Au royaume du pauvre - Myriam Rembaut - E-Book

Au royaume du pauvre E-Book

Myriam Rembaut

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Beschreibung

La pauvreté, ce n'est pas qu'un porte-monnaie vide. C'est un état qui se vit douloureusement, jour après jour, dans la tête et dans sa chair. La pauvreté, ce n’est pas aimer l’oisiveté. C’est passer des journées entières dans les administrations, à remplir sans cesse les mêmes dossiers, pour quémander de quoi survivre à des fonctionnaires payés pour à peine vous écouter. La pauvreté, c’est avoir des rêves, comme les autres, mais jamais aucun moyen pour le faire…

Myriam Rembaut a connu l'extrême pauvreté. Elle n'était ni traîne-savate, ni feignante, ni profiteuse… Elle était journaliste, confortablement installée dans la vie, et qui s'élevait, lorsqu'il le fallait, contre l'insupportable et pérenne pauvreté dans notre monde… mais sans se douter une seconde de l'extraordinaire violence qui l'accompagne ! La seule manière de faire comprendre les choses est parfois de se mettre à nu… Ce qu’elle fait dans le récit de sa chute, avec l'immense espoir d'éveiller un autre regard sur les pauvres, les démunis que notre société d'aujourd'hui méprise.


À PROPOS DE L'AUTEURE

Petite, Myriam Rembaut rêvait de vivre de grandes aventures et d’écrire dans un journal, comme son héros, Tintin. Pas assez sportive pour être globetrotteuse, elle est, en revanche, devenue journaliste. Un métier qu’elle adore et qu’elle exerce depuis plus de trente ans. Elle s’est spécialisée dans la presse jeunesse et elle a notamment travaillé pour le journal Mon Quotidien.

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Myriam Rembaut

Au royaume du pauvre

ISBN : 979-10-388-0475-3

Collection Résonance

ISSN :En cours

Dépôt légal : novembre 2022

© couverture Ex Æquo

© 2022 Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction intégrale ou partielle, réservés pour tous pays

Toute modification interdite

Éditions Ex Æquo

6 rue des Sybilles

88370 Plombières Les Bains

www.editions-exaequo.com

« Hommes, soyez humains, c’est votre premier devoir »,

Préface

L’histoire de Myriam, je la connaissais dans les grandes lignes, mais ce sont les détails qui m’ont permis de saisir l’essence de son témoignage. Ce livre, elle le porte en elle depuis des années, l’écrivant par pièce, comme un puzzle que l’on finit par rassembler. Le récit qu’elle raconte avec pudeur et sans pathos fera tristement écho à la réalité de beaucoup, en résonance avec une actualité grisâtre, qui ne met personne à l’abri de basculer en quelques semaines dans la précarité et de perdre pied dans les pièges d’une administration en labyrinthe à traverser.

Ce labyrinthe, jalonné d’uppercuts et de coups du sort, ne lui a jamais fait perdre ses valeurs. Plus je l’écoutais me conter ses mésaventures, plus j’avais l’impression, parfois, de redécouvrir le livre de Job, accablé de malheurs dans un crescendo sans fin. La force de son discours tient aussi dans la sérénité de sa foi qu’elle a toujours gardée en pierre précieuse. Son unique richesse qui a transformé les épreuves en chemin de vie à parcourir.

Comme elle le dit si justement, la pauvreté, on peut en parler pendant des heures, en faire des débats et des soirées thématiques sur Arte, mais tant qu’on ne l’a pas vécue jusqu’à ce qu’elle vous colle à la peau comme un vêtement trop étroit qui limite vos mouvements, on ne sait pas vraiment ce qu’elle implique. Des répercussions à tous les niveaux, sur les soins de santé qu’on retarde, sur l’estime de soi qui prend l’eau, sur la vie sociale qui se rétrécit comme un horizon borné de factures à régler. L’argent devient une obsession et son manque une épine dans le pied qui vous fait claudiquer hors des sentiers balisés jusqu’à une zone d’inconfort permanent.

Quand j’ai lu son texte la première fois, je me suis interrogée sur le titre. Il vient de Shakespeare, me répondit l’auteure qui me cita une phrase tirée de Roméo et Juliette : « Il n’y a que les mendiants qui puissent compter leurs richesses. »

La richesse, je l’ai trouvée dans ses mots et dans son témoignage que j’ai le plaisir d’avoir pu rassembler dans un livre qui ouvrira la collection Résonance des éditions Ex Æquo pour élargir la réflexion et donner la parole à ceux qui la prennent si peu souvent…

Ange Lise

Directrice de la collection Résonance

Introduction

J’ai toujours trouvé qu’il y a une certaine impudeur à livrer le récit de sa vie, à révéler son intimité au tout-venant… Un peu comme si, tout à coup, on décidait de se montrer nu devant toute une assemblée. Aussi, il m’a fallu plusieurs années de réflexion et surtout des rencontres prégnantes avant d’accepter de témoigner publiquement de l’absolue pauvreté, à partir de ma seule expérience.

On m’a souvent dit que ma chute n’a pas été banale. C’est peut-être vrai. Reste que je ne suis pas la seule personne à avoir dévissé de l’échelle sociale, à avoir été laminée par notre administration, aussi froide qu’absurde, et touché les abysses de l’extrême pauvreté.

— Vous, vous savez parler, expliquer les choses… Nous, on n’a pas les mots, m’a souvent répété Luc, un sans-abri que j’ai connu à Roubaix.

En réalité, c’est lui et d’autres sans-logis, comme Sonia, Jordan, Éric, Julien et son fidèle toutou Nounous, qui m’ont donné envie de renouer avec ma plume journalistique, pour informer et dénoncer les ravages d’une pauvreté toujours plus gangrenante.

Les pauvres ont toujours existé et, quelles que soient les époques, leur sort n’a jamais été très enviable. Ils ont pour ainsi dire toujours été l’objet de commisération ou de rejet. Pendant longtemps, la pauvreté a été perçue comme une fatalité. Ce n’était pas l’argent qui faisait le pauvre, mais davantage l’infirmité, la maladie ou encore la marginalité. À la fin du Moyen Âge, on a dissocié le « bon » du « mauvais » pauvre : le premier étant celui que l’on peut secourir et assister, et le second, celui que l’on ignore ou que l’on chasse. Cette opposition va d’ailleurs être à la base de beaucoup de catégorisations et de préjugés. Mais à côté de cela, il y a une pratique, aussi ancienne que la Bible, que l’homme n’a jamais cessé d’exercer : c’est l’aumône. Ce don aux nécessiteux a toujours été considéré comme un devoir moral, à accomplir dans un esprit de justice et un moyen de manifester sa charité envers le prochain. C’est d’ailleurs une notion que l’on retrouve dans toutes les grandes religions. Mais aujourd’hui, quelle place accordons-nous au pauvre ?

Dans nos sociétés d’enfants gâtés et individualistes, soumises au diktat de l’argent-roi, obsédées par le profit et un besoin sans fin d’hyperconsommation, le nécessiteux est exclu, méprisé, voire haï. En France, il se développe, depuis plusieurs années, une forme de racisme anti-pauvres, qui réduit l’indigent à d’abjects préjugés. On le dit profiteur, fraudeur, fainéant, dépensier… Et ces clichés dégradants, puérils, humiliants, s’inscrivent de plus en plus durablement dans l’imaginaire collectif de notre pays. Cette France, réputée à travers le monde pour être la championne des droits de l’Homme et de la protection sociale ! On le sait, les préjugés ont la vie dure. Albert Einstein ne disait-il pas « Il est plus difficile de désagréger un préjugé qu’un atome ».

Pour l’avoir côtoyée pendant dix longues années, je sais désormais ce qu’est la violence de la pauvreté. J’affirme que c’est un poison, un des pires qui soient, dont personne ne peut imaginer la toxicité tant qu’il n’y a pas pleinement goûté.

Avec ce livre-témoignage, j’ai d’abord cherché à accomplir ce travail de journaliste qui est le mien. C’est-à-dire rapporter l’information avec le plus d’objectivité possible, pour faire connaître et faire comprendre les rouages de cette pauvreté. J’ai aussi essayé d’éveiller les consciences sur l’urgence que nous avons à combattre cette « peste ».

L’administration m’a fait perdre beaucoup de mes droits, m’enfermant comme dans un piège à l’impossible évasion. Mais elle ne m’a pas privée de mes droits de citoyenne. Et c’est en ce nom que je témoigne de l’hypocrisie du monde d’aujourd’hui vis-à-vis du pauvre.

Cela fait des années et des années que l’on nous assomme de chiffres, de sondages, d’enquêtes, d’études… Que les gouvernements, les parlementaires, les politiques… nous sortent des plans, élaborent des projets, concoctent des programmes censés faire reculer la pauvreté. Pour aboutir à quoi ? Rien, ou très peu. Le nombre de pauvres est toujours croissant. La misère, qui devrait être un scandale, fait toujours partie du fonctionnement de nossociétés.Comme si le paupérisme faisait partie de notre paysage. Tout cela m’interroge : si tous les êtres humains sont égaux en droits, pourquoi les pauvres ne sont-ils pas riches ? Pourquoi lapauvreté est-elle érigée comme un problème public ?Pourquoi l’argent est-il honnête dans la poche des riches et mauvais entre les mains des pauvres ?

Mon vœu le plus cher, avec ce livre, est de pouvoir redonner de la fierté et de la dignité à tous ceux que l’on méprise, que l’on condamne pour le seul fait qu’ils n’ont pas d’argent. Mais aussi de donner un coup de chapeau à toutes celles et ceux qui travaillent sans relâche pour maintenir un tissu social, déchiré de partout. Et, enfin, d’arriver à pourfendre l’armure idéologique des « vaccinés de la vie » pensant que la pauvreté est l’affaire des autres et qu’ils seront toujours plus forts pour ne jamais tomber dans son piège. Un piège que je leur souhaite de tout mon cœur d’éviter.

J’ la pauvreté

Allez, j’avoue… J’aime, j’adore, je kiffe la pauvreté ! J’ai réalisé, il n’y a pas si longtemps encore, ma chance d’avoir côtoyé cet état d’indigence. Grâce à lui, j’ai fait l’apprentissage d’un savoir-faire, d’un art unique en son genre. Pour vous donner quelques exemples, j’ai appris à :

-préparer des formulaires et des dossiers très variés,

-utiliser les techniques adéquates pour me fighter rapidement avec les services sociaux,

-organiser des moments de jeûne,

-décoder les subtilités du langage administratif,

-me faire de nouveaux amis (les huissiers, les policiers,les juges…).

En résumé, j’ai acquis les atouts de la « parfaite petite pauvre » ! Mais pourquoi n’ai-je pas intégré ses rangs plus tôt ? Au moment de l’orientation professionnelle, si à la question : « Que voulez-vous faire plus tard ? », j’avais répondu « Être pauvre ! », j’aurais pu partager beaucoup plus vite les joies de la pauvreté qu’affectionne la grande et joyeuse cohorte des nécessiteux.

C’est tellement génial, je vous assure ! C’est simple, je recommande à tout le monde de l’essayer au moins une fois dans sa vie ! Profitez, par exemple, de vos congés payés pour la tester une petite semaine. Vous avez déjà réservé vos vacances ? Pas grave : tentez l’expérience au cours d’un de vos week-ends prolongés ! Ah, ils sont déjà tous bookés ? Ok, mais attention, il serait dommage pour vous de rater une telle opportunité. Essayez-la au moins quelques jours ! Non plus ? Quelques heures ? Comment ? Vous dites ? La pauvreté, ce n’est pas votre truc ?…

Bien. Maintenant, vous voulez la vérité vraie ? La pauvreté, ce n’est pas non plus mon truc ! Mieux, ce n’est le truc de personne ! Mais quelle mouche m’a donc piquée ? Pourquoi je vous assène ce texte gentiment provocateur ? En fait, il m’est venu à l’esprit après avoir lu la très longue liste des préjugés dont sont gratifiées les personnes en situation de pauvreté. Rendez-vous compte, une trentaine de préjugés, tous plus condescendants les uns que les autres, leur collent à la peau. Ces idées reçues, que je considère pour ma part comme des insultes déguisées, apportent une distorsion du jugement. Elles font mal ! C’est d’ailleurs la vocation de ces opinions hâtives. Elles cherchent à humilier, à nuire à l’image de ceux à qui elles s’adressent.

Ne trouvez-vous pas qu’il y a quand même quelque chose de ridicule dans tout ça ? Comment peut-on affirmer, par exemple, qu’il existe sur Terre des personnes aimant l’état de pauvreté ? Vous en connaissez beaucoup qui soient nées avec un besoin naturel de vivre dans la misère ? C’est absurde ! Aussi absurde que si je vous disais « J’aime le suicide ! C’est un besoin vital. Il faut absolument que je me pende ! » Allons, retrouvons un peu de bon sens ! Œuvrons pour l’apaisement social et déconstruisons tous ces clichés et stéréotypes aussi stupides que malveillants.

Préambule

« Pour trouver le bonheur, il faut risquer le malheur.

Si vous voulez être heureux, il ne faut pas chercher à fuir

le malheur à tout prix. Il faut plutôt chercher

comment — et grâce à qui — l’on pourra le surmonter.»

Boris Cyrulnik

Une personne à qui je racontais, un jour, ma dégringolade vers la pauvreté, m’a fait cette réflexion : « J’espère au moins qu’avant tout ça, tu as connu du bonheur. » Le bonheur ? À son propos, je partage assez bien cette phrase de Jules Renard qui dit : « Si l’on bâtissait la maison du bonheur, la plus grande pièce serait la salle d’attente. » Le bonheur a ceci de paradoxal que plus on le cherche et plus on souffre de ne pas l’atteindre. Je ne parlerai donc pas de bonheur, mais davantage de « joie ». Oui, la vie m’a apporté de nombreuses joies ! Notamment, dans mon métier de journaliste, avec lequel je me suis vraiment épanouie.

J’ai été longtemps critique de cinéma, télévision et théâtre. Les salles obscures, les coulisses de la télévision, les planches du spectacle vivant n’avaient aucun secret pour moi. Les invitations aux avant-premières des films étaient mes petites bulles d’oxygène. J’étais comme gagnée par un nouveau souffle chaque fois que je me retrouvais assise devant un écran de cinéma sur lequel je pouvais dévorer tous les trésors du septième art. Un peu lassée par le côté blasé des adultes et m’intéressant à l’univers des jeunes, j’ai eu l’idée de me spécialiser dans l’écriture pour les enfants. Un vrai coup de cœur pour ce lectorat joyeux, ouvert, curieux… J’ai travaillé pour plusieurs titres jeunesse, dont Mon Quotidien, du groupe PlayBac. J’ai intégré la rédaction de ce journal à sa création et j’y suis restée près de quinze ans. De belles années durant lesquelles j’ai exercé mon métier avec passion et dans le respect des règles déontologiques exigées par la profession. Un point important pour moi, car, de plus en plus de médias, guidés par le profit, commençaient à malmener l’information sans que cela n’inquiète personne.

Puis, j’ai été contactée par la directrice d’une entreprise, spécialisée dans le soutien scolaire à domicile. Elle était à la recherche d’une rédactrice en chef, pour gérer ses magazines destinés au jeune public des pays francophones. Le poste était attractif, mais très mal payé. Après plusieurs négociations et du leste lâché par chacune, j’ai signé le contrat. J’ai occupé, sans surprise, un poste absolument passionnant et j’ai eu plaisir à travailler avec la directrice, une personne tout à fait charmante. Son seul « gros défaut » était celui de ne rien connaître des médias. Du coup, certains de ses choix étaient en porte-à-faux avec les règles du milieu. Je me souviens qu’elle me disait chaque fois que j’abordais ce problème : « Nan, t’inquièèèèète ! ». Elle me faisait penser parfois à un petit oiseau, porté par une légère insouciance.

J’ai donc essayé de me tranquilliser… Mais lorsque la crise de 2008 est arrivée, la chute de l’imprimeur associée aux couacs de la direction a tout fait capoter. J’ai obtenu in extremis les conditions nécessaires pour obtenir les indemnités chômage. En revanche, même en employant la fermeté, je n’ai jamais réussi à être payée de l’entièreté de la somme convenue à la signature du contrat.

Après un parcours professionnel complet et, sans fausse modestie, riche d’expériences, je me suis donc retrouvée au chômage à l’âge de 46 ans. J’ai pensé qu’il était peut-être opportun de profiter de ce moment pour concrétiser un de mes vieux rêves : créer mon entreprise.

En bonne élève, j’ai suivi le parcours balisé du Pôle emploi et j’ai intégré un programme de formation à la BGE Adil, pour une durée de huit mois. Dans le même temps, je me suis associée avec une autre journaliste partageant mes valeurs et tentée, elle aussi, par l’aventure entrepreneuriale.

Le Pôle emploi nouveau est arrivé

Ma première expérience de demandeur d’emploi remonte au temps où cet établissement public portait le nom d’ANPE. À l’époque, le chômeur devait s’acquitter, tous les mois, d’un coup de tampon sur sa jolie carte d’un rose presque Barbie ! En 2008, l’ANPE a fusionné avec les Assédic et donné naissance au Pôle emploi. Tout beau tout neuf, en plus doté de l’outil Internet, ce nouveau centre chargé de l’emploi est devenu la Rolls de l’administration française, capable de répondre efficacement à tous les besoins des chômeurs..

Ayant reçu plusieurs courriers contradictoires au sujet de l’ASS, je me rends un matin à l’agence du Pôle emploi dont je dépends. À peine ouvert la porte, je suis surprise par la longueur de la file d’attente. Elle serpente de l’entrée jusqu’aux guichets. Il faut dire aussi qu’il n’y a qu’une seule personne aux guichets, pour répondre aux chômeurs. Nouveauté, effectivement : un agent du service slalome dans les rangs. Il a, de toute évidence, la mission de guider ce petit monde au plus vite vers la sortie. Le bonjour dans la poche, l’homme s’approche de moi et m’adresse cette phrase gracile, sans doute issue du nouveau code du bon accueil :

— Vous venez pour quoi ?

Je ne sais pourquoi, le sketch du restaurant de Bigard me vient soudainement en tête et je brûle de lui taquiner en retour :

— Ben, j’aime bien mon p’tit café le matin. Et votre établissement a l’air si chaleureux et accueillant que…

Mais il risque de mal le prendre. Aussi je me contente de lui répondre poliment :

— Je ne perçois pas l’ASS, alors qu’un courrier m’affirme le contraire. J’ai écrit, téléphoné plusieurs fois au 3949, sans résultat. Je viens donc voir si un agent peut débloquer la situation.

— Montrez-moi vos documents !

Coup d’œil rapide et diagnostic immédiat. Sa solution est claire comme le jour :

— Je vois. On va s’en occuper. Déposez vos papiers dans la boîte aux lettres située à l’entrée.

Près d’une heure d’attente pour repartir bredouille, avec en plus la frustration de n’avoir aucune explication… Pas question ! J’insiste.

— Non ! rétorque l’agent avec autorité. Vous déposez votre dossier avec votre numéro d’inscrit, et si vous souhaitez voir un agent, eh bien prenez le téléphone là-bas et appelez le 3949 : on vous programmera un rendez-vous.

— Mais c’est absurde !

— C’est comme ça, Madame.

Et, sans un « au revoir » ni une « bonne journée », il passe au chômeur suivant. En résumé, je me suis déplacée pour rien. En plus, m’inviter à prendre un rendez-vous un autre jour, alors que je suis à quelques mètres du guichet et que mon problème pourrait être réglé immédiatement par l’agent en service… J’avoue ne pas très bien comprendre le concept.

Pour sûr, l’efficacité du nouveau Pôle emploi est absolument redoutable !