Écologie et Économie aujourd'hui - Jean Cornelis - E-Book

Écologie et Économie aujourd'hui E-Book

Jean Cornelis

0,0

Beschreibung

Le marché aveugle accompagne une croissance infinie du profit, mais la terre n’est-elle pas finie ? Faut-il être économiste pour voir que le capitalisme se base sur une idéologie qui profite d’abord au capital ? Et assister à la destruction de la nature et à la mainmise des multinationales sur les destins de nos sociétés ? Comment provoquer un changement social comparable à celui rendu nécessaire pour lutter contre le Covid19 ? Face aux défis du XXIe siècle, le citoyen et la société civile peuvent changer le rapport de force politique en faveur d’une économie durable respectant l’équité sociale, l’intégrité environnementale et l’efficacité économique. La démocratie politique n’est pas la simple addition des intérêts particuliers à court terme, c'est d’abord le choix et la décision de projets d’intérêt commun à long terme. Les partis politiques conservateurs soutiennent l’arrogance des économistes, malgré l'incompétence de l’économique néolibérale à gérer la catastrophe écologique, le sous-développement, les crises financières et les crises sociales du capitalisme. Ce livre aide à comprendre les enjeux collectifs de notre mode de vie occidental. Il fait ressentir le lien solidaire unissant tous les êtres vivants et le besoin universel d’équité entre les hommes. Il remet donc l’homme et la nature au cœur du débat économique. Et le citoyen dans le rôle de celui qui, en définitive, décidera de la transition durable dont il a besoin, au terme de bouleversements de nature démocratique, scientifique et politique.


À PROPOS DES AUTEURS


Jean Cornelis, professionnel du management en multinationales, ayant exercé des fonctions de CEO notamment dans le secteur pharmaceutique, est titulaire d’une maîtrise en biologie ainsi que d’une maîtrise en économie appliquée et d’un ingéniorat commercial. Il a publié L’économique, une pseudo-science hostile à l’économie durable, ouvrage prefacé par Olivier De Schutter, Rapporteur spécial des Nations Unies, spécialiste des questions liées aux droits économiques et sociaux, en particulier à l’alimentation et à la pauvreté.
Olivier Malay, auteur de la préface, est économiste à l’UCLouvain et attaché à la Chaire Hoover d’éthique économique et sociale.

Sie lesen das E-Book in den Legimi-Apps auf:

Android
iOS
von Legimi
zertifizierten E-Readern
Kindle™-E-Readern
(für ausgewählte Pakete)

Seitenzahl: 202

Das E-Book (TTS) können Sie hören im Abo „Legimi Premium” in Legimi-Apps auf:

Android
iOS
Bewertungen
0,0
0
0
0
0
0
Mehr Informationen
Mehr Informationen
Legimi prüft nicht, ob Rezensionen von Nutzern stammen, die den betreffenden Titel tatsächlich gekauft oder gelesen/gehört haben. Wir entfernen aber gefälschte Rezensionen.



ÉCOLOGIE ET ÉCONOMIE AUJOURD’HUI

Du même auteur

L’économique, une pseudo-science hostile à l’économie durable. Pour un XXIe siècle durable soutenu par une citoyenneté rebelle, préfaces de Jean-Marc Nollet, Olivier De Schutter et Pierre Santacatterina, L’Harmattan, collection Les Impliqués, Paris, 2018.

Choisir sa carrière et réussir ses études supérieures, Manuel pratique pour s’épanouir dans sa future vie professionnelle, Publibook, Paris, 2014.

Jean Cornelis

ÉCOLOGIE ET ÉCONOMIE AUJOURD’HUI

L’urgence de recentrer l’économie sur l’homme et la nature

éditions mols

collection autres regards

© Éditions Mols, 2021

Collection Autres Regards

www.editions-mols.eu

Préface

Vers une économie écosociale

Nous vivons une époque charnière dans l’histoire humaine. Le monde évolue de plus en plus vite et les crises écologiques, sociales et économiques s’enchaînent à une rapidité inouïe. Le problème est que le vent de changement qui souffle aujourd’hui sur les peuples du monde peut aboutir au meilleur comme au pire. D’un côté monte un esprit de rébellion contre les injustices et la dégradation de la planète. Ce sont les gilets jaunes, les écolières qui marchent pour le climat, ou le soulèvement des travailleurs en Inde ou en Chine. Mais l’on voit aussi revenir un esprit de repli sur soi et d’un rejet de la différence. Ce retour d’idées qu’on croyait du passé porte au pouvoir des gens comme Trump aux États-Unis ou Bolsonaro au Brésil.

La tension n’est pas sans rappeler celle qui existait en Europe au début du XXe siècle. En empruntant une métaphore à un auteur de cette époque, je crois qu’il faut se représenter la société comme un groupe de cinq travailleuses. La première d’entre elles pense le groupe avant de se penser elle-même. Elle est combative et courageuse, se soucie du bien-être des quatre autres et se bat pour plus d’égalité. La dernière d’entre elles en est l’opposé. Elle accepte les situations d’injustice par fatalisme, invite volontiers à remettre la faute sur les plus faibles ou les absents, et privilégie le chacun pour soi. Entre ces deux travailleuses, il y a les trois autres, qui oscillent entre les deux pôles. On y retrouve les milles facettes des êtres humains. Mais l’important dans cette histoire, c’est qu’à chaque époque les trois travailleuses décident de suivre soit la première d’entre elles, soit la dernière. Et de qui est suivie dépend le sort des sociétés: si l’on maintient le statu quo, si l’on s’oriente vers une catastrophe, ou si l’on s’oriente vers un nouveau système économique basé sur des principes réellement humains et écologiquement durables. Comment faire pour que cette dernière voie soit celle suivie? Comment faire pour que la première travailleuse arrive à convaincre les trois du milieu? C’est la question clé aujourd’hui, et à cette question, il n’y a pas de réponse toute faite.

Un premier élément de réponse, c’est qu’il faut être capable de mettre à jour les illusions entretenues par le système en place. C’est-à-dire de critiquer les idées et les idéologies qui légitiment le système actuel et ses destructions, qui le présentent comme « normal ». Une deuxième chose à certainement avoir à sa disposition, c’est un système alternatif à proposer, une « utopie réaliste », afin de donner un horizon positif pour lequel se battre. Un troisième élément, souvent oublié, est de disposer de sérieuses techniques de gestion de groupe. La plupart des gens ont des idées pour changer le monde, mais celles-ci ne se réalisent pas car ils sont désorganisés ou agissent seuls. Se rassembler, rejoindre des organisations puissantes (syndicats, société civile, partis) et les rendre efficaces est aujourd’hui la condition indispensable pour qu’advienne une nouvelle société.

Ce livre écrit par Jean Cornelis, par sa critique du discours économique dominant, et par ses propositions pour une science économique et une économie durable au XXIe siècle, avance des réponses aux questions évoquées, et fournit par là une large matière à réflexion. Celle-ci est urgente, car nous avons du retard.

En 1947, trente-huit intellectuels se réunissaient en Suisse pour fonder la société du Mont Pèlerin. Leur objectif était de rénover le libéralisme mourant. Ils souhaitaient briser les États sociaux naissants, les mécanismes de sécurité sociale et remettre les actionnaires au centre des décisions. Alliés à des banques, à de grandes universités, à des patrons et à des médias, ils ont posé les bases du néolibéralisme, cette idéologie visant à rendre marchands tous les rapports entre humains et avec la nature. Le bilan du néolibéralisme est un succès pour ses partisans. En effet, la quantité de dividendes versés n’a jamais été aussi importante, et c’était un de ses objectifs. Par contre, il est un échec pour le reste de l’humanité, qui se retrouve face à une catastrophe sociale et environnementale. Les bastions du néolibéralisme ne sont plus forcément les grandes facultés d’économie, mais bien le monde de l’entreprise et le discours économique. Celui des banquiers, des technocrates et d’une grande partie des économistes qui prennent la parole dans le grand public. Si l’on veut inverser la vapeur, il faudra sans doute autant d’efforts que ceux déployés par la société du Mont Pèlerin, autant de temps (vingtcinq ans), et un sacré changement des rapports de force.

Il faudra également une vision claire d’une société alternative. Jean Cornelis nous propose une économie écosociale. Par là, il acte deux nécessités. La première étant la réhabilitation de l’action publique et de l’État dans l’économie, tant pour assurer sa stabilité que pour des questions de justice sociale. La deuxième étant la prise en compte de l’urgence écologique. Il s’agit d’une rupture radicale par rapport aux idéologies précédentes, qui ne se sont jamais sérieusement souciées de l’environnement.

L’économie durable écosociale est sans doute une voie d’avenir. Mais se pose la question, comme elle s’est posée depuis deux siècles, de la place du capitalisme. Quel avenir pour le capitalisme, ce système économique caractérisé par la propriété privée des grandes entreprises? Le programme écosocial doit-il demander un autre capitalisme, ou doit-il vouloir carrément sortir du capitalisme? L’enjeu est de taille: l’appartenance des grandes entreprises à des actionnaires et des patrons est ce qui leur donne un tellement grand pouvoir, celui de diriger notre économie. Peut-on réaliser la transition durable dans ce cadre? Ou la transition sera-t-elle plus rapide si les grandes entreprises appartiennent à l’État ou à leurs travailleurs? Les actionnaires accepteront-ils pacifiquement des diminutions de leurs profits? Il s’agit d’une des questions majeures aujourd’hui. Le XXe siècle a montré qu’il était possible de rester dans le capitalisme et d’accéder à un haut niveau de prospérité pour la majorité de la population des pays occidentaux. Mais cela s’est fait au cours d’un boom économique exceptionnel (1945-1975), et au prix du pillage et de la colonisation de l’Afrique. Plus que cela, les élites capitalistes étaient terrorisées par l’URSS, par des syndicats très puissants jusque dans les années 80, et par des ouvriers qui avaient gardé des armes après la seconde guerre mondiale. Elles ont donc accepté de lourdes concessions. Dans des circonstances actuelles bien moins favorables, rien ne dit que l’élite économique sera prête à accepter un programme écosocial. Le peuple grec en a douloureusement fait les frais en 2015. La question de la nécessité ou non de sortir du capitalisme pour réaliser la transition est donc réelle. En tout cas, le chemin vers une société plus juste et durable sera semé d’embûches, de questionnements et de tâtonnements.

C’est au cœur de ces réflexions que ce livre vous emmène. Il détaille et analyse de manière critique le discours économique dominant, remonte jusqu’à des questionnements sur la science elle-même, pour conclure en traçant les contours d’une autre société plus souhaitable. Je vous en souhaite une bonne lecture.

Olivier Malay,

économiste à l’UCLouvain,

Chaire Hoover d’éthique économique et sociale

Introduction

Les rebelles, par leur « non » à l’état de mensonge de la pensée unique,

génèrent des moments de vérité qui suscitent le progrès humain.

Jean-François Kahn

Voyant la nature comme réservoir inépuisable de ressources naturelles,

l’homme a façonné un modèle économique de cigales.

De réservoir, la nature s’est muée en dépotoir.

Inès Trépant

Les initiatives citoyennes écologistes seules suffisent-elles à engager la société dans la transition durable?

Les pouvoirs politiques conservateurs soutiennent-ils des valeurs écosociales durables?

La science économique néolibérale stimule-t-elle une économie durable?

La justice sociale et le respect de la nature sont-ils intégrés dans la science économique néolibérale?

La croissance économique profite-t-elle automatiquement aux plus démunis?

Le changement social décidé pour lutter contre le Covid-19 va-t-il provoquer un changement comparable pour lutter contre la crise écologique?

Si à chacune de ces questions la réponse avait été positive, ce livre n’aurait pas eu besoin d’exister.

Le citoyen averti répondra probablement par la négative à chacune d’entre elles, mais pourrait-il expliciter pourquoi et comment construire une société durable?

L’objectif de ce livre est de mobiliser le citoyen et la société civile pour l’économie durable. Face aux mécanismes économiques destructeurs de l’équilibre écologique de notre terre, il documente la nécessité de changer les rapports de force de notre société dominée par une économie néolibérale écocidaire et indigne pour l’humanité.

Le rôle historique du citoyen est de s’adosser à une société civile progressiste pour voter un programme politique, scientifiquement validé, centré sur le respect de la nature et sur la dignité humaine.

Ce livre s’adresse au citoyen curieux de comprendre le monde qui l’entoure tant dans les domaines de l’écologie que de la science économique afin, au bout du chemin, de transmettre une vision généreuse du monde. La perception d’une « lente » dégradation environnementale cache à la conscience de la majorité des Occidentaux la nécessité de répondre aux défis d’une gestion économique responsable vis-à-vis de la nature. Quant à l’aisance matérielle occidentale, elle tente à faire oublier l’indignité d’une gestion économique peu respectueuse des droits de l’homme des démunis.

Les informations sur les perturbations climatiques, si souvent médiatisées, coulent majoritairement dans l’océan d’indifférence du citoyen occidental, mobilisé par les quelques soubresauts boursiers de court terme, mais amorphe devant les variations climatiques. Le monde politique, miroir de son électorat, reste apathique à l’intérêt commun de la société, face à une agitation pour le court terme, celui de son horizon électoral.

Ce livre s’adresse donc au grand public, en qualité de citoyens du monde, pour comprendre les enjeux collectifs de notre mode de vie occidental, pour ressentir le lien solidaire unissant tous les êtres vivants et pour agir pour un mode de développement durable. Il est facile à lire et n’exige aucune connaissance économique ni écologique.

La référence à la science – qualifiée d’objective – sert trop facilement au pouvoir pour s’opposer aux opinions du citoyen. Les revendications subjectives du citoyen sont opposées aux décisions du pouvoir prises sur des réalités soi-disant objectives.

La question du pourquoi permet de comprendre les défis de l’économie durable du XXIe siècle, celle du quoi définit son contenu et celle du comment explicite le rôle du citoyen, de la société civile, du pouvoir politique et de la science économique, pour enfin s’engager dans la transition durable.

Un grand nombre d’indicateurs économiques et écologiques montrent l’évidence de risque élevé de différents effondrements, que ce soit une crise économique, une crise énergétique, une pénurie de ressources naturelles, une pandémie virale, une catastrophe climatique ou une catastrophe environnementale.

La contradiction entre le niveau de développement économique du capitalisme et l’état désastreux de l’environnement, ainsi que du sous-développement des pays pauvres, est largement à inscrire au passif de l’Occident. En effet, depuis deux siècles, le mode occidental de gestion de l’économie aveugle le monde par son matérialisme, dissimulant des problèmes devenus désormais des défis incontournables pour le XXIe siècle. Quant aux politiques économiques, inspirées par l’économique néolibérale depuis plus de vingt ans, elles montrent leur inefficacité pour répondre aux défis de la transition écologique dans les pays riches du Nord. Et la forte demande de rattrapage de santé publique, d’alimentation et d’instruction des pays du Sud fait pression sur leurs ressources locales et risque d’accentuer les dégâts écologiques, largement causés par le Nord.

La science économique enseignée performe – c’est-à-dire suscite – des économies associées à des crises, à une inégalité croissante et à un désastre écologique. Elle n’étudie ni l’écosystème, alors que la société en fait partie, ni l’inégalité sociale dans la société qu’elle étudie.

Nous dénonçons le déni d’idéologie de la science économique néolibérale et son imposture à se faire passer pour une science incontestable.

Cette économique met les valeurs de l’entreprise (compétitivité, productivité et rentabilité) au cœur de la société et elle permet aux hommes d’affaires de gagner en influence dans la sphère politique au détriment de valeurs de solidarité sociale et de protection écologique.

La mondialisation de l’économie permet aux multinationales de détenir un pouvoir de décision sans précédent sur les destinées des sociétés humaines.

Il faut urgemment développer une reconnaissance sociale pour une nouvelle théorie validée de science économique – qui reste à construire – fondée sur une conception durable du monde.

La société capitaliste refuse le changement et est bloquée par le pouvoir, formé par le lien entre les économistes orthodoxes, les intérêts des grandes entreprises et les pouvoirs politiques conservateurs.

L’hégémonie de l’économique néolibérale est liée à l’exercice d’une puissance économique plutôt qu’à sa pertinence scientifique. D’ailleurs, l’histoire économique montre que le libéralisme n’est pas la théorie économique unique et universelle qu’elle prétend être.

L’économique néolibérale masque son caractère pseudoscientifique, en s’identifiant à la physique et elle fait un déni d’idéologie, en cachant les intérêts de la classe capitaliste. Elle est inefficace et arrogante, mais ce savoir est socialement reconnu. Ainsi, la plupart des facultés universitaires et des mandataires politiques des partis de droite reconnaissent cette économique comme la seule fiable.

Une révolution scientifique, promouvant une science économique durable, et une révolution politique, supportant un programme écosocial, sont nécessaires.

Nous proposons une science économique durable, davantage scientifique, dégagée d’idéologie partisane et se basant sur des valeurs de droits de l’homme et de protection environnementale, légitimées en Occident.

L’économie durable permet de gérer nos ressources présentes, sans compromettre les générations futures, en s’appuyant sur un principe de responsabilité. Cette économie se fixerait des objectifs de protection écologique, de respect des droits de l’homme et d’efficacité économique, dans une perspective de long terme. Une science économique durable doit servir de guidance à une révolution politique économique durable par le vote citoyen.

Sans révolution démocratique, sans engagement politique des pouvoirs publics dans un programme global de transition rédigé par la société civile, il ne sera pas possible de gérer l’ensemble des défis du XXIe siècle.

Un pouvoir politique se contentant d’encourager ou de récupérer les mouvements citoyens, sans assumer sa part de responsabilité collective, risque même d’être un frein à la transition durable.

La politique doit veiller à ce que la croissance soit bénéfique à l’ensemble de la population et ne soit pas confisquée par la minorité riche. La démocratie politique n’est pas la simple addition des intérêts particuliers à court terme, c’est d’abord la décision de projets d’intérêt commun à long terme.

Ces révolutions scientifique et politique de l’économie durable s’opposent à l’illusion néolibérale de la solution financière, de la solution économique ou de la solution technologique au risque d’effondrement. Car l’écologie démontre que nous devons revoir notre conception du monde relative aux relations entre l’homme et l’écosystème et elle montre la nécessité politique d’allier l’économie et la nature.

Écologie et économie sont comme les deux facettes du yin et du yang, deux facettes en évolution dans le temps, à la fois opposées et complémentaires.

Comme les deux faces d’une pièce, l’écologie et l’économie sont unies dans une relation dynamique, sans pouvoir se séparer l’une de l’autre.

Écologie et économie sont évidemment complémentaires puisque, depuis toujours, l’homme puise dans la nature ses ressources pour vivre. Écologie et économie sont évidemment opposées puisque, depuis le XXe siècle, l’homme perturbe sévèrement l’écosystème.

La croissance est la solution de l’économiste néolibéral, mais c’est le problème de l’écologiste. Car les limites de la terre s’opposent à la croissance infinie des biens économiques. Et l’inégalité est le problème du problème, parce que la croissance économique s’accompagne d’inégalité. L’économique néolibérale considère que la motivation pour le profit des entreprises sur le marché produit une économie idéale pour tous les citoyens. Par conséquent, le modèle capitaliste n’est pas durable, il n’est pas tolérable pour la classe pauvre et il n’est idéal que pour les entreprises. En fait, il mène au XXIe siècle à l’effondrement.

L’économique durable suscite une société de citoyens orientés vers un bien-être commun du monde vivant et de l’humanité produisant un ordre économique avec un équilibre entre le citoyen, la nature, le marché et l’État.

La spiritualité peut se joindre à la science pour secouer la conscience du citoyen. Ainsi, pour le pape François, notre progrès technocratique repose sur des mythes: individualisme, concurrence, profit, progrès infini, consumérisme et marché dérégulé. Chercher à concilier ce progrès avec le développement durable, en un juste milieu, est impossible; il faut redéfinir le progrès économique pour laisser un monde meilleur. Quant au Dalaï-Lama, il propose une éthique de la responsabilité universelle sur la base de valeurs de convivialité, de bonheur partagé et d’unité avec le vivant pour une humanité du bien-vivre et du bien-cohabiter.

Le livre a été subdivisé en cinq chapitres dont la dernière section de chacun d’eux relie un thème particulier à l’objectif général de ce livre de mobiliser le citoyen pour l’économie durable, c’est-à-dire centrée sur l’homme et la nature.

Ces répétitions volontaires permettent d’aborder la lecture du livre sans devoir obligatoirement suivre l’ordre de succession linéaire des chapitres. Le lecteur peut ainsi se laisser inspirer par les sections des chapitres qui l’intéressent davantage.

Répondre aux défis du XXIe siècle signifie s’engager dans la transition durable (chapitre 1). Il faut changer le regard des économistes occidentaux sur la nature et sur l’homme, et questionner la validité de la science économique dominante (chapitre 2). Comprendre le passé permet de mieux changer le cours de notre histoire occidentale et de changer notre rapport à l’homme et à la nature (chapitre 3). La gestion des défis du XXIe siècle exige une science économique durable, en dépassant les problèmes de qualité scientifique de l’économique enseignée. La validité scientifique de l’économique durable ne suffit pas à sa reconnaissance sociale (chapitre 4). Enfin, le chapitre 5 envisage les facteurs de réussite de la transition vers l’économie durable; les citoyens et la société civile jouent un rôle majeur pour conscientiser, agir et voter en faveur d’une économie durable.

Le lexique fournit au lecteur une explication simple des concepts utilisés dans le livre (ces concepts apparaissent dans le texte avec *).

Chapitre 1

Prendre conscience des défis du XXIe siècle et provoquer la transition durable

Changer d’urgence notre regard sur la nature et sur l’homme

Il paraît chaque jour plus évident que la croissance économique ne se poursuit qu’au prix d’une décroissance écologique, tout comme une tumeur cancéreuse ne s’alimente qu’au détriment de l’organisme qu’elle épuise: dans les deux cas, le bilan final est désastreux.

Jean-Marie Pelt

Alors que la fourmi se comporte comme un idiot individualisé et un génie collectif, l’homme-cigale apparaît comme un génie individuel et un idiot collectif.

Joël de Rosnay

L’économie néolibérale et l’économie durable face aux grands défis du XXIe siècle

Lors de la Marche de Bruxelles pour le climat de fin 2018, des mandataires politiques libéraux, écolos et socialistes appuyaient tous le besoin d’une économie* durable*. Et lorsqu’on entend nos mandataires de toute couleur politique commenter une manifestation écologiste, on a l’impression qu’ils sont tous d’accord pour agir en faveur de l’environnement. Et pourtant le climat se dégrade… Et la situation écologique empire depuis une génération, montrant, au contraire, qu’ils préfèrent une communication floue à une action pertinente.

L’un de mes professeurs de chimie détestait le flou, puisqu’il aimait nous dire qu’en science, pour avoir la démocratie des débats entre savants, il faut la tyrannie des concepts! Nous allons donc commencer par définir les concepts d’ « économie* durable* » et de « science économique* » (les concepts avec * sont définis dans le lexique).

L’économie durable est une façon de gérer nos ressources présentes sans compromettre la situation pour les générations futures. Et c’est une économie qui, à la fois, se fixe des objectifs de protection écologique, de respect des droits de l’homme et d’efficacité économique, dans une perspective de long terme.

Ce graphique très connu présente l’économie durable comme celle du chevauchement entre trois domaines écologique, social et économique, suggérant que certains aspects écologiques interfèrent avec les deux autres domaines du social et de l’économique, et de même, pour chacun des deux autres domaines. Ce schéma a été interprété par les économistes orthodoxes comme une validation de la croissance économique qui resterait largement endogène.

Dans le second graphique, le domaine économique est inséré dans le domaine social et culturel, et ce dernier dans le domaine écologique (René Passet). Le graphique du « donut » de la théorie d’économie durable (Kate Raworth) présente également un modèle à cercles concentriques. Autrement dit, l’économie durable est encastrée dans la société qui, à son tour, est encastrée dans la nature.

Tous ces graphiques présentent l’économie durable comme celle dans laquelle les aspects écologiques, sociaux et économiques sont en interaction, contrairement à la conception de l’économie capitaliste qui considère que le domaine économique est séparé des domaines du social et de l’écologique considérés comme des « externalités* ».

Nous avons ajouté un dernier graphique d’économie durable parce qu’il intègre un quatrième facteur essentiel, la participation citoyenne.

En fait, l’économie durable n’est pas pour l’humanité un choix dont on dispose, c’est une nécessité. Ce n’est pas une nouvelle idéologie* qu’il nous est libre de choisir parmi d’autres types d’idéologies économiques. Car le monde doit affronter des problèmes importants qui sont autant de défis pour le XXIe siècle. Et l’économie durable porte une vision à long terme qui heurte de plein fouet l’économie capitaliste du profit à court terme. L’idéologie capitaliste* prône la croissance économique infinie, de façon aveugle, avec comme conséquences l’inégalité* sociale nuisible pour certaines classes de la société et certains pays et les effets catastrophiques à long terme sur certains écosystèmes*.

Et l’inégalité environnementale à son tour se traduit en injustice sociale, lorsque le bien-être d’une population est affecté négativement par le milieu dans lequel elle vit. Ainsi la population du Bangladesh, un pays sous-développé, est menacée par la montée de l’océan; pourtant ce pays ne représente que 2 % de l’émission mondiale de carbone.

Le capitalisme domine le monde via des sociétés multinationales qui sacrifient la justice sociale et la complémentarité entre les êtres vivants au culte du profit (Jean Ziegler). Au final, l’économie durable est nécessaire parce que la prospérité pour un petit nombre, par l’injustice sociale, et la dégradation écologique, par la croissance illimitée, ne sont pas des choix réalistes et sûrs, pour les sociétés du XXIe siècle. Par conséquent, les risques de dégradation écologique et les effets d’une inégalité indigne, constituent les défis majeurs d’une société de bien-être pacifique au XXIe siècle.

La contradiction entre le niveau de développement économique du capitalisme et l’état désastreux de l’environnement et du sous-développement des pays pauvres est largement à inscrire au passif de l’Occident. L’homme affecta l’environnement par des modifications anciennes, mais c’est seulement à partir du XIXe siècle qu’elles s’intensifièrent. Et l’homme occidental est, après l’ancienne oppression des peuples par l’esclavage et par la colonisation, complice au XXIe siècle d’un sous-développement renforçant l’inégalité sociale.

La classe capitaliste occidentale voit le Reste du monde à partir de sa propre perspective culturelle, pour contrôler les ressources économiques de la nature et des peuples dominés. Et, au final, on peut dire que tous ces défis du XXIe siècle ne sont que des conséquences de notre économie capitaliste, aussi bien que de l’économie marxiste.

Nous avons rassemblé la longue liste des défis du XXIe siècle, en familles de problèmes:

– les menaces pour l’environnement

Les pollutions, le pillage des ressources naturelles, le réchauffement climatique, la dégradation des écosystèmes* et la diminution de la biodiversité* engendrent des déséquilibres écologiques. Ces déséquilibres sont associés au recul des forêts, à la surexploitation des ressources, à la réduction du captage de carbone, à la désertification et à l’acidification des océans.

La menace pour l’environnement est encouragée par une croissance économique et démographique infinies, face à la surexploitation d’une terre finie. D’où la pénurie énergétique, la pénurie d’eau, l’appauvrissement des sols et l’épuisement des ressources naturelles, qui constituent des injustices majeures vis-à-vis des générations futures.