des gens de cette manière ni en se collant les mains sur le bitume. Au contraire, de telles opérations envoient les auteurs devant la justice et agacent les simples gens qui ne comprennent pas ces comportements.

Le monde change. Il semble que la jeune génération, dans sa large majorité, souhaite avant tout exercer une activité en phase avec ses valeurs. Ces dernières s’orientent vers un monde avec d’autres convictions que celles adoptées par la génération précédente, comme le partage, la solidarité, la coopération et une sensibilité affirmée pour les aspects sociaux et environnementaux. Les futurs dirigeants et les acteurs de la vie économique de demain sont bien à la recherche du changement et d’un cadre professionnel différent, pas nécessairement axé sur le travail d’une semaine de 50 heures !

Avec les nouvelles aspirations des jeunes, le monde de l’entreprise et son management vont devoir se confronter à de grandes différences14. Le modèle économique actuel, comme les formations dans les écoles de commerce, pousse les responsables à exiger plus de rentabilité et de profits. Pour la main-d’œuvre engagée, en termes de motivation, de reconnaissance, de responsabilités et d’informations, le compte n’y est peut-être pas toujours. Il n’y a donc rien d’étonnant qu’un certain nombre de collaborateurs tourne le dos à leurs employeurs. Pourtant, le secteur des entreprises a besoin de bras et en aura encore plus besoin ces prochaines années pour assumer la transition énergétique et sociétale en marche, à coup d’intelligence artificielle. Des PME l’ont compris et portent une attention toute particulière à leurs employés. Le résultat est immédiat en termes de fidélité et d’engagement au travail.

La pandémie a donc servi de point marquant. Elle a aussi renforcé les travers de la forte dépendance industrielle consentie ces dernières décennies, en particulier avec les pays asiatiques. Les échanges mondialisés ont été pointés du doigt par la recherche généralisée d’une rentabilité maximisée et d’une désindustrialisation massive des pays occidentaux. Enfin, elle a été sans pitié pour les entités les plus économiquement vulnérables qui ont dû fermer boutique. Les mauvaises langues diront que l’économie s’est assainie ! Pendant ce temps, et il fallait s’y attendre, chacun a constaté et profité du boum des entreprises de vente par correspondance, dont les chiffres d’affaires ont explosé.

Malgré des circonstances objectives qui pouvaient faire croire à un changement de direction économique, toutes les activités ont repris leurs cours normaux dès 2021, dans la précipitation, sur le même modèle capitaliste. Si les mieux lotis financièrement ne veulent pas entendre parler de changements, la grande majorité des jeunes et des moins jeunes espèrent une remise en cause des fondamentaux du moment. Imaginer un changement de modèle s’est encore accentué avec le retour de l’inflation, une guerre européenne privant l’Afrique de céréales de base et une déstabilisation du Moyen-Orient accentuant la pression sur l’accès aux énergies fossiles. Même si l’objectif est évidemment de rompre avec l’approvisionnement carboné, cela va prendre du temps quand on sait que la consommation mondiale d’énergie est à plus de 80 % d’origine carbonée, en pétrole, charbon et gaz. De nombreuses personnes se chauffent au gaz ou au mazout, donc en produits carbonés et personne ne veut les priver de cela. De plus, il y a un vent de révolte des investisseurs du secteur énergétique pour retrouver plus de rentabilité des capitaux investis, par les énergies fossiles à forte marge. À titre d’exemple et en complète opposition avec son plan de neutralité carbone de 2020, British Petroleum (BP) vient d’annoncer un changement de stratégie d’investissements pour plus d’énergie fossile rentable et moins d’énergie à bas carbone.

Pourtant, ne sommes-nous pas convaincus maintenant que les effets d’un réel réchauffement climatique sont là et qu’il conviendrait d’infléchir la courbe de la montée de la température terrestre ? Une récente enquête d’opinion internationale Ipsos, de 2022, montrait pourtant qu’un tiers des sondés revendiquait leur climatoscepticisme. En marge de ce constat curieux, ce résultat démontre un manque de connaissance des problèmes actuels, comme la manifestation d’une certaine méfiance de la population envers ce que disent ses dirigeants, ce que montrent les résultats scientifiques et ce que la presse relaie avec tant de mauvaises nouvelles. C’est aussi sans compter sur les réseaux sociaux qui colportent n’importe quelles informations non vérifiées et confortent les utilisateurs dans leurs opinions, par algorithmes interposés. Donc, il va falloir vraiment du temps et nous en avons de moins en moins, car la température terrestre continue de croître.

Quoi que nous pensions, et même avec la récente pandémie qui a brassé les cartes du quotidien, un changement, voire une adaptation, du modèle économique actuel, n’est pas attendu. Au mieux, nous avons conscience maintenant que l’usage des produits carbonés dans l’activité humaine est une partie du mal environnemental que nous vivons.

 

Pouvons-nous imaginer un autre modèle économique plus durable ?

 

À ce stade, une question se pose. Qui des milieux politiques, économiques et financiers voudraient prendre le risque que les fonctionnements de l’économie soient différents et, surtout, orientés vers moins de court terme et plus de durabilité ? En constatant les actions mises en œuvre pour le combat climatique et pour une réelle adaptation du modèle de fonctionnement de l’économie, la réponse logique est « personne » ! Il faut tempérer cela et dire que la récente pandémie a surtout refroidi toutes velléités de vrais changements. Comme de nombreux pays développés, nous vivons dans un monde que nous nous sommes forgé tout au long de décennies de croissance presque continue, autour du progrès. Cela doit continuer ainsi, selon l’avis d’une large majorité de décideurs. Pour la suite, une avancée serait déjà de mieux définir notre croissance pour quoi faire demain, pour quels développements attendus et sans perturbation de quoi ? Si l’objectif n’est pas une modification de modèle, il devient nécessaire d’envisager une adaptation de nos comportements économiques pour s’orienter vers un horizon moins déstabilisant.

À ce stade, il est important de ne pas confondre l’usage du terme croissance avec celui de développement, mots qui seront largement employés par la suite. La croissance de l’économie est une notion quantitative. Elle se définit comme l’augmentation des revenus d’un pays. Elle forme le binôme « PIB-croissance », référence majeure des politiciens et économistes. Par contre, le développement économique est qualitatif. Il désigne le changement de structure et de fonctionnement de la société. Avoir une croissance à la hausse, cela ne signifie pas nécessairement que chaque couche de la population bénéficie d’un développement économique, social ou environnemental associé, partagé et acceptable15. Croissance et développement ne vont pas de pair aussi directement. Comme le propose le Prof. S. Rossi de l’Université de Fribourg (CH) : Plutôt que de parler croissance, il semble plus approprié de concevoir un développement repensé, dans l’intérêt de l’environnement. Aux yeux de cette référence, le qualitatif primerait sur le quantitatif ! En fait, nous parlions d’avenir durable à entrevoir. C’est dans ce sens que les futurs développements devraient s’inscrire et cela touche de plein fouet nos concepts énergétiques actuels, orientés fossiles.

À la lumière de tous les événements fâcheux, géopolitiques et naturels, qui s’accumulent ces dernières années, il y a aussi une tendance vers un repli sur soi de nombreux pays qui souhaitent retrouver une prédominance nationale, plus protectrice à leurs yeux. Seulement une faible moitié de la population mondiale vit aujourd’hui dans une démocratie16 ! C’est une autre leçon de la pandémie, celle d’avoir renforcé ce besoin de revenir aux fondamentaux de la nation. Mais, il y a un réel danger de tomber dans une sorte de « piège identitaire17 », en rupture avec les relations internationales accrues, instaurées avec la mondialisation qui n’a pas que des défauts. Il est clair que nous avons échoué à apporter le progrès à tous.

Peu visible en termes de résultats concrets sur le terrain et dans la vie de tous les jours, l’action politique conduit souvent au sentiment d’inaction ou d’impuissance. C’est le cas pour les aspects climatiques, surtout chez les jeunes. Résultat, le système en place est rejeté au profit de ceux qui ont été assez malins pour attiser les peurs sécuritaires et sociales et faire croire qu’ils feront mieux. Aujourd’hui tout spécialement, le monde a besoin de dirigeants sereins, fermes et compétents, capables d’anticipation et de décisions courageuses au profit du plus grand nombre. Ils doivent être une force de propositions par des actions simples et compréhensibles, afin d’éviter ces coups de butoir financiers, conjoncturels et environnementaux, déstabilisants pour les peuples de cette planète.

Sans soutien de la majorité de la classe politique et une volonté des grandes économies de ce monde, il ne peut y avoir de changement économique marquant vers un modèle bien plus durable, au sens « Sustainable » en anglais, pour être clair. Il n’y a rien d’impossible d’imaginer une mobilisation de tous les acteurs de la vie économique pour un objectif commun, celui de réduire ensemble tous les dangers qui guettent la planète et ils ne sont pas qu’environnementaux.

Ce que l’on observe, c’est la tendance de rester dans son égoïsme confortable, de privilégier ses seuls propres intérêts et le « moi-je », sans la moindre vision collective du court au long terme. La récente élection du 47e Président américain, en 2025, est une parfaite illustration de ce qui précède. Les personnes les plus remontées face aux dégâts sanitaires, environnementaux et climatiques diront que c’est surtout la faute d’une poignée d’individus. Les plus fortunés auraient pris depuis longtemps les rênes de l’économie et imposent leur chemin et la manière de le suivre à leurs avantages et pour une accumulation de richesses toujours plus grande. L’arrivée à la Maison-Blanche de D. Trump et de sa cohorte de milliardaires des GAFA (Google, Amazon, Facebook et Apple) semble parfaitement illustrer le propos. Ces puissants du numérique sont en train de réécrire une forme d’économie à leur image, mais très loin de tout développement durable.

Selon une récente étude18, le monde comptait près de 2 700 milliardaires, pour une fortune détenue de US $ 12 700 milliards, soit de l’ordre de 14 % du PIB mondial. Dans ce contexte, et alors que la pandémie a déjà touché les plus démunis, entre 2021 et 2022, les prix des denrées agroalimentaires ont pris l’ascenseur de près de 57 %, poussant plus de 260 millions de personnes vers l’extrême pauvreté. Le panier de la ménagère est devenu un pensum pour chaque foyer, alors que les États pourraient accroître leur pression fiscale sur les plus nantis, comme le fait l’Italie sur les bénéfices exceptionnels des grandes sociétés. Au grand dam des principes néolibéraux, l’idée se propage d’une mise en place d’un impôt ciblé sur les gains exceptionnels des plus riches, dans le but de réduire les inégalités qui se creusent ou de trouver l’argent où il est pour les États très déficitaires. Pour l’heure, et selon la multimillionnaire et activiste autrichienne, Marlene Engelhorn : Les riches s’enrichissent, les pauvres s’appauvrissent.

Ces dernières années et en soutien économique de leurs citoyens, plusieurs pays ont accru leurs dettes publiques. Mais, cela a également réduit d’autant leurs marges de manœuvre pour de futurs investissements en direction d’un environnement mieux préservé. La France, avec son « Quoi qu’il en coûte19 », a une dette publique accumulée fin 2024 de 3 228 milliards d’euros, soit 112 % de son PIB20. Pour remplir les caisses de l’État et permettre une relance incitative, il faudrait que le gouvernement français décide, soit de réduire les coûts de fonctionnement de l’appareil d’état, déjà mis à mal en particulier dans le secteur de la santé publique, soit d’augmenter les revenus, donc les impôts. Dans les deux cas, c’est un coup de plus sur la tête des contribuables de l’Hexagone et des décisions très peu populaires à prendre. Surtout et en lien avec notre contexte de durabilité, cela veut dire que les promesses de la France en termes de réduction des impacts environnementaux ne seront pas tenues, faute de budget suffisant à allouer à la défense de l’environnement.

Gagner de l’argent n’est pas un crime ni une situation méprisante, sauf si les comportements de malversation et de corruption d’argent mal acquis sont avérés. Disons que certaines périodes sont surtout favorables aux plus aisés et permettent l’accroissement de leur fortune sans trop d’effort, simplement par la hausse exceptionnelle des prix sur le marché. Il faut dire que les cinq personnes les plus riches au monde ont vu leur fortune doubler depuis la récente pandémie. Cette information peut légitimement laisser un goût amer dans la bouche de nombreuses personnes dont les moyens ont fondu comme neige au soleil durant la même période, surtout avec le retour de l’inflation.

Pour beaucoup, il est difficile de comprendre et d’accepter la situation des plus riches. Si certaines fortunes devaient quitter le pays où ils investissent, par lassitude face aux critiques ou par ponctions fiscales jugées abusives, il y aurait de nombreux perdants. Le patron de LVMH, B. Arnault, dirige un empire qui est le premier employeur ou recruteur de France. Pourtant, il est critiqué et vilipendé à chaque occasion. En 2023, ses magasins ont été des cibles choisies et ont fait l’objet de vandalismes répétés par des groupes d’ultraviolents. Pourtant, un emploi créé chez LVMH en génère trois ou quatre chez les fournisseurs. Alors que 90 % de la production de LVMH sont dédiés à l’exportation, le groupe paie 50 % de ses impôts en France ! Certes, LVMH est un acteur central du consumérisme de luxe en plein boum. Son bilan carbone est aussi nécessairement scruté, même si l’indicateur du groupe21 des émissions de gaz à effet de serre affiche une baisse de 11 % depuis quatre ans.

Au niveau commun, la compréhension du comportement des plus riches est difficile, voire peu lisible. Pour beaucoup de gens, ces derniers sont dans un monde à part. L’emblématique et fantasque Elon Musk est capable de souffler le chaud, comme le froid à toutes occasions, mais jamais en sa défaveur. Plus généralement, il est souvent trop facile de lancer l’opprobre sans tout appréhender de ce monde à part et d’affirmer sans nuance que : les riches doivent payer