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Déclic insolite offre une série de réflexions approfondies visant à soutenir la pérennité spirituelle, morale et sociale de l’Église instaurée par Jésus-Christ sur les fondements solides de la parole de Dieu, représentée par Pierre. Cet ouvrage dévoile également les observations de l’auteur concernant la dégradation de l’Église évangélique de « réveil » ou « réveillée ». Il nous invite à méditer sur l’essence et le rôle de l’Église dans notre monde en mutation perpétuelle.
À PROPOS DE L'AUTEUR
Paul Daniel Péléka-Mvouza est un pasteur chrétien évangélique et animateur du ministère « Jésus-Christ, La Source d’Eau Vive » - 89. À la suite de son précédent livre intitulé Itinéraire d’un moindre serviteur évangélique de Jésus-Christ, paru en 2022, il dévoile son engagement envers la vraie et indéfectible parole de Dieu dans Déclic insolite.
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Seitenzahl: 529
Veröffentlichungsjahr: 2023
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Paul Daniel Péléka-Mvouza
Déclic insolite
Essai
© Lys Bleu Éditions – Paul Daniel Péléka-Mvouza
ISBN : 979-10-422-0468-6
Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Avertissement
Déclic insolite,entre autres:
– Fait suite à mes timides observations sur l’état de délabrement de l’Église d’aujourd’hui en général, et plus particulièrement l’église dite « de réveil ou réveillée », observations publiées sous le titre : Itinéraire d’un Moindre Serviteur Évangélique de Jésus-Christ (2022 – Presses de l’Imprimerie BARRÉ 89 100 COLLEMIERS [ISBN : 978-2-917707-54-8])…
– Se penche plus foncièrement sur bien des problématiques qui ne cessent d’assombrir et de dénaturer vertigineusement la mission confiée par le Seigneur Jésus-Christ à ses servantes et serviteurs intègres…
– Contribue modestement à l’éradication de l’ignorance, le manque de volonté à lire, partager, comprendre et vérifier les saintes écritures pour savoir si ce que l’on dit, enseigne, demande aux disciples en milieu évangélique de « réveil ou réveillé » est exact, conforme aux enseignements et commandements de Jésus-Christ.
Malheureusement, ce manque récurrent d’intérêt pour la compréhension de la parole de dieu profite à bien des rapaces qui dépouillent de son contenu « la bonne nouvelle de Jésus-Christ » en inoculant un autre évangile…
– Exhorte, conscientise et invite les chrétiens en milieu évangélique de « réveil » ou « réveillé » à adopter le dynamisme des chrétiens de Bérée qui vérifiaient attentivement les saintes écritures pour savoir si ce qu’on leur disait était exact…
– Ouvre une brèche assez riche sur quelques timides traits sociologiques, éducatifs, pédagogiques et spirituels en milieu traditionnel ambiant de l’adolescence de l’auteur…
Introduction
L’évangéliste Luc, auteur des Actes des Apôtres, médecin de profession, disciple de Paul, rapportant le témoignage sur la disposition de cœur et l’esprit de recherche permanente de la vérité, la profondeur de l’amour du prochain et de la crainte de Dieu, la persévérance et le discernement, l’éveil et la vigilance, la prudence et la rigueur, la foi agissante et dynamique des chrétiens de Bérée, souligne :
Actes des Apôtres 17 : 11 « Ces Juifs avaient des sentiments plus nobles que ceux de Thessalonique ; ils reçurent la parole avec beaucoup d’enthousiasme et ils examinaient chaque jour les Écritures, pour voir si ce qu’on leur disait était exact. »
Quand on sait qu’à l’époque de l’Apôtre Paul, la Parole de Dieu était rarissime et pas du tout en libre-service comme elle l’est de nos jours avec :
Une pratique, un fonctionnement, un comportement de vérification et de recherche de la vérité qui font profondément défaut de nos jours… En effet, aujourd’hui, bien des églises qui n’ont jamais reçu l’amour de la vérité sont frappées par un esprit d’égarement, comme le souligne l’apôtre Paul dans son adresse à l’église de Thessalonique :
2 Thessaloniciens 2 : 10 – 11 « 10 – Et avec toutes les séductions de l’iniquité pour ceux qui périssent parce qu’ils n’ont pas reçu l’amour de la vérité pour être sauvés. 11– Aussi Dieu leur envoie une puissance d’égarement, pour qu’ils croient au mensonge. »
En effet, bien des églises excelleraient dans le mensonge et l’homme, « dit de dieu à tort », serait devenu un « leader incontesté et envahissant, visionnaire unique et absolu » avec une onction salvatrice, permanente… On assiste à bien des abominations et à l’utilisation démagogique du nom de Jésus-Christ… Bien des « faiseurs des miracles et/ou des magiciens prestidigitateurs », fortement imbus de leur personnalité, prétendraient, fallacieusement, guérir de toutes maladies sous certaines conditions pécuniaires, et apporteraient des solutions à tous les problèmes des membres de l’église… C’est un secret de polichinelle, bien des faux serviteurs de dieu trop zélés, pervers et macabres, multiplient « prophéties et révélations » au nom de Jésus-Christ, dans le but d’en tirer profit :
– Dans telle église de tel pays, un dimanche matin, en plein culte d’action de grâce, devant toute l’assemblée avec enfants, mères, pères et familles entières, c’est un monsieur, « charlatan », probablement, qui fait la toilette intime à des femmes dites « stériles » pour une promesse de fécondité sécurisée par l’acquittement d’une imposante offrande financière de la part des époux…
– Dans telle autre église de tel autre pays, un dimanche matin, en plein culte dit « de miracles programmés et annoncés en avance », c’est un autre charlatan « faux serviteur de Dieu », probablement, qui demande un matelas et fait accomplir, à un couple en quête de bébé, l’acte sexuel en public, sécurisé par le versement d’une somme exceptionnelle de la part des époux…
– Dans telle autre assemblée, de tel autre pays, l’homme « dit de dieu à tort », impose les mains et demande en échange « bijoux en or, foulards, cravates, chaussures, argent… » pour sécuriser la bénédiction…
– Dans telle autre église, de tel autre pays, c’est un « charlatan autoproclamé pasteur » qui initie un jeûne extrême à sec, insensé et non biblique « pour voir Jésus-Christ », jeûne qui fait mourir plus d’une centaine de disciples…
Et l’église, témoin de ces spectacles immoraux, insensés et rocambolesques, dit « amen » (c’est la vérité) par acclamation… Quelle abomination ! où est donc passée la vraie église du Seigneur Jésus-Christ, bâtie sur sa parole, rien que sa parole ? C’est de l’usurpation et usage de faux, véritable arnaque spirituelle avec, malheureusement, bien des dégâts familiaux et financiers discréditant fortement la réputation du nom de Jésus-Christ, de son corps (l’église), de ses servantes et serviteurs intègres. De tels hommes « dits faussement de dieu », sont arrivés au ministère chrétien évangélique par la ruse, et malheureusement, ils y sont encore très nombreux, devenant de véritables dangers ambulants. Ces « faux serviteurs de dieu », probablement « auto-proclamés », qui ne s’inquiètent pas de la déontologie même de l’exercice de leur ministère et de leur mission, deviennent inquiétants pour la pérennisation de la bonne nouvelle de Jésus-Christ et l’efficacité du sacerdoce… En vérité, le Seigneur Jésus-Christ a besoin des servantes et des serviteurs humbles ou mieux des ouvrières et des ouvriers appliqués, méticuleux, fidèles à la parole de dieu, pour exercer, selon la grâce octroyée, avec minutie et dextérité, dans sa si grande moisson [Luc 20 : 2 ; Matthieu 9 : 37]… Mais, hélas, dans un obscurantisme spirituel notoire, certaines servantes et certains serviteurs se sont octroyés des promotions abracadabrantesques :
– En devenant des leaders avides des honneurs, au lieu de modestes servantes et serviteurs de dieu ;
– En s’arrogeant des titres farfelus : untel qui était appelé comme pasteur serait devenu apôtre, untel appelé comme évangéliste serait devenu docteur… Ils ont oublié l’interactivité spirituelle pour le perfectionnement des saints en vue de l’œuvre du ministère et de l’édification du corps de Christ. [Éphésiens 4 : 11 - 12]
Aucun ministère n’est au-dessus de l’autre, chacun ayant une onction spécifique… ils sont complémentaires… et leur action n’est efficace que si et seulement s’ils exercent ensemble, de commun accord à l’exemple d’un centre hospitalier qui, pour une offre efficace et variée des soins aux malades, a besoin de faire travailler ensemble « infirmiers et divers spécialistes (cardiologue, néphrologue, rhumatologue, diabétologue, pédiatre…) »
Dans la vie courante, l’on aurait tort de penser que le cordonnier serait supérieur au couturier (et vice versa)… le cordonnier et le couturier étant utiles pour le bien-être de l’homme…
Le travail accompli par chaque apôtre, chaque prophète, chaque évangéliste, chaque pasteur et chaque docteur dépend entièrement de l’onction spécifique octroyée par le Seigneur à chacun d’eux… Les ministères sont complémentaires les uns des autres, et c’est un faux débat que de vouloir les hiérarchiser pour mettre un « superlatif néologiste » au-dessus de l’organisation pyramidale des hommes et non de dieu… L’exercice harmonieux du ministère évangélique étant une mission très délicate, les pages qui suivent en examinent quelques situations, pratiques et événementielles, susceptibles d’interférer sur la paix, la puissance, l’efficacité, l’amour et l’harmonie dans le « vivre ensemble » de la communauté chrétienne… Pour ce faire, il est fortement et spirituellement suggéré à chaque vrai « élu du Seigneur », de bien entretenir l’instrument que l’Éternel Dieu a mis en lui pour le perfectionnement des saints en vue de l’œuvre du ministère et de l’édification de l’église, corps de Christ… Bien entretenir les dons spirituels par une vie de consécration au Seigneur Jésus-Christ, une vie encline :
– À la persévérance ;
– À la lecture et la méditation de la parole de Dieu ;
– À la prière ;
– À la crainte de Dieu et à la repentance ;
– Au pardon ;
– À l’amour et la soif de la vérité…
Pour ce faire, chaque « vrai appelé de dieu à la responsabilité au sein de l’église, corps de Christ », devrait examiner et réexaminer sa pratique afin d’exercer, non pas selon la volonté permissive, mais bien selon la volonté parfaite de Jésus-Christ…
Chaque être humain étant, par définition et par routine, la résultante d’un conglomérat d’expériences vécues et/ou découvertes, Déclic insoliteemporte les lecteurs dans un parcours foncièrement tributaire de la volonté parfaite de dieu… Et les saintes écritures de renchérir fortement :
Lamentations de Jérémie 3 : 37 - 38 « 37 – Qui dira qu’une chose arrive, sans que le Seigneur l’ait ordonnée ? 38– N’est-ce pas de la volonté du Très-Haut que viennent les maux et les biens ? »
Plus qu’un récit, c’est une vitrine richissime de problématiques et de scènes de vie en communauté chrétienne évangélique avec la description de bien des leviers…
Des concepts comme l’imposition des mains et la guérison des malades, l’appel de dieu pour le service et le ministère, la prospérité, la dîme, la prédication, le don de l’adoration et de la louange, le mariage entre un homme et une femme, la consommation des boissons fortes, l’immaturité spirituelle… sont examinés assez foncièrement.
Par ailleurs, un adage stipule que « chaque être humain viendrait de quelque part »… Il serait donc de bon aloi :
– D’une part, qu’une modeste lisibilité de la richesse éducative, sociologique et pédagogique en milieu traditionnel Koongo/Laari du Pool en République du Congo-Brazzaville (milieu ambiant d’enfance et d’adolescence de l’auteur) essaie de meubler ce déclic à travers quelques notes timides et nécessaires…
– D’autre part, que quelques lignes associent timidement les lecteurs aux impondérables du cheminement et de l’accomplissement de la prédestination de l’auteur…
Wa dia foua yika dio. (Le bon héritier fructifie et pérennise l’héritage reçu.)
Proverbe Koongo/Laari du Pool, Congo-Brazzaville
J’ai vu le jour à « Moundongo », village du nom de l’illustre chef de canton, district de Kinkala, Pool, Congo-Brazzaville, chef qui s’impliqua foncièrement dans la défense d’André Grénard Matsoua, éminent visionnaire de l’indépendance politique du Congo et de l’Afrique Équatoriale Française. J’ai grandi à « Makoumbou-Ma-Mpombo », village du nom du successeur de Moundongo, selon les us et coutumes des Koongo/Laari dont je me permets de dessiner, avec humilité, quelques valeurs culturelles, éducatives, sociales et pédagogiques… extraites, pêle-mêle, de ma thèse de doctorat.
En milieu traditionnel Koongo/Laari, l’éducation est informelle en ce qu’elle se traduit concrètement, par le fait que chaque événement, chaque geste sont des moments d’apprentissage, de formation et d’autoformation, d’éducation et d’autoéducation. Le cloisonnement à partir de l’âge que l’on pourrait être tenté d’emprunter pour expliquer l’éducation de l’enfance au troisième (voire quatrième) âge, suggérerait une plus grande prudence.
Dans la pratique, ce que l’enfant découvre et le moment qu’il le découvre ne sont pas rigoureusement pré-établis. Il pourrait bien découvrir et comprendre, en assistant à l’arbre aux palabres que le divorce est une étape du mariage avant qu’il n’ait découvert, par exemple, que c’est de l’inceste de connaître sexuellement sa sœur. La logique, dans cet exemple, serait plutôt que l’enfant sache avec qui et comment se marier, avant de savoir comment divorcer…
L’ethnie Koongo ferait partie des populations « Koongo » ou « Bissi Koongo » (originaires du Koongo) qui seraient venues de l’ancien royaume du Koongo ou « Koongo dia Ntotila » qui, fondé aux XIIe – XIIIe siècles, s’étendrait de l’Angola au sud du Congo Démocratique et du Congo-Brazzaville. Ce royaume aurait succombé vers 1660, laissant la place à des clans inorganisés. Ce qui justifierait de nos jours, la présence de ces populations « koongo » dans les Républiques de l’Angola, du Congo Démocratique (Kinshasa), du Congo-Brazzaville (où les Pygmées, premiers occupants des terres, auraient été étouffés et dépassés par la grande migration des Bantous…). De nos jours, les « Koongo » se répartissent en trois sous-groupes au Congo-Brazzaville :
Les Koongo du Kouilou :
– Vili ;
– Yoombé.
Les Koongo de la vallée du Niari :
– Béembé ;
– Doondo ;
– Kaamba ;
– Nkéengué ;
– Soundi ;
– Kouni…
Les Koongo du Pool :
– Laari ;
– Koongo-Nzaadi ;
– Koongo-Nséké ;
– Maniaanga ;
– Haangala ;
– Soundi.
Le « Kikoongo », la langue des Koongo du Pool, appartient à la famille des langues « Bantou » et compte plusieurs variantes :
– Kilaari ;
– Kisoundi ;
– Kihaangala ;
– Kikoongo-nzaadi ;
– Kikoongo-nséeké ;
– Kimaanianga.
De toutes ces variantes, le « kilaari » est, de façon spontanée, le « parler » le plus sollicité dans le Pool d’une part, la commune de Brazzaville et bien des villes du Congo d’autre part. C’est dire que le « Kilaari » compte de nombreux locuteurs éparpillés à travers tout le pays et que son aire d’extension est difficile à circonscrire.
Quelques valeurs culturelles de l’éducation traditionnelle « Koongo/Laari » du Pool
Le « mfoumou kaanda »(chef de lignage, chef de famille) estl’élément central de la société traditionnelle Koongo/Laari.
C’est un personnage apparaissant non pas comme imposé de l’extérieur, mais produit et exigé par le système social lui-même. Il devient en même temps « mfoumou haata »(chef de village) sous certaines conditions… Dans la majorité des cas, c’est un « oncle aîné » c’est-à-dire le plus « âgé » des frères de la « mère » qui occupe ces fonctions. L’évidence de cette autorité naturelle du frère aîné de la mère fait apparaître une première dysharmonie qui se singularise par la rupture de continuité entre le groupe lignager et le groupe local. Il y a contradiction entre le fait que le mariage est patrilocal en ce milieu, et le fait que le système familial, lui, est matrilinéaire. En demandant à la femme d’aller habiter avec son époux dans le village du beau-père, les Koongo/Laari engendreraient plutôt une société patrilinéaire qui se prononcerait en faveur de la prépondérance du lignage du père sur le « kaanda » de la mère… Non, la réalité est différente en ce milieu où l’on accorde plutôt le pouvoir « décisionnel » au lignage maternel… Sur ce sujet, précisons bien que la prépondérance du lignage « maternel » ne signifie aucunement que « la mère », en tant que « femme » prime sur « l’homme ». C’est plutôt à travers son « sang » que la femme vit la prépondérance de son lignage qui, au bout du compte, reste géré par « un homme », son frère biologique… C’est dire que la femme Koongo/Laari, même si elle est l’aînée, n’accède que rarement, disons à défaut, à la « chefferie lignagère »… La tradition Koongo/Laari s’en justifie par le fait que la femme est d’abord et avant toute chose la procréatrice chargée d’assurer la survie du lignage par plusieurs maternités, donc une mère attachée à un foyer conjugal. Elle ne peut assumer en même temps les responsabilités de « mfoumou kaanda » qui exigent beaucoup de déplacements… L’une des tâches du « chef de famille » consiste à voler au secours des siens, chaque fois qu’il y est sollicité… Par ailleurs, la société traditionnelle Koongo/Laari, foncièrement phallocratique, octroie à « l’homme » l’autorité dans « l’assemblée » où la femme n’intervient qu’à travers un « oncle » ou « un frère ». A contrario, lorsqu’elle est « âgée », la « femme » a droit aux mêmes égards que « l’homme ». Ce qui rejoint la loi de la préséance de « l’aîné » sur le « cadet »…
La dysharmonie de cette société entraîne des conséquences non moins importantes dans la conduite des personnes.
Juridiquement, c’est au frère de la mère que l’on se réfère dans les affaires concernant la femme et les enfants au foyer :
– Maladie ;
– Décès ;
– Décisions importantes…
Mais cette accentuation de la matrilinéarité ne signifie pas pour autant que le père et ses parents n’ont aucune importance dans la vie de l’épouse et de la progéniture… En effet, même si la parenté par la mère est plus importante que celle par le père, l’époux jouit toujours d’une certaine autorité.
Économiquement, cette dysharmonie ne permet pas à l’enfant d’hériter des biens de son père et à l’époux de dépenser librement ceux de la femme au foyer.
Tout comme sur le plan idéologique, c’est aussi cette dysharmonie qui justifie la tenue du culte des ancêtres chez le « mfoumou kaanda » où se retrouvent tous les membres du lignage à certaines occasions, devant le « nzô baa nziita » ou sanctuaire des « biiba » (esprits), non loin du « mboongui » (aire publique)…
Ce comportement explique à suffisance pourquoi l’accès à la chefferie traditionnelle passe par la bénédiction des ancêtres, pourquoi le pouvoir a un caractère sacré, pourquoi il ne se brigue pas et pourquoi il n’est confié qu’à des personnes ayant une certaine maturité… En se rattachant ainsi à la sagesse, la chefferie traditionnelle Koongo/Laari est d’abord et avant tout un don, voire un choix du monde de « l’au-delà », monde des « biiba bia ba nkaaka » (esprits des ancêtres), monde qui s’adresse à l’individu dans sa vie. Le chef de lignage s’en fait fortement assister pour gérer au mieux la vie de ses sujets… La délicatesse d’une telle fonction en écarte le « jeune », parce que « sans maturité, donc sans sagesse et sans expérience ». Elle en écarte aussi la femme, parce que devant essentiellement procréer pour assurer la survivance et la pérennité du lignage… De ce fait, la « chefferie traditionnelle Koongo/Laari » est régie par la loi de la gérontocratie qui sacre le plus âgé et assigne à chacun sa place dans une société où, l’aîné passe toujours avant le puîné.
La soumission du cadet s’y singularise par une pratique sociale selon laquelle tout chasseur rentrant avec du gibier doit en remettre le gigot de poitrine à « l’aîné », Chef des terres lignagères où a eu lieu la partie de chasse…
Toutefois, sans remettre foncièrement en cause la part de respect dû à « l’aîné », il est urgent d’en souligner les dangers. Un tel respect « à sens unique », toujours de bas en haut, loin de conduire les sociétés traditionnelles africaines vers le changement auquel les appelle la dialectique socioculturelle, économique et politique, risque de les garder dans un conservatisme notoire.
En fait, le respect, comme l’éducation, ne devait plus être une chasse gardée pour les « aînés » seuls… En relativisant le concept « d’âge » et en extrapolant, l’on peut dire que l’on est « âgé ou vieux » lorsque l’on est en mesure de donner des ordres et de se faire obéir. Ce qui en écarte toute référence à « l’âge » absolu et au principe de séniorité selon lequel le vivant le plus proche du premier ancêtre a toujours la suprématie.
Mais déjà, la tradition Koongo/Laari en reconnaissant, à travers l’adage qui stipule « ne pas croire qu’une grande barbe soit un signe de sagesse », que l’âge biologique d’un individu (c’est-à-dire la grande barbe) ne détermine pas forcément son degré de sagesse sociale, n’entrevoit-elle pas favorablement l’accession d’un « moins âgé » à la chefferie lignagère ?
De nos jours, le droit d’aînesse en tant que critère d’accession à la chefferie traditionnelle Koongo/Laari, tend à être supplanté par la compétence, accession certes encore renforcée par l’assistance des esprits des ancêtres, mais de plus en plus influencée par le savoir scolaire. C’est dire que la tradition et la sagesse Koongo/Laari ne sont pas insensibles au courant quelque peu « moderniste » secouant même les villages les plus reculés du Congo qui ne peuvent plus s’empêcher de se faire ériger des écoles… Savoir lire et savoir écrire deviennent alors, plus qu’une nécessité, une source même de sagesse pour la vie harmonieuse dans la société traditionnelle Koongo/Laari actuelle non fermée aux acquisitions du monde moderne.
C’est dire que le monde traditionnel Koongo/Laari d’aujourd’hui est convaincu qu’un chef sachant lire et écrire devient un atout pour l’avancée du village vers les idées novatrices. Dans cette vision des choses, les « moins âgés » ont plus de chance que les « plus âgés » pour accéder à la tête et aux responsabilités des affaires du lignage (ou du village).
Il n’est pas superflu non plus de préciser que l’accession à la chefferie reste une dignité réservée strictement au lignage, qu’elle est héréditaire de l’oncle au neveu, jamais de père à fils, à moins que le fils ait une mère esclave ou que l’oncle n’ait plus de neveu susceptible d’y prétendre.
D’ailleurs, le relais se fait sans trop de problèmes dans la mesure où le futur « mfoumou » (chef) est assisté dès la cérémonie d’investiture (et le reste de sa vie) par un « maléla », sorte de « prince héritier » choisi parmi ses neveux.
Une fois investi, le « mfoumou kaanda » est respecté de tout le lignage. Il assume à vie sa charge, car, ce n’est que très rarement, et en cas de réelle incompétence notoire, que le chef investi est « dégommé »…
Connaissant aussi bien ses droits que ses devoirs, le mfoumou kaanda :
– Veille à la prospérité des membres de son lignage ;
– Protège leur vie et leurs biens, car il est leur sécurité ;
– Lutte pour leur fécondité, car, en ce milieu, l’on n’est un homme ou une femme véritables que lorsque l’on est apte à procréer, prolonger et transmettre le sang du lignage.
La procréation en tant que participation au processus universel de la vie est, de ce fait le sens profond des initiations auxquelles sont soumis l’homme et la femme suivant le rôle qu’ils doivent jouer dans la société : être père ou être mère…
Le « mfoumou kaanda » symbolise aussi l’unité, la cohésion, l’harmonie au sein du lignage. Ce qui requiert de lui, la compétence à déjouer les mauvaises influences de la sorcellerie et à gérer les conflits pouvant perturber la sérénité du lignage. Lorsque le « haata » (village) ne regroupe essentiellement que des individus d’un même et seul lignage, c’est le « mfoumou kaanda » qui en devient « mfoumou haata » (chef de village).
Mais, cette organisation change pour les villages qui s’agrandissent avec l’adjonction d’autres lignages qui s’y installent. Dans ce cas, le lignage étranger ne peut, comme tel, revendiquer une indépendance sur un espace qui n’est pas le sien. Il accepte la chefferie du village d’accueil. Mais le chef de ce village d’accueil laisse au chef de chaque lignage étranger la latitude de gérer les affaires familiales de son groupe. De ce fait, le chef du village d’accueil a une double fonction :
– En tant que « mfoumu kaanda » (chef de lignage), il est responsable d’un « kibelo » (quartier), gère la vie de son lignage ;
– En tant que « mfoumou haata » (chef de village), il a une parcelle d’autorité sur les autres chefs de lignage et règle, dans son « mboongui » (aire publique) situé au centre du village, les litiges opposant les individus n’appartenant pas à un même lignage et tous ceux dépassant la compétence des chefs de lignage. Il se fait alors assister d’un ou de plusieurs chefs de lignage.
Dans cette « instance de juridiction traditionnelle », c’est le « mounaanga » (serviteur) qui annonce l’arrivée du chef. En fait, les « minaanga » (serviteurs) ne participent pas aux débats et à la prise de décision de jugement. Leur rôle est, pour l’essentiel, de veiller à l’installation des villageois à l’aire publique (avant l’arrivée du chef) et de maintenir la discipline dans la foule (pendant les débats). Ce qui ne les empêche pas de bénéficier d’un traitement particulier et de se réjouir de faire partie de la suite du chef.
L’autorité du chef est, de ce fait, incarnée par le « mboongui » (aire publique). C’est à ce lieu que le « visiteur » qui arrive dans le village se présente afin de s’adresser au « mfoumou » pour son logement ou sa nourriture, car, il revient au « chef » de régler tous les problèmes d’hospitalité. Pour ce faire, la tradition demande au « chef » d’être suffisamment riche pour mettre à l’aise les visiteurs et dépanner, en cas de besoin, les membres du lignage et/ou les villageois…
Par ailleurs, en tant que point de liaison du lignage actuel constitué par tous les membres vivants et du lignage de « l’au-delà » constitué par tous les membres morts, le « mfoumou kaanda » (chef de lignage) détient un pouvoir sacré reconnu par toute la famille à telle enseigne que c’est à lui que les « vivants » s’adressent pour les protéger.
C’est dire que si le « mfoumou kaanda » s’attendrit à cause du mauvais comportement d’un de ses sujets, les « esprits » des ancêtres s’attendrissent aussi…
Si le « mfoumou kaanda » est mécontent de ses « administrés », les esprits des ancêtres se mécontentent et cessent alors leur protection sur eux. Ce qui a pour conséquences de les exposer à la merci des « cancrelats », c’est-à-dire des sorciers, jeteurs de mauvais sorts…
On comprend alors pourquoi le chef de lignage se réfère au sacré pour se valoriser et pourquoi le lignage n’est pas concevable sans lui. De ce fait, personne n’ose contester l’autorité du « mfoumou kaanda », car, lui désobéir, c’est désobéir aux esprits des patriarches lignagers et sortir de la barrière de protection qu’ils constituent.
Quand l’on sait qu’un Koongo/Laari traditionnel sans la protection de ses ancêtres est un « être » sans défense et à la merci de toutes les forces du mal ou de la sorcellerie, il n’est que normal d’éviter de se heurter contre le chef de lignage.
Cette autorité spirituelle traditionnelle reconnaît aussi au « chef de lignage » le pouvoir de favoriser ou défavoriser :
– La guérison de certaines maladies ;
– La réussite ou l’échec d’une récolte, d’une partie de chasse ou de pêche…
Ce qui ne va pas sans lui poser des problèmes. En effet, tous les membres du lignage ne lui reconnaissent pas toujours que du bien. Il n’est donc pas à l’abri des ennuis et des tracas. On rapporte à cet effet que certains membres de lignage s’attirent sciemment des ennuis se disant que le « chef » versera les amendes à leur place. Quoique conscient de tels abus, le chef de lignage évite d’être antipathique de peur que son entourage refuse de se confier à lui, ce qui, sans conteste, ternirait son image d’homme d’ouverture et de tolérance.
La fonction de « mfoumou kaanda » est très difficile. C’est donc consciente de cela que la sagesse traditionnelle conseille à tout individu « recevant en héritage la direction d’une famille » (chef de lignage nouvellement investi) de se raser la tête en signe de deuil, c’est-à-dire se responsabiliser, se conscientiser de l’ampleur de la mission qui lui revient.
Quoiqu’il advienne, le « mfoumou kaanda » doit diriger avec douceur, car, s’il tyrannise ses sujets, ces derniers prendront peur et risqueront même de quitter le village pour aller s’établir ailleurs.
Le « mfoumou kaanda » doit être un « clair de lune » (c’est-à-dire quelqu’un de bon, de doux, de tolérant) et non les « rayons solaires » (c’est-à-dire quelqu’un de tyran, de violent). Il ne doit pas voir le « diable » (c’est-à-dire qu’il doit avoir un gros cœur capable de supporter et de savoir épargner la honte à ses administrés)…
En effet, si le « mfoumou kaanda » voyait le diable (c’est-à-dire s’il exposait en public tout ce qu’il savait et entendait), la famille se détruirait, se désunirait.
Le « mfoumou » (chef) en milieu « Koongo/Laari » est un personnage à qui les administrés se confient en toute quiétude. C’est fort de cela qu’il lui est interdit de se plaindre. Mais pourquoi il se plaindrait dans la mesure où cette fonction lui octroie bien des honneurs ? Et, comme ces honneurs lui viennent de la responsabilité lignagère et/ou villageoise, il lui revient de supporter le fardeau qu’impose sa fonction.
Toutefois, la responsabilité d’un lignage est loin d’être un dîner de gala en milieu Koongo/Laari. Le « mfoumou kaanda » y est préparé dès le jeune âge. Cette préparation est tellement méticuleuse que, le jour de son accession à la chefferie familiale, le « neveu » a des palpitations comparables à celles que ressent tout jeune Koongo/Laari lors de son premier coup de fusil. Mais, le temps aidant, il s’y habitue quand même.
Comment en serait-il autrement lorsque pour la tradition, être garçon, c’est être prédestiné aux responsabilités lignagères et les assumer comme le jeune verrat qui ne peut échapper au coutelas ?
En effet, le sort du garçon face à son rôle naturel de « mfoumou kaanda » rejoint symboliquement celui du « verrat » dans les pratiques traditionnelles de l’élevage en milieu Koongo/Laari où l’on tue le mâle dès qu’il grandit, sa viande étant toujours réclamée sur le marché.
La responsabilité lignagère requiert de la promptitude dans l’exécution des affaires du groupe social, voire de la disponibilité. À l’image du « rat palmiste» qui se relève immédiatement dès qu’il tombe d’un arbre, le « mfoumou kaanda » doit être prêt à voler au secours de sa famille, chaque fois qu’il est sollicité ou en sent la nécessité.
Le « responsable lignager », doit paraître aux yeux de ses administrés comme un homme fort et robuste moralement, sûr de lui, un homme dont chaque intervention attire respect, estime et admiration. Il doit éviter de se laisser prendre en faute dans toute entreprise. Il doit réfléchir suffisamment avant d’agir. Il doit se sacrifier, se dévouer pour son lignage qu’il doit tant aimer à l’image du singe des forêts qui meurt en serrant dans sa main le fruit dont il est friand.
En principe, même dans les cas de contradictions et de provocations notoires, le « mfoumou » doit avoir la maîtrise de soi.
Fait rarissime en milieu Koongo/Laari, certains règlements des litiges tournent à des bagarres auxquelles sont introduits bon gré mal gré le « mfoumou » et tous ses administrés… Cela ne devrait pas le surprendre, car, le « chef » s’y est préparé dès le jeune âge.
En effet, comme tous les jeunes garçons de son âge, le futur « mfoumou » s’initie, à l’insu des parents, au « makouboungou », sorte de fétiche qui :
– Donnerait une force extraordinaire au cours d’une rixe ;
– Rendrait insensible aux coups, voire invulnérable à l’arme.
Mais, le fétiche seul ne suffit pas, il faut avant tout être fort naturellement. C’est dire, par extrapolation, que la vocation ne suffit pas. L’exercice avec autorité de certaines professions exige, en sus de l’apprentissage, des prédispositions.
C’est l’éternel « débat » sur le primat entre l’inné et l’acquis…
La tradition Koongo/Laari assimile l’activité du « chef de famille » à celle de la paume de la main qui ne cesse de tenir le « manioc » (aliment de base en milieu Koongo/Laari). Ce qui peut traduire chez le « mfoumou », un sentiment d’affliction dans le sens où il a la charge d’un lignage élargi dont les exigences le placent parfois dans une impasse.
Pragmatiquement, il lui est impossible d’être partout où on l’appelle, ou de satisfaire tout le monde. L’élasticité de la famille traditionnelle ne lui facilite aucunement la tâche. C’est fort de cela que l’on pense, avec raison que s’il ne prend pas acte, le « mfoumou » sera toujours dans l’impossibilité de subvenir aux exigences de sa vaste famille… Par conséquent, à force de se préoccuper des problèmes et de l’éducation de tous les membres de la grande famille, le « mfoumou kaanda » court le risque de sacrifier l’éducation de sa propre progéniture…
Un langage franc et clair est vivement conseillé au « mfoumou ». Sur le sujet, les Koongo/Laari critiquent avec force le défaut qui consiste à se plaindre en l’absence des « administrés »…
En effet, un « chef » qui parle « sous les aisselles » (c’est-à-dire ne cesse de se plaindre de ses administrés, lorsqu’ils sont absents et ne peuvent l’écouter) perd la confiance de son groupe lignager. Il fait là, preuve de lâcheté et de fourberie comme cet homme qui est allé se plaindre, auprès de son épouse, de l’insuffisance de la part de viande que ses amis lui ont remise au cours du partage du gibier, suite à sa participation effective et dynamique à une partie de chasse…
Le « mfoumou kaanda » doit savoir se servir de ses mains, se nourrir à la sueur de son front, se vêtir et entretenir les siens à l’image de cet homme qui sait toujours se faire une petite place pour s’asseoir sur un banc, même réduit et déjà occupé par plusieurs personnes. Il lui suffit de savoir modifier intelligemment la position des premiers occupants (en les bousculant légèrement à l’aide de ses fesses). C’est dire, par extrapolation, que le « mfoumou kaanda » doit user de finesse pour se faire une personnalité…
Son pouvoir économique lui permet de :
– Gérer la « nsii » (terre lignagère) ;
– Organiser les « malaki » (réjouissances familiales) ;
– Subvenir aux besoins des membres de son lignage ;
– Être le « trésorier » de toutes ses « sœurs », car, la femme au foyer prête à son époux, mais donne à son « frère ».
Son pouvoir politique se singularise en ce que la tradition lui octroie le droit de prendre des décisions, en conformité avec les intérêts du lignage.
L’exercice de son pouvoir juridique lui permet de rendre la justice selon les us et coutumes de la société traditionnelle Koongo/Laari.
Quant à son pouvoir administratif, il lui reconnaissait, dans les temps très anciens, la responsabilité d’envoyer les troupes combattre l’ennemi en cas de provocation ou d’attaque. De nos jours, cette fonction administrative du chef consiste, pour l’essentiel, en la convocation et la présidence de l’assemblée familiale.
Le Chef de lignage est, de ce fait, un personnage très influent dont les ordres se situent dans la relation de l’être et de sa conscience avec le monde métaphysique et protecteur des « biiba bia ba nkaaka » (esprits des ancêtres).
La prépondérance dont il jouit étant soigneusement orchestrée par cette considération spirituelle, on peut relever néanmoins que la sentence du chef traditionnel Koongo/Laari est loin d’être un consensus, c’est-à-dire une décision qui aurait le poids réel de tout le groupe social.
En fait, avec qui se concerte le chef ? Ce n’est ni avec les jeunes, ni avec les femmes, mais uniquement avec les « les hommes âgés », c’est-à-dire les anciens. Dans ce cas, les décisions qui s’en dégagent semblent être plutôt celles d’un mini-groupe. Il n’y a pas de démocratie dans les conseils traditionnels africains, car, les anciens seuls en constituent une voie d’autorité, même si le village n’a pas de policiers… En effet, s’il est vrai que le village traditionnel africain ne compte pas encore des « policiers » en tenue, aussi bien formés et organisés que ceux des villes, il n’est pas moins vrai qu’il existe bel et bien dans les chefferies traditionnelles comme celle des Koongo/Laari, des serviteurs du chef qui font office d’agents de l’ordre. Ce sont les serviteurs qui conduisent manu militari, parfois, au « mboongui » (aire publique), tout sujet récalcitrant qui refuserait d’obtempérer à une convocation du tribunal coutumier. Le sujet en question avait l’obligation de leur verser une rétribution (ou frais de commission). Dans les temps très anciens, l’honneur revenait même à ces serviteurs d’enterrer « vivant », à la place du marché, le condamné à mort du tribunal coutumier, traditionnel.
En écartant le point de vue du jeune et de la femme, la décision du « mfoumou kaanda » qui n’écoute qu’une seule cloche, donc un seul son, celui des « hommes âgés » s’inscrit en faux contre les recommandations faites par la tradition « Koongo/Laari » à sa fonction qui doit plutôt manifester un intérêt et une écoute équitables pour les jeunes et pour les anciens, les hommes et les femmes. Il apparaît donc assez urgent que la tradition africaine s’appuie sur sa propre sagesse pour douter enfin de la légitimité des informations et conseils unidirectionnels.
Les relations entre villages sont régies par un respect réciproque et une hospitalité permanente.
Il n’est pas indispensable d’annoncer sa visite. On est toujours le bienvenu dans le village voisin. Le chef et ses sujets partagent volontiers leur manger, leur boire et leur couchette avec leur hôte…
Ces relations sont consolidées par :
– L’exogamie du mariage (l’homme prenant femme dans le lignage et/ou le village voisins) ;
– La maladie ou le décès (occasions de se retrouver ensemble, la tradition conseillant de fortes solidarités agissantes pendant ces événements).
Économiquement, les villages se regroupent en « zaandu » (marché) où se font les échanges…
– La « nsii » (terre lignagère) fait aussi l’objet des relations économiques. Les lignages avoisinants vont la solliciter pour ouvrir des plantations, y chasser ou pêcher.
– Les « malaki » (réjouissances familiales marquant la fin du deuil observé en mémoire d’un parent décédé) mettent à contribution les rapports entre individus et lignage, entre individus et ancêtres, entre lignages et alliés ;
– Des « mafoundou », sorte d’aide-épargne, s’organisent ;
– Le « kitémo » (tontine, ristourne), coopération au niveau monétaire ;
– Et le « zola », coopération ou coopérative pour les travaux des champs, consolide les relations socio-économiques.
Toutes ces relations sont placées sous la haute juridiction des « esprits des ancêtres » qui en assurent la protection et en déterminent le choix. Il est inadmissible, en effet, qu’un chef traditionnel Koongo/Laari entretienne des relations avec un village (ou un lignage) dont les patriarches fondateurs auraient été désavoués par ses « baambouta » (vieux, anciens) à lui. C’est dire que le Koongo/Laari n’entreprend rien sans la volonté des esprits. Cette crainte omniprésente des esprits et la référence qu’on en fait à tout instant sont à l’origine du climat d’animosité entre certains villages en ce milieu.
Place de l’enfant : La mission première sur terre de tout individu Koongo/Laari est d’assurer l’agrandissement du lignage par une procréation abondante qui crée de l’ambiance autour de soi.
L’enfant est accueilli avec un amour sans fin. En effet, parce qu’il vient des esprits, rien ne doit être tenté pour l’empêcher de naître. Fortement désiré, il est la toile de fond du mariage. Ce n’est donc pas un hasard, pendant la cérémonie de mariage, que la belle-famille remette une chèvre au gendre, symbole de maternité. En fait, de tous les cadeaux remis au beau-fils, la chèvre reste le don le plus significatif. Elle met bas, en principe, dans les mêmes délais que se dessinent les premiers signes de grossesse chez la nouvelle mariée.
La nécessité d’avoir un enfant a pouvoir d’obligation. Mais, comment peut-on imaginer un couple Koongo/Laari ne souhaitant pas d’enfant ? Comment en serait-il autrement dans cette société où l’enfant influe fortement sur la perception que l’entourage se fait de l’âge adulte ? Thomas Malthus et sa théorie sur les limitations de naissances ne croirait pas ses oreilles. En milieu Koongo/Laari, le nombre d’enfants par femme ne dépend point de la richesse matérielle et financière des parents. Être « riche », c’est en avoir beaucoup, tout faire pour les protéger, les nourrir et les élever même avec peu, à l’image de l’écureuil qui se contente des noix de palme pour offrir une couverture à ses petits.
La tradition Koongo/Laari glorifie le comportement de la mère écureuil qui remplit sa retraite de noix de palme dont elle nourrit son petit. Une fois sèches, ces noix lui servent de couverture protégeant le petit contre le froid. Les parents portent sur l’enfant une attention très particulière. C’est dans ce sens que, lorsqu’ils mangent, les parents soucieux de leur progéniture gardent toujours une petite réserve de nourriture pour leurs enfants. Il est un déshonneur pour un parent Koongo/Laari de ne rien offrir à son enfant qui pleure de faim. À l’image du chien pour qui son maître est le plus riche, le parent géniteur est pour son enfant, non seulement la personne la plus belle, mais aussi celle qui songe le plus au ventre de ses petits. Ces pratiques éducatives sont transmises de génération en génération. À juste titre, les Koongo/Laari disent que « le don fait par un enfant vient en réalité de sa mère ». En d’autres termes, la conduite morale et le comportement social de « l’adulte » sont fonction de l’éducation dont il a bénéficié auprès de ses parents. Pour les Koongo/Laari, l’attitude des parents ne doit être ni trop sévère, ni trop paternaliste. Aider exagérément l’enfant c’est l’empêcher de s’épanouir. On ne devrait ni trop le gâter ni observer une indifférence à son égard. C’est là un juste milieu difficile à respecter, car, la mère a plutôt des tendances « surprotectrices »…
Fortement critiquée, cette attitude inculque un manque de dynamisme chez le garçon. Sur le sujet, la société traditionnelle Koongo/Laari pense que le « garçon », élevé dans un foyer monoparental constitué essentiellement de la « mère », a peu de chance d’être dégourdi. Ce qui n’est pas tellement contradictoire à l’idée que la mère doit imprimer les premières bases éducatives chez l’enfant. Et le père, par sa présence, doit corriger les imperfections de l’éducation maternelle. En effet, le père ou son image est le point de référence dans les conseils que la mère donne à son enfant. Elle parle le plus souvent au nom du « père ».
La responsabilité des parents dans le comportement futur de l’enfant, devenu « adulte », est tellement évidente pour la tradition Koongo/Laari, qu’elle ne ménage aucune opportunité pour la mettre en exergue : « Le chacal sent mauvais parce que ses parents ne l’ont pas habitué à la propreté ». La question n’est pas de savoir s’il est envisageable qu’un chacal ne sente pas mauvais. Les Koongo/Laari ne sont pas dupes sur le sujet. Ils savent que le chacal a été condamné par la nature divine à sentir mauvais toute sa vie, même s’il était habitué à la propreté. L’intérêt de la comparaison réside en l’affirmation suivante : « considérer que les parents du chacal pouvaient éviter que leur petit sente mauvais c’est reconnaître qu’il est possible à un parent de modifier certains comportements chez l’enfant grâce à l’éducation ». Pour les Koongo/Laari et pour bien des sociétés traditionnelles africaines, le meilleur « éducateur » de l’enfant est le parent géniteur. Il est patient et ne s’en fatigue point. Il est impensable qu’une mère abandonne son enfant, qu’elle s’en sépare de la journée. C’est à juste titre que le système des crèches où les parents des sociétés modernes abandonnent leurs enfants de la journée est loin d’être accepté dans les sociétés traditionnelles où l’enfant doit rester accroché sur le dos de sa mère. Ce qui favorise fortement l’attachement du petit à sa maman et vice versa, la tendresse de la mère pour son enfant…
Les parents ont, certes, une grande responsabilité dans l’éducation de l’enfant, mais ils ne sont pas les seuls responsables de la réussite ou de l’échec de leur progéniture devenue « adulte ». En effet, l’Être humain a un parcours social très important de son état d’enfant à l’âge adulte. À l’image d’un train qui embarque des passagers dans chacune des stations où il s’arrête, l’enfant a, tout au long de ce parcours social, fait une expérience très riche et variée qui lui permet de parfaire ou de défaire les bribes de l’éducation reçue auprès des parents. À cela s’ajoutent certaines prédispositions congénitales pour ou contre la conquête sociale. Le père, la mère et la fratrie constituent, certes, la première cellule éducative de l’enfant, mais il sort de ce prisme familial à un certain âge pour agrandir et renforcer son expérience sociale. De ce fait, s’en tenir uniquement à la responsabilité des parents paraît assez exagéré et trop simpliste, le comportement social d’un individu étant sans nul doute l’addition de toutes ses expériences de la vie.
Quant à l’âge auquel la jeune fille peut se marier et l’âge auquel elle peut avoir son premier enfant, les Koongo/Laari ne font aucune restriction sur le sujet. Bien des filles vont chez leurs maris à partir de 13 - 14 ans. Et dès qu’elle voit ses règles, la fille peut être mère. Toutefois, la tradition recommande au jeune Koongo/Laari de l’abstinence et une certaine maturité, voire une maturation physiologique suffisante avant de prétendre se marier et avoir plusieurs enfants qui feront de lui un individu libre. En effet, « avoir un enfant » est pour le parent géniteur, une manière de bien préparer les derniers jours de sa vie. Cela est une nécessité dans le sens où les Congolais ne bénéficient pas de structures de troisième âge à l’instar des pays occidentaux, comme la France où l’on compte des maisons de retraite, chargées d’entretenir les personnes âgées. Chez les Koongo/Laari, les personnes âgées sont à la charge totale de leur progéniture. C’est donc un net avantage, voire une sécurité pour elles d’avoir eu des enfants qui, devenus grands, s’occupent d’elles. Cependant, il faut nuancer ce propos en soulignant que, s’il est bien vrai qu’en milieu Koongo/Laari, les solidarités lignagères favorisent l’entretien de toutes les « personnes âgées » par tous les enfants de la famille au sens large du mot, il n’est pas moins vrai que le Koongo/Laari n’est pas dupe. Il est conscient de la différence entre les soins portés à une personne âgée par un fils sorti de ses propres entrailles et ceux qui lui sont portés par l’enfant de son parent. En fait, lorsque le fils porte des soins à une personne âgée qui se trouve être son propre père ou sa propre mère, il le fait avec joie et amour, avec une attention sincère et réelle. A contrario, le fils enfanté par un parent de son lignage le fait par contraintes et routines lignagères. C’est pour cette raison que la personne âgée qui bénéficie de l’attention de sa progéniture en est très fière et très heureuse. Elle est « affranchie », du fait qu’elle ne le doit à personne d’autre qu’à son propre fils, fruit de ses propres entrailles. En effet, le propre fils qui lui vient en aide est une partie concrète de son œuvre sociale, une certaine force, une certaine liberté précieusement économisée, précieusement acquise pendant le déroulement normal de la partie active de son histoire personnelle. Les soins en provenance du fils d’un parent du lignage (autre que soi-même) sont alors ressentis comme une dépendance à l’égard du géniteur, donc un manque de liberté…
L’enfant est le « ndaangui » (témoin) du lignage paternel. C’est lui qui a la mémoire des faits et événements qui marquent la vie sociale. De ce fait, lorsqu’il n’y a pas d’enfant, le lignage a peu d’opportunité de survie, la relève n’y étant pas assurée. Il ne faut pas croire cependant, au fait que l’enfant en tant que témoin de la vie sociale du lignage paternel, appartienne à la famille du père. Non, il n’en est pas question dans l’esprit du père Koongo/Laari qui, en affectant à son fils le rôle de témoin du lignage paternel, attend simplement de lui, comme de la part de tout témoin qui se respecte, une interprétation impartiale et objective, un récit juste des faits. En effet, n’appartenant pas au lignage du père, l’enfant peut en être un témoin juste et impartial. Ce qui ne lui est pas possible dans le cas du lignage maternel dont il est membre à part entière.
La nécessité d’avoir un enfant traduit l’espoir que les parents et la société placent en cette « mountou » (personne). C’est à l’enfant que reviennent les petites courses et les petits travaux ménagers. Ce n’est pas surprenant que la société traditionnelle Koongo/Laari couvre de moqueries les couples qui n’en ont pas. La stérilité est source de divorce en ce milieu où l’on pense, malheureusement, que c’est la femme seule qui en est susceptible. Bien des polygamies s’expliquent par ce comportement du monde traditionnel Koongo/Laari face à la stérilité. Pour ce faire, dès qu’elle constate que l’enfant tarde à venir, la femme se soumet à un traitement curatif. Elle boit des « mabondzo » (mélange de produits à effet correcteur de stérilité). Quant à la stérilité masculine si elle n’est pas reconnue comme telle en ce milieu, elle n’y est pas pour autant inexistante. En effet, lorsqu’un homme tarde à engrosser son épouse, deux attitudes sont envisageables par la tradition pour y remédier :
– La première est une démarche de la famille maternelle de l’épouse qui se rend chez le gendre avec plusieurs cadeaux en le suppliant de leur grossir la famille. La belle-famille espère, par cette démarche, obtenir la pitié des esprits de son gendre qui, selon elle, s’opposeraient à la venue au monde de l’enfant.
– La deuxième attitude est un geste maternel au profit de l’homme. En effet, les Koongo/Laari pensent que si l’homme ne fait pas d’enfant à sa femme c’est tout simplement parce que, pendant que sa mère l’allaitait, elle lui aurait fait tomber, par inadvertance, quelques gouttes de lait du sein maternel sur le corps. Pour ce faire, la mère doit lécher son fils (devenu homme) sur toutes les parties du corps (surtout l’appareil génital) afin de vaincre les sordides effets des gouttes de lait du sein maternel. Pour l’honneur de la famille, les mères Koongo/Laari n’hésitent pas à lécher leurs fils qui se présentent, malgré eux, nus devant elles. Ce léchage est tenu dans le strict secret entre la mère et le fils. Ce secret renforce l’honneur de l’homme qui, au bout du compte, peut se vanter de ne jamais souscrire à une cure spéciale (vue et sue du village) pour avoir des enfants. C’est dire que, même s’il est soupçonné de stérilité, l’homme s’en tire toujours honorablement, car, pour la société traditionnelle Koongo/Laari, c’est la femme seule qui est la cause du manque de grossesse.
La grossesse est un état que la tradition Koongo/Laari tient strictement secret. En effet, on pense en ce milieu qu’il y a du chemin entre la grossesse et l’enfant. Pour les Koongo/Laari, être enceinte ne signifie pas que l’on a déjà un bébé. Ce n’est pas étonnant que la femme traditionnelle Koongo/Laari trouve stupide le comportement de sa consœur « occidentale » qui s’enthousiasme après une ou deux semaines de gestation. Cette précaution, chère en ce milieu, s’érige en faux contre les apprêts de la layette de bébé avant la naissance. La grossesse exige une grande fidélité de la part de la femme Koongo/Laari afin de la protéger contre les difficultés d’accouchement. En effet, lorsque la femme enceinte sort avec plusieurs hommes, elle souffre de « nsouza » (conséquences de l’infidélité) au moment de l’accouchement. L’effet de « nsouza » ne disparaît que lorsque l’infidèle porte à la connaissance de son entourage le nombre exact de ses amants. Ne pas obtempérer à cette recommandation, entraîne l’impossibilité d’accoucher. Et, comme on ne peut pas envisager une intervention par « césarienne » (méthode, non seulement inconnue, mais pouvant être perçue comme blasphématoire), il est impossible d’éviter la mort de la mère avec son enfant dans le ventre…
La tradition interdit à la future mère de manger debout, de peur de donner naissance à un enfant qui ferait des selles toutes les heures, sans répit. Elle ne doit consommer ni de la volaille [pour que son bébé n’ait pas des crises de « nzieeta » (épilepsie)], ni des grillons [pour que l’enfant n’ait pas tendance à « louka » (vomir) abusivement], ni des « nsafou », sorte de fruits [pour ne pas provoquer le « beeka » (mal de ventre) au bébé], ni les reptiles [pour que l’enfant n’ait pas des malformations congénitales]. Selon la société traditionnelle Koongo/Laari, la grossesse (n’étant pas une maladie) ne donne point de repos à la femme qui continue de vaquer normalement à toutes ses occupations conjugales, domestiques et champêtres jusqu’à l’accouchement…
L’enfant annonce toujours sa venue au monde par des douleurs ressenties par la mère. Mais en s’aidant du « loutééte » [mélange de « nsouaari » (sorte de courges écrasées), de « mpéémba ya haata » (chaux traditionnelle)], les femmes Koongo/Laari réussissent un accouchement rapide et sans difficulté. Ne maîtrisant pas suffisamment la durée de la gestation, la tradition Koongo/Laari recommande qu’une femme d’une certaine expérience accompagne, partout et en tous lieux, la femme enceinte dès que son état est perçu assez mûr (c’est-à-dire à terme). De ce fait, lorsqu’elle est seule, la tradition conseille à la femme à terme, déjà secouée par de fortes douleurs d’accouchement, de placer sur le « bas-ventre » une petite « tari » (pierre). Les femmes âgées reconnaissent un pouvoir d’attente (effet de pause) à cette petite pierre qui maintiendrait ainsi le bébé dans le ventre de sa mère jusqu’à l’arrivée des secours. Dans le cas d’une première grossesse, la future maman quitte la maison conjugale pour s’installer provisoirement chez sa mère, tout comme la mère peut aller habiter chez son gendre, dans la case-cuisine avec sa fille, les derniers moments de grossesse afin de veiller sur elle et l’amener à un accouchement serein…
L’accouchement a lieu, le plus souvent, dans la case-cuisine de la future mère ou encore dans les herbes, loin des hommes. C’est la femme la plus âgée et la plus expérimentée du lignage (ou à défaut du village) qui dirige l’opération. Elle est assistée par toutes les grandes femmes du lignage et du village. Pour aider la future maman à réussir une délivrance rapide et sans trop de difficultés, la femme initiatrice du « loutéété » lui en fait manger. Mais lorsque l’enfant tarde à sortir, c’est l’initiatrice des « mifoundou » (accouchement lent et difficile) qui intervient. Elle lui apprête, loin des hommes et dans le strict secret, un remède constitué d’un mélange de « siinga ngoulou » brûlée, de « mpéémba » (chaux traditionnelle) et du « moungoua » (sel non encore utilisé). Elle le fait manger à la future maman. Enfin, lorsque ce mélange de « mifoundou » ne produit pas l’effet attendu, l’assistance conclut alors au « nsouza » qui contraint la future mère à donner publiquement le nombre exact de ses amants…
La naissance d’un enfant est l’occasion d’une danse spéciale, surtout lorsqu’il s’agit des jumeaux. En effet, le hasard étant exclu de la pensée Koongo/Laari, la naissance des jumeaux reste fortement liée à des incidences supra-naturelles. Alors, frères, sœurs et oncles du lignage, hommes et femmes du village exécutent à demi vêtus, dans l’obscurité de la nuit, les danses « yaala ntsiimba » (égayer les jumeaux). On danse et chante la bêtise sexuelle. On cite nommément l’appareil génital. On l’expose parfois. On vante la virilité sexuelle des parents géniteurs. « Les jumeaux requièrent non seulement des soins particuliers et une attention infaillible, mais aussi et surtout une rigueur de traitement d’égalité entre eux, dans tous les domaines ». À la moindre injustice, l’enfant désavantagé peut jeter un mauvais sort à ses parents ou à l’enfant avantagé, tout comme il peut décider d’en mourir…
Toutefois, le nouveau-né et la mère restent dans la case-cuisine qui devient pour la circonstance, « nzo maa ntsibouti » (la case de la femme qui vient d’avoir un bébé). Cette réclusion, de 2 à 4 mois, a pour but principal d’accorder enfin du repos à la maman qui ne s’occupe plus des activités domestiques. Alors, les solidarités féminines du lignage et du village se manifestent fortement. Toutes les femmes qui rendent visite à la maman et au bébé s’activent. Ici, une « sœur » s’occupe de la toilette du nouveau-né et le berce. Là, une autre villageoise puise l’eau de la case de l’enfant. Là encore, une autre en réchauffe une quantité pour les soins intimes de la maman. La grande maison, la case-cuisine et la cour sont nettoyées par d’autres femmes. Le déjeuner du mari est apprêté par une commère. Le bois et le manioc sont offerts à la case de l’enfant. Les hommes du village et le mari n’entrent pas dans cette case. La tradition Koongo/Laari déconseille au père de prendre dans ses bras robustes un être encore si fragile que le bébé. Cette case est aussi interdite aux femmes qui ont été avec leurs maris dans la nuit. Conscientes de leur « masoumou » (péché), ces femmes qui ont eu des rapports sexuels n’entrent dans la case de l’enfant qu’après s’être lavées sur tout le corps, sorte de purification.
« Maa ntsibouti » (femme venant de mettre au monde) se repose pour récupérer ses forces et mieux veiller sur son bébé. Elle devient potelée et très charmante. Son mari la désire follement, mais en vain. Les rapports sexuels sont prohibés tout comme les interdits observés pendant la grossesse sont maintenus.
Le système onomastique de la société traditionnelle Koongo/Laari affecte un seul nom à l’enfant.
La signification du nom se rapporte à une circonstance ou un événement ayant fortement marqué la vie des parents. À l’inverse du monde occidental où le nom précède la naissance proprement dite de l’enfant, les parents traditionnels Koongo/Laari le gardent hermétiquement pour eux… En principe, c’est le père qui en a le monopole, tout comme l’oncle ou la mère peuvent aussi le donner.
– C’est ainsi qu’un père, sous-estimé et critiqué par sa belle-famille qui le traite d’homme incapable, n’hésitera pas à donner le nom de « nzéingui » ou « zooba » (idiot) à son enfant ;
– Une mère qui, malgré les injures de sa belle-famille et les fouets que lui administre son mari, tient mordicus à son mariage qu’elle honore de sa présence et de son sang-froid, appelle son enfant « Miakatsindila » (qui sait tout supporter).
L’enfant peut porter aussi le nom d’un ancêtre. Mais en héritant d’un nom, l’individu n’hérite pas en même temps, des relations de consanguinité que ce nom supportait. Il n’y a pas, de ce fait, reprise de mêmes dénominations de parenté, mais seulement réemploi du vocable porté par le parent défunt. Dans la pratique du quotidien Koongo/Laari, il y a adjonction du nom patronymique :
– Ainsi, « Zéingui », fils de Malonga s’appelle-t-il « Zèingui dia Malonga » ;
– À l’inverse de l’Occident où le nom patronymique (en tant que nom propre) est commun à toute la famille, chez les Koongo/Laari le nom du père ne vient que préciser de qui l’enfant est le fils. Il ne détermine donc pas l’appartenance lignagère ;
– Dans certaines situations mêmes, le nom du père est remplacé par un sobriquet récapitulatif des événements ayant marqué la vie de l’individu.
C’est dans ce sens que « Samba dia Mayala » (Samba, fils de Mayala) ayant lutté pour tirer sa sœur des mains des sorciers du lignage a été surnommé « Samba Kouloukouti » (Samba a lutté)…
Un certain « Mabondzo maa Boloko » (Mabondzo, fils de Boloko) ayant le défaut de changer perpétuellement l’emplacement de sa demeure, était plus connu sous le pseudonyme de « Nzoo haa héémbo » (la case à l’épaule), c’est-à-dire quelqu’un qui est toujours en train de construire et de défaire sa case.
La signification de certains noms comme « Zooba » (qui manque d’intelligence) peut influer négativement sur la vie de leurs porteurs, tout comme elle peut aussi leur apporter le contraire des images onomastiques. La société traditionnelle Koongo/Laari n’a pas l’exclusivité de ce phénomène qui se pose aussi dans bien des pays. En France par exemple, certains noms comme « cocu » sont lourds à prononcer en public. Mais ce n’est pas pour autant que monsieur « Cocu » soit fait « cocu » par sa femme…
La fin de la réclusion de la mère et son bébé est marquée par une cérémonie dite « de sortie de l’enfant »… Quant à la sortie de l’enfant « fétiche », c’est-à-dire né grâce aux « maboondzo », elle est présidée par la gardienne du « boondzo » (fétiche)… À ce propos, un rituel mobilise tout le lignage, le village et les villages voisins. En cas de jumeaux, la sortie de la maman et ses nourrissons est une cérémonie grandiose faisant appel aux danseurs de la « bêtise » à connotation sexuelle [« yaala ntsiimba » (égayer les jumeaux)]… L’enfant conçu « sans problème » lui, sort sans trop de cérémonial… Si la fin de la réclusion permet à la maman d’accrocher son bébé sur le dos afin de consolider la charpente de son corps, elle ne lui permet aucunement de quitter définitivement la case-cuisine au profit de la grande maison conjugale. Parce qu’elles affaiblissent l’enfant, les relations sexuelles sont formellement déconseillées chez la femme qui allaite. Elles ne seront autorisées que lorsque l’enfant sera capable de :
– Porter un récipient d’au moins 2 litres d’eau ;
– Ramener un petit fagot de bois…
Pendant que « maa ntsibouti » pouponne, la grande maison du mari est occupée par la 2e épouse qui, en principe, ne tarde pas à tomber enceinte à son tour.
Institutions chargées de l’éducation et de l’intégration :
1. La famille : L’intégration verticale de l’enfant dans la lignée passe par l’éducation qu’il reçoit au sein de la cellule familiale.