Julien et Georges Kowal - Destins croisés - Manu Kowal - E-Book

Julien et Georges Kowal - Destins croisés E-Book

Manu Kowal

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Georges Kowal fut le premier grand reporter cinéaste du cinéma d’actualités de l’armée française. Connu et reconnu comme un soldat de l’image qui n’hésitait pas à défier la mort en allant en premières lignes au plus près de l’ennemi pour ramener des images authentiques sur le conflit durant la guerre d’Indochine, il devient un personnage emblématique pour la qualité de son travail et la beauté de ce qu’il a mis sur pellicule. Montant au front avec pour seule arme sa caméra à la main afin d’immortaliser le combat de ses compagnons, Georges Kowal va y laisser sa vie. C’était le 20 février 1952.

70 ans après sa disparition, son plus jeune neveu propose de découvrir son histoire et son parcours à travers un récit retraçant sa biographie et sa filmographie. Mais si Georges était dans la lumière, son destin est aussi lié à celui de son frère aîné Julien qui était légionnaire et qui va effectuer un itinéraire tout aussi dramatique qui se terminera également en Indochine
Après plusieurs mois de recherches et avec l’aide de lettres retrouvées, de documents originaux d’archives, d’extraits de livres, de témoignages et de souvenirs, Manu Kowal retrace l’histoire de quatre enfants placés tout jeune à l’Assistance Publique suite au décès de leur mère et de l’incapacité de leur père de s’occuper d’eux.

Pupilles de la Nation, Georges, Julien, Véra et Robert connaîtront chacun une destinée différente.
Dont Georges Kowal sera le leader.

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ManuKowal

Julien et Georges Kowal Destins croisés

Introduction

Cela faisait longtemps que j’avais envie d’écrire un livre sur mon oncle Georges Kowal. Un oncle que je n’ai jamais connu et qui est pourtant si proche de moi par notre passion commune du cinéma.

Georges Kowal fut le premier grand reporter cinéaste du cinéma d’actualités de l’armée française. Connu et reconnu comme un soldat de l’image qui n’hésitait pas à défier la mort en allant en premières lignes au plus près de l’ennemi pour ramener des images authentiques sur le conflit durant la guerre d’Indochine.

Il devient alors un personnage emblématique pour la qualité de son travail et la beauté de ce qu’il a mis sur pellicule.

Montant au front avec pour seule arme sa caméra à la main afin d’immortaliser le combat de ses compagnons, Georges Kowal va y laisser savie.

C’était le 20 février1952.

Mais si Georges Kowal était dans la lumière, son destin est aussi lié à celui de son frère aîné Julien qui était légionnaire.

Dans l’ombre de Georges, Julien va lui aussi effectuer un itinéraire tout aussi dramatique qui va l’amener à en perdre la vie à son tour pratiquement au même endroit que son petit frère.

Mon père me parlait souvent de ses deux frères disparus en Indochine.

Et pourtant, du plus loin de mes souvenirs, il restait encore des zones d’ombres.

Des choses que je ne savaispas.

Et puis un jour, pratiquement trente ans après la mort de mon père, j’ai retrouvé par hasard de vieilles lettres qui étaient dans un carton sous monlit.

C’était des lettres d’un peu tout le monde. De mes oncles, de mon père et de mon grand-père. En les lisant, j’ai eu envie d’en savoirplus.

J’ai donc décidé de faire des recherches sur l’enfance de mes oncles et de mon père dans des archives départementales mais également au service cinématographique des armées pour retrouver les films tournés par Georges Kowal.

J’ai également découvert que plusieurs articles de presse et quelques livres faisaient déjà référence à mon oncle :

<< Georges Kowal, ce jeune homme blond, magnifique avec une gueule à faire du cinéma, caméra à la main...>> pour reprendre cette phrase que j’ai lue quelque part sera aussi malgré lui de par sa disparition à l’origine de la vocation d’un autre reporter cinéaste qui le remplacera... Pierre Schoendoerffer.

Je vais donc vous raconter l’histoire de mon oncle Georges Kowal. Mais pas seulement. Car beaucoup de choses se sont passées autour delui.

Ma famille vient de loin. Il sera donc normal de remonter aux sources de cette histoire marquée par les aléas de la vie et du destin.

Car c’est avant tout l’histoire de quatre enfants, pratiquement orphelins.

Trois garçons et une fille face à l’abandon et qui vont grandir alors que nous traversons la seconde guerre mondiale.

Ce livre sera peut-être ma façon à moi de participer à l’histoire de ma famille pour que rien ne tombe dans l’oubli et que nos enfants connaissent nos origines.

Ce sera ma pierre à l’édifice.

Il me semble donc tout à fait légitime de dédier ce livre à ceux qui ont fait notre histoire

à JULIEN, GEORGES, VERA, ROBERT

à WASYL et BRONISLAWA

à MA FAMILLE...

–Manu Kowal

Les origines

On dit que le nom de Kowal vient de Kowalski. Ce nom de famille d’origine polonaise signifie <<forgeron>>.

Je ne sais pas à quel moment ce changement a eu lieu car lorsque mon grand-père vient au monde en ce jour de l’an du 1er janvier 1897, il s’appelle déjà Kowal.

Basilius Kowal est né à Savynka qui en ce temps-là est en territoire Russe.

Aujourd’hui cette ville se trouve en Ukraine.

Les parents de Basilius sont de modestes ouvriers.

Arsenius (Arsène) Kowal et son épouse Juliannae Stawnyera (Julienne Stavonica) vivent comme ils peuvent.

Basilius que l’on prénomme bientôt Wasyl gardera le mystère sur son enfance quant à savoir s’il était leur unique enfant.

En grandissant chez ses parents, Wasyl apprend en autres le tissage de couverture.

Mais il semble que la mécanique l’intéresse beaucoupplus.

Sa première satisfaction personnelle est l’obtention de son certificat d’études.

Très jeune vers 12 ans, il commence un apprentissage de mécanicien ajusteur en travaillant sur des camions et des tracteurs.

Et un peu plus tard, alors qu’il gagne ses premiers salaires en devenant ouvrier, il est mobilisé dès l’âge de 18 ans durant la guerre de 14/18.

Dans une de ses lettres, Georges raconte les souffrances de son père :

<<Papa fut amené de par les péripéties de la guerre et pendant la révolution Russe, en Roumanie dans les tourbières de la Dobroudja, vaste delta du Danube, plaine marécageuse et malsaine sous une chaleur assez vive, sans vivres avec pour toute boisson cette eau stagnante... cette tombe croupie...>>...

Effectivement, beaucoup vont mourir ici, décimés par la fièvre plus que par les balles. Wasyl voit ses camarades empoisonnés, atteints de paludisme ou autre maladie.

Lui-même très malade va pourtant survivre et la débâcle arrivant, sera transféré dans un hôpital militaire.

Nul ne sort indemne d’une telle épreuve...

Physiquement et moralement éprouvé par ces rudes épreuves, Wasyl revient à la vie civile.

Trois ans après la fin de la guerre, donc en 1921, ressentant le manque d’industrialisation de l’Ukraine, il décide de partir travailler en Pologne. Toujours comme mécanicien.

C’est précisément à cet instant qu’il va faire la rencontre de savie.

Présentés par des amis en commun, il fait la connaissance de la douce et belle Bronislawa.

Mabrona Bronislawa Atamanczuk est née le 11 juillet 1902 à Szwiejkow, district de Podhajce.

Cette jolie jeune femme aux yeux clairs issue d’une famille nombreuse est la fille de Zacharine (Zacharia) et Mariàe (Maria) Atamanczuk, commerçants.

Avec tout son amour et sa patience, Bronislawa va tout changer pour Wasyl.

Elle va lui apporter le réconfort et l’amour passionnel que Wasyl a toujours rêvé d’avoir un jour sans croire que cela serait possible.

Wasyl et Bronislawa vont se marier début1923.

Et le 6 novembre 1923 va naître leur premier enfant. Un petit garçon.

Bohdan Julianius voit le jour à Lwow (Pologne) rebaptisé Lviv dès que la ville devient Ukrainienne après la seconde guerre mondiale.

Wasyl est heureux. Il arrive à vivre de son métier de mécanicien ajusteur et parvient à subvenir aux besoins de sa petite famille.

C’est le 12 août 1925 que vient au monde leur secondfils.

Orkan Georginius né à Erwykow (appelait aussi Szwezkov) qui est également un district de Podhajce. Si nous partons du fait que ce quartier a complètement disparu aujourd’hui, on peut donc dire que Orkan ( Georges Kowal ) est tout simplement né à Podhajce !

Quelques mois plus tard, début 1926, Wasyl et Bronislawa vont décider de quitter la Pologne (Ukraine) pour venir en France.

Bien que mon père m’est raconté qu’ils sont partis pour fuir les Bolcheviks (La bolchevisation sous Staline, a marqué la prise en main complète des partis nationaux par Moscou et a été prétexte à de nombreuses exclusions...) … des témoignages de Wasyl que j’ai retrouvés dans des lettres contestent cette version car il prétend qu’il est venu en France simplement parce-qu’on lui a proposé un contrat de travail très intéressant pour être ouvrier dans les mines de sel du département de l’Allier.

Wasyl et Bronislawa ont donc tout quitté, proche famille et amis pour venir tenter leur chance dans un pays inconnu poureux.

La légende raconte qu’ils seraient venus des pays de l’Est.... en marchant.

Ce que je trouve improbable avec deux petits garçons en basâge.

Je pense plutôt qu’ils ont fait le voyage en train ou trouvé des places de fortune dans des remorques de camions.

Les débuts en France sont très difficiles comme en témoigne Georges dans une de ses lettres :

<<Nous sommes arrivés en France en pleine crise économique. Cette crise de l’après-guerre et d’autre part sans parler un mot de français. Nous étions en grandes difficultés. Isolés des autres avec pleins de vexations. Nous étions vus comme des russes et donc de quel droit venions-nous en France dérober le travail et le pain à ceux qui disaient en avoir tout juste pour eux ? Nous étions les indésirables. Pourtant, papa avait une femme à nourrir et des enfants à élever...>>

Début 1927, Wasyl et Bronislawa remontent s’installer en Seine-et-Oise à Guerville (aujourd’hui département des Yvelines).

Wasyl travaille dans une entreprise de réparation de machines agricoles.

Son métier de chaudronnier lui plaît et sa petite famille est installée dans une petite habitation du hameau de la Plagne non loin de l’entrée du château au nord de Guerville.

Bronislawa est femme au foyer. Elle s’occupe de toutes les taches du quotidien et il n’est pas rare de la croiser au lavoir avec ses deux petits garçons.

La famille Kowal a sympathisé avec d’autres familles pour la plupart venus d’ailleurs comme Wasyl et Bronislawa.

Bronislawa attend alors un troisième enfant. Ce sera leur premier bébé né en France. Bronislawa est heureuse car c’est une petite fille.

Wera vient au monde le 26 avril 1927 au hameau de La Plagne (Guerville n’ayant pas d’hôpital, les enfants naissaient à domicile).

On imagine bien par la suite le travail de tous les jours de cette jeune maman avec deux enfants en bas âge et un bébé de quelquesmois.

Mais Bronislawa est heureuse. A 25 ans, elle a réussi à fonder un foyer avec un homme qu’elle aime et de magnifiques enfants.

La petite famille n’a aucune richesse personnelle et les fins de mois sont parfois difficiles mais qu’importe.

Ce bonheur de chaque instant va pourtant être frappé par le destin près de deux ans plus tard. Une tragédie malchanceuse pour Wasyl.

Alors que Bronislawa met au monde un quatrième enfant, on est obligé de lui faire une césarienne car la tête du bébé ne permet pas un accouchement par voie basse.

La jeune maman fait une hémorragie de la délivrance et perd énormément de sang. Transportée en urgence à l’hôpital de Mantes-sur-seine (depuis=Mantes-la-Jolie), Bronislawa tombe dans un coma profond.

Ce quatrième enfant est de nouveau un garçon.

Sbeszko Oberka né le 16 janvier 1929 également au hameau de La Plagne.

Le bébé est sauvé mais sa maman est entre la vie et lamort.

Wasyl est désemparé. Mais il fait face à l’épreuve pour ses enfants.

Malgré les soins et les traitements qu’elle reçoit à l’hôpital dans les jours et les semaines qui suivent, l’état de santé de Bronislawa s’aggrave et son décès est prononcé le 18 février 1929, soit près d’un mois après la naissance de son bébé qu’elle ne connaîtra jamais. Elle n’avait que 26ans.

Pour Wasyl tout s’écroule. Il vient de perdre la femme de sa vie. La seule qu’il a toujours aimé. Celle qui avait changé sa vie en le soutenant de tout son amour, en étant toujours auprès delui.

Mais en sa mémoire, Wasyl doit rester fort et continuer à avancer.

De là-haut, il sait qu’elle le regarde et l’accompagne toujours.

Il sait que pour elle, il doit à présent s’occuper des enfants.

Des enfants particuliers

Des quatre enfants, Bohdan sera celui qui sera le plus marqué par la disparition de sa maman. Il a déjà 5 ans quand elle meurt et c’est lui qui l’a connu le plus. Cette maman a qui il donnait la main et qui le prenait sans cesse dans ses bras pour lui faire des câlins.

Pourtant, Bohdan n’en voudra jamais à ce bébé par qui l’accident est arrivé.

Non, il en veut simplement à la vie. Marqué par cette injustice, c’est à ce moment là que son caractère de garnement rebelle va voir lejour.

Après le décès de son épouse, Wasyl quitte Guerville et s’installe à Dreux.

Nous sommes en 1930. Il occupe encore un emploi de mécanicien dans une nouvelle société. Il rencontre des difficultés à s’en sortir et fait garder ses enfants par une nourrice.

Il part pour Monts pour y travailler dans une entreprise de cellophane mais finalement revient assez vite à Dreux.

Les temps sont de plus en plus difficiles pour lui et son moral baisse mois aprèsmois.

Il tombe dans une profonde déprime.

Il n’arrive pas à trouver un emploi stable et n’arrive plus à s’en sortir.

Georges expliquera plus tard :

<<Papa est tombé en dépression avec des souffrances morales à cause des difficultés matérielles, insolubles et tenaces qu’il a rencontrés dans ce monde ingrat.

Les événements, les épreuves et les circonstances auxquelles il a dû faire face vont radicalement le changer...>>

Début 1931, Wasyl fait de la menuiserie. Et il compte chacun de sessous.

Alors, quand arrive cette histoire d’heures supplémentaires que son patron conteste et refuse de lui payer, la colère de Wasyl l’emporte et il s’énerve en menaçant et en clamant haut et fort : << Je vais le tuer...>>

Il accuse également son patron, ce Monsieur Pastre, de vouloir attenter à la vie de ses enfants. Un homme qui, après vérification, est totalement innocent.

Mais ce n’est qu’un début.

Au bout du rouleau et usé par toutes les malchances qu’il a rencontrées dans sa vie, Wasyl a perdu la raison et commence à divaguer.

Tout commence par des plaintes répétées au Parquet de Dreux dans lesquelles

Wasyl déclare qu’un médecin lui aurait prétendument jeté une poudre syphilitique dans la bouche et dans son caleçon.

Mais le pire, c’est lorsqu’il se met à écrire des lettres incohérentes au Procureur de la République pour le menacer de mort !

Une même lettre que va recevoir également le Président du tribunal.

C’est certain, Wasyl n’a plus tous ses esprits. Il est décrit alors comme un malade dans un état mental extrêmement délirant, un persécuté actif, un hypocondriaque interprétateur et mégalomane,

Le 5 juillet 1931, Wasyl veut en finir et tente de mettre fin à ses jours en essayant par trois fois de se couper la gorge mais sans y parvenir.

Déposé à l’hôpital où on lui met des agrafes, il déclare alors qu’il avait 800.000 francs qu’on lui aurait volé. Une somme bien entendu, qu’il n’a jamais possédé.

Et le personnel se rend compte qu’ils ont aussi à faire à un fanatique avec des hallucinations auditives lorsque Wasyl dit avoir entendu une infirmière dans le couloir qui disait :

<< Il faut se débarrasser de lui, il faut le tuer...>>...

Que d’inventions délirantes. Et Wasyl continu quand il dit avoir reçu la visite du Préfet d’Eure-et-Loir alors que celui-ci n’a jamais mis un pied à l’hôpital.

Mais entre ses fictions et ses fabulations, l’homme lucide réclame ses enfants auprès de lui. Ils seront recueillis à l’hôpital et installés dans une chambre voisine.

Dans un courrier retrouvé de l’hôpital, il est écrit sur Bohdan :

<<L’aîné des enfants Kowal va tous les jours à l’école. C’est un garçon extrêmement turbulent, querelleur, sournois et malicieux. En dehors des heures d’école, il est absolument insupportable à l’hôpital, il est capable de provoquer les pires accidents.

Il a déjà poussé un de ses petits frères dans la rivière et il s’enferme à clé dans une chambre du bâtiment B...>>...

Cette situation va encore durer quelques mois puisque Wasyl sortira de l’hôpital le 2 décembre. Mais sans ses enfants.

Instable, désorienté et ne pouvant subvenir aux besoins de ses enfants, un courrier du Préfet va heureusement tout changer pour eux...

Le 14 mars 1932, Bohdan, Orkan, Wera et Sbeszko sont placés à l’hospice St Brice de Chartres en attendant une décision du tribunal sur leur avenir.

Wasyl manifeste son mécontentement et son intention de renouveler sa tentative de suicide après, dit-il : << Avoir fait disparaître les siens...>>...

Cette phrase lourde de conséquences jouera en sa défaveur puisqu’il est déchu par jugement du Tribunal de Dreux de la puissance paternelle.

Destitué de son autorité parental, Wasyl n’a plus aucun droit sur les enfants.

Le cas particulier de ces quatre enfants qui n’ont plus, ni père, ni mère en fait donc des enfants de l’assistance publique et par la même occasion, des pupilles de la Nation.

Avant toute chose et pour faciliter les placements dans des familles, le directeur départemental de la population va faire des démarches pour simplifier et franciser les prénoms des enfants.

Ainsi, les garçons récupèrent leur second prénom de naissance.

Bohdan sera désormais Julien et Orkan deviendra..... Georges Kowal.

Wera ne perdra que son W puisqu’il s’agit à présent deVéra.

Enfin, mon futur père ne sera plus Sbeszko mais simplement Robert.

A partir de maintenant dans le récit de ce livre, j’utiliserai ces prénoms.

Wasyl de son côté, considéré comme un malade avec délires chronique systématisé est placé dès le 13 mai 1932 dans un centre de repos pour ne pas dire qu’il s’agit d’un hôpital psychiatrique.

En effet, il est interné au centre hospitalier Henri Ey de Bonneval pour une durée indéterminée. A ce moment précis, personne ne peut prévoir qu’il va finalement y rester... près de 40 ans jusqu’à la fin de ses jours.

Il va également récupérer son prénom de naissance, puisque tout le monde au centre l’appellera dorénavant Basile.

Durant les 15 ans qui vont s’écouler entre 1932 et 1947 et ce n’est pas une surprise, c’est Julien qui va faire le plus parler de lui. Ce garnement ne perdra aucune occasion pour constamment désobéir.

Quant à Georges, il sera ce petit blond très calme en retrait qui observe, qui apprend sans se faire remarquer.

Dès la mi-avril 1932, Julien, Georges, Véra et Robert sont placés ensemble chez une Madame Godon à Chartres.

En janvier 1933, les garçons sont placés tous les trois à Mainvilliers.

La petite Véra sera quant à elle chez Mme Horchoisne qui habite Le Puiset.

Avec des retours constants à l’hospice entre chaque affectation, les enfants vont ainsi faire plusieurs familles dans plusieurs villes et villages d’Eure-et-Loir.

Je ne vais pas énumérer tous les placements mais ils seront parfois séparés et souvent ensemble. Surtout pendant les vacances scolaires.

Mais si Georges et Robert restent ensemble, Julien est trop insupportable.

On change constamment de famille ce garçon turbulent de 10ans.

Il est chez Mme Sortais à Le-Boullay-les-deux-églises, puis chez Mme Goudiehou à Brou avant finalement de tomber chez quelqu’un qui aura moins de patience.

Car en juin 1936, alors qu’il se trouve près d’Epernon chez un cultivateur de Houdreville, Mme Falland qui s’occupe de lui ne supporte plus ses bêtises et son manque de respect.

Est-elle trop dure avec lui en le réprimandant et en le giflant tout le temps ? Peut-être, car Julien est retrouvé par son mari, allongé et sans connaissance dans la grange.

Il a tenté de se suicider pour échapper à tout cela. En utilisant le même moyen que son père autrefois.

Admis à l’hôpital de Chartres pour une dizaine de jours, il retournera ensuite dans un de ses anciens placements.

Après être passés par Combres, Georges et Robert quant à eux, sont placés ensemble à Abondant chez Mme Lamarre-Dubois.

Les trois frères se retrouvent lorsqu’ils sont à l’ EPS (Ecole primaire supérieure) d’Illiers. A cette époque, aucun d’eux ne brille encore par les études.

Les résultats scolaires de Georges restent sans éclats, dans la moyenne alors que Julien, de son côté, commence une formation dans la mécanique.

Mais les professeurs reconnaissent quand même le potentiel des frères Kowal malgré le fait que Julien fasse encore et toujours parler de lui.

Dans un courrier que j’ai retrouvé en date du 27 novembre 1936 à l’attention de l’inspecteur de l’assistance publique, il est écrit :

<<Monsieur l’inspecteur, je vous signale la conduite répréhensible des enfants Kowal et Desroziers qui se sont rendus coupables des faits suivants :

Kowal a allumé une cigarette pendant le cours de maréchalerie et Desroziers a injurié grossièrement la femme du maître-Maréchal... Je pense que c’est le résultat inévitable de l’éducation reçue par les enfants dans les fermes où ils ont été élevés. Je leur ai infligé une punition et une privation de sortie...>>...

L’année suivante, le 8 avril 1937, un autre courrier fait savoir cette fois à l’inspecteur de l’assistance publique que son pupille Julien a l’habitude de rencontrer pendant ses cours de mécanique ou sa promenade du jeudi, un certain Monsieur Janain avec lequel il échange des discussions.

Ce personnage quelque peu douteux fait déjà l’objet de poursuites judiciaires connues car elles sont relatées dans la presse départementale.

Mais que veut donc cet individu et pourquoi parle-t-il avec des enfants dans de mystérieux rendez-vous ?

Nous n’en saurons pas plus car il est arrêté peu après et nous n’entendrons plus jamais parler delui.

Quant à Julien, il part en formation à « L’Atelier du Loir ».

Pendant l’été 1938, Georges et Julien passent ensemble les grandes vacances auprès de leur soeur chez Mme Grunwald à Saint-Rémy-sur-Avre.

Je trouve intéressant de relire un bulletin du 4 septembre que Georges a écrit là-bas et qui est destiné à l’inspecteur de l’assistance publique.

Dans ce bulletin, Georges fait des demandes concernant certains besoins pour lui-même et pour son frère aîné :

<<Monsieur l’inspecteur, voudriez-vous avoir la bonté s’il vous plaît de m’envoyer une feuille de route pour mon frère et moi car nous voudrions des vêtements et nous dire à quel moment nous devrons revenir à Chartres.