Aime et fais ce que tu veux - Cédric Anastase - E-Book

Aime et fais ce que tu veux E-Book

Cédric Anastase

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Beschreibung

Dans cet ouvrage simple, nourri de sa propre expérience, de l’Évangile et de la pédagogie de don Bosco, l’auteur revient sur les fondamentaux de l’éducation : accompagnement, formation de la conscience morale, croissance dans la liberté. À partir de nombreux exemples, il nous éclaire pour aider concrètement les jeunes à fonder leur vie, non sur la facilité et le plaisir, mais sur une recherche du véritable bien.


Un livre lumineux et utile pour les parents, éducateurs, professeurs, chefs scouts... et tous ceux qui veulent aider les jeunes à grandir.

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Cédric Anastase

Aime et fais ce que tu veux

Aider nos jeunes à choisir le bien

Nihil obstat,

Paris, le 15 janvier 2019

P. PELLETIER, Cens. dep.

Imprimatur,

Paris, le 15 janvier 2019

Mgr CHAUVET, Vic. ép.

Conception couverture : © Christophe Roger

Composition : Soft Office (38)

© Éditions Emmanuel, 2019

89, bd Auguste Blanqui – 75013 Paris

www.editions-emmanuel.com

ISBN : 978-2-35389-734-6

Dépôt légal : 1er trimestre 2019

À ma mère,

ma première éducatrice

À tous ceux qui travaillent,

de quelque manière,

à éduquer des êtres libres

Préface

Voici un petit live sans prétention mais non sans enjeux. En ce moment où la mission éducative de l’Église rejoint une urgence sociale décisive, il est bon de revenir, en un langage simple et nourri d’expérience, aux « fondamentaux » de l’action et de la relation éducatives. C’est ce que fait Cédric Anastase, en puisant généreusement, pour nous les partager, dans les expériences, les intuitions et les pratiques de saint Jean Bosco et de la tradition salésienne.

Le cœur de l’action d’un éducateur est de susciter la liberté en ceux qui lui sont confiés, en leur montrant qu’ils en sont capables et en leur offrant des occasions de la découvrir en l’exerçant.

Le cœur de la relation éducative est de leur manifester qu’ils sont aimés et dignes de l’être, en se faisant soi-même médiateur et signe d’un amour inconditionnel qui n’attend pas leurs qualités pour exister et ne se laisse pas décourager par leurs fautes. Ce double message anime et traverse toutes les pages de ce livre.

On comprend alors la place essentielle qu’occupe en éducation la formation de la conscience, sanctuaire de la vie morale et source de toute liberté authentique. On comprend aussi quelle ressource représente pour tout éducateur la bonne nouvelle de l’Évangile, attestant que chacun de nous est aimé de Dieu, avant tout mérite et au-delà de toute culpabilité : « Tu as du prix à mes yeux et je t’aime. » Cédric Anastase sait choisir dans la Parole de Dieu les épisodes qui peuvent guider la mission éducative – Élie sur la montagne et le goût du silence, la Samaritaine au bord du puits et la grâce du pardon… – et les mêler aux situations vécues par don Bosco ou par lui-même pour rendre concrets et savoureux les conseils qu’il donne et les pistes qu’il ouvre à ses lecteurs.

À travers ses propos et les épisodes de son ministère, il manifeste combien une vocation sacerdotale peut s’épanouir dans l’exercice d’une responsabilité éducative. En ces temps où bien des soupçons et des déviances en ont terni l’image, il est bon de restaurer, avec simplicité, élan et joie, la figure du prêtre éducateur, si exemplairement incarnée par don Bosco. Il est beau de constater qu’elle suscite aujourd’hui encore chez beaucoup de jeunes prêtres cette « option préférentielle pour les jeunes », chère aux yeux du pape François, et si précieuse pour notre aujourd’hui.

Marguerite Léna, Communauté saint François-Xavier

Avant-propos

Chers lecteurs,

Je m’appelle Pierre, j’ai 16 ans. J’ai accepté avec grande joie la proposition du père Cédric d’écrire ce petit avis aux lecteurs. Je comprends que cela puisse paraître surprenant : quelle idée de demander à un adolescent d’écrire l’introduction d’un livre sur l’éducation ! Mais vous allez comprendre…

Contrairement aux clichés de « l’âge bête », de l’adolescent insupportable car mal dans sa peau, j’ai le sentiment d’avoir vécu, et de vivre encore aujourd’hui, une très belle adolescence : je suis pleinement heureux ! Il m’arrive de prendre du recul et de me demander ce qui m’a mis sur la voie de la joie. Le hasard ? La chance ? Je ne le pense pas. J’ai plutôt en tête des figures de personnes qui, à différentes étapes de ma (courte) vie, ont su m’orienter, m’élever, me donner de belles leçons… je pense à de nombreux éducateurs que j’ai côtoyés ou que je côtoie encore : mes parents, un professeur, deux prêtres qui sont comme des pères pour moi, mes frères et sœurs, des CP scouts… je me souviens aussi de simples discussions avec des personnes inconnues, qui resteront longtemps gravées dans ma mémoire… Je pense vraiment que cela m’a façonné et que sans eux, ma vie spirituelle, familiale et morale en serait bien différente !

Le père Cédric fait partie de ces personnes qui m’ont aidé à grandir, qui m’ont guidé, m’ont fait progresser, et je lui en suis très reconnaissant. À la lecture de ce livre, j’ai reconnu plein de belles clefs dont il s’est servi pour me faire avancer ! Ses conseils précieux peuvent aussi bien toucher un jeune de 16 ans à qui on confie une patrouille, qu’un père de famille. Le père Cédric nous éduque à l’éducation à travers la figure de saint don Bosco et je trouve cela très beau. En effet, je pense que nous sommes tous guides et guidés dans ce monde, que nous sommes tous appelés à faire grandir le monde qui nous entoure, tout en ayant soi-même la volonté de toujours progresser ! Selon moi, c’est primordial pour marcher vers le Christ.

Aujourd’hui, face à la société, les jeunes de ma génération (et moi le premier !) se sentent un peu perdus et l’enjeu de l’éducation est immense. Nous avons besoin qu’un éducateur, qu’un don Bosco des temps modernes nous tende la main, nous mette sur le droit chemin, nous éclaire tout simplement !

Alors, je vous appelle à vous tourner vers les jeunes, ils ont besoin de vous, besoin que vous les façonniez, besoin que vous leur montriez la beauté de la vie ! L’enjeu est à la fois immense et magnifique !

Pierre

Introduction

Quand j’étais adolescent, j’ai eu la chance de jouer dans un club de foot, le Paris Alésia Football Club. Paradoxalement, l’un de mes souvenirs les plus mémorables n’est pas celui dont je suis le plus fier.

Je devais avoir 16 ans et nous jouions ce week-end-là contre une équipe qui nous était nettement supérieure. Par miracle, à la mi-temps, le score était encore nul et vierge. Nous savions que si nous continuions à bien défendre, les adversaires nous laisseraient une ou deux occasions de marquer, dans leur acharnement à vouloir arracher la victoire. Effectivement, nous avons eu cette occasion. À une minute de la fin du match, alors que nous étions encore à égalité, je réussis à obtenir un penalty sur une subtile simulation. Tout le monde avait repéré la supercherie. Tout le monde, excepté les arbitres… C’est ainsi que nous avons remporté le match grâce à un penalty transformé bien que contestable.

De retour aux vestiaires, tous mes coéquipiers sont venus me féliciter pour ma malice. Je sentais que ce n’était pas très juste mais, après tout, nous avions gagné et là était bien l’essentiel. C’est alors qu’est arrivé notre entraîneur. Il a fermé la porte du vestiaire puis nous a réunis : « Est-ce que vous êtes heureux de cette victoire, les gars ? » nous a-t-il questionnés. Quelle question ! Bien sûr que nous étions heureux ! Un match difficile mais une victoire qui fait du bien. L’entraîneur a poursuivi son discours avec une seule phrase qui me reste encore aujourd’hui gravée dans la mémoire : « Eh bien moi, aujourd’hui, j’ai honte d’entraîner des garçons comme vous. » Puis il est parti, sans rien ajouter d’autre…

Ce jour-là, j’ai reçu une des plus belles leçons de ma vie : gagner en trichant, c’est perdre. Nous avions remporté la victoire, certes, mais nous avions perdu notre honneur parce que nous n’avions pas fait ce qui était juste et bon. Étrangement, malgré la victoire, je suis rentré chez moi tout triste ce soir-là, à l’image du jeune homme riche qui était déçu de ne pas avoir fait le bon choix (cf. Mt 19, 22).

Ce discernement de ce qui est juste et bon nous est rendu possible grâce à notre conscience. N’avons-nous pas déjà tous fait l’expérience de cette voix intérieure qui nous indique où est le bien à faire, où est le mal à éviter, ici et maintenant ? Quand nous obéissons à cette voix, nous sommes heureux car nous posons des actes en conformité avec notre dignité d’être humain à laquelle nous aspirons tous. Quand nous désobéissons à cette voix, c’est la tristesse qui survient. Rendre les jeunes sensibles à cette voix de la conscience m’apparaît être l’un des enjeux prioritaires de l’éducation.

Hannah Arendt, grande philosophe allemande, nous a montré que lorsque cette voix intérieure n’était plus écoutée, lorsque la conscience était trop anesthésiée, immanquablement, l’être humain risquait de sombrer dans la barbarie parce que le mal devenait comme « banalisé », pour reprendre l’une de ses expressions. Notre histoire récente est malheureusement riche d’exemples des conséquences désastreuses d’une telle anesthésie de la conscience. Que l’on pense à tous ces dignitaires nazis qui, lors de leur jugement, prétendaient n’avoir jamais eu l’intention de faire le bien ou au contraire le mal, et répétaient qu’ils n’avaient fait qu’obéir aux ordres. Hannah Arendt commente :

Cette excuse, typique des nazis, montre que le mal le plus grand qui soit au monde est accompli par des personnes normales, le mal accompli par des personnes qui n’ont aucune motivation, aucune conviction, aucun goût pour la méchanceté, aucune tendance démoniaque, par des humains sans prétentions qui refusent soudain d’être des personnes humaines1.

Dans un autre ouvrage, la philosophe juive saisit le problème en deux phrases :

C’est dans le vide de la pensée que s’inscrit le mal. S’il cesse de penser, chaque être humain peut agir en barbare2.

À l’heure actuelle, nous ne sommes plus confrontés aux horreurs des guerres mondiales mais l’affirmation d’Hannah Arendt ne manque pas de pertinence et une question mérite d’être posée et réfléchie. Notre société, à la conscience trop anesthésiée par la surconsommation, la publicité ou la technique, n’a-t-elle pas ainsi favorisé certaines conditions à l’expansion d’idées fanatiques dans des esprits trop faibles ? La perte de l’immédiateté de la conscience morale entraînant un déclin du sens moral n’a-t-il pas favorisé le travail des groupes terroristes qui manipulent le langage humain ? L’obscurcissement du discernement moral ne peut-il pas expliquer, en partie au moins, pourquoi tant de jeunes Français se laissent convaincre de servir une vérité qui est en fait un mensonge, de s’affirmer martyrs alors qu’ils ne sèment que la mort3 ? Le communiqué publié par Daech, au lendemain des attentats du 13 novembre 2015, atteste de cette falsification du langage qui ne pourrait jamais réussir à tromper une conscience éclairée :

Allah a facilité à nos frères et leur a accordé ce qu’ils espéraient, le martyr, ils ont déclenchés leurs ceintures d’explosifs au milieu de ces mécréants après avoir épuisé leurs munitions. Qu’Allah les accepte parmi les martyrs et nous permette de les rejoindre4.

« Ne tardez pas à vous occuper des jeunes sinon ils ne vont pas tarder à s’occuper de vous. » Cet avertissement de saint Jean Bosco résonne aujourd’hui avec une actualité déconcertante.

Sans entrer davantage dans ces débats de société, restons-en à nos considérations éducatives. Le pape François nous le rappelle, « l’obsession n’éduque pas. On ne peut pas avoir sous contrôle toutes les situations qu’un enfant pourrait traverser5 ». Tout parent, tout éducateur sait bien que l’enjeu de l’éducation n’est pas de contrôler l’enfant mais de le rendre autonome (auto-nomos), c’est-à-dire capable de se donner à lui-même la règle qui guidera sa vie. Mais selon quel critère cette règle sera-t-elle établie ? La facilité et le confort ? Le plus grand plaisir ? Le plus grand gain d’argent ? Le seul critère qui vaille est celui qui prend en considération le vrai bien de la personne et celui des autres. « Ce qui importe surtout, c’est de créer chez l’enfant, par beaucoup d’amour, des processus de maturation de sa liberté, de formation, de croissance intégrale, de culture d’une authentique autonomie. C’est seulement ainsi que cet enfant aura en lui-même les éléments nécessaires pour savoir se défendre ainsi que pour agir intelligemment et avec lucidité dans les circonstances difficiles6. » Former une conscience droite, éclairée, capable de faire entendre sa voix, en dépit de toutes les autres voix que nous distille notre monde, participe de ce processus de maturation.

Ce petit livre est à destination des éducateurs : parents, professeurs, catéchistes, animateurs, chefs scouts ou chefs de patrouille… Tous ceux qui sont en position de transmission à des plus jeunes pourront, je l’espère, y trouver quelques lumières. Je veux essayer de donner quelques clefs pour une formation de la conscience morale des jeunes. Je m’appuierai en grande partie sur la tradition biblique qui est un véritable trésor de sagesse. Dieu n’est-il pas un Père qui éduque, tout au long de l’Histoire, la conscience de ses enfants ? Je m’inspirerai également de mes recherches effectuées en théologie morale. Enfin, je me référerai à celui qui est pour moi un maître en la matière, saint Jean Bosco, saint patron des éducateurs. À travers des épisodes de sa vie, j’essaierai de montrer comment il a lui-même formé la conscience morale des jeunes dont il s’est occupé. J’espère que vous serez indulgents à l’évocation de ma courte expérience dans le domaine de l’éducation.

Le propos est loin d’être exhaustif. Je ne prétends pas établir une méthode éducative et je ne veux donner aucune leçon. Je souhaite simplement apporter ma modeste contribution, une petite pierre dans l’édification de cette belle œuvre qu’est l’éducation d’hommes et de femmes libres, capables de discerner et de choisir le bien en toutes circonstances.

1. H. Arendt, Eichmann à Jérusalem. Rapport sur la banalité du mal (juin 1964), Paris, Gallimard, 2002, p. 1043. H. Arendt montre ainsi que l’usage de clichés de langage diminue la conscience des actes. Ces expressions toutes faites, utilisées mécaniquement, empêchent l’imagination de s’interroger sur soi, sur ses actes, sur la norme, et entraînent une incapacité à être affecté par ce que l’on fait et voit, provoquant l’absence de pensée, la personne se drapant d’un aspect banal.

2. H. Arendt, Les Origines du totalitarisme (1963), Paris, Gallimard, 2002, p. 824.

3. À la fin de l’année 2015, près de mille Français ont rejoint les rangs de l’organisation terroriste en Syrie ou en Irak et cent cinquante y ont trouvé la mort, sans compter ceux qui perpètrent leurs attentats en France.

4. Extrait du Communiqué sur l’attaque bénie de Paris contre la France croisée,