Familles de cœur - Mécénat Chirurgie Cardiaque - E-Book

Familles de cœur E-Book

Mécénat Chirurgie Cardiaque

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Beschreibung

Quand la générosité et l'altruisme permettent de soigner de nombreux enfants souffrant de malformations cardiaques

Les familles d’accueil sont un élément essentiel de l'action de Mécénat Chirurgie Cardiaque. Elles acceptent bénévolement une responsabilité très importante : accueillir dans leur foyer un enfant étranger pour une durée de 8 semaines, et l’accompagner tout au long de son parcours vers la guérison. Ces témoignages sont autant de preuves de leur engagement et attachement à ces enfants.

Une série de témoignages touchants de familles d'accueil qui ont participé à l'action de Mécénat Chirurgie Cardiaque !

EXTRAIT

Quelques jours plus tard, tu n’as déjà plus de pansements, tu cours dans les couloirs et les petites voitures dans tes mains roulent plus vite, « pipo, pipo, voiture police ».
Ton appétit d’oiseau s’est transformé en ogre vorace : les mandarines, les bananes, les petits-suisses, les madeleines de Catherine, tout, tu dévores tout ; c’est qu’il y a des années à rattraper.
Encore un peu de temps pour retirer l’eau qui est venue faire des misères à ton cœur et c’est le départ pour une semaine de convalescence au « château des Côtes ». Maintenant, on sait que le plus dur est derrière toi. Là, comme à l’hôpital, tu as conquis ton monde. Chaque fois que je suis venue te voir, tu n’étais pas dans ta chambre, il fallait te chercher dans la salle des infirmières où tu passais ton temps ! Ah, Fallou, comme tu sais te faire aimer…

À PROPOS DE L'AUTEUR

Mécénat Chirurgie Cardiaque a été fondé en 1996 par Francine Leca et Patrice Roynette.
Lorsqu’elle était chef de service en chirurgie cardiaque, Francine Leca recevait de nombreux courriers de médecins d'Afrique et d'Asie et de parents qui lui demandaient de sauver leur enfant malade du cœur. Faute de moyens financiers et logistiques, il lui était difficile d'y répondre favorablement. Il fallait des fonds, une structure pour faire venir des enfants en France, les opérer et les guérir. C'est pourquoi elle a décidé de fonder Mécénat Chirurgie Cardiaque avec son filleul Patrice Roynette.

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Mécénat Chirurgie Cardiaque

Famillesde cœur

Fallou

Fallou, venant du Sénégal, opéré du cœur avec Mécénat Chirurgie Cardiaque en mars-avril 2013, accueilli par Catherine et Gérard (Kakrine et Rérard) puis chez les Martinet (Édith, Cyril et son amie Sara + Gilian une amie GB).

22 avril 2013, aéroport de Roissy — Fallou, moi aussi je pleure. Comme toi. Tu veux bien essuyer les larmes qui coulent sur mes joues ? Dans quelques heures, tu seras à nouveau dans ton pays. Moi aussi j’ai de la peine, beaucoup de peine de te quitter. On savait bien qu’on ne serait pas longtemps ensemble. Rien n’y fait. On a du chagrin de se séparer, mais si tu savais tout le bonheur que tu nous as apporté ! Notre cœur est gros, mais rempli de ta lumière. Comment aurions-nous pu savoir que cette rencontre serait inoubliable ? C’est ça la magie Fallou ? Un véritable « buzz » s’est créé autour de ton arrivée. Tout le monde t’attendait, les voisins, les amis, la famille, « alors, il est arrivé ? »,  « Non, pas encore ». Comme tu étais long à venir.

Et te voilà en France chez Catherine et Gérard. Eux aussi avaient hâte de te voir. Ils sont allés te chercher à l’aéroport ce jeudi 7 mars 2013, à 6 heures du matin. Petit bonhomme courageux, séparé de ton papa et ta maman, débarquant dans un monde étrange, avec des gens qui parlent une langue pas comme la tienne, qui sont tout blancs ; il fait froid, tu es fatigué par le voyage, usé par la maladie, épuisé.

Juste le temps d’une nuit, tu étais déjà parti à l’hôpital reprendre quelques forces pour supporter l’opération. C’est qu’il est difficile d’aller dans la cage réparer l’oiseau blessé qui t’empêchait de respirer depuis si longtemps.

Pendant que Catherine et Gérard te serraient dans leurs bras pour te donner de l’amour et du courage, les infirmières t’encadraient de leurs soins et te préparaient pour le grand jour où le chirurgien allait transformer ta vie.

« C’est fait, tout s’est bien passé, il est déjà réveillé mais reste en réanimation ». À ton réveil, Catherine et Gérard sont là près de toi, rassurés, impatients, guettant ton réveil. Toi, petite fleur restée en bourgeon pendant cinq ans et demi, tu es prêt à t’ouvrir, à grandir, à t’épanouir.

Quelques jours plus tard, tu n’as déjà plus de pansements, tu cours dans les couloirs et les petites voitures dans tes mains roulent plus vite, « pipo, pipo, voiture police ».

Ton appétit d’oiseau s’est transformé en ogre vorace : les mandarines, les bananes, les petits-suisses, les madeleines de Catherine, tout, tu dévores tout ; c’est qu’il y a des années à rattraper.

Encore un peu de temps pour retirer l’eau qui est venue faire des misères à ton cœur et c’est le départ pour une semaine de convalescence au « château des Côtes ». Maintenant, on sait que le plus dur est derrière toi. Là, comme à l’hôpital, tu as conquis ton monde. Chaque fois que je suis venue te voir, tu n’étais pas dans ta chambre, il fallait te chercher dans la salle des infirmières où tu passais ton temps ! Ah, Fallou, comme tu sais te faire aimer…

À la fin de chaque visite, c’est toujours le cœur brisé — encore lui — que l’on se séparait. Jusqu’au jour où Catherine et Gérard sont venus te chercher. Mon petit doigt m’a dit qu’ils t’ont trouvé en pleurs, en rage plutôt, parce que tu ne voulais pas faire la sieste. Catherine lâche la phrase magique : « Arrête de pleurer, prends tes affaires, on s’en va. » Ah, tu ne parles pas français ? Pourtant tu t’arrêtes net et cours vers la porte.

Pour la première fois, Fallou devient « Fallou ».

Une nouvelle vie commence chez « Kakrine et papy Rérard. » Haut comme trois pommes et un calot, te voilà, conquérant, le centre du monde.

Il faudra tout de même donner des limites à tes exigences parfois. Tu vas jouer au ballon, rencontrer Oscar (j’ai longtemps compris Eustache) et son papa. Ensemble, vous allez au jardin, sur les balançoires, au manège, faire des promenades dans le froid avec ta grosse doudoune bleue que tu aimes tant, tes gants et ton bonnet.

Après une semaine à la maison de Kakrine et papy Rérard, voici l’heure de venir chez Édith. On se connaît déjà et tu as été bien préparé au changement. Aussi, quand je te vois arriver, j’aperçois ta petite bouille souriante à la vitre de la voiture de papy Rérard et j’entends crier : « Édith, Édith » ! Ce n’est qu’une continuité, un simple relais. Ils auront eu la période la plus ingrate avec ton arrivée difficile, l’opération, la convalescence et la mise sur rails. À nous les vacances.

Ici, on est au cœur de Paris, pas de jardin, seulement un appartement avec plein de monde dedans et au centre : Fallou. Tu rayonnes : à table, perché bien droit sur le tabouret haut avec ta serviette blanche nouée autour du cou, témoin du menu du jour. Avec tes couverts « girafe », tu racles les bols et les assiettes, tu enfournes les trois dattes bien moelleuses, non sans avoir retiré méticuleusement le noyau que tu as appris à reconnaître. Tu te souviens des petits-suisses qui apparaissaient comme par miracle sur les étagères du frigo ? À leur vue, tu poussais des cris de joie avant de t’en barbouiller les « moustaches ». Si l’appétit commençait à légèrement faiblir, on donnait la béquée à Sara, à Cyril, à Gillian, à Édith et puis on disait : « Non, non, pas pour Sara, non, pas pour Cyril, non, pas pour… » Et hop : « Pour Fallou ! » et on recommençait jusqu’à la fin de l’assiette. Après, il fallait aller « frotter, frotter, frotter » les mains… jusqu’à la prochaine fois.

On allait brosser les dents, la « blosse ». Un rituel bien huilé : hop, debout sur la chaise de la salle de bains, devant le lavabo ! Avec tes gestes de petit homme, tu retirais le protège brosse, dévissais le bouchon du tube, étalais une longue coulée de dentifrice et la brosse gigotait dans tous les coins de la bouche pleine de mousse. Tu as découvert qu’il était plus marrant de se rincer au robinet plutôt qu’au verre… Et toujours aussi précisément tu remettais tout en place. Après trois pas sur ses ventouses, pop, pop, pop, la brosse « girafe » regagnait celles de la famille dans le verre à dents. Un petit coup d’œil devant le miroir pour découvrir encore ces foutues « moustaches » qui t’ont tellement fait rire, toutes blanches sur ta peau toute noire !

Et le bain avec sa grosse mousse épaisse. Avec Sara, tu as appris à souffler dessus, tout doucement pour la faire voler en petits nuages. Tu nous as tous frotté la figure avec ton gant, tu t’es accroché des bouquets de mousse au menton, sur la tête, tu t’es arrosé avec les pots à yaourt vides, tu as promené tes amis les jouets sur le rebord de la baignoire… et la sortie ! Pas toujours facile… les courses tout nu dans la maison avec tes éclats de rire pour ne pas mettre le pyjama « baby Dior », s’il te plaît, et les petits chaussons rouges.

Fallou, maintenant il faut aller au lit, il est tout de même 10 heures du soir et la machine ne s’est pas arrêtée depuis 8 ou 9 heures ce matin ! Il faut être raisonnable, d’ailleurs ce n’est pas fini, il faut encore fermer les rideaux et lire l’histoire. Perché sur la chaise tu as bien appris à manier les ficelles qui font descendre les rideaux. C’est ton travail à toi, gare si d’autres le font avant !

Et voyons, pas de coucher sans la lecture de Bonsoir lune. Tu connais le livre par cœur. C’était souvent avec Gillian, une amie anglaise de passage, que tu le « lisais » : bonsoir bébé lapin, bonsoir les petits chats qui jouent avec la laine de maman lapin, bonsoir le peigne et la brosse sous la lampe, bonsoir la petite souris qui est montée sur la table et a mangé la soupe de bébé lapin, bonsoir les gants… bonsoir lune, et maman lapin qui dit « chuuttt, bébé lapin dort »… 

Ensuite, il y a la ritournelle de ta boîte à musique : « il était un petit navire » et enfin il faut qu’Édith s’allonge à côté de toi, que tu lui serres la main jusqu’à l’arrivée des rêves qui te berceront toute la nuit. Chuutt ! Fallou dort, sa petite tête noire posée sur l’oreiller blanc, un doudou dans les mains. Le ronron tranquille de son nouveau petit cœur.

Qu’y a-t-il dans tes rêves ? Le manège Saint Paul ? « Deux touilles (tours), Édith, deux touilles ». Ça te faisait rire. Qu’est-ce que tu comprenais vraiment, ou bien qu’est-ce que tu voulais nous faire croire ? Tu avais beau serrer les deux tickets dans ta petite main et en donner un à chaque tour à ton ami le monsieur du manège, quand tu avais tout donné et qu’il fallait partir, tu te mettais dans des colères… noires, comme si deux tours, ça ne voulait rien dire ! Alors je t’emportais à la maison dans mes bras et pour oublier, on marchait au pas cadencé en faisant des couacs (1, 2, 1, 2, 1… couac…), ça te faisait rire aux éclats. Mais le lendemain, tu recommençais… un tour dans le bus, un autre sur la moto. Puis tu découvrais le cheval qui bougeait, alors un tour dans le bus, un autre sur la moto… et un sur le cheval. Puis découverte du bateau qui montait en appuyant sur le bouton vert… Oh, tu n’as pas été à plaindre, le dernier jour j’ai même laissé trois fois « deux touilles ». Tu t’en es rendu compte ?

Plusieurs fois, on a pris le métro, on montait dans la première voiture pour voir le tunnel et les métros qui nous croisaient. Souvent encore après on prenait le bus, comme ça, juste pour se promener, voir la rue, les voitures, les camions, les pompiers et les ambulances… C’est toi qui mettais le ticket dans la fente, elle l’avalait et te le rendait avec de l’encre dessus.

Oh, et puis, il ne faut pas le dire à la police, mais tu as conduit la voiture d’Édith. Tu te souviens ? On a fait plusieurs fois le tour du Château des Côtes, assis sur mes genoux. Je faisais avancer la voiture et toi tu tournais le volant !

Avec Vincent, qui te grattait toujours la tête, tu es allé te promener place des Vosges que tu as arrosée de bulles de savon.

Tu es aussi allé au musée des Arts forains avec Gillian. Là, on s’est bien amusés. Les grands pouvaient monter sur les manèges ! Oui, oui ! C’est vrai. Même qu’il y en avait un où il fallait pédaler pour faire avancer les vélos. C’est Gillian qui a pédalé, et vite encore, ça faisait du vent et elle pédalait, pédalait ! Et puis il y avait de la musique et on a dansé tous les trois ! Quelle belle journée, tu l’as racontée à Cyril, à Sara et à tout le monde, les mots se bousculaient dans ta bouche tant il y avait de choses à raconter avec tes mots !

Un jour aussi, on a pris le train pour aller chez Dominique et Tim. Dans leur jardin, c’est Charles qui faisait cuire la viande sur le feu. Il y avait de la fumée partout. Qu’est-ce que tu as mangé comme viande ce jour-là ! Tu t’es bien amusé avec les grands garçons ! Le soir, on était morts de fatigue !

Une autre fois, on est allés au Parc floral avec Aline. On a eu la chance de voir un paon, un grand oiseau qui ouvrait ses plumes en rond tout autour de lui, comme une roue. On a voulu l’approcher, mais il s’est mis à crier comme une casserole et ça te faisait peur. Alors on est partis sur un grand toboggan avec des bosses et des tournants, tu ne voulais plus t’arrêter.

Quand on rentrait de nos promenades, on retrouvait Cyril et Sara ! Ça te faisait tellement plaisir que tu riais aux éclats, tu trépignais sur place de bonheur. Alors commençaient les jeux, les grimaces, la danse et le piano, les conversations avec le singe que Sara faisait parler, la gymnastique les pieds en l’air avec Cyrille, les parties de cache-cache sous la table, derrière les portes, le jeu de Lynx où il fallait retrouver les images…

Comme tu nous as amusés le jour où je t’ai retrouvé accroupi devant la vitre de la machine à laver. Tu regardais tourner tes vêtements : « jean’s, fauchettes, le slip ! ». Et tout à coup : « Donald ! ». Celui brodé sur ton pull bleu. Il avait poussé les autres habits pour venir te faire un petit coucou derrière le hublot. Un tour, deux tours, une cabriole à l’endroit, une autre à l’envers et hop ! parti dans le tourbillon.

Tu as rencontré plein d’amis qui voulaient te connaître : Marie, Ève, Bernard, Jacqueline, Élisabeth, Benoît, Éric, Étienne, Sarah…

Ben (avec, comme Cyrille, des bisous « ça pique, ça pique ! »).

Marie-Michel avec son gros chien noir que tu as promené en tenant la laisse.

Tous les jours aussi on passait dire « bonjour madame » au restaurant Le petit Dakar à côté de la maison. C’était bien parce que tu pouvais parler wolof avec Emmanuelle, avec son turban dans les cheveux et la grande Mima au large sourire. Ils te donnaient un verre de bissap. Tu aimais bien, c’était un peu de ton bon pays… sucré et tout rouge, ça te faisait des moustaches que tu essuyais sur la serviette blanche pour laisser la trace de ta bouche.

On a même rencontré Babacar, le grand monsieur Sénégalais avec sa casquette vissée entre les deux oreilles. Comme il était grand ! C’est lui qui un soir t’a préparé « le mafé », même que tu as tout mangé, pourtant il y en avait beaucoup dans ton assiette !

Tout ce qui roulait, c’était ton dada. Dans la rue, tu voyais toujours le camion d’Édith, la moto de papy Rérard ou celle de Kakrine. Je te disais « mais non, Édith elle n’a pas de camion », « mais non, papy Rérard, il n’a pas de moto. » « Mais non, Kakrine, elle n’a pas de moto. » Ça te faisait rire.

Un jour Aminata est venue à la maison, exprès pour toi, pour parler wolof avec toi. Elle t’a apporté un magnifique ensemble de footballeur que tu mettras quand tu seras plus grand. Tu as voulu l’essayer, mais tout de même, on aurait pu mettre deux Fallou dedans ! Elle va venir te voir bientôt au Sénégal. Elle nous donnera de tes nouvelles ?